Grâce actuelle et sainteté personnelle, par le P. Reg Garrigou-Lagrange, O. P.

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Re: Grâce actuelle et sainteté personnelle, par le P. Reg Garrigou-Lagrange, O. P.

Message par InHocSignoVinces »

La fidélité est requise, en outre, pour mériter et obtenir l'augmentation en nous de la vie de la grâce, qui doit croître jusqu'à notre entrée au ciel, puisque nous sommes des voyageurs en marche vers l'éternité et que nous nous en rapprochons en grandissant dans l'amour de Dieu.


D'où la nécessité de sanctifier toutes et chacunes de nos actions, même les plus ordinaires, en les accomplissant avec pureté d'intention, pour un motif surnaturel et en union avec Notre-Seigneur. Si nous étions ainsi fidèles du matin au soir, chacune de nos journées contiendrait des centaines d'actes méritoires, des centaines d'actes d'amour de Dieu et du prochain, à toute occasion agréable ou pénible, et le soir notre union avec Dieu serait plus infinie et plus forte. On l'a souvent dit : il n'est pas de moyen plus pratique, plus efficace, plus à la portée de tous, pour se sanctifier, que de surnaturaliser ainsi chacune de nos actions, en les offrant, avec Notre-Seigneur, à Dieu pour sa gloire et pour le bien des âmes.


Rome. Angelico.

Fr. Rég. Garrigou-Lagrange, O. P.


La Vie Spirituelle n° 226, juillet 1938

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InHocSignoVinces
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Re: Grâce actuelle et sainteté personnelle, par le P. Reg Garrigou-Lagrange, O. P.

Message par InHocSignoVinces »

[1] Cf. Concile d'Orange (Denzinger, Enchiridion, n° 176-200) et saint Thomas, Ia IIae, q. 109, a. 1-10.

[2] II Cor., III, 5. « Non quod sufficientes simus cogitare aliquid a nobis quasi ex nobis. »

[3] Phil., II, 13. « Deus est qui operatur in nobis et velle et perficere. »

[4] Denzinger, n° 182-200 et 141.

[5] Matth., VII, 7-8.

[6] Matth., XXVI, 41.

[7] Cf. S. Thomas, IIa IIae, q. 83, a. 2, c. et ad 3m.

[8] Session VI, ch. XI (Denzinger, n° 804).

[9] Cf. Catéchisme du Concile de Trente, P. IV, c. 1, n° 3.

[10] Jean, IV, 10.

[11] Galat., II, 20.

[12] Quelquefois une grâce lumineuse très élevée donne l'impression de l'obscurité, c'est une obscurité translumineuse, comme la lumière trop forte du soleil éblouit les yeux trop faibles de l'oiseau de nuit.

[13] Beaucoup de ces grâces ne sont nullement senties quand on les reçoit, elles sont d'ordre tout spirituel et surnaturel et dépassent par suite nos moyens naturels de connaissance. Quelques-unes sont senties par suite du retentissement qu'elles ont sur notre sensibilité, sous forme, par exemple, de consolation sensible.

D'autres, qui n'ont pas ce retentissement, peuvent cependant être conscientes, en ce sens que Dieu, surtout par le don de sagesse, se fait sentir spirituellement, à nous comme le principe de l'amour filial qu'il nous inspire pour lui.
Cf. St. Thomas, In Epist. Ad Rom., VIII, 10.

[14] Cf. S. Thomas, Ia, q. 105, a. 4 ; Ia IIae, q. 9, a. 6 ; q. 10, a. 4 ; q. 109, a. 2, 3, 4, 10.

[15] Cf. S. Thomas, Ia IIae, q. 111, a. 2. Sous la grâce coopérante, la volonté se meut elle-même délibérément en vertu d'un acte antérieur, c'est ainsi que voulant déjà la fin elle se porte au choix des moyens ; tandis que sous la grâce opérante elle est mue en vertu, non d'un acte antérieur, mais d'une inspiration spéciale.

[16] Ici, il y a bien délibération, mais ce n'est pas en vertu de la délibération et d'un acte antérieur que le pécheur, au moment de sa conversion, est mû à vouloir efficacement la fin dernière surnaturelle, car tout acte antérieur est inférieur à ce vouloir efficace et il ne peut qu'y disposer. Il faut donc ici une grâce opérante spéciale. Celle-ci n'est pas requise lorsque, voulant déjà efficacement la fin, nous nous portons nous-mêmes à vouloir les moyens ; ici est requise seulement la grâce coopérante.



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Re: Grâce actuelle et sainteté personnelle, par le P. Reg Garrigou-Lagrange, O. P.

Message par InHocSignoVinces »

[17] Nous avons traité ailleurs plus longuement de ce sujet. Cf. Perfection chrétienne et contemplation, I, pp. 355-386 : L'inspiration spéciale du Saint-Esprit et la grâce actuelle commune. D'après de nombreux textes de saint Thomas, à la suite de plusieurs grands thomistes et en particulier du P. del Prado, nous y avons montré que Dieu meut la volonté, soit avant la délibération (lorsqu'il la porte à vouloir la béatitude en général, ou aussi la fin ultime surnaturelle), soit après la délibération ou avec elle (lorsqu'il la porte à se déterminer par délibération discursive, à vouloir les moyens en vue de la fin préalablement voulue), soit au-dessus de la délibération (par inspiration spéciale, en particulier par celle à laquelle les dons du Saint-Esprit nous rendent dociles.

Saint Thomas a énuméré ces trois modes de motion en divers endroits : Ia IIae, q. 9, a. 6, ad 3m ; q. 68, a. 2 et 3 ; q. 109, a. 1, 2, 6, 9 ; q. 111, a. 2 ; de Veritate, q. 24, a. 15.

Il suffit ici de citer le texte classique de la Ia IIae, q. 111, a. 2, sur la distinction de la grâce opérante et de la grâce coopérante « Operatio alicujus effectus non attribuitur mobili, sed moventi. In illo ergo effectu, in quo mens nostra est mota non movens, solus autem Deus movens, operatio Deo attribuitur, et secundum hoc dicitur gratia operans. In illo autem effectu, in quo mens nostra et movet (virtute prioris actus) et movetur, operatio non solum attribuitur Deo, sed etiam animae, et secundum hoc dicitur gratia cooperans. »

La grâce opérante peut se présenter sous plusieurs formes : Elle peut être seulement excitante, porter à une bonne pensée salutaire, qui de fait reste stérile ; elle peut porter jusqu'à un acte salutaire de foi ou d'espérance, sans qu'il y ait l'influence des dons du Saint-Esprit, comme il arrive chez le fidèle en état de péché mortel ; elle peut porter jusqu'à un acte salutaire et méritoire des dons du Saint-Esprit. C'est surtout dans ce dernier cas qu'il y a inspiration spéciale, non seulement avant la délibération, mais au-dessus d'elle. Nous pouvons soit être portés, soit nous porter de nous-mêmes à un acte de foi (bien qu'il soit simple et non discursif), tandis que nous ne pouvons de nous-mêmes nous porter à un acte des dons.

[18] « Qui creavit te sine te, non justificabit te sine te » (Sermo 15, c. 11).


[19] Ici se trouve le grand mystère de la grâce, dont les deux aspects à concilier se peuvent exprimer ainsi :

D'une part, Dieu ne commande jamais l'impossible (il ne serait ni juste, ni miséricordieux), mais par amour il rend réellement possibles à tous les devoirs qu'ils ont à accomplir. Nul adulte n'est privé de la grâce nécessaire au salut que s'il la refuse par résistance à l'appel divin, comme il arriva au mauvais larron mourant près du Sauveur.

D'autre part, « comme l'amour de Dieu pour nous est cause de tout bien, nul ne serait meilleur qu'un autre s'il n'était plus aimé par Dieu », comme le dit saint Thomas, Ia, q. 20, a. 3. En ce sens, Jésus nous a dit : « Sans moi vous ne pouvez rien faire » (Jean, XV, 5), et en parlant des élus il a ajouté : « Personne ne pourra les ravir de la main de mon Père » (Jean, X, 29). Saint Paul a dit aussi : « Qui est-ce qui te distingue ? Qu'as-tu que tu ne l'aies reçu ? » (I Cor., IV, 7). Quelle leçon plus profonde d'humilité !

Comme le dit un Concile du Moyen-Age : « Si certains sont sauvés, c'est par le don du Sauveur ; si d'autres se perdent, c'est par leur faute » (Denzinger, Enchiridion, n° 318). Résister à la grâce est un mal qui ne peut venir que de nous. Ne pas y résister est déjà un bien qui dérive de la source de tout bien. Ces formules réunissent les deux aspects du mystère et les principes que nous venons de rappeler.

Chacun de ces deux principes pris à part est absolument certain, autant celui du salut possible à tous que celui-ci : « Nul ne serait meilleur qu'un autre s'il n'était plus aimé par Dieu. Qu'avons-nous que nous ne l'ayons reçu ? » Mais comment ces deux principes si incontestables se concilient-ils intimement ? Nulle intelligence créée ne peut le voir avant d'avoir reçu la vision béatifique. Ce serait voir en effet comment se concilient dans l'éminence de la Déité l'infinie Miséricorde, l'infinie Justice et la souveraine Liberté. Nous avons exposé ailleurs ce problème plus longuement dans ses rapports avec la spiritualité, cf. Perfection chrétienne et contemplation, I, pp. 88-131 : La mystique et la doctrine de saint Thomas sur l'efficacité de la grâce, et Providence et confiance en Dieu, pp. 338-363.

[20] Jean, X, 10.

[21] Jean, VII, 38.


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