Prophétie de Saint Remy

Si vis pacem
Messages : 477
Inscription : mer. 11 oct. 2006 2:00

Re: Prophétie de Saint Remy

Message par Si vis pacem »

Maintenant que nous avons nettoyé la place du bric à brac qui l'encombrait, posons notre regard sur l'essentiel.

1 - Texte tiré de la Vita S. Remigii d'Hincmar, telle que nous la donnent les Bollandistes (les vrais !) dans les Acta sanctorum, Octobris, Tomus I, pp. 145-146 :
57 - […] Die vero passionis Domini, quem Paraseven usus ecclesiasticus vocat, pridie scilicet antequam baptismi gratiam rex et populus ejus percepturi erant, cum sanctus Remigius et venerabilis conjux regis Rothildis pro regis et populi ejus salute in oratione pernoctarent, Episcopus in domo ante altare sanctae Mariae multas effundens lacrimas, et regina in oratorio sancti Petri juxta domum regiam; expleta oratione, Pontifex ad hostium regii cubiculi pulsaturus accessit, ut videlicet per alta silentia noctis aliis curis regi absoluto liberius posset committere sacra mysteria verbi.

58 - Quem hostiis apertis cubicularii regis reverenter suscipiunt, et cum honore debito usque ad penetralia regis introducunt. Sed et rex alacriter ei obviam prosilivit, eumque amplexatus, cum ipso et venerabili conjuge in oratorium beatissimi Apostolorum principis Petri, quod, ut diximus, cubiculo regis contiguum erat, processit. Cumque illi tres, Pontifex scilicet et rex atque regina, dispositis sedilibus consedissent, circumstantibus quibusdam clericis, qui cum Pontifice venerant, et familiaribus regis atque reginae, et sanctus Praesul regem monitis instrueret salutaribus, ac Euangelicis disciplinis imbueret, ad confirmandam verae fidei praedicationem, per sanctum depromptam Pontificem etiam visibiliter ostendere Dominus voluit, quod fidelibus cunctis promisit : {i]Ubi sunt duo vel tres congregati in nomine meo, ibi sum in medio eorum[/i]; repente lux tam copiosa totam replevit ecclesiam, ut claritatem solis evinceret; et cum luce vox pariter audita est dicentis : Pax vobis : ego sum, nolite timere; manete in dilectione mea.

59 - Et post haec verba lux, quae advenerat, recessit, et incredibilis suavitatis odor in eadem domo remansit, ut patenter ostenderetur, illuc Autorem lucis et pacis atque suavitatis venisse, quem nemo eorum, qui aderant, praeter Episcopum, propter fulgorem luminis timore perculsi, intueri valuerunt; tantaque claritatis gloria Pontificem sanctum perfudit, ut splendor ex eo procedens plus conspicuam domum, in qua sedebant, reddiderit, quam lucernarum lumina ibidem lucentia. Rex itaque ac regina pedibus se sancti Sacerdotis prosternunt, et cum magno pavore ac gemitu consolationem ejus requirunt, et quid sibi ad utilitatem atque salutem pertinens esset agendum, cum magna expetunt devotione, parati audire et opere complere, quod a sancto Pontifice discerent.

60 - Nam lumen, quod eos exterius perfudit, etiam interius illuminavit, et ad quaerendum salubre consilium incitavit. Delectabantur namque in verbis illis, quae audierant, licet exterriti essent de luminis claritate. At vero Vir sanctus, sancta repletus sapientia, coepit eos instruere, hanc esse visionis divinae atque angelicae consuetudinem, ut in adventu suo terreant corda mortalium, sed subsequenti consolatione demulceant praecedentem timorem, instruens eos ex auctoritate sanctarum Scripturarum, quomodo singulis, quibus apparuerunt, et in primordio apparitionis incusserint videntibus se timorem, sed post per gratiam consolationis gratissimam eorum cordibus praebuere laetitiae hylaritatem. Cumque jam sanctus Vir eos de talibus sufficienter instruxisset, prophetico repletus spiritu cuncta, quae eis, vel semini eorum, eventura erant, praedixit.

61 - Qualiter scilicet successura eorum posteritas regnum esset nobilissime propagatura atque gubernatura, et sanctam Ecclesiam sublimatura omnique Romana dignitate regnoque potitura, et victorias contra aliarum gentium incursus adeptura, nisi forte a bono degenerantes viam veritatis relinquerent, et diversos vitiorum fuerint secuti anfractus, quibus negligi Ecclesiastica solet disciplina, et quibus Deus offenditur ; ac per hoc regna solent subverti atque de gente in gentem transferri. Quod de Moyse scriptum legimus, quia splendida facta est facies ejus, dum respiceret in eum Dominus, hoc et in beatum Remigium luce splendida illustratum factum fuisse audivimus; quoniam sicut Moyses legislator populo veteri erat a Domino constitutus, ita et beatus Remigius Euangelicae gratiae lator populo in proximo per fontem baptismatis innovando extitit munere Christi electus cc.
2 - Traduction du "Sourcier" (Le grand pape et le grand roi, p 45), reprise par l'abbé Curicque (Voix prophétiques, pp 549-550), par le baron de Novaye (Demain, page 49), par Elie Daniel (Serait-ce vraiment la fin des temps ?, pages 366-367), en partie par le marquis de La Franquerie (Mission divine de la France dans son chapitre sur Le baptistère de Reims), etc... :
« Apprenez, mon fils, dit saint Remi à Clovis, que le royaume de France est prédestiné par Dieu à la défense de l'Église romaine, qui est la seule véritable Église du Christ. Ce royaume sera un jour grand entre tous les royaumes de la terre et il embrassera toutes les limites de l'Empire romain, et soumettra tous les autres royaumes à son sceptre; il durera jusqu'à la fin des temps; il sera victorieux et prospère tant qu'il restera fidèle à la foi romaine et ne commettra pas un de ces crimes qui ruinent les nations ; mais il sera rudement châtié toutes les fois qu'il sera infidèle à sa vocation. »
Cependant, le marquis de La Franquerie se distingue des autres en omettant la partie de phrase suivante :Citation:
... et ne commettra pas un de ces crimes qui ruinent les nations ...
Pourquoi cette omission ?

Heureusement ... Le sourcier nous donne, dans une note, ses sources :
[i]Le grand pape et le grand roi[/i], p. 45 a écrit :Vincent de Beauvais : Speculum historiale (L. XX, C. 49), Gerson dans le Panégyrique de Saint Louis, Godefroi de Viterbe, Aimoin (T. V, C. 21), Hippolyte, évêque sicilien, rapportent cette prophétie. Celui-ci dit que le grand monarque français qui doit soumettre tout l'Orient arrivera vers la fin des temps: plusieurs anciens écrivains byzantins en font aussi mention entre autres Agathias et Chalcondyle.
Pour ceux qui sont intéressés à vérifier les dires du "Sourcier", je me permets de donner ses deux sources les plus rapides à vérifier : (à savoir Vincent de Beauvais et Aimoin ) car pour ma part, j'ai eu beau chercher ... je n'ai pas trouvé ce texte.
Si vis pacem
Messages : 477
Inscription : mer. 11 oct. 2006 2:00

Re: Prophétie de Saint Remy

Message par Si vis pacem »

Tenons-nous en donc à Hincmar, comme nous le laisse entendre Curicque (p. 549) ou Elie Daniel (p. 366).

Alors voici, en comparaison de la traduction proposée plus haut par le "Sourcier & C°", diverses traductions de ce fameux passage de la Vita s. Remigii d'Hincmar :

1 - Traduction de Dom Marlot au XVII° :
Dom Marlot - Histoire de la ville, cité et université de Reims, métropolitaine de la Gaule Belgique, Reims, 1825. Tome II, pp 39-40 a écrit :
Le jour désigné pour la cérémonie s'approchoit, et le saint prélat ayant fait entendre à Clovis que ce temps qui le précède estait destiné par l'Eglise à la pénitence nécessaire à ceux qui veulent se présenter au baptesme, il l'embrassa volontiers, et, pour en tirer plus de fruict, la reine et saint Remy se mirent en oraison, celuy-cy en son autel, et la reine en l'oratoire de Saint-Pierre, près du palais royal.

Le saint prélat, ayant achevé, vint trouver le roy fort matin (1), afin que son esprit, épuré de toutes sortes d'affaires de la journée, fût mieux disposé pour comprendre les secrets de la parole de Dieu. Clovis le reçoit fort humainement, et saint Remy l'ayant exhorté de commencer cette heureuse journée par la prière, ils allèrent de compagnie en la chapelle de Saint-Pierre, où la reine les attendait; et comme ils estaient assis, le roy n'estant accompagné que de ses plus familiers pour entendre les exhortations du saint prélat , Dieu voulut faire voir en leur présence que le zèle de ce grand roy lui agréoit : car voici venir tout-à-coup une lumière très-éclatante, qui parut aux yeux de toute l'assemblée, avec des rayons si brillants qu'à peine les pouvait-on supporter.

Et à mesme temps fut ouye une voix du ciel qui disait : « La paix soit avec vous; ne craignez point, demeurez en mon amitié. » Cette voix cessée, la clarté disparut aussitost, mais elle laissa dans l'église une odeur si agréable, qu'on pouvait connoistre aisément que le père de lumière et de toute douceur s'estait voulu trouver au milieu de cette sainte troupe ; lequel ne put estre envisagé que par saint Remy, à cause de l'excessive clarté qui l'environnait, laquelle laissa beaucoup de frayeur et d'étonnement en l'esprit des assistants.

On remarqua à mesme temps un rayon de lumière sur la face et les habits du saint prélat, si éclatante, qu'elle surmontait la lueur des flambeaux qui luisoient en l'église.

Cette vision toucha vivement l'esprit du roy et de la reine, qui en demeurèrent fort émeus, et se jettèrent aux pieds de saint Remy, qui les releva en leur siége, et les exhorta d'avoir courage ; que les apparitions du ciel étonnaient d'abord nostre foiblesse, mais que, puis après, elles combloient nos coeurs de joie qui surpassoit les contentements du monde ; que c'estoit une touche sensible qui les invitoit d'apporter un religieux respect aux saints mystères de nostre foi.

Puis animé de l'esprit de Dieu, il commença à prédire et à annoncer à Clovis ce qui arriveroit à sa postérité ; avec quelle puissance elle devoit entendre son royaume, deffendre et ennoblir la sainte Eglise, et gouverner un jour l'empire romain ; les victoires que ses enfants devoient remporter contre le peuple ennemy, les royaumes qui seroient sujets à leurs sceptres, et l'éternité de sa monarchie, pourveu qu'ils ne vinssent à quitter le bien et s'égarer dans le labyrinthe des vices, qui seuls font périr les royaumes et transporter les empires de nations à nations.
(i) Les anciens auteurs ne parlent ni de cet entretien ni des prodiges qui l'accompagnent; Hincmar, et après lui Flodoard, sont les seuls qui en font mention. (ÉD.)
2 - Traduction de Darras au XIX° :
Darras - Histoire de l'Eglise, tome XIV, pp. 33-34 a écrit :
« [57] […] Dans la soirée qui précéda la cérémonie du baptême, dit Hincmar, le saint et vénérable Remi passa quelques heures en prières devant l'autel de l'église de Sainte-Marie, pendant que la reine Clotilde priait elle-même dans l'oratoire de Saint-Pierre, à proximité de la demeure royale. Après son oraison, le pontife se rendit près du roi, voulant profiter du silence de la nuit pour donner ses dernières instructions au néophyte couronné. [58] Les cubicularii (chambellans) lui ouvrirent les portes et l'introduisirent près de leur maître. Clovis s'avança à sa rencontre, l'embrassa et le conduisit près de la reine, dans l'oratoire du très bienheureux Pierre, prince des apôtres. On disposa des sièges pour le roi, la reine, les clercs qui avaient accompagné le pontife et un certain nombre de serviteurs du palais, seuls témoins de cette scène imposante.

Remi, dans une allocution paternelle, résuma pour la dernière fois les instructions évangéliques des jours précédents. Pendant qu'il parlait, une lumière céleste éclata soudain dans l'église, effaçant la lueur des cierges allumés, et une voix se fit entendre qui disait : La paix soit avec vous. C'est moi, ne craignez point ; persévérez dans mon amour.

[59] Après ces paroles, la lumière surnaturelle disparut et un parfum d'une suavité céleste se répandit dans l'enceinte. Le roi et la reine se précipitèrent aux genoux du saint pontife, en versant des larmes d'émotion et de joie. L'homme de Dieu, illuminé lui-même par l'esprit prophétique, leur tint ce langage :

[61] Votre postérité gouvernera noblement ce royaume ; elle glorifiera la sainte Eglise et héritera de l'empire des Romains. Elle ne cessera de prospérer, tant qu'elle suivra la voie de la vérité et de la vertu. Mais la décadence viendra par l'invasion des vices et des mauvaises moeurs. C'est là, en effet, ce qui précipite la ruine des royaumes et des nations.

En parlant ainsi, le visage de l'évêque resplendissait de gloire, comme autrefois celui de Moïse. Le législateur évangélique des Francs avait une auréole semblable à celle du chef des Hébreux (1).»
La prière de saint Remi à l'autel de Marie, la veille du baptême des Francs, est restée dans la mémoire nationale, et s'est traduite par l'adage chevaleresque et chrétien : Regnum Galliae, regnum Mariae.

La prophétie de l'évêque de Reims au berceau de la monarchie française s'est également réalisée au pied de la lettre, Plus la France s'écartera des voies de la vérité et de la vertu, plus elle précipitera sa propre ruine.

(1) - Hincmar., Vit. S. Remig., cap. XXXVII; Patr. lat., tom. CXXV, col. 1158-1160
3 - Voici celle de Michel Sot :
Actes du Colloque international d'histoire de Reims - Clovis, histoire & mémoire, Paris 1997, Tome II, pp. 165-167 a écrit :
... Le jour de la passion du Seigneur, que l'usage ecclésiastique désigne comme veille du Sabbat, c'est-à-dire le jour avant que le roi et le peuple ne reçoivent la grâce du baptême, saint Remi et Clotilde, la vénérable épouse du roi, passaient la nuit en prière pour le salut du roi et de son peuple, l'évêque, dans sa demeure, versant d'abondantes larmes devant l'autel de sainte Marie, et la reine dans l'oratoire Saint-Pierre proche de la demeure royale. Leur prière étant achevée, le pontife alla frapper à la porte de la chambre royale, pour que le roi, libéré des autres soucis par le profond silence de la nuit, puisse plus librement lui transmettre les mystères sacrés de la Parole. Il est reçu avec révérence par les chambriers du roi qui avaient ouvert les portes et l'introduisent, avec l'honneur qui lui est dû, jusqu'aux appartements privés du roi. Mais le roi se précipita joyeusement à sa rencontre et, l'ayant embrassé, se rendit avec lui et sa vénérable épouse à l'oratoire du bienheureux Pierre, prince des apôtres, qui, nous l'avons dit, était contigu à la chambre du roi. Tandis que tous trois, à savoir le pontife, le roi et la reine, étaient assis ensemble sur des sièges que l'on avait disposés et qu'autour d'eux se tenaient des clercs venus avec le pontife et des familiers du roi et de la reine, et tandis que le saint prélat instruisait le roi de conseils salutaires, lui inculquant les principes évangéliques, le Seigneur voulut, pour confirmer l'enseignement de la vraie foi dispensé par le saint pontife, rendre sensible à la vue ce qu'il a promis à tous les fidèles : « Là où sont réunis deux ou trois en mon nom, je suis au milieu d'eux (Mat. 18, 20) ». En un instant, l'église entière fut emplie d'une lumière si vive qu'elle éclipsait la clarté du soleil et, avec la lumière, une voix se fit simultanément entendre qui disait : « La paix soit avec vous; c'est moi, ne craignez pas (Luc, 24,36). Demeurez dans mon amour (Joh. 15,9) ». Et après ces mots, la lumière qui avait tout envahi se retira et un parfum d'une incroyable douceur flottait dans la maison pour qu'il soit démontré à l'évidence que là était venu l'Auteur de la lumière, de la paix et de la douceur, Lui qu'aucun de ceux qui étaient là, à part l'évêque, n'eut la force de regarder, frappés qu'ils étaient de terreur par l'éclat de la lumière. Une glorieuse clarté recouvrit le saint pontife au point que le rayonnement qui émanait de lui éclairait la maison dans laquelle ils se tenaient plus que la lumière des luminaires qui brillaient là. C'est pourquoi le roi et la reine se prosternent aux pieds du saint prêtre et implorent, terrorisés et gémissant, sa consolation. Ils demandent, avec une grande humilité, ce qu'ils devaient faire qui soit utile à leur salut, prêts à écouter et à exécuter ce qu'ils apprendraient du saint pontife. Car la lumière, qui les recouvrit de l'extérieur, les illumina aussi de l'intérieur et les poussa à demander conseil pour leur salut. Ils se délectaient en effet des paroles qu'ils avaient entendues, bien qu'ils fussent terrorisés par l'éclat de la lumière.

Mais le saint homme, rempli de sainte sagesse, se mit à leur expliquer qu'il était habituel que la vision divine ou angélique terrifie le coeur des mortels au moment où elle se produit mais qu'ensuite elle métamorphose la peur en consolation. Il leur expliqua, d'après l'autorité des Saintes Écritures, comment des visions étaient apparues à certains et comment, au début de l'apparition, elles avaient frappé les voyants de terreur, mais aussi comment ensuite, par la grâce infinie de la consolation, elles avaient comblé de joie leurs coeurs.

Lorsque le saint homme les eut suffisamment instruits sur ce point, rempli d'esprit prophétique, il prédit tout ce qui devait arriver à eux et à leurs descendants : c'est-à-dire comment leur postérité étendrait et gouvernerait très noblement le royaume, élèverait la sainte Eglise, se rendrait maître de toute la dignité et de tout le royaume de Rome, remporterait des victoires contre les attaques des autres peuples, pourvu seulement que, s'écartant du bien, elle n'abandonne pas le chemin de la vérité et qu'elle ne s'engage pas dans les nombreux méandres des vices par lesquels la discipline ecclésiastique est habituellement négligée et Dieu offensé : car c'est pour cette raison que les royaumes sont habituellement renversés et transférés d'une famille à une autre. Ce que nous lisons à propos de Moïse, à savoir que sa face est devenue resplendissante pendant que Dieu le regardait, nous l'avons entendu dire à propos de saint Remi, qui a été illuminé d'une resplendissante lumière parce que, de même que Moïse avait été institué par le Seigneur législateur du peuple ancien, de même saint Remi, porteur de la grâce évangélique pour le peuple nouveau en le renouvelant par l'eau du baptême, se distingua par la charge d'élu du Christ.
Par ce récit prophétique, dont nous ne connaissons pas la source, Hincmar enrichit considérablement l'imaginaire du baptême de Clovis et lie l'avenir de la famille royale à la tête de la monarchie franque à l'intervention de Dieu. Après que Dieu se fut manifesté de façon sensible, et sous son inspiration, Remy, qu'Hincmar compare à Moïse, a tracé l'avenir de la dynastie et défini le ministère royal. Le roi qui s'écarte du bien et de la vérité en s'engageant dans les méandres du vice, n'est plus digne de la royauté.

Nous noterons ici la sobriété de la traduction de dom Marlot, la désillusion de celle de Darras qui, à l'extrême opposé des partisans du grand monarque, ne semble se faire guère d'illusion quant à l'avenir de la France, et la traduction quasi littérale de Michel Sot.

Dans tous les cas, nous apercevons une différence essentielle de traduction entre ces trois auteurs et l'école du sourcier. Serions-nous donc en présence d'une autre supercherie ?
Si vis pacem
Messages : 477
Inscription : mer. 11 oct. 2006 2:00

Re: Prophétie de Saint Remy

Message par Si vis pacem »

Mais peut-être me trompè-je ? Après toutes ces confusions ... Le texte cité par le "Sourcier & Co" serait celui de l'Historiae Ecclesiae Remensis de Flodoard, ainsi que nous le laisse entendre le marquis dans une de ses notes (cf http://www.micael.byethost7.com/viewtop ... &t=81#p420)...


Alors voilà :
[quote="Patrologie Latine - Flodoard dans son "Historiae Ecclesiae Remensis", lib. I, cap. 13, col. 51-52 "]Die vero Passionis Dominicae, pridie scilicet antequam baptismi gratiam percepturi erant, post hymnos, precesque nocturnas, praesul regium cubile petiit, ut absoluto curis saecularibus rege, liberius ei committere sacra valeret mysteria verbi. Quo reverenter a cubilariis admisso, rex prosiliens obvius alacriter occurit, et oratorium beatissimi apostolorum principis Petri, cubiculo regis forte contiguum, pariter ingrediuntur. Cumque dispositis sedilibus, pontifex, rex atque regina consedissent, intromissis quibusdam clericis, sed et aliquibus regi necessariis ac domesticis, et venerabilis Pater regem monitis imbueret salutaribus, ad corroborandam salutiferam fidelis servi sui doctrinam, Dominus etiam visibililer dignatus est ostendere, sese fidelibus in nomine suo congregatis, ut promiserat, semper adesse (Matth. XVIII, 20). Repente namque lux tam copiosa totam replevit ecclesiam, ut solis videretur evincere claritatem. Mox cum luce vox facta est, inquiens : Pax vobis, ego sum, nolite timere (Luc. XXIV, 36). Manete in dilectione mea (Joan. XV, 9). Post quae verba lux quae advenerat, abcessit, sed ineffabilis odor suavitatis in eadem domo remansit. Ut evidenter valeret agnosci lucis, pacis atque piae dulcedinis illuc auctorem advenisse, beatus etiam praesul ex eodem lumine, non modicum visus est vultus fulgurem traxisse. Rex igitur atque regina pedibus almi sacerdotis adstrati, cum magno pavore ipsius requirunt consolationem audire, opere adimplere parati quae propalarentur ore patroni. Delectabantur etenim verbis quae audierant, interius illuminati, quam viderant, luce, licet exteriore territi luminis claritate. Sanctus autem Pater supernae repletus splendore sapientiae de coelestis eos instruit visionis consuetudine, quae adventu quidem suo corda mortalium terret, sed timorem praecedentem subsequenti consolatione demulcet, ut quibus apparuit patribus, primum quidem pavorem incusserit, at postea per pietatis gratiam laetitiae blandimenta refuderit. Irradiatus quoque vir beatissimus Remigius, ut exterius, veteris exemplo legislatoris, vultus illustratione, ita, multoque magis, interius, divini fulgoris spiritu prophetico, quae ipsis, vel corum forent eventura prosapiae, traditur praedixisse. Quomodo videlicet eorum posteritas regnum nobiliter esset propagatura, Ecclesiam quoque Christi sublimatura, Romanaque dignitate vel regno potitura, et victorias contra impetus aliarum gentium perceptura, si non a bono degenerantes, salutis viam forte relinquerent, et quibus Deus offenditur scelera consectari, pestiferorum vitiorum laqueos incurrerent, quibus regna subverti, atque de gente solent in gentem transferri ( Eccli. X, 8 ).
[/quote]

Je vous livre, à la suite, la traduction telle que Guizot la fit paraître dans sa Collection des mémoires relatifs à l'histoire de France depuis la fondation de la monarchie française jusqu'au XIII° siècle :
Flodoard - Histoire de l'Église de Rheims, Reims, pp. 43-45 a écrit :Le jour de la passion de notre Seigneur, c'est-à-dire la veille du jour où ils devaient être baptisés, après avoir chanté nocturnes, l'évêque alla trouver le roi dès le matin dans sa chambre à coucher, afin que, le prenant dégagé de tous les soins du siècle, il pût lui communiquer plus librement les mystères de la parole sainte. Les gens de la chambre du roi le reçoivent avec grand respect, et le roi lui -même accourt et vient au-devant de lui. Ensuite ils passent ensemble dans un oratoire consacré au bienheureux saint Pierre, prince des apôtres, et attenant à l'appartement du roi. Quand l'évêque, le roi et la reine eurent pris place sur les siégés qu'on leur avait préparés, et qu'on eut admis quelques clercs, et aussi quelques amis et domestiques du roi, le vénérable évêque commença ses salutaires instructions. Pendant qu'il prêchait la parole de vie, le Seigneur, pour fortifier et confirmer, les saints enseignements de son fidèle serviteur, daigna manifester d'une manière visible que, selon sa promesse, quand ses fidèles sont rassemblés en son nom, il est toujours avec eux; la chapelle fut tout-à-coup remplie d'une lumière si brillante qu'elle effaçait l'éclat du soleil, et du milieu de cette lumière sortit une voix qui disait : « La paix soit avec vous, c'est moi, ne craignez point, et demeurez en mon amour. » Après ces paroles la lumière disparut, mais il resta dans la chapelle une odeur d'une suavité ineffable; afin qu'il pût être évident à tous que l'auteur de toute lumière, de toute paix et de toute piété, était descendu en ce lieu, le visage du saint prélat avait aussi été illuminé de cette merveilleuse lumière. Prosternés à ses pieds, le roi et la reine demandaient avec grande crainte d'entendre de lui des paroles de consolation, prêts à accomplir tout ce que leur saint protecteur leur commanderait, et en même temps ils étaient charmés de ce qu'ils avaient entendu, et éclairés à l'intérieur, quoique effrayés de l'éclat extérieur de la lumière qui leur était apparue. Le saint évêque, inspiré de la sagesse divine, les instruisit des ordinaires effets des visions célestes; comment à leur ap­parition elles effraient le coeur des mortels, mais bientôt le remplissent d'une douce consolation ; comment aussi les pères qui en avaient été visités avaient toujours à l'abord été frappés de terreur, mais ensuite pénétrés des douceurs d'une sainte joie par les merveilles de la grâce. Resplendissant à l'extérieur, comme l'ancien législateur Moïse, par l'éclat de son visage , mais plus encore à l'intérieur, par l'éclat de la lumière divine , le bienheureux prélat, transporté d'un esprit prophétique, leur prédit ce qui devait arriver à eux et à leur postérité : il annonce que leurs descendants reculeront les limites du royaume, élèveront l'Église de Jésus-Christ, succéderont à l'empire romain et à sa domination, et triompheront des nations étrangères, pourvu que, ne dégénérant pas de la vertu, ils ne s'écartent jamais des voies de salut , ne s'engagent pas dans la route du péché , et ne se laissent pas tomber dans les piéges de ces vices mortels, qui renversent les empires et transportent la domination d'une nation à l'autre.
Et non ... Là non plus, nous ne trouvons pas de similitude entre cette traduction et celle du "sourcier" ...

Pourquoi, alors, cette différence entre les auteurs ci-dessus et l'école du grand monarque ?

On se demande, par exemple, de quelle partie du texte est tirée cette traduction :
[i]Le grand pape et le grand monarque[/i], p. 45 a écrit : ... mais il sera rudement châtié toutes les fois qu'il sera infidèle à sa VOCATION.
Et surtout celle-là :
[i]Le grand pape et le grand monarque[/i], p. 45 a écrit :... il durera jusqu'à la fin des temps ...
A l'inverse, où est la traduction de ce passage :
Hincmar a écrit :... viam veritatis relinquerent, et diversos vitiorum fuerint secuti anfractus, quibus negligi Ecclesiastica solet disciplina, et quibus Deus offenditur; ac per hoc regna solent subverti atque de gente in gentem transferri.
ou de celui-ci :
Flodoard a écrit :... salutis viam forte relinquerent, et quibus Deus offenditur scelera consectari, pestiferorum vitiorum laqueos incurrerent, quibus regna subverti, atque de gente solent in gentem transferri.

Nous pouvons, donc, sérieusement nous poser la question de savoir pourquoi cette différence de traduction entre les tenants d'une pseudo-prophétie de Saint Remy et l'histoire telle que rapportée par Hincmar ou Flodoard ?

Ne serait-ce pas tout simplement parce que ce texte n'est prophétie que pour certains qui, n'osant voir la réalité en face, cherche à faire croire à des lendemains qui chantent.
Si vis pacem
Messages : 477
Inscription : mer. 11 oct. 2006 2:00

Re: Prophétie de Saint Remy

Message par Si vis pacem »

Cette prophétie n'est, à tout bien considérer, qu'une pseudo-prophétie !

- Pseudo-prophétie parce que forgée de toute pièce en amalgamant deux textes étrangers l'un à l'autre.

- Pseudo-prophétie parce que forgée sur une traduction faussée afin de lui donner un sens eschatologique temporairement consolant. L'exemple typique nous en ai donné par le marquis qui n'hésite pas à supprimer purement et simplement un bout du texte parce que trop tristement réel, et dans l'ajout par cette école d'une factice durée perpétuelle !

- Pseudo-prophétie parce qu'il n'y a qu'à (re)lire ce passage tiré du premier livre des Paralipomènes :
I Paralipomène, XXVIII, 7-8 a écrit : 7 - Et firmabo regnum ejus usque in aeternum, si perseveraverit facere praecepta mea et judicia, sicut et hodie.
8 - Nunc ergo coram universo coetu Israel audiente Deo nostro custodite et perquirite cuncta mandata Domini Dei nostri, ut possideatis terram bonam et relinquatis eam filiis vestris post vos usque in sempiternum

7 - Et j'affermirai son règne à jamais, pourvu qu'il persévère dans l'observance de mes préceptes et de mes jugements, comme il le fait présentement.

8 - Je vous conjure donc maintenant en présence de toute l'assemblée du peuple d'Israël, et devant notre Dieu qui nous entend, de garder avec exactitudes tous les commandements du Seigneur, notre Dieu, et de rechercher à les connaître, afin que vous possédiez cette terre qui est remplie de bien, et que vous la laissiez pour jamais à vos enfants après vous.
Ou cet autre passage tiré, quant à lui, de l'Écclésiastique :
Ecclésiastique, X - 8 a écrit : - Regnum a gente in gentem transfertur propter injustitias, et injurias, et contumelias, et diversos dolos.

- Un royaume est transféré d'un peuple à un autre à cause des injustices, des violences, des outrages et des différentes tromperies qui s'y commettent.
pour s'apercevoir que si prophétie il y a, elle n'est pas de saint Remy, elle est de nul autre que de Dieu lui-même ! Mais dans ce cas, est-ce vraiment une prophétie ? Ne serait-ce pas plutôt une loi divine ?


Alors ?

Alors que Jérusalem, la patrie de Notre Seigneur, sur laquelle il a pleuré, n'a pas échappé à cette loi divine, la France, en vertu d'une volonté humaine aurait ce privilège ?

Privilège en quel honneur ?

Et voyant ce qu'elle est devenue aujourd'hui ... Privilège jusqu'à quel point ?

Celui-ci :
[i]Le grand pape et le grand monarque[/i], p. 45 a écrit :... il durera jusqu'à la fin des temps ...
D'où sort ce rajout ? Qui peut se permettre de se moquer ainsi de la justice divine ?

Non, je tiens à le dire : De Dieu, on ne se moque point !

Et la chute des nations anciennement chrétiennes est là pour nous le rappeler.

Cela nous amène, tout naturellement, à faire la corrélation avec un autre texte que nous propose dom Mabillon :
Mabillon - Acta sanctorum ordinis S. Benedicti. Paris, 1668, pp. 100-101 a écrit : Vita S. Chrotildis reginae Francorum
Ex MS. cod. S. Germani Pratensis

7 - Eo tempore magnus Sacerdos et Pontifex REMIGIUS Cathedram Remensis Ecclesiae regebat strenue. Hunc Regina accersivit, deprecans ut ostenderet Regi viam salutis. Tunc Pontifex ante Regem venit, quem honorifice suscepit et ait : Audiam te libenter, beatissime Pater, et quod jusseris exequar obedienter. B. Remigius respondens dixit ad Regem : Est Deus in coelo Rex Regum et Dominus Dominorum, ipse enim dixit ; Per me Reges regnant. In quem si credere volueris, et sacro baptismate ablutus fueris, omnium peccatorum tuorum remissionem habebis, omnes inimicos tuos superabis, et in futuro saeculo cum eo sine fine regnabis.
Audiens Rex Flodoveus haec verba sancti Praesulis Remigii, obortis lacrymis dixit : Deum credo, baptizari desidero, per eum vivere et in eo mori cupio.

Orat sancta Regina Chrothildis indesinenter Deum, expetit suppliciter ut eripiat Regem cum populo a laqueo diabolico, et ut purgetur baptismate sacro, operante in eo Spiritu Sancto. Ornat praeterea ecclesiam cortinis et palliis et ceteris ecclesiasticis ornamentis. Venit novus Constantinus ad baptismum, praecedente B. Remigio, subsequente beata Chrothilde, haec omnia Spiritu sancto typice operante. Erat enim congruum ut veniente Rege Pagano ad baptismum praecederet S. Remigius vice Christi Iesu, et subsequeretur sancta Regina Chrothildis vice Ecclesiae Deum interpellantis. Consecrat Sanctus Praesul fontem ; Rex indumentis corporalibus exuitur, et a praedicto Praesule baptizatur.

Cumque chrisma defuisset, Dei nutu in specie Columba venit Spiritus sanctus portans duas ampullas (1) oleo et chrismate plenas, quas B. Remigius devote suscepit, Regemque more ecclesiastico perunxit, vocavitque eum LUCDOVICUM, quasi laudabilem virum. Felix Gallia, laetare et exulta, gratulare in Domino, delectare in Deo vero : tuus enim Rex primus a coelesti Rege electus, precibus sanctae Chrothildis Ecclesiae typum gerentis a cultu daemonum avulsus, praedicatione B. Remigii ad Deum conversus, et ab eo baptizatus, chrismate coelesti per Spiritum Sanctum adlato carne est delibutus, a Divino amore corde spiritaliter perunctus. Coepit ergo Rex consilio beatae Chrothildis fana destruere, ecclesias aedificare, easque terris et muneribus copiose ditare, pauperibus eleemosynam largiter erogare, viduis et orphanis misericorditer subvenire, cunctisque bonis operibus sedule et devote insistere. Peperit ergo beata Chrothildis filium, cui in sacro baptismate nomen imposuit, eumque LOTHARIUM vocavit.

8 - Post haec Rex Lucdovicus, qui et Flodoveus, veniens in civitatem Parisius ait ad Reginam suam sanctam Chrothildem : Incongruum est et indecens, quod Gothi Ariani optimam partem Galliae tenent : cum Dei auxilio eamus, eosque de ipsa terra ejiciamus. Placuit hoc consilium Reginae, universisque proceribus Galliae. Tunc beata Chrothildis ad Regem dixit : Si vis, Domine Rex, regnum tuum terrenum dilatare, et in coelesti regno cum Christo regnare, fac in hoc loco ecclesiam in S. Petri Principis Apostolorum honore, ut eo auxiliante valeas tibi Arianam gentem subjugare, et eo praeduce cum victoria redire.

Placuit consilium Regi quod Regina dedit. Tunc cum exercitu magno Rex perrexit, Regina Parisius remansit, ecclesiamque sanctorum Apostolorum aedificavit. Reversusque victoria adepta regnum Francorum strenue rexit, monasteria plurima aedificavit, et sicut a sancto Remigio et a beata Chrothilde didicerat, vitam religiosam usque ad mortem deduxit. Post haec vero mortuus est Rex Lucdovicus in pace anno quinto (2) postquam cum ALARICO Rege Gothorum pugnavit ; regnavit quoque simul annis triginta, et sepultus est in Basilica S. Petri Apostoli quam ipse vel Regina aedificaverant. A transitu S. Martini usque ad transitum Lucdovici Regis fuerunt anni centum duodecim.

(1) - Nullus antehac, opinor, meminit duarum ampullarum. Nam Hincmarus, quo antiquiorem hujus miraculi scriptorem non habemus, testatur in vita sancti Remigii Columbam attulisse ampullam chrismate sancto plenam.
(2) - Hunc calculum istius vitae scriptor mutuatus est ex Gregorio Turon. in libri 2. Hist. cap. 43. de quo calculo, praecipue a transitu S. Martini, non leuis difficultas. Chlodoueum anno Christi D. XI. obijsse, receptior hodie sententia est.

Texte dont voici la traduction :
Vie de Sainte Clotilde, reine des Francs
tirée d'un manuscrit de l'abbaye de Saint Germain des Près

7 - En ce temps là, le grand Prêtre et Pontife Rémi régissait avec diligence la Chaire du diocèse de Reims. C'est à lui que la Reine s'adressa, en le priant de montrer au Roi la voie du salut. Alors le Pontife vint devant le Roi, qui le reçut avec honneur et lui dit : Je vous écouterai volontiers, bienheureux Père, et je suivrai avec obéissance ce que vous commanderez. Répondant au Roi, le B. Rémi déclara : Dieu est dans le ciel le Roi des Rois et le Seigneur des Seigneurs, et c'est Lui-même qui a affirmé : "C'est par Moi que règnent les Rois.". Si vous voulez croire en Lui et être purifié par le saint baptême, vous obtiendrez la rémission de tous vos péchés, vous surpasserez tous vos ennemis, et vous règnerez avec Lui sans fin dans le siècle futur.
En entendant ces paroles du Saint Evêque Rémi, le Roi Clovis dit en versant des larmes : Je crois en Dieu, je désire être baptisé, j'espère vivre par Lui et mourir en Lui.

La Sainte Reine Clotilde pria incessamment Dieu, L'implora avec supplications de délivrer le Roi avec son peuple des filets du diable, et pour qu'il soit purifié par le saint baptême, par l'oeuvre du Saint-Esprit en lui. En outre, elle orna l'église de voiles, tissus et autres ornements ecclésiastiques. Le nouveau Constantin vint au Baptême, précédé du B. Rémi et suivi de la bienheureuse Clotilde, tout cela étant typiquement opéré par l'Esprit-Saint. Il était en effet convenable que le Roi venant du paganisme soit précédé de S. Rémi comme vicaire du Christ-Jésus, et suivie de la sainte Reine Clotilde comme représentant l'Eglise interpellant Dieu. Le Saint Evêque consacra la fontaine ; le Roi se dépouilla de ses vêtements corporels, et fut baptisé par le susdit Evêque.

Mais comme le chrême fit défaut, sur l'indication de Dieu le Saint-Esprit vint sous la forme d'une Colombe portant deux ampoules (1) remplies d'huile et de chrême, que le B. Rémi reçut avec dévotion et il oignit selon l'usage ecclésiastique le Roi, le nomma LOUIS, comme pour exprimer homme louable. Heureuse Gaule, réjouis-toi et exulte, remercie le Seigneur, délecte-toi dans le vrai Dieu : car ton Roi a été le premier à être élu par le Roi céleste, détourné du culte des démons grâce aux prières de Sainte Clotilde remplissant la figure de l'Eglise, converti à Dieu (retourné vers Dieu) par la prédication du B. Rémi et baptisé par lui, oint en sa chair par un chrème céleste apporté par le Saint-Esprit, entièrement enduit spirituellement en son coeur par le Divin Amour. Sur le conseil de la bienheureuse Clotilde, le Roi commença donc à détruire ce qui était voué aux idoles, à édifier des églises, à les enrichir copieusement de terres et de revenus, à donner avec largesse l'aumône aux pauvres, à subvenir miséricordieusement aux veuves et orphelins, à s'appliquer avec zèle et dévotion à toutes les bonnes oeuvres. Ainsi, la bienheureuse Clotilde mit au monde un fils, auquel on imposa le nom lors du saint Baptême et qui fut appelé Lothaire.

8 - Après cela le Roi Louis, qui est Clovis, venant en la ville de Paris dit à sa Reine Sainte Clotilde : Il ne convient pas et il est indécent que les Goths ariens tiennent une grande partie de la Gaule ; allons, avec le secours de Dieu et chassons-les de la terre elle-même. Cet avis plut à la Reine et à tous les grands de la Gaule. Alors la Reine Clotilde dit au Roi : Si vous voulez, Seigneur Roi, dilater (étendre) votre royaume terrestre, et régner avec le Christ dans le Royaume céleste, faites bâtir en ce lieu une église en l'honneur de S. Pierre le Prince des Apôtres, afin qu'avec son aide vous puissiez subjuguer (vaincre) la nation arienne et sous sa conduite rentrer victorieux.

Ce conseil donné par la Reine plut au Roi. Puis, avec une grande armée le Roi s'en fut, tandis que la Reine demeura à Paris, et édifia l'église des saints Apôtres. De retour, une fois remportée la victoire, il gouverna le royaume des Francs avec ardeur, édifia de multiples monastères, et comme il l'avait appris de saint Rémi et de la bienheureuse Clotilde, il mena une vie religieuse jusqu'à sa mort. Le Roi Louis mourut donc après cela en paix cinq ans après (2)) qu'il est combattu le Roi des Goths Alaric ; il a régné en tout trente ans, et fut enseveli dans la Basilique de l'Apôtre S. Pierre que lui-même et la Reine avaient édifiée. Du trépas de S. Martin à celui du Roi Louis s'écoulèrent cent douze ans.

(1) Il me semble que nul, avant ce document, ne mentionne deux ampoules. Car Hincmar atteste en la vie de saint Rémi, alors que nous n'avons pas de relation écrite plus ancienne de ce miracle, qu' "une Colombe apporta une ampoule pleine de saint-chrème".
(2)) - Ce calcul de sa vie est emprunté à (Saint) Grégoire de Tours en son livre 2 ch. 43 de son Histoire des Francs, dont le calcul, surtout depuis le trépas de S. Martin, n'aplanit pas les difficultés. La sentence la plus reçue aujourd'hui est que Clovis est mort en l'an du Christ 511.

Nous voyons ici une version personnalisée (basée sur la même vérité divine) de la promesse faite à Clovis par saint Remy.

Ne touche-t-on pas, en fait, à l'authentique prédication de S. Rémi ? Promettant, à qui reste fidèle, la protection et bénédiction divine, et le Royaume éternel du Ciel.

N'y a-t-il pas eu chez le sourcier et ses suiveurs transposition du sens évangélique et spirituel en un sens rabbinisant de messianisme temporel et désiré perpétuel ?
Répondre

Revenir à « Tribune de réponses publiques »

Qui est en ligne ?

Utilisateurs parcourant ce forum : Aucun utilisateur inscrit et 1 invité