Les Oblats de Marie-Immaculée chez les Esquimeaux

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Abbé Zins
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INUK "Au dos de la terre ! "

par le R.P. ROGER BULIARD, O.M.I.



CHAPITRE IV


VICTORIA

EXPLORATION — ESSAIS



Après les fêtes de Noël, comme j'étais taquiné par un brin de mélancolie, je rendis visite au traiteur le plus proche, distant d'une cinquantaine de kilomètres.

Il possédait un poste de radio, et, le jour du Nouvel An 1939, j'avais la bonne aubaine d'y entendre le Père de Goppermine qui, à tout hasard, m'appelait à l'écoute pour me communiquer un message d'encouragement et de félicitations de la part de Mgr Breynat et l'invitation à descendre à Coppermine, pour rendre compte de mon exploration et de mes projets définitifs en vue de la nouvelle fondation dont tout le matériel arriverait en été ; j'étais attendu à Coppermine pour le 18 janvier.

C'était une trotte de 700 km dans une période où les heures de jour sont particulièrement courtes ! J'abrégeai mes préparatifs et partis.

Un jour je cassai mon traîneau en route, le lendemain je m'égarai, mais j'arrivai quand même à temps au rendez-vous.
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Abbé Zins
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Tous les Pères des Missions de l'est étaient rassemblés à la Mission de Notre-Dame de Lumières ; je laisse deviner quelles heures délectables nous passâmes ensemble !

Je m'y trouvais même si bien que je ne me pressais pas le moins du monde de rentrer... quand, un beau matin, on m'annonça que le ministre anglican du lieu, ayant appris que ma petite chrétienté s'accroissait là-bas tout doucement, s'était décidé à tenter, lui aussi, sa chance. (C'était le premier voyage d'un pasteur dans ces hautes latitudes !) Il avait pris le large en cachette pour s'infiltrer dans ma « bergerie » durant mon absence. Ceci se passait le 30 janvier.

Conjecturant qu'un saint Paul aurait prestissimo attelé ses chiens pour repartir ventre à terre, j'interrompis ma villégiature et, le 2 février, me mis, à vrai dire d'assez mauvaise humeur, aux trousses de mon partenaire.

Quand j'arrivai chez moi, personne ne m'avait encore précédé.

En fait, le ministre ne déboucha que cinq jours plus tard et, si jamais la pensée lui était venue de me causer une belle peur et une grosse surprise, il put certes s'accuser d'avoir vendu la peau de l'ours avant de l'avoir tué !
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Abbé Zins
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Un soir en effet, chez Holorak, j'étais occupé à boire le thé traditionnel lorsque mon collègue survint. Gelé tout de bon, il ne fit qu'un saut de sa traîne jusqu'à l'intérieur de notre iglu.

De la pénombre où il ne pouvait me distinguer, je le saluai d'un « Hello ! » qui ne devait pas manquer d'une pointe d'ironie, car il faillit bien en tomber assis dans les décors ! Il dut enfin se résigner à se convaincre que c'était bien moi en chair et en os. Il accepta néanmoins une tasse de thé.

Malheureusement mon hôte m'invita à faire la prière et toute l'assistance se signa ; cela, et le crucifix mis en évidence sur le mur face à lui, l'achevèrent. Il but son thé et nous assura, malgré nos insistances, qu'il irait camper ailleurs !...

Il me croyait encore à Coppermine, je parie !... « — Ça lui apprendra, me dis-je dans l'intime, à vouloir écourter mes vacances ! »
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Abbé Zins
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Ce retour à Minto s'effectua cependant par des temps abominables et des misères de toutes sortes. Malgré mon acharnement, nous ne progressions qu'avec lenteur.

Je m'encourageais chaque soir en me répétant : « Mon ministre est servi comme nous, et 700 km c'est une longue course ! »...

Jamais je ne mis autant de jours à parcourir ce trajet : 17 ! Il en fallut 26 à mon concurrent, et je ne cache pas que ce match victorieux me consola d'étrange façon !

C'est à cette époque que je me fis une réputation de dentiste, je veux dire d'arracheur de dents.

Un jeune homme ne cessait de se plaindre d'une douloureuse molaire. Un soir de veillée, plusieurs volontaires s'offrirent gaiement pour le soulager de ce petit bobo, armés d'une petite tenaille que j'avais parmi mes outils ; au grand amusement d'ailleurs de tous ceux qui essayèrent leur vigueur à défaut d'habileté, la tête du patient menaçait bien de s'arracher, mais pas la dent ! Pris de pitié, je voulus à mon tour me faire la main et, en quelques secondes, j'extirpai dextrement la molaire rebelle.

Quelques jours plus tard, la femme de mon Kanguak siégeait sur le même banc pour subir les mêmes tourments. N'arrivant à rien, Tom la fit s'étendre sur le plancher pour avoir meilleure prise et, bien qu'elle pesât près de cent kilos, il la soulevait presque du sol dans ses efforts pour extraire la dent malade. J'intervins de nouveau avec succès ; du coup ma renommée fut établie et je devins le dentiste officiel à 500 km à la ronde.

C'eût été l'heure où jamais de m'appliquer cependant l'adage : « Médecin, guéris-toi toi-même ! », car je souffrais depuis.longtemps de plusieurs dents incurables.

La douleur devint si intolérable que je lue résignai à m'opérer moi-même avec mes propres tenailles ; je laissai le chicot dans ma mâchoire sous les applaudissements des spectateurs.

J'aurais fait ce jour-là des milliers de kilomètres pour me rendre au cabinet dentaire le plus proche... Que d'autres missionnaires ont souffert ainsi le martyre des mois durant avec ces rages de dents !
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Abbé Zins
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... Physiquement mal en point, j'étais cependant consolé par les progrès de mes catéchumènes et l'apprivoisement sympathique qui se manifestait chez tous.

C'est donc avec le sourire que j'envisageais les mois à venir, quand, à ma profonde surprise, le traiteur me dépêcha un attelage pour me prévenir qu'un avion viendrait me chercher sous peu : peu tendres pour eux-mêmes autant que délicats pour autrui, les Pères de Coppermine avaient vraisemblablement écrit à Monseigneur que ma santé générale et mes dents surtout exigeaient des soins immédiats.

Comme je ne pouvais répondre, il ne me restait qu'à me soumettre et à attendre.

Je prévins mes gens qu'un tigmierpak (grand oiseau) allait venir.

A partir de ce jour, mes Esquimaux ne cessèrent plus de guetter le ciel : c'était l'événement capital de leur vie !

Je passai des heures à leur expliquer comment le tigmierpak était bâti, comment il pouvait voler, combien de passagers il transportait, qu'ils le reconnaîtraient au bruit de ses moteurs, etc. etc.

L'attente se prolongea durant près d'un long mois.
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Le 20 mars, dans la tempête, les Esquimaux entendirent un grand bruit ; Niperpaluk ! » Ils étaient surexcités. Ce devait être le grand oiseau !

Je l'entendis aussi ; il ne volait pas haut, perdu dans la neige qui voltigeait juste au-dessus de nous. L'avion semblait tournoyer très bas, mais restait invisible ; puis il s'éloigna après avoir décrit de longues spirales.

La peur m'envahit ; j'avais allumé des feux au-dehors les jours précédents, mais qui aurait pu penser qu'il prendrait l'air aujourd'hui par une telle bourrasque ?...

Il revint et recommença à tournoyer, ayant dû remarquer quelque chose, car il atterrit. Les Esquimaux étaient cloués sur place, bouche bée, un tantinet effrayés !

Je me précipitai au-devant de l'appareil sur la glace et, en courant devant l'avion, le guidai vers la Mission. Mgr Fanllaize descendit de la carlingue, puis mon remplaçant provisoire, le P. de Coccola, et enfin le courageux pilote, M. Louis Bisson.

Aucun des voyageurs n'ayant l'air d'apprécier particulièrement mon fichu pays, il fut question de repartir au plus tôt.

En conséquence je bousculai le programme et, le soir même, Monseigneur, les larmes aux yeux, baptisa les dix adultes que j'avais préparés. Ensuite, à minuit, il célébra la messe, distribua dix communions, administra dix confirmations et bénit trois mariages.

Ce furent de grandioses cérémonies en l'honneur du Christ-Roi. A part les Saintes Huiles et l'évêque lui-même, tout manquait évidemment pour la belle ordonnance de la messe pontificale et surtout celle de la Confirmation ; ni chape, ni crosse ; mais, à voir la figure émue et triomphante de Monseigneur, personne ne s'en serait douté !

Après s'être extasié sur mon encensoir fabriqué dans une boîte de conserve, l'évêque remarqua cependant que mon encens exhalait une curieuse odeur qui ne lui était pas totalement inconnue ; je dus confesser humblement que c'était du sucre en poudre légèrement rouillé pour plus d'atmosphère.
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Après tant de précipitation, il nous fallut pourtant patienter avant de décoller, bloqués dans mon ermitage pendant huit jours par une interminable tempête.

Au début, je fus bien ennuyé pour loger et nourrir mes hôtes, mon évêque notamment ; mais lui était aux anges, rajeuni de dix ans, à coucher sur les peaux, à manger du poisson cru, à parler de nouveau l'esquimau, à revivre enfin l'existence qu'il mena jadis, durant plusieurs années sur terre, seul lui aussi !

C'était un véritable expert à déchiqueter son morceau de poisson gelé ; après chaque repas, il ne manquait point d'être le premier avant moi à gagner le lit de peaux, le seul siège confortable du logis ; invariablement aussi, il me battait aux cartes sous l'oeil amusé de tous mes Esquimaux.

« — Ça, c'est des vacances, hein, Père ? », me disait-il. Tous nos rêves enfin réalisés !

Nous sommes au bout du monde ! Mon ambition à moi, c'est vous qui l'avez réalisée, veinard !...

Il est vrai, mon petit Père, que je n'ai rien manqué du tout ; ces baptêmes, ces confirmations, ces premières communions, ces mariages, vous les aviez gardés pour me les offrir ; j'ai deviné ça, mon malin ! Vous connaissiez le rêve de ma vie ; vous avez voulu me consoler ; vous êtes trop gentil ! »
....

« — Mais, Monseigneur, cela ne vous était-il pas dû ? Après nos deux martyrs, après ce pauvre Père Frapsauce qui se noya, n'êtes-vous pas le premier apôtre esquimau de chez nous ? Je vais vous faire un aveu : c'est à notre aîné, au Père esquimau, que j'ai offert tout cela, et pas à l'évêque, excusez-moi Monseigneur ! » ...

« — Votre intention, Père, n'en est que plus touchante ! Et je vous le dis, voilà le plus beau jour de mon existence, car je sens que c'est le couronnement de ma vie de « Père missionnaire esquimau » !... Jamais je n'oublierai ces quelques jours passés ici dans cet iglu-chapelle au bout du monde ! »
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Je me devais d'ajouter :

« — Monseigneur, ce n'est pas simplement le couronnement de votre apostolat de Père missionnaire ; c'est aussi celui de votre épiscopat et la réalisation de votre devise : Usque ad extremum terrae !... Jusqu'aux confins de la terre ! aviez-vous écrit dans vos armes... Vous y voilà !...

Tenez ! Prenez les baptêmes pour le Père Fallaize et les confirmations pour le Monseigneur ! .. Qu'en dites-vous ?...»


Trop ému, il préféra plaisanter : « — Ce que j'en dirai ?... Rien ! .. On devrait arroser ça en grand, et nous n'avons rien de rien !... Acceptez cependant le profond merci du Père et de l'évêque... De nous tous et de l'Eglise, vous avez bien mérité ! Que le Christ-Roi, que vous avez apporté ici, vous récompense surabondamment comme je désirerais pouvoir le faire moi-même ! »

C'était à mon tour de sentir mes yeux commencer à piquer. Oubliées toutes les petites tribulations passées, le froid, les tempêtes, la faim, les voyages, les déceptions, les enchevêtrements de glace, les cailloux des portages, mes chiens morts à la tâche, etc. etc.

Je ne sus que dire : « — Monseigneur, vos paroles couronnent aussi le rêve de ma jeunesse et de ma vocation missionnaire. Pour rien ici-bas, je ne voudrais d'autre récompense. J'ai trente ans et volontiers maintenant je chanterais mon Nunc dimittis en répétant

les paroles du premier Oblat, le Père Grollier, mort de fatigue et de peine à l'âge de trente-huit ans, à Good Hope, sous le cercle Polaire, le 29 mai 1864 :

— Je meurs content, ô Jésus, maintenant que j'ai vu Votre étendard élevé jusqu'aux extrémités du monde !
»

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Abbé Zins
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... Le 5 avril, nous nous envolions de Minto, y laissant le P. de Coccola qui, seul durant quatre mois, allait s'y dévouer sans compter.

Nous emmenions à bord un jeune Esquimau menacé de cécité. En quelques heures, ce primitif passa littéralement de l'âge néolithique à toute la civilisation du xx° siècle.

Tandis que l'avion planait au-dessus du Grand Lac de l'Ours, il commença par s'émerveiller du nombre d'hommes qui couvraient déjà la terre des Grands-Sourcils ; n'ayant jamais vu d'arbres, il croyait que c'était des hommes.

Arrivé à Fort Smith, il nomma incontinent une vache « un caribou avec un gros ventre » ; le cheval, dont il avait une frousse terrible, fut appelé « un chien géant ».

Il avait le vertige en regardant par la fenêtre du second étage de l'hôpital, persuadé qu'il était que ce « grand iglu » allait s'écrouler ; il montait volontiers un escalier, mais ne le redescendait que sur son derrière.

Son ravissement n'eut plus de bornes lorsqu'il contempla un jardin, une automobile, etc. Inutile de dire si mon petit paroissien eut du succès !

Quant à moi, transféré, en l'espace de quarante-huit heures, des 40 degrés sous zéro de l'hiver encore rigoureux de Minto à la température trop chaude et au merveilleux printemps d'Edmonton, je crus étouffer et j'étais si mal à l'aise que je n'étais pas loin de regretter mes glaces et mes neiges.

Mais revoir, après tant d'années, des arbres et des fleurs, entendre chanter des oiseaux, contempler des lumières électriques, manger des fruits, des légumes, jouir du service méticuleux d'un hôpital et de toute sa luisante propreté ! Tout me semblait un monde de féérie et me faisait l'effet de vivre un rêve mirobolant. J

e n'étais pas moins étonné de voir des moutons et des boeufs autrement qu'en boîte de conserve, ni moins surpris que tous ces fruits pussent être distingués par leur vraie forme et leur vrai goût, qu'une bande de papier, soigneusement imprimée, ne fût plus nécessaire pour révéler à des convives autour d'une table, d'une vraie table, l'identité de toutes ces viandes et de tous ces légumes ! ..
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Entre autres avantages cependant, cette excursion imprévue hors de mon désert eut surtout celui de fixer définitivement tous les détails relatifs à la nouvelle fondation qui devait se faire en règle et dans les formes cette fois-ci.

Le Compagnie de la Baie d'Hudson me consulta sur mes projets, le Gouvernement canadien ayant exprimé le désir qu'à l'avenir les différents postes (Missions, traites de fourrure et autres) s'installasent côte à côte en petite colonie homogène.

Je déclarai — à l'encontre des plans de la H.B.C., me semble-t-il — qu'ayant circulé durant deux années dans tous les recoins du pays, j'avais un choix bien arrêté et que j'éleverais ma Mission à cinq milles au nord d'Holman Island, dans une place centrale pour les divers camps de la région qui était en même temps un bon port pour les bateaux, un excellent terrain de chasse et une source d'eau fraîche appréciable.

Ces Messieurs finirent par se rallier à mes vues et décidèrent de transplanter leur poste de traite au même endroit.

Parfaitement reposé, je repris le chemin du retour en très illustre société : accompagnant Mgr Breynat, Son Excellence Mgr Antoniutti, Délégué Apostolique, venait, au nom du Saint-Père, visiter toutes les Missions du Mackenzie et affirmer les droits de saint Pierre jusque sur les suprêmes habitants du globe.

Le 24 juillet 1939, l'éminent prélat inscrivait sur le Codex de Minto Inlet, l'indigente petite Mission qui rayonna ce jour-là de splendeur :

« Je suis heureux d'avoir pu célébrer la Sainte Messe, dans la petite chapelle du Christ-Roi, avec le calice donné par Sa Sainteté Pie XI qui m'avait parlé de cette Mission avec une prédilection particulière... De tout coeur, je forme des voeux les plus ardents pour que cette Mission vivat, crescat, floreat in bonum animarum et in aedificationem Corporis Christi ! »

Il me remit gracieusement sa photographie ainsi dédicacée :

« In terra deserta apparui tibi ut viderem virtutem et gloriam tuam ! » ...

En souvenir de ma visite, avec une Bénédiction particulière de la part du Saint-Père au bien méritant missionnaire et à ses fidèles de Minto Inlet.

Jamais nous ne pourrons assez dire notre reconnaissance au Souverain Pontife pour nous avoir envoyé Son représentant qui brava les distances et les hasards d'un raid au bout du monde afin de nous apporter Sa bénédiction et Ses précieux encouragements.
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