DE LA DESCENTE DU SAINT-ESPRIT, OU DE L'AMOUR DE DIEU, méditation du R.P. Bourdaloue

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DE LA DESCENTE DU SAINT-ESPRIT, OU DE L'AMOUR DE DIEU, méditation du R.P. Bourdaloue

Message par InHocSignoVinces »

DE LA DESCENTE DU SAINT-ESPRIT, OU DE L'AMOUR DE DIEU

Méditation du R.P. Bourdaloue


Charitas Dei diffusa est in cordibus nostris per Spiritum
Sanctum, qui datus est nobis.

La charité de Dieu s'est répandue dans nos coeurs par le
Saint-Esprit, qui nous a été donné.
Rom. chap. 5.


PREMIER POINT.

Toutes les créatures nous annonçaient les perfections
de Dieu ; et toutes les créatures étoient à notre égard
autant de bienfaits de Dieu, dont nous étions, comme
nous le sommes encore, redevables à sa providence, et
dont il ne cessoit point de nous combler. Ainsi elles
nous excitoient toutes à l'amour de Dieu. Mais, après
tout, cette voix des créatures ne touchoit point encore
assez nos coeurs, et rien, à ce qu'il semble, n'étoit capable
de les émouvoir et de les engager.
Quel est donc
le moyen le plus excellent que Dieu a pris pour inspirer
aux hommes son amour ?
C'a été de nous envoyer le
Saint-Esprit, qui est lui-même personnellement et
substantiellement l'amour de Dieu.
Aussi, comment
est-ce que descendit ce divin Esprit ?
en forme
de feu ; pour nous donner à connoître qu'il étoit
tout amour par son ardeur, et qu'il venoit embraser
de cette même ardeur toutes les âmes.



Or, ce n'est pas cette fois seulement qu'il s'est
communiqué sur la terre.
Il s'y communique tous les
jours, et il y a même des temps particuliers où il se
fait sentir, et où ce feu céleste agit dans une âme avec
plus de force.
Tel est le temps de la retraite. Ce fut à
la fin de la retraite que firent les apôtres dans le
cénacle, que cet Esprit d'amour leur fut envoyé ; et si
je me suis bien acquitté de celle que je viens de faire,
j'ai lieu de penser que je l'ai reçu tout de nouveau.

Mais en veux-je un témoignage solide ? Je le connoîtrai
par mon amour pour Dieu : car recevoir le Saint-Esprit
et aimer Dieu, c'est une même chose ;
et il faut que
j'aime Dieu à mesure que j'aurai reçu l'Esprit de Dieu.



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Message par InHocSignoVinces »

Que dis-je, et pourquoi parler de mesure où il n'y
en doit point avoir ? C'est sans mesure que Dieu
nous donne son Esprit ; c'est donc sans mesure que
nous devons aimer Dieu.
Non, mon Dieu, point de
bornes dans mon amour pour vous, puisqu'il n'y en a
point dans tout ce qui vous rend si aimable pour moi.
Vous êtes un Dieu infini ; ma charité doit donc être, en
sa manière, une charité infinie. Quelque étendue qu'elle
puisse avoir, elle n'ira jamais au delà de ce que vous
méritez ; et c'est ce que votre Esprit, si j'en suis animé,
me représente continuellement au fond de mon âme.
Il me retrace toutes vos grandeurs, toutes vos vertus,
toutes vos perfections ; et de là il me fait bientôt conclure
qu'à quelque degré d'amour que je me porte, je
ne puis excéder en vous aimant.
Dans tout le reste il
peut y avoir de l'excès. Je puis user dans les rencontres
de trop de circonspection et de prudence, je puis
prendre garde aux choses avec trop d'attention et
trop de vigilance, je puis même aller trop loin dans la
pratique de la mortification et de la pénitence ;
mais
je ne puis trop, Seigneur, vous aimer.
Sur ce point
l'Esprit de charité est insatiable, et ne dit jamais, c'est
assez.



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Message par InHocSignoVinces »

Hélas ! je ne le dis, moi, que trop et qu'en trop
d'occasions. Au moindre acte d'amour que je forme
ou que je crois former pour Dieu dans un bon moment
où le Saint-Esprit me fait goûter l'attrait de sa grâce
et la douceur de sa divine onction, je m'imagine déjà
être ravi au troisième Ciel, et avoir marqué à Dieu
l'attachement le plus parfait.
Mais cette étincelle n'est
pas longtemps à s'éteindre. Ah ! un coeur perd-il si
aisément le souvenir de ce qu'il aime, et y pense-t-il si
rarement ? Tout homme sur cela est inexcusable ;
mais, entre tous les autres hommes, un religieux est
sur cela même encore plus coupable :
car, dans la
religion, il y a beaucoup moins d'objets qui me détournent
de Dieu; et m'étant séparé du monde, que me
reste-t-il autre chose que Dieu ? Heureux partage que
je ne puis assez estimer !
Si je n'en suis pas content,
que faut-il pour me satisfaire, et que trouverai-je qui
puisse me contenter (1)? Bien avare est une âme à
qui Dieu ne suffit pas !
mais en même temps, bien
malheureuse et bien criminelle est cette âme qui n'a
que Dieu et qui ne s'attache pas à Dieu !



(1) Aug.

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Message par InHocSignoVinces »

SECOND POINT.


C'est dans le coeur que l'Esprit d'amour vient
d'abord se répandre :
c'est là qu'il établit sa demeure,
et là même aussi qu'il commence à faire sentir ses
plus merveilleuses opérations, car l'amour, avant
toutes choses, consiste dans l'affection. Que n'inspiret-
il point à l'âme ? de quoi ne la dégage-t-il point ? á
quoi ne l'élève-t-il point ?
On le vit dans les apôtres.
Le premier effet de la descente du Saint-Esprit sur
eux, fut de purifier leurs coeurs; de sorte qu'il n'y
resta plus la moindre attache qui ne vînt immédiatement
de Dieu, et qui ne les portât directement et
uniquement à Dieu; car ils comprirent dès lors ce qu'a
dit depuis un grand saint:
Qu'un coeur aime d'autant
moins Dieu, qu'il aime quelque chose avec Dieu, s'il ne
l'aime pas pour Dieu
(1).


De là s'ensuivit le second effet de la présence de ce
même Esprit d'amour dont les apôtres furent remplis.

Plus un coeur est pur et libre de tout attachement aux
objets visibles, plus le divin amour le touche intérieurement,
l'excite, l'embrase.
Dès qu'un feu n'a plus-
d'obstacle qui l'arrête, quel incendie ne cause-t-il pas?
Et comment aussi les apôtres sortirent-ils du cénacle ?
comme des hommes transportés; jusque là qu'on les
croyoit pris de vin, tant ils parurent animés et hors
d'eux-mêmes. Voilà ce qu'ont éprouvé tant de saints.
Tout ce que l'amour profane a de plus vif et de plus
pénétrant, n'est point comparable aux mouvemens
affectueux qui les ravissoient. Ils en tomboient en de.
saintes défaillances, et ils en perdoient jusqu'à l'usage
de leurs sens.
Si vous rencontrez mon bien-aimé, disoit
cette fidèle épouse des Cantiques, faites-lui connoître
l'état où je suis et la langueur où me réduit mon
amour
(2).


C'est ainsi qu'ils étoient disposés. Or n'ai-je pas
comme eux un coeur capable d'aimer Dieu ?
D'où vient
donc que ce coeur qu'il n'a fait que pour lui, est néanmoins
toujours à son égard si froid et si peu sensible ?
De tout ce qui a rapport à Dieu, rien ne l'affectionne,
rien ne l'émeut; ni oraisons, ni offices divins, ni sacremens,
ni entretiens spirituels, ni lectures de piété. On
a beau me dire que dans l'amour de Dieu la sensibilité
n'est point nécessaire : cela est vrai ; mais il n'est pas
moins vrai que si mon coeur étoit bien vide des choses
humaines, et bien solidement à Dieu, je me trouverois
en de tout autres dispositions, et j'aurois de tout
autres sentimens. Ah ! j'ai tant de vivacité, et quelquefois
je me laisse si aisément attendrir sur de vains
sujets ! n'y aura-t-il que Dieu pour qui je serai tout
de glace ? ne lui suis-je pas assez redevable ? ne m'a-t-il
pas fait assez de grâces, et ne m'en fait-il pas assez
chaque jour ? n'a-t-il pas pour moi des caractères assez
touchans ? Ces titres qu'il porte de père, de créateur,
de conservateur, de rédempteur, mille autres, sont-ils
trop peu engageans pour m'attirer ?
Toutes ces idées
ne me sont-elles pas assez présentes, et que vois-je
autour de moi qui ne m'annonce incessamment les miséricordes
infinies de mon Dieu ? Elles sont incompréhensibles :
mais, Seigneur, plus elles sont au-dessus
de tout ce que j'en puis penser, plus l'indifférence de
mon coeur me devient par là même inconcevable, et plus
je dois me la reprocher devant vous et m'en confondre.



(1) Aug.
(2) Cant. 5.


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Message par InHocSignoVinces »

TROISIÈME POINT.


Mais encore qu'est-ce qu'aimer Dieu, et tout mon
amour doit-il se borner à des affections et à des sentimens?

Afin de m'instruire là-dessus, il me suffît de
considérer ce que Dieu fait pour nous dans ce mystère.
Il nous aime, et pour nous témoigner son amour, il
ne se contente pas de nous avoir donné son Fils, il fait
encore descendre sur nous son Esprit. Il nous le
donne, et en nous le donnant, il se donne lui-même à
nous. Voilà le caractère de l'amour de mon Dieu pour
une aussi vile créature que je le suis. Rien ne lui coûte
dès qu'il s'agit de mes intérêts, et il n'a rien de si
grand et de si divin, dont il ne me fasse part.



Faut-il bien des raisonnemens pour apprendre de
quel retour je dois user envers lui, et comment je le
dois aimer? Il ne m'a pas seulement aimé de coeur,
mais en oeuvres : ou plutôt parce qu'il m'a aimé véritablement
et de coeur, son amour n'a point été oisif,
mais il s'est fait connoltre par les effets les plus merveilleux
et les plus éclatans.
Si donc je l'aime, y a-t-il
rien que je lui puisse refuser; rien, dès qu'il est question
de le servir et de lui plaire, que je doive épargner?

Car sans cela, sans cette pleine fidélité à suivre ses
divines volontés et à pratiquer généralement et ponctuellement
tout ce qu'il demande de moi, comme il le
demande de moi, autant qu'il le demande de moi, en
vain je dis que je l'aime : ce ne sont que des paroles,
et rien de plus.



Aussi l'amour de Dieu est-il l'accomplissement de
toute la loi.
Accomplissement de toute la loi, parce
qu'il n'y a pas un point dans la loi, ni si petit que
l'amour de Dieu nous laisse négliger, ni si relevé dont
l'amour de Dieu ne nous fasse soutenir la pratique.
Que n'ai-je bien commencé à aimer Dieu ! Dès là toutes
les difficultés qui m'arrêtent depuis longtemps, et tous
les obstacles seroient tout-à-coup levés. Je m'étonne
de ce que les saints ont entrepris pour Dieu, et de ce
qu'ils ont soutenu jusques au dernier jour de leur vie.
Mais il n'y a rien là qui me doive surprendre, quand
je pense qu'ils aimoient Dieu. Je vois encore, dans le
même ordre et sous la même règle que moi, de saintes
âmes vivre dans une régularité, et agir en tout avec un
zèle et une persévérance que j'aurois peine à croire,
si je n'en étois témoin.
D'où leur vient cette ferveur
sans relâche et cette fermeté inébranlable? de l'amour
de Dieu.
Au lieu de la surprise où je suis en leur voyant
faire ce qu'ils font, je devrois bien plus m'étonner
qu'ils aimassent Dieu et qu'ils ne fissent pas tout cela.
De là même je dois voir si j'ai lieu de me flatter en
quelque sorte d'avoir jusques à présent aimé Dieu.
Peut-être lui ai-je assez de fois protesté que je l'aimois;
mais à juger de mes paroles par mes oeuvres, puis-je
compter sur toutes mes protestations? Réflexion bien
humiliante et bien terrible ! Car je ne puis être aimé
de Dieu, si je ne l'aime. Ah ! mon Dieu, que ce soit du
moins aujourd'hui et pour jamais, que ce saint amour
s'allume dans mon coeur !



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Re: DE LA DESCENTE DU SAINT-ESPRIT, OU DE L'AMOUR DE DIEU, méditation du R.P. Bourdaloue

Message par InHocSignoVinces »

CONCLUSION.


Divin Esprit, charité essentielle et toujours subsistante,
source intarissable de ce sacré feu qui brûle les
anges bienheureux et tous les élus de Dieu, descendez,
ouvrez mon âme, et venez vous-même l'embraser. Si
elle se tient encore fermée, faites-lui une salutaire violence.
Vous pénétrez partout, et il ne vous faut qu'un
trait pour enflammer tout un coeur et le consumer.

C'est donc par vous que je puis sortir de ma retraite,
comme les apôtres sortirent du cénacle; avec le même
amour, et par conséquent avec la même résolution,
la même activité, la même force. Dans toute la suite
de leurs années, rien désormais ne les put séparer de
la charité de Jésus-Christ, et de la charité de Dieu.
Qui m'en séparera moi-même ? Car c'est maintenant,
ô Esprit d'amour ! que je me livre tout entier à vous,
pour m'attaçher à mon Dieu d'un lien indissoluble
et d'un amour éternel. Que voudrois-je encore lui
dérober de ma vie; et ce que je lui déroberois, à qui
le donnerois-je ?



Hélas ! Seigneur, je n'ai jusques à présent que trop
partagé mon coeur entre vous et d'autres objets; mais
n'étant pas à vous uniquement, il n'y étoit point du
tout. Car vous êtes un Dieu jaloux, et vous voulez un
amour sans réserve. Vous le méritez bien, ô mon Dieu !
et je suis bien indigne de vos grâces, si tant de grâces
que j'ai reçues de votre main libérale et paternelle, ne
suffisent pas pour m'apprendre â vous aimer. Eh !
Seigneur l'ai-je su jusques â ce jour ? Mais que devois-je
néanmoins savoir autre chose? Avec cela seul,
j'aurois su tout le reste; c'est-à-dire, que j'aurois su
remplir tous les devoirs de mon état et en pratiquer
toutes les vertus. C'est ce que votre Esprit m'enseignera.
Plaise an Ciel qu'il m'inspire toujours ; et plaise surtout
au Ciel que j'en suive toujours les divines inspirations,
et que jamais je n'en éteigne dans mon âme les saintes
ardeurs !



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