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Re: Mise en garde contre de dangereuses exagérations &déviations

Publié : lun. 16 oct. 2017 18:55
par Abbé Zins
Revue Sub Tuum Praesidium, n° 54 - Février/Mars 1998 -


2. L ' ECHO DE LA TRADITION


Cas typique de l'observance de la circoncision (Suite)

A s'en tenir à leur manière de raisonner ou déraisonner à tambours battants, on pourrait arriver à des incongruités comme celle-ci :
Saint Thomas d'Aquin a écrit :
« Observer la circoncision après la Passion du Christ est péché mortel » (Saint Thomas d'Aquin, 1.2.104, 4, S.C.)
Or Saint Paul a circoncit Timothée, en outre « à cause des Juifs » (Act. 16,3), qui plus est juste après la décision solennelle du Concile de Jérusalem à l'encontre des judaïsants (Act. 15, 28s). Donc !.. Donc...

Mais Saint Paul ?... Oui, parfaitement, la vérité est la vérité, et elle ne change pas ! Mais c'est pourtant lui qui s'est opposé le plus fortement aux judaïsants et qui a suscité la sentence du Concile de Jérusalem....

S'agit-il de réprouver ainsi l'acte d'un Saint, la sentence d'un Saint Docteur, voire d'un des Apôtres dont la Tradition nous assure que, ayant reçu le privilège d'être confirmés en grâce à la Pentecôte, ils ne pouvaient plus dès lors pécher mortellement, rien ne les arrête, n'entame la "sûreté" de leur conclusion péremptoire.

Certes, un Saint, même déjà établi en son état habituel de sainteté, peut avoir une faiblesse passagère, un Saint Docteur peut parfois émettre une inexactitude, le sens de tout un peuple peut basculer peu à peu jusqu'à l'apostasie généralisée, mais avant de s'arrêter à conclure que telle est bien pourtant la réalité dans tel cas, il faut s'y reprendre à une fois, deux fois, dix fois, interroger ceux qui en savent normalement plus, peser leur réponse.

Voilà donc une apparence de faute grave concernant un Apôtre même, un Confesseur de la Foi, un futur Martyr ? Le témoignage est-il véridique ? celui qui le rapporte fiable ? la traduction est-elle exacte et précise ? le fait est-il avéré ?

Ici, il s'agit d'un texte sacré justement traduit, du Saint-Esprit et donc d'un fait certain. Quel en a été le contexte, général ? particulier ?


Re: Mise en garde contre de dangereuses exagérations &déviations

Publié : mar. 17 oct. 2017 22:15
par Abbé Zins
Revue Sub Tuum Praesidium, n̊ 54 - Février/Mars 1998 -


2. L ' ECHO DE LA TRADITION


Cas typique de l'observance de la circoncision (Suite)


Là, comme souvent, une explication des plus claires et des plus précises est fournie par le Docteur Commun et Universel dans le passage cité même.

Remettons donc cette assertion dans son contexte immédiat et sa suite, pour nous mieux pénétrer de la véracité de l'affirmation du Saint Docteur. Puis, suivons-le dans sa réponse aux objections, afin de comprendre exactement le contexte, d'abord général, puis particulier, qui montre que, malgré l'apparence accablante contraire, il n'y a point eu là un acte fautif mais vertueux de l'Apôtre des Gentils.

La question de la Somme Théologique en question (1.2. 104,4) s'intitule : « Les observances légales peuvent-elle être accomplies sans péché mortel après la Passion du Christ ? ».

Après avoir exposé, conformément à la méthode scolastique, une série d'objections tendant à prouver que cela est possible, le Saint Docteur énonce un argument d'autorité pour démontrer que non, puis en expose la raison dans le corps de l'article, avant d'y apporter les nuances qui s'imposent à travers la réponse aux objections.
Saint Thomas a écrit :
« Sed contra [à l'encontre de ces objections, voici un argument d'autorité], l'Apôtre dit aux Galates (5,2) : « Voici que moi, Paul, je vous dis : que si vous vous faites circoncire, le Christ ne vous sert de rien.».. Or rien d'autre que le péché mortel n'exclut le fruit du Christ. Par conséquent, observer la circoncision et les autres cérémonies légales après la Passion du Christ est péché mortel.

Il faut dire que toutes les cérémonies sont des protestations de foi, en lesquelles consistent le culte intérieur rendu à Dieu. C'est ainsi que l'homme peut professer la foi intérieure par des actes et des paroles. En une telle profession, si un homme exprime quelque chose de faux, il pèche mortellement.

De la sorte, bien que la foi que nous avons envers le Christ soit la même que celle qu'ont eue les Patriarches, toutefois, du fait que ceux-ci ont précédé le Christ tandis que nous le suivons, la même foi est exprimée de manières diverses par nous que par eux. Car par eux il était dit : La Vierge concevra et mettra au monde un Fils [Is. 7,14], en employant des verbes au futur, tandis que nous exprimons la même réalité par des verbes au passé, en disant : elle a conçu et mis au monde.

De même, les cérémonies de la loi ancienne signifiaient le Christ comme devant naître et souffrir, tandis que nos Sacrements Le signifient comme étant né et ayant souffert.

Par conséquent, pécherait mortellement celui qui, maintenant, professerait sa foi en déclarant que le Christ va naître, alors que les Patriarches disaient cela avec piété et véracité.

Pour la même raison, si quelqu'un observait maintenant les cérémonies que les Patriarches pratiquaient pieusement et fidèlement, il pécherait mortellement, comme Saint Augustin le dit contre Faustus (19,16).»


Re: Mise en garde contre de dangereuses exagérations &déviations

Publié : mar. 17 oct. 2017 22:21
par Abbé Zins
Revue Sub Tuum Praesidium, n̊ 54 - Février/Mars 1998 -


2. L ' ECHO DE LA TRADITION


Cas typique de l'observance de la circoncision (Suite)

Une fois cette vérité ainsi clairement démontrée, le Docteur Commun souligne d'abord le fait qu'il n'y aurait par contre aucun péché à être circoncit ou à faire circoncire son enfant pour des raisons purement médicales et sanitaires, car il n'y aurait là aucune volonté de le faire en raison et dans le sens des observances légales.

Puis, il en vient au cas de la circoncision de Timothée et d'autres observances légales, encore pratiquées par Saint Paul après la Passion et le Concile de Jérusalem, pour ménager les Juifs convertis n'arrivant pas à s'arracher d'un coup aux observances légales (Act. 21,18-26).

Ici, à la suite de Saint Augustin, et selon sa clarté habituelle, le Docteur Commun en vient à distinguer trois périodes en lesquelles la même observance de la circoncision est passée d'obligatoire et salutaire à désuète et tolérée, puis à interdite et péché mortel :
Saint Thomas a écrit :
« Saint Augustin (Ep. 40) distingue trois périodes : 1̊) avant la Passion du Christ, en laquelle les observances légales [avaient leur force en tant qu'encore en vigueur (ou vivantes : viventia), et dès lors] n'étaient ni porteuses de mort (mortifera), ni mortes (mortua) ; 2̊)[après la Passion et avant la divulgation de l'Evangile, en laquelle les observances légales étaient mortes (mortua), en tant que nul n'y était (plus) tenu et que leur accomplissement ne conférait rien à quiconque, mais n'étaient pas encore porteuses de mort (sed non mortifera), parce que les Juifs convertis au Christ pouvaient les observer sans pécher] ; 3̊) [après la divulgation de l'Evangile, en laquelle les observances légales ne sont plus seulement mortes (mortua) mais de plus porteuses de mort (mortifera), en tant que quiconque les observe pèche mortellement.] - C'est pourquoi l'Apôtre dit : "qui conduisent toutes à la perdition (qui sunt omnia in interitu : Col. 2,22), parce qu'elles sont porteuses de mort (mortifera) après la Passion du Christ, pour ceux qui y placent leur espérance ; en outre, après le temps de la grâce divulguée, elles sont de soi porteuses de mort pour tous (simpliciter omnibus sunt mortifera)... Elles conduisent donc à la perdition et à la mort (ad interitum ergo et in mortem perducentia sunt).-

Dans la période intermédiaire, à savoir de la Passion du Christ jusqu'à la divulgation de l'Evangile, les observances légales étaient mortes, parce qu'elles n'avaient plus de vigueur et que nul n'était obligé de les observer, sans être toutefois porteuses de mort, car ceux qui s'étaient convertis au Christ d'entre les Juifs pouvaient observer licitement ces pratiques légales pour autant qu'ils ne plaçaient point en elles leur espérance en les tenant nécessaires pour leur salut, comme si la foi dans le Christ ne pouvait point justifier sans les observances légales. Tandis que ceux qui se convertissaient au Christ d'entre les Gentils n'avaient point de raison de les observer. C'est pourquoi Saint Paul a circoncit Timothée, qui avait été engendré par une mère juive, tandis qu'il a refusé de circoncire Tite (cf. Act.) qui était né d'entre les Gentils.

Aussi, le Saint-Esprit ne voulut point que ceux qui s'étaient convertis d'entre les Juifs soient aussitôt empêchés de pratiquer les observances légales comme ceux qui se convertissaient d'entre les païens se voyaient aussitôt empêchés de pratiquer les rites du paganisme, afin que la différence entre ces rites soit de la sorte mieux montrée : car les rites païens étaient répudiés en tant que totalement illicites et interdits depuis toujours par Dieu, tandis que le rituel de la Loi cessait, en tant qu'accompli par la Passion du Christ et qu'établi par Dieu comme figure du Christ.»

(Saint Thomas, 1.2. 104, 4 ad 1 et in [Rom. 14,2] et - Col. 2,22 -)

Re: Mise en garde contre de dangereuses exagérations &déviations

Publié : mar. 17 oct. 2017 22:28
par Abbé Zins
Revue Sub Tuum Praesidium, n̊ 54 - Février/Mars 1998 -


2. L ' ECHO DE LA TRADITION


Cas typique de l'observance de la circoncision (Suite)

Le Docteur Commun, après avoir ainsi expliqué comment Saint Paul n'a point péché du tout en observant la circoncision et d'autres observances légales après la Passion et le Concile de Jérusalem, afin de ménager licitement les convertis d'entre les Juifs, lents à comprendre et admettre l'abolition de l'Ancienne Alliance et de ses rites figuratifs à présent accomplis, montre ensuite (ad 2) comment Saint Pierre commit une imprudence répréhensible (Gal. 2,11) ; non point en ayant voulu pareillement ménager ces judaïsants en une pratique moindre, celle de ne point prendre des viandes anciennement défendues par la Loi, mais en l'ayant fait sans se rendre suffisamment compte qu'en voulant ainsi ménager les judaïsants, il était en train de scandaliser très fortement les convertis de la Gentilité. Aussi changea-t-il promptement et humblement d'attitude dès que Saint Paul lui en fit publiquement la remarque (cf. STP 28. 39s).


On trouve, au sujet de la circoncision de Timothée, une explication semblable dans le commentaire de Saint Jean Chrysostome (hom. 34 in Act. 16,3) :
Saint Jean Chrysostome a écrit :
« Lorsqu'il « le prit et le circoncit », il en dit la raison : c'était « à cause des Juifs qui étaient en ces lieux-là». Voilà pourquoi il le circoncit... Voilà déjà, comme vous le voyez, une dérogation à la loi...

En effet, cette obligation n'existait plus pour les Gentils qui se convertissaient : c'était là un grand pas de fait que d'avoir écarté un sujet de scandale aussi ancien.

On commençait à abroger cette coutume en décidant que les Gentils pouvaient s'en abstenir sans qu'on les blâmât, et sans qu'il leur manquât rien pour la Religion ; le reste devait venir tout seul.

Cependant, comme Timothée devait exercer la prédication [parmi les Juifs de cette région, qui le savaient Juif incirconcis] Paul le circoncit, quoiqu'il fut Gentil par son père et Juif par sa mère....

Observez ici tout le bien qu'il accomplit quand il semble se contredire : « Les églises se multipliaient ». Vous voyez que cette circoncision, non seulement n'a fait aucun mal, mais a procuré même de grands avantages.»
Saint Bède précise également (ibid.) :
Saint Bède a écrit :
« Non pas que Saint Paul ait cru à quelque utilité des figures de la Loi, une fois la clarté de l'Evangile apparue, mais afin que les Juifs ne s'écartent point de la foi à l'occasion de l'entrée des Gentils. Il importait que l'ombre de ces figures légales soit effacée peu à peu...».

Tout ceci peut être appliqué, mutatis mutandis, à la compréhension des fidèles et à leurs rapports vis-à-vis de l'antipape J 23 et du conciliabule ou bombe à retardement V 2, de l'antipape P 6, du NOM et de la secte conciliaire, de Mgr Lefebvre, des Messes célébrées una cum et de la Fraternité d'Ecône.


Re: Mise en garde contre de dangereuses exagérations &déviations

Publié : mer. 18 oct. 2017 19:00
par Abbé Zins
Revue Sub Tuum Praesidium, n° 54 - Février/Mars 1998 -


4. L I A I S O N D E S L E C T E U R S


Réponse du 21/1/1993 à une question sur la Fraternité d'Ecône


« Sainte Agnès, jeudi 21/1/1993 (Bicentenaire du régicide du Roi très Chrétien).... Venons-en à la question soulevée à propos de la Fraternité S. Pie X et de Mgr Lefebvre .


Caractère factice de raisonnements tardifs voulus à effets rétroactifs :


Certains veulent appliquer leur raisonnement présent des années 1990 aux années 1970 ou même 1962-65, comme si rien ne s'était passé depuis et comme si le contexte était le même.

Il suffit pour les dégriser de leurs constructions purement intellectuelles de leur demander ce qu'ils faisaient eux-mêmes et comment ils voyaient les choses dans ces années 1960 - 70.

S'ils ont alors perçu ce qu'ils analysent maintenant de la manière où ils l'exposent actuellement, pourquoi ces beaux esprits n'ont-ils point fait part alors aux autres de leurs lumières si perspicaces, pourquoi ont-ils attendu les années 90 pour exprimer et publier ce qu'ils avaient compris dès les années 60 - 70 ?

Par contre, s'ils étaient eux-mêmes alors loin d'avoir saisi ce qu'ils exposent aisément maintenant que la voie a été tracée et que les taillis touffus qui obstruaient la bonne direction ont été taillés, si leur comportement était en conséquence très différent voire opposé à celui qu'ils déclarent devoir s'imposer aujourd'hui, pourquoi jugent-ils les autres coupables de n'avoir point perçu dans les années 60 - 70 ce qu'eux-mêmes n'ont perçu et exposé que dans les années 90 ?


Re: Mise en garde contre de dangereuses exagérations &déviations

Publié : mer. 18 oct. 2017 19:05
par Abbé Zins
Revue Sub Tuum Praesidium, n ̊ 54 - Février/Mars 1998 -


4. L I A I S O N D E S L E C T E U R S


Réponse du 21/1/1993 à une question sur la Fraternité d'Ecône (Suite)


Objectivité de la Vérité et conséquences morales de la relativité de sa perception subjective :


La Vérité est certes objective et dans son essence de soi immuable, impliquant une perception adéquate de la réalité. Mais, à la différence de la connaissance divine et angélique qui en ont une perception intuitive directe, l'homme ne s'y porte que d'une manière discursive et fractionnée.

De plus, si l'essence de la Vérité ne change pas, les modalités de son expression et donc de sa compréhension peuvent changer, notamment dans le sens de l'imparfait vers le parfait, de la perception partielle et singulière à la perception globale et universelle.

En outre une différence ou un changement substantiel d'état peut impliquer des devoirs substantiellement différents. Ainsi, avant d'être clerc majeur, la récitation d'une heure canoniale est pour un séminariste la matière libre d'un acte personnel de dévotion ; mais une fois sous-diacre, la moindre petite heure devient matière grave. Ainsi, l'acte conjugal est permis à des époux légitimes, tandis qu'il est matière grave en dehors du mariage.

Ce qui vaut de la sorte pour un tel changement objectif ou pour une telle différence réelle, vaut aussi sur le plan moral pour un changement substantiel de la perception subjective de cette différence ou de ce changement.


Un exemple classiquement cité par les moralistes est celui d'un chasseur entendant remuer dans un buisson au milieu d'une épaisse forêt, tirant en pensant avoir affaire avec du gibier et blessant mortellement un autre chasseur. On ne saurait parler alors d'un délit d'homicide. A l'inverse, s'il tirait de fait un gibier en ayant pensé se débarrasser de son ennemi après l'avoir suivi à la trace, il y aurait devant Dieu délit effectif d'homicide.

De tout ceci résulte que, selon les circonstances objectives d'une part, et selon leur perception subjective d'autre part, un même comportement peut impliquer un acte moralement bon, indifférent ou gravement coupable.


Re: Mise en garde contre de dangereuses exagérations &déviations

Publié : jeu. 19 oct. 2017 19:10
par Abbé Zins
Revue Sub Tuum Praesidium, n ̊ 54 - Février/Mars 1998 -


4. L I A I S O N D E S L E C T E U R S


Réponse du 21/1/1993 à une question sur la Fraternité d'Ecône (Suite)


Cas typique de l'observance de la circoncision :


Avant de revenir aux cas individuels et à la notion des for interne et externe, considérons un exemple très propre à nous faire percevoir les implications non seulement personnelles ou singulières d'une telle vérité, mais aussi sociales et communautaires ; exemple qui nous rapprochera grandement du cas qui nous préoccupe.

Il s'agit de la pratique du rite de la circoncision. Etant le signe sensible sacramentel de l'Ancienne Alliance et la figure du Saint Baptême, ce rite fut de soi excellent et très méritoire pendant toute la durée de l'Ancien Testament.

Avec le Baptême, il devient inutile et désuet. Toutefois, pour la mentalité juive, surtout en raison de sa déformation formaliste pharisaïque, cela impliquait un changement radical de perception de la vertu salvatrice et rédemptrice découlant de la grâce divine dont les canaux ordinaires sont les sacrements et liée à l'Alliance avec Dieu. C'était comme leur demander de s'arracher à ce qu'ils considéraient la marque essentielle et spécifique de leur identité religieuse et de peuple choisi entre tous les peuples. Et cette conception fut encore longtemps partagée par les premiers Chrétiens [d'origine juive] eux-mêmes.

Rendu désuet, ce rite de soi bon par ce qu'il avait représenté, devint indifférent et longtemps laissé matière à option libre par les Apôtres eux-mêmes, comme devant normalement être abandonné peu à peu comme devenu inutile.

Pourtant, du fait que se leva parmi les premiers Chrétiens un fort parti de judaïsants prêchant que c'était là un rite encore obligatoire et absolument nécessaire au salut, prenant l'ombre pour la réalité, la pratique de la circoncision devint dès lors très néfaste en devenant le signe d'une grave erreur théologique sur la nature de la Nouvelle Alliance et fut par conséquent proscrite.

Un même comportement était donc passé, en raison d'un changement tant objectif que subjectif de circonstances, d'une matière moralement bonne à une matière d'abord indifférente et libre, puis moralement mauvaise et prohibée.


Application de ce cas typique à celui de la crise ecclésiastique actuelle :


Le cas qui nous préoccupe est semblable.

Le fait que l'appareil de l'administration ecclésiastique romaine soit, et même puisse être, occupé jusqu'au plus haut sommet par des ennemis de l'Eglise cherchant à la détruire comme de l'intérieur, est, était, une montagne à admettre pour notre conception catholique, d'autant plus pour ceux qui étaient instruits de la doctrine sur la pérennité et l'indéfectibilité de l'Eglise. Avant les événements eux-mêmes et la force objective des faits, cela était même quasi impensable, pas même imaginable.

Le changement d'Alliance et l'appel de tous les peuples à la Foi étaient pourtant prédits de multiples façons comme le démontre le Livre II de Consummatum Est, ainsi que le Livre IV [non encore achevé], mais il fallut néanmoins un assez long laps de temps aux premiers Chrétiens d'origine juive pour en envisager seulement l'idée, puis pour l'admettre peu à peu.

Ce que nous vivons était pareillement mystérieusement prédit, comme le montrent le Livre V sur l'Antéchrist et le n°23 de Sub Tuum Praesidium, mais il nous a, communautairement et socialement, ainsi qu'individuellement fallu un assez long laps de temps d'abord pour le concevoir simplement comme possible, ensuite pour admettre que telle était pourtant la réalité des faits.

Sauter à pieds joints sur tout ce contexte extraordinaire de cette crise inouïe et sans précédent, comme s'il n'existait pas, est une grotesque aberration.


Re: Mise en garde contre de dangereuses exagérations &déviations

Publié : ven. 20 oct. 2017 18:15
par Abbé Zins
Revue Sub Tuum Praesidium, n ̊ 54 - Février/Mars 1998 -


4. L I A I S O N D E S L E C T E U R S


Réponse du 21/1/1993 à une question sur la Fraternité d'Ecône (Suite)


Aspect communautaire et social de cette question :


Ceci étant démontré, il reste à considérer un double aspect de la question que vous posez : aspect social et communautaire, aspect particulier et individuel.

Socialement parlant, le cas de l'imposture de l'antipape JP 2 est devenu évident à partir de 1986, année de ses actes publics d'idolâtrie en Afrique et en Inde et de l'apostasie publique mondialement diffusée d'Assise. Ceci au for externe et public, et socialement parlant, car son cas était déjà clair dès le début avec le choix de son nom double pour continuer J 23 et P 6 et sa pseudo-encyclique-programme Redemptor hominis bourrée d'énormes hérésies.

La question de l'illégitimité de P 6 a du reste été également posée publiquement par divers prêtres au début des années 1970 et par Mgr Lefebvre lui-même fin 1976. Jusque là sa résistance n'avait fait que s'améliorer et suivre une bonne courbe : garde du dépôt, dénonciations publiques des erreurs, et commençait alors la dénonciation des auteurs des hérésies et la remise en cause de leur autorité (en fait factice et usurpée).

Sa réception par P 6 jeta un trouble dans cette bonne progression, et commencèrent alors deux années de déclarations et d'attitudes contradictoires penchant encore en grande majorité dans le bon sens avec cependant des hauts et des bas jusqu'à sa réception par JP 2 fin 1978.

A partir de là, la courbe commença à devenir descendante avec quelques sursauts, et vers la fin 1979 fut publiquement abandonnée et dénoncée comme d'esprit schismatique la remise en cause de l'autorité des fauteurs d'hérésies. Cette année 1979 vit aussi le renvoi de la Fraternité S. Pie X de ceux qui persistaient publiquement à le faire.

La descente se poursuivant, les plus perspicaces ou courageux pouvaient déjà tirer une gravissime conclusion, comme le montre par exemple ma brochure de 1983 [L'attitude actuelle de Mgr Lefebvre ou le traditionalisme libre dans "l'église conciliaire" libre : épuisée].

On pouvait toutefois encore espérer alors que ce n'était là qu'une grave faiblesse passagère et non définitive, due peut-être à l'énormité de la réalité et au poids accablant de l'immense responsabilité que cela impliquait qu'il charge sur ses épaules, et que, tout en devant rompre publiquement avec lui sur le moment, selon les exigences de la confession de la foi, il finirait par y voir tout à fait clair ou par avoir le courage de faire le pas.

Cette espérance, contre l'évidence même allant toujours en s'amplifiant, restait encore sous-jacente en nous, à cause du bel élan passé du prélat, au milieu du combat que nous menions publiquement contre ses erreurs et déviations.

Aussi quand, en raison des actes publics d'idolâtrie et d'apostasie de K. W., Mgr Lefebvre déclara dans son sermon de Pâques 1986 qu'il allait peut-être devoir proclamer que JP 2 n'était pas pape, tout en restant réalistes et circonspects, avons-nous essayé de l'encourager par une lettre-ouverte publiée en juillet 1986 (n° 4) dans le sens d'une déclaration publique de la vacance du Saint-Siège.

Ceci dans une triple optique : en tant que 1. exigée par la confession de la Foi comme seule base légitime de notre résistance en conformité avec toutes les données de la doctrine catholique, 2. elle aurait pu constituer une preuve a posteriori que Mgr Lefebvre n'aurait pas été définitivement engagé dans les erreurs qu'il s'était laissé aller à proférer puis à défendre un temps, 3. cela aurait constitué un rejet public de ces erreurs et une reprise et un parachèvement du bon combat passé.

Psychologiquement, les fidèles les mieux intentionnés et les plus avertis l'espéraient tellement qu'ils finissaient par y croire et y voir la seule solution possible.

Néanmoins, tant le long intermède public dans l'erreur que beaucoup de données présentes, ont vite donné à entendre que ce n'était là qu'une tactique de "diplomatie" pour faire pression sur les conciliaires afin d'obtenir sa reconnaissance officielle, puisque cela lui a valu l'envoi dans ce but du "cal" Gagnon.

Comme toutefois les choses ne nous apparaissaient pas aussi clairement alors qu'avec le recul présent, sur la lancée de la lettre-ouverte, nous avons continué notre tentative d'encouragement dans le bon sens jusqu'à l'accord du 5/5/1988 de Mgr Lefebvre avec les conciliaires et les sacres de 1988. Ceci, sans pourtant nous leurrer, comme le montre entre autre le n° 12 [publié à la mi-juin 1988] p.5, et de plus en plus principalement pour démontrer que notre opposition à Mgr Lefebvre n'était point une affaire de personne ou d'hostilité personnelle à son encontre mais une question de doctrine et de confession publique de la Foi.

Aussi, socialement parlant, c'est à partir des sacres de 1988 publiquement justifiés par des thèses hérétiques, que le cas de Mgr Lefebvre et de la Fraternité S. Pie X sont devenus évidents au for externe et public.

Cet aspect social est rendu patent du côté des conciliaires par la fulmination de la pseudo-excommunication solennelle, du côté des lefebvristes eux-mêmes par leur éclatement en diverses fraternités (S. Pierre, S. Vincent Ferrier), en "ralliés - non ralliés", etc..

Cet acte donc, encore aggravé par la signature de l'accord du 5/5/1988, non seulement n'a pas été une preuve, plus souhaitée en soi qu'attendue en fait, d'une non pertinacité antérieure, mais en a plutôt été une confirmation patente et somme toute venant logiquement à la suite des déviations et obstinations précédemment manifestées de plus en plus clairement.


Re: Mise en garde contre de dangereuses exagérations &déviations

Publié : lun. 23 oct. 2017 16:09
par Abbé Zins
Revue Sub Tuum Praesidium, n ̊ 54 - Février/Mars 1998 -


4. L I A I S O N D E S L E C T E U R S


Réponse du 21/1/1993 à une question sur la Fraternité d'Ecône (Suite)


Aspect particulier et individuel de cette question :


Après ce résumé du caractère social et du contexte public de toute cette question, venons-en au cas particulier des prêtres et des séminaristes [qui vaut aussi mutatis mutandis pour les laïcs dans leurs rapports avec les conciliaires et la Fraternité d'Ecône].

Au départ, où personne n'y voit encore clair dans l'énormité de ce qui se passe au sein des structures ecclésiastiques, la Fraternité S. Pie X obtient les permissions conformes au Droit Canon pour commencer [sa fondation] et ouvrir un séminaire.

Ce n'est qu'après les ordinations de 1976 qu'intervient la pseudo-suspens a divinis ; mesure à l'encontre de laquelle Mgr Lefebvre dépose un recours suspensif.

A la suite de cela et de ses précédentes déclarations, il commence à remettre en cause la légitimité et l'autorité de ceux qui prétendent le frapper [cf Réflexions sur la suspense a divinis (29/7/1976) et Déclaration publiée dans le Figaro (2-4/8/1976), cf. Itinéraire, La condamnation sauvage, p.170s, 173s)].

Jusqu'à son entrevue avec K. W. les choses demeurent incertaines et ambiguës de part et d'autre, Mgr Lefebvre commençant à avoir des comportements et à faire des déclarations contradictoires depuis son entrevue avec P 6 mais en penchant le plus souvent dans le bons sens et sans revenir sur sa remise en cause de la légitimité et de l'autorité des conciliaires, semblant à la fois ménager beaucoup de fidèles pas prêts à accepter encore une telle vérité et poser des jalons pour les amener peu à peu à la reconnaître.

Ces ambiguïtés, ces attitudes et déclarations contradictoires, donnent un temps l'impression à toutes les tendances traditionnelles de leur donner raison, et il en est de même pour les membres de la Fraternité.

En été 1977 ce sont les "anti-libéraux" qui sont un temps menacés, mais à la rentrée d'octobre ce sont finalement les "libéraux" les plus acharnés qui s'en vont [du séminaire d'Ecône].

Cette incertitude, et ces mouvements de balancier marquant des hauts et des bas semblant être l'écho du combat intérieur qui se joue alors en Mgr L. lui-même, persiste(nt) plutôt en faveur de la bonne position jusqu'à l'entrevue avec JP 2.

Alors, Mgr L. commence à pencher de plus en plus dans l'autre sens, et avant de le manifester publiquement en septembre 1979, il commence à faire la guerre aux "sédévacantistes" de la Fraternité S. Pie X alors assez nombreux et à en frapper quelques-uns en les renvoyant.

Par la suite, la reconnaissance de la "légitimité" de JP 2 est implicitement exigée pour être ordonné, et à partir de ce moment, les séminaristes clairvoyants, qui mettent la lumière sous le boisseau pour pouvoir être ordonnés, commencent, selon les cas, à gravement charger leur conscience.

Cela d'autant plus que s'amplifie toujours la mise en avant par Mgr L. des erreurs et écarts de la bonne doctrine par lesquels il tente de justifier sa communion dans la désobéissance, son acceptation du concile hérétique et schismatique dans le sens de la Tradition, sa demande d'insertion dans l'église conciliaire qui n'est pas l'église réelle, etc...


Re: Mise en garde contre de dangereuses exagérations &déviations

Publié : mar. 24 oct. 2017 19:05
par Abbé Zins
Revue Sub Tuum Praesidium, n ̊ 54 - Février/Mars 1998 -


4. L I A I S O N D E S L E C T E U R S


Réponse du 21/1/1993 à une question sur la Fraternité d'Ecône (Suite et fin)


Mais bientôt, il y a beaucoup plus grave pour l'ensemble des séminaristes, dont nous n'aurons connaissance que par une revue allemande début 1987 (cf. STP 7. 42). A savoir la demande expresse, à partir de 1981, d'un serment d'adhésion aux positions de la Fraternité S. Pie X impliquant depuis lors la déclaration expresse de la "légitimité" des autorités conciliaires et des nouveaux rites [cf. STP 48. 25s, et Abbé Celier : L'Eglise déchirée, p.83], bref un embryon des points de l'accord signé le 5/5/1988.

Dès lors, les membres de la Fraternité S. Pie X [dont les fondateurs de "Sodalitium" ayant prêté le fameux serment], publiquement désavoués par ceux qu'ils reconnaissent par serment tenir pour les autorités légitimes, ne pouvaient qu'adhérer aux erreurs mises en avant par Mgr L. pour se justifier ; erreurs dont nous avons montré l'opposition à la doctrine catholique et le caractère hérétique dans la brochure de 1983 et, entre autres, dans le n° 8 et 11 à 14 [de STP].

Par le fait même, leurs ordinations devenaient gravement illicites et fondées sur des conceptions à la fois hérétiques et d'esprit schismatique. Tous ceux qui l'ont été ainsi ont encouru la suspens a divinis réservée au Saint-Siège mentionnée au canon 2372 [et 2374, ainsi que l'excommunication mentionnée par le rituel d'ordination, cités en la brochure de 1983, p. 57 ; cf.a. 36.d), p.31]..

Pour le cas que vous soulevez reste donc à savoir l'année et les conditions de l'ordination de ce prêtre. La relève de cette suspense étant réservée au Saint-Siège, on se trouve donc dans une [demi-] impasse là aussi pour la plupart des cas.

Cela n'enlève pas pour eux le devoir de se rétracter publiquement et de confesser publiquement la Foi, indispensable pour leur salut personnel, et très utile pour tous ceux sur qui ils peuvent avoir de l'influence....

Que le Père éternel fasse triompher la Vérité en nos intelligences et la Charité en nos coeurs....»


Ajoutons, à cette réponse d'il y a 5 ans, qu'en cas de conversion publique véritable, impliquant une rétractation publique de l'adhésion, au moins au for externe, à des hérésies et à une attitude schismatique (can. 2314,1,2 ; 731,2 ; DB 1848), il y aurait une demi-solution d'attente de l'intervention publique de Dieu, moins pour ces clercs repentis eux-mêmes, que pour les fidèles vis-à-vis d'eux en raison des dispositions du canon 2261,2, non valable pour ceux entachés d'hérésie et de schisme, dont le cas relève des canons 2314-2316, et surtout 1258.

Ainsi, le retour à la confession publique de la Foi (comme telle avec ses conséquences et exigences pratiques et non telle une opinion comme une autre à la mode de l'abbé Paladino) et l'abjuration qu'il implique et nécessite, - pour autant qu'on aurait des motifs raisonnables de le tenir pour honnête et sincère, et non le fait d'une démarche hypocrite pour tromper et infiltrer -, entraînerait déjà de soi, en faveur des seuls Catholiques, le passage vis-à-vis d'un tel clerc validement mais illicitement ordonné, de l'impossibilité de communicatio in sacris exposée et prescrite au canon 1258, à la possibilité, non l'obligation, de recourir à cet excommunié (can. 2261,2s) de soi redevenu, au moins au for externe, publiquement Catholique.

Ce qui ne serait point cependant sans de graves risques de tromperie.