Question sur Matt. 27, 3-8 et Actes 1, 18-19 (Judas et le champ du sang)

chartreux
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Question sur Matt. 27, 3-8 et Actes 1, 18-19 (Judas et le champ du sang)

Message par chartreux »

Matt. 27, 3-8 a écrit : 3 Tunc videns Iudas qui eum tradidit quod damnatus esset paenitentia ductus rettulit triginta argenteos principibus sacerdotum et senioribus 4 dicens peccavi tradens sanguinem iustum at illi dixerunt quid ad nos tu videris 5 et proiectis argenteis in templo recessit et abiens laqueo se suspendit 6 principes autem sacerdotum acceptis argenteis dixerunt non licet mittere eos in corbanan quia pretium sanguinis est 7 consilio autem inito emerunt ex illis agrum figuli in sepulturam peregrinorum 8 propter hoc vocatus est ager ille Acheldemach ager sanguinis usque in hodiernum diem


3 Alors Judas, qui L’avait trahi, voyant qu’Il était condamné, poussé par le repentir, rapporta les pièces d’argent aux princes des prêtres et aux anciens, 4 en disant : J’ai péché, en livrant le sang innocent. Mais ils dirent : Que nous importe ? c’est ton affaire. 5 Ayant jeté les pièces d’argent dans le temple, il se retira, et alla se pendre. 6 Mais les princes des prêtres, ayant pris les pièces d’argent, dirent : Il ne nous est pas permis de les mettre dans le trésor, parce que c’est le prix du sang. 7 Et ayant tenu conseil, ils en achetèrent le champ d’un potier, pour la sépulture des étrangers. 8 C’est pourquoi ce champ a été appelé jusqu’à ce jour Haceldama, c’est-à-dire champ du sang.
Actes 1, 18-19 a écrit : 18 et hic quidem possedit agrum de mercede iniquitatis et suspensus crepuit medius et diffusa sunt omnia viscera eius 19 et notum factum est omnibus habitantibus Hierusalem ita ut appellaretur ager ille lingua eorum Acheldemach hoc est ager Sanguinis


18 Cet homme [Judas], après avoir acquis un champ avec le salaire du crime, se pendit et se brisa par le milieu, et toutes ses entrailles se répandirent. 19 Le fait a été si connu de tous les habitants de Jérusalem, que ce champ a été nommé dans leur langue Haceldama, c'est-à-dire, champ du sang.
Il n'est pas tout-à-fait évident de concilier ces deux passages ; dans le premier Judas rend l'argent et ce sont "les princes des prêtres" qui achètent le champ, tandis que dans le second il semble que Judas garde l'argent et c'est lui qui achète le champ.

Il n'est peut-être pas inutile de citer ici le commentaire de S. Augustin à ce sujet, cité dans la Catena Aurea :
S. Augustin, Sermon sur la Cène a écrit : Je regarde comme un effet particulier de la providence divine, que le prix de la vente du Sauveur n’ait pas tourné au profit des pécheurs, mais ait servi à procurer un lieu de repos aux étrangers, pour montrer que Jésus-Christ rachetait ainsi les vivants par le sang de sa passion, et qu’il sauvait aussi les morts au prix du même sang répandu. Le champ du potier est donc acheté avec le prix du sang du Seigneur. Or, nous lisons dans les Écritures que le genre humain tout entier a été racheté par le sang du Sauveur. Par ce champ, il faut donc entendre le monde enfler, et ce potier, qui doit avoir l’empire sur tout l’univers, est celui qui a formé du limon de la terre les vases de notre corps. C’est le champ de ce potier qui a été acheté avec le prix du sang de Jésus-Christ pour les étrangers sans famille, sans patrie, exilés, et errants sur toute la terre, et à qui le sang du Sauveur prépare un lieu de repos. Ces étrangers sont les chrétiens pleins de dévouement qui, renonçant au siècle, et ne possédant rien dans le monde, trouvent leur repos dans le sang de Jésus-Christ, car la sépulture de Jésus-Christ est le vrai repos du chrétien. " Nous avons été ensevelis avec lui par le baptême pour la mort du péché, dit 1’Apôtre " (Rm 6.) Nous sommes donc des voyageurs en ce monde, et comme des étrangers sur cette terre. — S. Jér. On peut dire aussi que nous étions étrangers à la loi et aux prophètes, et que les mauvaises dispositions des Juifs ont été pour nous une cause de salut. — Orig. Ou bien, nous appelons ici étrangers, ceux qui demeurent séparés de Dieu jusqu’à la fin ; car si les justes ont été ensevelis avec Jésus-Christ dans le sépulcre neuf qui a été taillé dans le roc, ceux qui demeurent jusqu’à la fin étrangers à Dieu, sont ensevelis dans le champ de ce potier qui façonne la boue, champ qui a été acheté avec le prix du sang et qui est appelé pour cela le champ du sang : " C’est pourquoi ce champ est encore aujourd’hui appelé haceldama, c’est-à-dire le champ du sang ".
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Abbé Zins
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Re: Question sur Matt. 27, 3-8 et Actes 1, 18-19 (Judas et le champ du sang)

Message par Abbé Zins »

chartreux a écrit : sam. 03 juin 2023 10:50
Matt. 27, 3-8 a écrit :
(....)

Il n'est pas tout-à-fait évident de concilier ces deux passages ; dans le premier Judas rend l'argent et ce sont "les princes des prêtres" qui achètent le champ, tandis que dans le second il semble que Judas garde l'argent et c'est lui qui achète le champ.

Il est courant dans les Saintes Ecritures d’attribuer à quelqu’un ce qui est fait en son nom par personnes interposées.

Ainsi, l’un des Evangélistes relate la demande d’un centurion à Jésus de venir chez lui guérir l’un de ses serviteurs, tandis qu’un autre Evangéliste précise qu’il fit cette demande par l’intermédiaire de ses serviteurs.
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Laetitia
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Re: Question sur Matt. 27, 3-8 et Actes 1, 18-19 (Judas et le champ du sang)

Message par Laetitia »

Abbé Zins a écrit : sam. 03 juin 2023 11:34
Il est courant dans les Saintes Écritures d’attribuer à quelqu’un ce qui est fait en son nom par personnes interposées.
...
En effet, voyez ce qu'en dit Knabenbauer dans son Commentaire des Actes des Apôtres de Joseph Knabenbauer, S. J. Paris, 1899
Verum quid ipse sibi pro parte illa ac dignitate acquisierit refertur v. 18 hic quidem possedit ἐκτήσατο acquisivit, comparavit (cf. Salm. Cai: Sa, Est. Lap. Beel. Hake, Felt. Wendt) agrum de mercede iniquitatis; non dicitur ipsum emisse vel possedisse agrum , sed quia illa pecunia a synedrio ager emptus erat (Matth. 27,6-9), Petrus de re nota loquitur oratorie efferens quid Iudas pro sorte ministerii sibi elegerit et acquisierit; loquitur cum aliqua ironia, ita ut acquisitio Iudae dicatur ager ille mercede iniquitatis, pecunia pro proditione soluta, coemptus (Patr.). Est enim ager ille pecunia proditionis emptus perpetuum documentum et monumentum quod sui sceleris testimonium ac memoriale Iudas sibi acquisivit; pro apostolatu memoriam huius agri, hunc agrum sibi quasi comparavit, et suspensus crepuit medius et diffusa sunt omnia viscera eius καὶ πρηνὴς γενόμενος et praeceps, pronus factus, in praeceps delatus; lapsu scil. praecipite disrupto ventre effusa sunt viscera eius. Apud Aug. textus legitur : et collum sibi alligavit et deiectus in faciem disruptus est medius (c. Felic. manich. 1,4; M. 42,5292). Quae h. 1. Petrus narrat, non contradicunt illis apud Matth. 27,5 et abiens laqueo se suspendit. Utique « critici » qui ubique contradictiones sedulo indagare malunt (atque id impingunt sacris auctoribus quod si fieret profanis rerum scriptoribus summe indignarentur), hic clamores quoque tollunt de contradictione aperta. Audiant quod philologus eos docet : « recte iam Eusebius (ap. schol. Matthaeii) Matthaei relationem cum hac Lucae concinnavit : rupto fune Iudam in terram procidisse » (Bl.). Vide quae dixi ad Matth. 27,5; apud Oec. Theoph. Et in cat. Cr. sub nomine Apolinarii referuntur insulsa illa quae Papias de Iuda narrat.
chartreux
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Re: Question sur Matt. 27, 3-8 et Actes 1, 18-19 (Judas et le champ du sang)

Message par chartreux »

Merci bien à vous deux pour ces explications.
JCL
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Re: Question sur Matt. 27, 3-8 et Actes 1, 18-19 (Judas et le champ du sang)

Message par JCL »

Il y a aussi la difficulté liée aux deux causes de la mort de Judas évoqué dans les Écritures :
-la pendaison
-et le fait que dans une chute ses entrailles se soient répandues.
Je crois que la solution admise est que pendu dans ce champ ,
(qui donc a pu lui être attribué , -ou lui revenir de droit potentiellement ?, car si c'est acheté pour la sépulture des étrangers cela peut il être en mème temps sa propriété ? ou bien a t il pu finalement en réclamer la propriété afin de s'en faire à lui même le lieu de son auto-chatiment ?-ultérieurement à son abandon de la somme )
son corps déjà avancé dans la décomposition a fini par tomber et se répandre à terre.
JCL
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Re: Question sur Matt. 27, 3-8 et Actes 1, 18-19 (Judas et le champ du sang)

Message par JCL »

Une précision trouvée sur internet :
Pour ce qui est de l'achat du champ, il y a deux possibilités : 1) Judas a reçu la promesse des trente pièces d'argent quelques jours avant l'arrestation de Jésus (Marc 14.11). Quelque temps avant de trahir Jésus, il s'est arrangé pour acheter ce champ, mais sans payer. Ensuite, Judas a été payé, mais il a rendu l'argent aux chefs des prêtres, lesquels ont achevé la transaction qu'il avait commencée en achetant le champ, parce qu'ils considéraient cet argent comme le prix du sang. 2) Quand Judas a jeté les trente pièces d'argent à terre, les prêtres l'ont pris et s'en sont servis pour acheter le champ du potier (Matthieu 27.7). Judas n'a pas acheté le champ lui-même, mais il a fourni l'argent de la transaction, si bien qu'il pouvait être considéré comme l’acquéreur.
JCL
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Re: Question sur Matt. 27, 3-8 et Actes 1, 18-19 (Judas et le champ du sang)

Message par JCL »

En fait tout etait déjà dans le texte latin cité mais encore fallait il parler le latin alors pour ceux qui comme moi ne comprennent pas le latin je "colle" ci-dessous la traduction en français par "google" ,sans doute tres imparfaite ,que je viens de faire pour moi-meme.


Il est vrai que ce qu'il a lui-même acquis pour ce rôle et cette dignité est relaté au v. 18 il possédait en effet ἐκτήσατο il a acquis, obtenu (cf. Psaume. Cai: Sa, Est. Lap. Beel. Merlu, Felt. Wendt) un champ du salaire de l'iniquité; il n'est pas dit qu'il a lui-même acheté ou possédé le champ, mais parce que le champ a été acheté par le Sanhédrin avec cet argent (Matthieu 27: 6-9), Pierre parle d'un sujet bien connu soulignant oratoirement ce que Judas avait choisi et acquis pour lui-même comme le lot du ministère. il parle avec une certaine ironie, de sorte qu'on dit que l'acquisition de Judas est ce champ acheté avec le salaire de l'iniquité, avec l'argent payé pour la trahison (Patr.). Car ce champ, acheté avec l'argent de la trahison, est un document permanent et un monument que Judas s'est acquis comme témoignage et mémorial de son crime ; pour son apostolat, la mémoire de ce champ, il a pris ce champ pour lui, pour ainsi dire, et quand il a été suspendu, le milieu s'est fissuré et toutes ses entrailles se sont éparpillées. automne Ses entrailles ont été renversées par une rupture soudaine de l'estomac. Au mois d'août le texte est lu: et il s'est attaché le cou et a été jeté sur son visage et le milieu a été brisé (c. Felic. manich. 1,4; M. 42,5292). Qui h. 1. Pierre dit qu'ils ne contredisent pas ceux de Matt. 27.5 Et s'en allant, il se pendit avec un collet. Bien sûr, les « critiques » qui partout préfèrent scruter soigneusement les contradictions (et imputent aux auteurs sacrés qu'ils s'indigneraient fort s'il en était ainsi aux écrivains de choses profanes), poussent ici aussi des cris de contradiction ouverte. Qu'ils entendent ce que le philologue leur enseigne : « Eusèbe (ap. schol. Matthaeii) a maintenant correctement concilié la relation de Matthieu avec celle de Luc : Judas tomba à terre avec une corde cassée » (Bl.). Regarde ce que j'ai dit à Matt. 27,5 ; à l'Oec. Théoph. Et en chat. Cr. sous le nom d'Apollinaire sont rapportées les choses insipides que Papias raconte de Judas.
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