A. da Silveira sur l'hérésie exprimée par des gestes ou omissions

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Version anglaise disponible sur le site de John Lane : http://strobertbellarmine.net/essayonheresy.htm


Pour faciliter la lecture, j'ai ajouté une numérotation des sections absente de l'article initial.

1. Introduction
2. Des loups cachés dans le troupeau
3. Hérésies internes et externes
4. Personne ne conteste qu'on peut tomber dans une hérésie sans prononcer un mot
5. Des difficultés importantes

5. a. Un acte peut-il être vraiment univoque ?
5. b. La pertinacité peut-elle être prouvée par des actes ?
5. c. Un avertissement est-il nécessaire dans le cas d'une hérésie par action ?

6. Actions canoniquement considérées comme indices d'hérésie
7. Mesures canoniques contre le suspect d'hérésie
8. Les autres cas de soupçon d'hérésie non prévus dans le code actuel

8. a. Les hérétiques non-affiliés
8. b. Les fauteurs d'hérésie
8. c. Ceux qui reçoivent des hérétiques
8. d. Les défenseurs d'hérétiques


9. Des lois sorties de l'usage depuis longtemps ?
10. L'impunité canonique pour tous ces péchés proches de l'hérésie ?
11. Les hérésies diffuses

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De l'hérésie exprimée par des gestes, une attitude, un comportement ou des omissions

par Arnaldo Vidigal Xavier da Silveira

1. Introduction

Dans son encyclique Pascendi Dominici Gregis, le pape S. Pie X a dit que les modernistes étaient les ennemis les plus dangereux de l'Église parce qu'au lieu d'admettre ouvertement leur hérésie, ils la cachaient dans leur cœur.

Dès lors, un Catholique qui considérerait qu'il ne faut combattre que les ennemis déclarés de l'Épouse du Christ se tromperait gravement. Prétendre qu'il suffit à quelqu'un de se dire catholique pour être au-dessus de tout soupçon, n'importent les paroles ou actes les plus grotesques, c'est décréter l'impunité absolue pour les loups en peau de brebis qui s'immiscent dans le troupeau. Et c'est aussi priver injustement les personnes de bonne foi des avertissements et informations qui pourraient les prémunir contre l'erreur ou même les libérer de l'erreur dans le cas où elles seraient déjà trompées par ces impostures.

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2. Des loups cachés dans le troupeau

La position de ceux qui veulent empêcher les loups en peau de brebis de faire leurs ravages au sein du troupeau est peu enviable. Ils sont incompris et passent pour des paranoïaques, pitoyables dans leur empressement à voir de l'hérésie partout.

C'est pour cela que nous ne nous contentons pas de combattre les ennemis intérieurs ; nous nous efforçons aussi de convaincre que ce combat est légitime, approprié, et même nécessaire. Promouvoir ce combat, c'est suivre l'exemple des meilleures traditions de l'Église et les recommendations des Souverains Pontifes, c'est imiter les saints, c'est prendre en compte l'avertissement de Notre-Seigneur :

Gardez-vous des faux prophètes, qui viennent à vous sous des vêtements de brebis, et qui au dedans sont des loups ravisseurs.

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Dans le présent article, nous n'allons pas redémontrer qu'il est "permis et même nécessaire de prévenir les âmes contre leurs ennemis, même si ces ennemis sont de leur propre foyer", qu'une telle action est recommandée par les papes, qu'elle n'est pas contraire à la charité, et qu'elle ne vient pas d'une disposition systématiquement négative.

Nous voulons seulement traiter d'un point très-particulier, qui est de la plus grande importance dans la détection précise d'un intrus qui s'est infiltré dans l'Église. La question que nous posons est la suivante : « Est-il nécessaire pour un Catholique de soutenir par oral ou par écrit des positions contraires à la Foi pour devenir hérétique ou suspect d'hérésie ? Un ensemble d'attitudes, une disposition générale, une conduite générale, peuvent-ils trahir un hérétique, même s'il ne dit ni n'écrit habituellement rien de contraire à la Foi ? Bref : peut-on tomber dans l'hérésie par de simples actes ? »

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L'importance théorique et pratique de ce point est évidente. Sur le plan théorique, il faut se souvenir que, d'après le droit canon, les hérétiques qui manifestent extérieurement leur hérésie sont ipso facto excommuniés et hors de l'Église. Il s'ensuit que la possibilité de tomber dans l'hérésie par de simples actes a des répercussions profondes sur l'étude du Corps Mystique du Christ ainsi que d'autres aspects de la Théologie Sacrée.

Observons tout de suite cependant que toute action incompatible avec le dogme n'est pas nécessairement preuve d'un état d'esprit hérétique. Un pécheur par exemple, mais qui croit à l'Enfer, peut, par faiblesse ou malice, agir comme s'il n'y croyait pas. Il veut profiter de la vie, espère pouvoir se repentir avant de mourir et ne fait pas suffisamment d'efforts pour vaincre ses mauvaises habitudes. Cela fait-il de lui un hérétique ? Absolument pas. Un acte ou un ensemble d'actes ne peuvent révéler une "agressivité" hérétique que si l'action, considérée en rapport avec toutes ces circonstances, en plus d'être incompatible avec le dogme, le nie ou le met en doute obstinément.

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Sur le plan pratique, si de simples actes trahissent un hérétique, il est évident que le nombre d'excommuniés est plus grand que ce que l'on s'imagine communément. De plus, le combat contre les loups en peaux de brebis en acquiert une nouvelle dimension. L'idée contraire, qu'on ne peut nier un article de foi que par des paroles, est courante chez les Catholiques d'aujourd'hui.

Trompés par cette idée fausse, de nombreux esprits timides se sentent impuissants à combattre tel ou tel ennemi qui a infiltré l'Église. Ils s'imaginent même que ce serait attaquer un frère dans la foi, un membre du Corps Mystique du Christ. Même quand ils admettent qu'une attitude donnée est erronée ou contraire aux intérêts de la Religion, ils hésitent à dénoncer quelqu'un qui est apparemment Catholique. Si seulement l'on parvenait à les faire voir que c'est un hérétique à qui ils ont affaire, des milliers de résistances intérieures injustifiables à la vraie foi s'effondreraient.

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Le problème est compliqué par le fait que, comme le dit P. Correa de Oliveira en son Em Defesa ...(p. 100), "Ceux qui répandent de telles erreurs sont très fréquemment des personnes qui ont un comportement exemplaire dans leur vie privée, ce qui, loin de servir le bon combat, facilite au contraire la propagation des mauvaises doctrines en les habillant d'un aspect désintéressé et purement spéculatif".

Les ravages considérables qui ont décimé le troupeau du Christ auraient pu être évités si dès le début les loups avaient été traités de loups, si on leur avait rapidement arraché la peau de brebis et mis à nu la marque vulgaire, difforme et hideuse de l'hérésie.

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Prenons l'exemple d'un jeune étudiant à l'université qui se dit catholique. Il participe activement à des mouvements pour "les droits des paysans, des travailleurs, des étudiants". Une longue fréquentation de ces mouvements l'a mis en contact avec des communistes, qu'il est habitué à avoir autour de lui. Il ne se dit pas marxiste, et se déclare même adversaire irréductible de tout athéisme, mais il se sent attiré par le socialisme, même sous ses formes les plus extrêmes. À cause de son activisme pour diverses réformes d'avant-garde, il a déjà eu des soucis avec la police, qu'il accuse d'être "réactionnaire", "un instrument des capitalistes", "un instrument du colonialisme états-unien".

Il communie quotidiennement, mais il estime que les puérilités de l'"Église de Constantin" doivent s'effacer devant une vie de piété adulte et sérieuse, vécue par un Catholique éclairé de l'"Église de Vatican II". C'est pour ces raisons qu'il a un sourire dédaigneux quand il entend parler du Sacré-Cœur, de la virginité de Marie, de dévotion aux saints, de transsubstantiation, d'enfer, etc. Il n'attaque jamais directement aucun dogme par ce qu'il sait que cela nuirait à sa cause, mais il ne parle jamais de ces choses et n'aime pas en entendre parler.

Nous devons maintenant répondre avec précision à cette question : Peut-on affirmer que ce jeune homme est hérétique ?

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3. Hérésies internes et externes

Pour répondre à cette question, observons d'abord que sur le plan des conséquences juridiques, il y a une différence de taille entre l'hérésie interne et l'hérésie externe, autrement dit entre le péché d'hérésie commis dans le secret de sa conscience, et le péché d'hérésie manifesté extérieurement, qui constitue l'hérésie au sens canonique. En tant que société visible, l'Église ne peut juridiquement punir que les péchés qui sont manifestés de façon visible. Un péché qui reste enfermé dans la conscience est un vrai péché qui sera puni par Dieu. L'Église peut éventuellement le pardonner au tribunal de la confession, mais si le péché n'apparaît pas dans le domaine visible, il ne peut pas être puni dans ce domaine, c'est-à-dire qu'il ne peut pas être l'objet de censures ou peines ecclésiastiques.

Supposons qu'un individu cède à une tentation contre la Foi et nie par exemple en son cœur le dogme de l'éternité de l'enfer. Il n'en fait part à personne. Il a certes commis un péché mortel d'hérésie, mais il n'est ni excommunié ni exclu de l'Église. Cela n'arrivera qu'au moment où il manifestera extérieurement son hérésie.

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Il est admis par les théologiens qu'il est possible d'extérioriser une hérésie (et par là devenir passible des peines canoniques) non seulement par des paroles ou écrits, mais aussi par une attitude, un comportement, des signes, des omissions.

Un simple hochement de tête, un geste de la main, un langage corporel peut parfois suffire à exprimer une pensée. Dans un contexte plus étendu, la position politique, le silence ou autre attitude semblable d'une autorité publique peut démontrer, au vu des circonstances, qu'un tel tient telle ou telle idée.