Le Cœur Immaculé de Marie

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Laetitia
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Re: Le Cœur Immaculé de Marie

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Mais afin de mieux connaître ce qu'on entend par le Cœur de la bienheureuse Vierge, il faut savoir que, comme en Dieu nous adorons trois Cœurs, qui pourtant ne sont qu'un Cœur; et comme en l'Homme-Dieu nous adorons trois Cœurs qui ne sont qu'un même Cœur : de même nous honorons trois Cœurs dans la Mère de Dieu, qui ne sont qu'un Cœur.

Le premier Cœur qui est en la très sainte Trinité, c'est le Fils de Dieu, qui est le Cœur de son Père, comme il a été dit ci-dessus. Le second, c'est le Saint-Esprit, qui est le Cœur du Père et du Fils. Le troisième, c'est l'Amour divin, l'un des adorables attributs de la divine essence, qui est le Cœur du Père, du Fils et du
Saint-Esprit; trois Cœurs qui ne sont qu'un très simple et très unique Cœur, avec lequel les trois Personnes éternelles s'aiment mutuellement d'un amour aussi grand qu'elles le méritent, et nous aiment aussi d'une charité incomparable.

Le premier Cœur de l'Homme Dieu, c'est son Cœur corporel, qui est déifié, ainsi que toutes les autres parties de son sacré corps, par l'union hypostatique qu'elles ont avec la personne divine du Verbe éternel. Le second, c'est son Cœur spirituel, c'est-à-dire la partie supérieure de son âme sainte, qui comprend sa mémoire, son entendement et sa volonté, et qui est particulièrement déifiée par la même union hypostatique. Le troisième, c'est son Cœur divin, qui est le Saint Esprit, duquel son humanité adorable a toujours été plus animée et vivifiée que de son âme propre et de son propre Cœur; trois Cœurs dans cet admirable Homme-Dieu qui ne sont qu'un Cœur, parce que son Cœur divin étant l'âme, le cœur et la vie de son Cœur spirituel et de son Cœur corporel, il les établit dans une si parfaite unité avec lui, que ces trois Cœurs ne font qu'un Cœur très unique, qui est rempli d'un amour infini au regard de la très sainte Trinité, et d'une charité inconcevable au regard des hommes.

Le premier Cœur de la Mère de Dieu, c'est le Cœur corporel qui est enfermé dans sa poitrine virginale. Le second, c'est son Cœur spirituel, le Cœur de son âme, qui est désigné par ces paroles du Saint-Esprit : Omnis gloria Filia Regis ab intus (1) : « Toute la gloire de la fille du Roi prend son origine dans son intérieur », c'est-à-dire dans le cœur et dans le plus intime de son âme, duquel il sera parlé plus amplement ci-après. Le troisième Cœur de cette divine Vierge, c'est celui dont elle parle quand elle dit : Je dors, et mon Cœur veille (2) ; c'est-à-dire, selon l'explication de plusieurs saints Docteurs, pendant que je donne à mon corps le repos qui lui est nécessaire, mon Fils Jésus, qui est mon Cœur et que j'aime comme mon Cœur, est toujours veillant sur moi et pour moi.

Le premier de ces trois Cœurs est corporel, mais tout à fait spiritualisé par l'esprit de grâce et par l'Esprit de Dieu dont il est tout rempli.

Le second est spirituel, mais divinisé, non pas par l'union hypostatique comme le Cœur spirituel de Jésus, dont nous venons de parler, mais par une très éminente participation des divines perfections, comme l'on verra dans la suite de cet ouvrage.

Le troisième est divin et Dieu même, puisque c'est le Fils de Dieu.

Ces trois Cœurs de la Mère de Dieu ne sont qu'un seul Cœur, par la plus sainte et la plus étroite union qui fut ni qui sera jamais, après l'union hypostatique. C'est de ces trois cœurs, ou plutôt de cet unique cœur, que le Saint-Esprit a prononcé par deux fois ces divines paroles : Marie conservait toutes ces choses dans son cœur (3).

Car premièrement elle conservait tous les mystères et toutes les merveilles de la vie de son Fils en quelque manière dans son cœur sensible et corporel, principe de la vie et siège de l'amour et de toutes les autres passions, parce que tous les mouvements et battements de ce cœur virginal, toutes les fonctions de la vie sensible qui en procédaient, et tous les usages des susdites passions, étaient employés pour Jésus et pour toutes les choses qui se passaient en lui : l'amour, pour l'aimer; la haine, pour haïr tout ce qui lui était contraire, c'est-à-dire le péché; la joie, pour se réjouir de sa gloire, de ses grandeurs; la tristesse, pour s'affliger de ses travaux et souffrances; et de même des autres passions.

Secondement, elle les conservait dans son cœur, c'est-à-dire dans la partie la plus noble de son âme, dans le plus intime de son esprit. Car toutes les facultés de la partie supérieure de son âme étaient sans cesse appliquées à contempler et adorer tout ce qui se passait en la vie de son Fils, jusques aux moindres choses.

En troisième lieu, elle les conservait dans son cœur, c'est-à-dire dans son Fils Jésus, qui était l'esprit de son esprit et le cœur de son cœur : lequel les conservait pour elle et les lui suggérait et remettait en mémoire lorsqu'il était convenable, tant afin qu'elles servissent de nourriture à son âme par la contemplation, et qu'elle y rendît les honneurs et adorations qui leur étaient dues, comme aussi afin qu'elle les racontât aux saints Apôtres et Disciples, pour les prêcher aux fidèles.

Voilà ce qu'on entend par le cœur admirable de la bien-aimée de Dieu, qui est une image accomplie du cœur adorable de Dieu et de l'Homme-Dieu, ainsi que nous le verrons encore plus clairement ci-après.

(1) Psal. XLIV. 14.
(2) «Ego dormio, et Cor meum vigilat.» Cant. V, 2.
(3) « Et Mater ejus conservabat omnia verba haec in corde suo.» Luc. II, 19 et 51.
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Laetitia
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Voilà le très digne sujet duquel j'ai à parler en ce livre. Les trois chapitres suivants vous feront encore voir plus particulièrement ce que c'est que le cœur corporel de la Mère du Sauveur, ce que c'est que son cœur spirituel. et ce que c'est que son cœur divin. Dans tout le reste de l'ouvrage vous trouverez plusieurs choses qui sont propres à son cœur corporel, d'autres qui conviennent à son cœur spirituel, d'autres qui n'appartiennent qu'à son cœur divin, et d'autres qui regardent tous les trois. Toutes seront fort utiles à votre âme, si vous les lisez après avoir donné votre esprit à l'Esprit de Dieu, et avec intention d'en faire bon usage.

Pour cet effet ayez soin, dans cette lecture, d'élever de fois à autre votre cœur vers Dieu, pour le louer de toute la gloire qu'il s'est donnée et donnera éternellement à soi-même dans ce merveilleux chef-d’œuvre de son divin amour; pour le bénir de toutes les faveurs inénarrables dont il a enrichi ce cœur très auguste; pour le remercier des grâces innombrables qu'il a faites par lui aux hommes; et pour lui offrir votre cœur et le supplier qu'il le fasse selon son cœur, en y détruisant tout ce qui lui déplaît, et en y gravant une image du très saint cœur de la Mère du Saint des saints, à laquelle je vous exhorte aussi de donner souvent le vôtre pour la même intention.

O Jésus, Fils unique de Dieu, Fils unique de Marie, vous voyez que je travaille à une œuvre qui est infiniment au-delà de ma portée; mais je l'ai entrepris pour l'amour de vous et de votre très digne Mère, et dans la confiance que j'ai en la bonté du Fils et en la charité de la Mère. Vous savez, mon Sauveur, que je ne prétends autre chose en ceci, que de vous plaire, et de vous rendre, et à votre divine Mère, quelque petite reconnaissance de tant de miséricordes que j'ai reçues de votre Cœur paternel, par l'entremise de son Cœur très bénin. Mais vous voyez aussi que de moi-même je n'ai qu'un abîme d'indignité, d'incapacité, de ténèbres, d'ignorance et de péché. C'est pourquoi, de tout mon cœur je renonce à tout ce qui est de moi; je me donne à votre divin esprit et à votre sainte lumière; je me donne à l'amour immense que vous avez pour votre très chère Mère; je me donne au zèle très ardent que vous avez pour votre gloire et pour son honneur. Possédez et animez mon esprit, éclairez mes ténèbres, embrasez mon cœur, conduisez ma main, dirigez ma plume, bénissez mon travail, et ayez agréable de vous en servir pour l'accroissement de votre gloire et de l'honneur de votre bénite Mère, et pour imprimer dans les cœurs de ceux qui liront ce livre une véritable dévotion à son très aimable Cœur.
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Laetitia
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CHAPITRE III. Le Cœur corporel de la très sainte Mère de Dieu.

Afin que vous connaissiez mieux ce que c'est que le Cœur sensible et corporel de la bienheureuse Vierge, il est nécessaire de vous faire voir quelque chose des excellences de son saint corps dont le Cœur est la principale partie. Pour cet effet je vous dirai que, comme il n'y a rien en Jésus qui ne soit grand et admirable, aussi il n'y a rien dans la Mère de Jésus qui ne soit plein de grandeurs et de merveilles. Tout ce qui est en l'humanité sacrée de Jésus est déifié et élevé à une dignité infinie, par l'union qu'elle a avec la Divinité. Tout ce qui est en Marie est ennobli et sanctifié jusqu'à un point inconcevable, par sa divine Maternité. Il n'y a aucune partie au corps sacré de l'Homme-Dieu qui ne soit digne des admirations éternelles des hommes et des Anges. Il n'y a rien du tout au corps virginal de la Mère de Dieu, qui ne mérite les louanges immortelles de toutes les créatures.

Il est vrai ce que dit saint Paul, que nous ne sommes aucunement redevables à la chair et au sang (1) ; que ceux qui vivent selon les sentiments de la chair et du sang périront et mourront de la mort éternelle (2) ; que la prudence de la chair est la peste et la mort de l'âme (3) ; que la sagesse de la chair est ennemie de Dieu (4) ; que les enfants de la chair ne sont point enfants de Dieu (5) ; que la chair et le sang ne posséderont jamais le royaume de Dieu (6) ; qu'il n'y a aucun bien dans notre corps, mais au contraire toute sorte de mal; que c'est un corps de mort (7) et une chair de péché (8) ; et que ceux qui appartiennent à Jésus-Christ ont crucifié leur chair avec tous ses vices et toutes ses inclinations perverses (9).

(1) « Ergo, fratres, debitores sumus non carni.» Rom. VIII, 12
(2) « Si enim secundum carnem vixeritis, moriemini. » Rom. VIII, 13.
(3) « Nam prudentia carnis, mors est.» Ibid. 6.
(4) « Quoniam sapientia carnis inimica est Deo. »Ibid. 7.
(5) « Non qui filii carnis, hi filii Dei.» Rom. IX, 8.
(6) « Caro et sanguis regnum Dei possidere non possunt.» I Cor. XV, 50.
(7) « Quis me liberabit de corpore mortis hujus ? » Rom. VII, 24.
(8) « Filium suum mittens in similitudinem carnis peccati.» Rom. VIII, 3.
(9) « Qui autem sunt Christi, carnem suam crucifixerunt cum vitiis et concupiscentiis, » Galat. V, 24
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Laetitia
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Mais d'autant plus que nous devons mépriser et mortifier ce corps de mort et cette chair de péché qui est en nous, et qui est un cloaque d'ordure, une masse de corruption, une voirie pleine de puanteur et un enfer d'abomination, d'autant plus devons-nous respecter et honorer le très pur et très saint corps de la Mère du Rédempteur, à raison des excellences merveilleuses dont il est doué, entre lesquelles j'en remarque cinq principales, qui font qu'il sera éternellement l'objet de la vénération de tous les Esprits bienheureux.

La première est qu'il a été formé dans les bénites entrailles de sainte Anne, non point par la vertu ordinaire de la nature, mais par la puissance extraordinaire de Dieu, puisque la conception immaculée de la très sainte Vierge ne s'est faite, quant à la nature et quant à la grâce, que par un grand miracle. C'est pourquoi on peut dire que son corps a été formé de la main du Saint-Esprit, et que c'est l'ouvrage du Très-Haut. De là vient qu'après le corps déifié de Jésus-Christ Notre-Seigneur, il n'y a jamais eu et n'y aura jamais en la terre aucun corps qui soit si accompli en toutes sortes de qualités avantageuses, comme le corps sacré de sa très pure Mère. Car Dieu l'ayant formé de sa propre main et pour les plus hauts desseins de son conseil éternel, qui peut douter qu'il ne l'ait orné de qualités convenables à la fin très sublime laquelle il était destiné, et aux fonctions très divines auxquelles il devait être employé ? Voulez-vous voir quelque chose des rares perfections de ce saint corps de la Vierge des vierges ? Écoutez ce que les saints Pères et les historiens ecclésiastiques en disent. Voici comme saint Épiphane, Nicéphore Calixte et plusieurs la dépeignent : Elle était douée en son corps de toutes les qualités qui sont requises pour la perfection d'une souveraine beauté.

Sa taille n'était ni trop grande ni trop petite, mais moyenne, ou plutôt riche, selon quelques-uns; belle de visage et d'un maintien très agréable; son front plein et poli, d'une médiocre et convenable grandeur; son teint blanc et vermeil, tirant un peu sur le brun; sa face plutôt longue que ronde; ses cheveux blonds, tendant un peu sur le brun; ses yeux pers (1) et brillants; ses sourcils un peu noirs et doucement arrondis; son nez droit et bien proportionné; ses lèvres vermeilles et pleines, celle de dessous étant un peu plus élevée que celle de dessus; sa bouche remplie de douceur et d'affabilité; ses dents blanches, nettes, droites et égales; son menton de bonne grâce, ayant une petite fosse au milieu; son regard doux, humble et bénin; son visage sans fard, mais plein de simplicité, de pudeur et de mansuétude; ses mains déliées et bien faites; sa démarche posée et composée, accompagnée de modestie, portant la tête un peu baissée en marchant, comme une vierge humble et pudique; sa voix argentine, douce, chaste et gracieuse. Toute sa composition extérieure était remplie de majesté et de bénignité. En un mot c'était une image vivante de la pudeur, de l'humilité, de la mortification, de la modestie et de toutes les autres vertus.

Sa robe était nette et propre, mais toujours modeste, sans faste, et sans autre couleur que celle de la laine; et son manteau de couleur céleste. Elle était de très saintes mœurs et d'une conversation mêlée de douceur et de gravité, d'humilité et de charité: ce qui la faisait aimer et respecter de tous ceux qui la voyaient. Elle aimait le silence, parlait peu et rarement, ne se laissait jamais aller à aucun mouvement de colère, ou d'impatience, ou de ris immodérés, et ne disait jamais de paroles oiseuses.

C'est ainsi que Nicéphore, en son Histoire (2), décrit la bienheureuse Vierge. Comme aussi saint Épiphane, prêtre de Jérusalem, qui affirme avoir employé toute la diligence possible en la recherche de tous les anciens auteurs grecs qui ont traité de la vie et des mœurs de la Mère de Dieu, pour choisir ce qui en était de plus certain (3).

(1) Pers, de couleur bleue.
(2) Voici le texte de Nicéphore qui s'appuie sur le témoignage de saint Épiphane: « Mores autem, formaeque et staturae ejus modus talis, ut inquit Epiphanius, fuit: Erat in rebus omnibus honesta et gravis, pauca admodum atque necessaria loquens, ad audiendum facilis et perquam affabilis, honorem suum et venerationem omnibus exbibens, statura mediocri, quamvis sint qui eam aliquantulum mediocrem longitudinem excessisse dicunt. Decenti dicendi libertate adversus homines usa est, sine risu, sine perturbatione, et sine iracundia maxime. Colore fuit frumentum referente, capillo flavo oculis acribus, subflavas et tanquam oleae colore pupillas in eis habens; supercilia ei erant inflexa decenter, nigra; nasus longior; labia florida, et verborum suavitate plena; facies non rotunda et acuta, sed aliquanto longior; manus simul et digiti longiores. Erat denique fastus omnis expers, simplex, minimeque vultus fingens, nihil mollitiei secum trahens sed humilitatem praecellentem colens: vestimentis, quae ipsa gestavit coloris nativi, contenta fuit: id quod etiamnum sanctum capitis ejus velamen ostendit. Et, ut paucis dicam, in rebus ejus omnibus multa divinitus inerat gratia. » Lib. 2 Hist. eccles. cap. 23.
(3) Instit. vit. et morib. Mariae.
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Laetitia
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Re: Le Cœur Immaculé de Marie

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Oyons maintenant les autres saints Pères.« Vous êtes toute belle, Vierge des vierges, dit saint Augustin; vous êtes toute agréable, toute immaculée, toute lumineuse, toute glorieuse, ornée de toute perfections enrichie de toute sainteté; vous êtes plus sainte et plus pure, même en votre corps, que toutes les Vertus angéliques (1) »

« O souveraine beauté de toutes les beautés, s'écrie saint George, archevêque de Nicomedie; o Mère de Dieu, vous êtes l'ornement et la couronne de tout ce qu'il y a de beau et d'éclatant en l'univers (2). »

« O Vierge sainte, dit saint Anselme, vous êtes si excellemment belle et si parfaitement admirable, que vous charmez les yeux et ravissez les Cœurs de tous ceux qui vous contemplent (3). »

La seconde excellence du corps virginal de la Reine du ciel, est qu'il a été formé expressément pour Notre-Seigneur Jésus-Christ, et qu'il n'a été formé que pour lui seul. Le ciel a été fait pour être la demeure des Anges et des Saints; mais le corps bienheureux de Marie est un ciel qui n'est fait que pour être le séjour du Roi des Anges et du Saint des saints. Votre très pur sang, O divine Vierge, n'est fait que pour être la matière du corps adorable de Jésus : votre ventre sacré, que pour le renfermer l'espace de neuf mois; vos bénites mamelles, que pour l'allaiter; vos saints bras, que pour le porter; votre sein et votre poitrine virginale, que pour l'y faire reposer; vos yeux, que pour le regarder et pour l'arroser de leurs larmes amoureuses et douloureuses; vos oreilles, que pour entendre ses divines paroles; votre cerveau, que pour être employé à la contemplation de sa vie et de ses mystères; vos pieds, que pour le conduire et l'accompagner en Égypte, en Nazareth, en Jérusalem, au Calvaire, et aux autres lieux où il a été; votre Cœur divin, que pour l'aimer et pour aimer tout ce qu'il aime.

(1) « Tu tota pulchra, tota formosa, tota delectabilis et tota gloriosa: tu macula nulla fuscaris, tu omni decore vestiris, tu omni sanctitate ditaris. Tu super omnes virtutes sancta in carne, tu cunctas foeminas vincis pulchritudine carnis, et omnes Angelicos spiritus excellentia sanctitatis. » Serm. de Incarn. Christi.
(2) « O pulcherrima pulchritudo omnium pulchritudinum ! o Dei Genitrix, pulchrorum omnium summum ornamentum ! » Serm. de Praesent. B. Virg.
(3) « O Domina pulchra ad intuendum, amabilis ad contemplandum ! » Serm. de S. Deipara.
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Re: Le Cœur Immaculé de Marie

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La troisième excellence du sacré corps de la Mère admirable, est qu'il est animé de la plus sainte âme qui fut jamais, après l'âme adorable de Jésus. A raison de quoi on peut dire que les organes de ce saint corps ont servi aux plus saintes et excellentes fonctions qui puissent être, après celles de l'âme déifiée du Fils de Dieu.

J'entends le grand apôtre saint Paul qui proteste hautement que, soit en la vie, soit en la mort, Jésus-Christ sera toujours glorifié dans son corps (1=336). Si Jésus-Christ est glorifié dans le corps d'un Apôtre, qu'il appelle lui même un corps de péché et de mort, combien davantage reçoit-il de gloire dans le corps de sa divine Mère, qui est une fontaine de vie immortelle, et dans lequel le péché n'a jamais eu de part, ayant été sanctifié avec son âme dès le moment de sa Conception immaculée ! A raison de quoi elle est appelée par l'apôtre saint Jacques, surnommé le frère du Seigneur, en sa Liturgie : Virgo sanctissima et immaculata, super omnes benedicta, semper beata et omnibus modis irrreprehensa : O Vierge très sainte, Vierge immaculée, bénite par dessus toutes choses, toujours bienheureuse et irrépréhensible en toutes manières.
C'est ici la quatrième excellence du sacré corps de la Mère du Saint des saints, qui consiste en ce qu'elle a accompli très parfaitement le commandement que Dieu nous donne par son Apôtre en ces paroles : Glorifiez et portez Dieu en votre corps (2) ; et qu'elle a commencé à l'accomplir longtemps auparavant que ces paroles eussent été prononcées.

Le Saint-Esprit voulant faire connaître à tous les chrétiens que la volonté de Dieu est qu'ils soient saints, non pas seulement en leurs âmes, mais aussi en leurs corps, dans lesquels ils le doivent porter et glorifier, leur annonce par la bouche de saint Paul : « Qu'ils doivent être, selon l'âme et selon le corps, des vaisseaux d'honneur et de sainteté utiles au service du souverain Seigneur de toutes choses, et préparés à toutes sortes de bonnes œuvres (3).

« Que leurs membres doivent être comme des armes de justice et de sainteté en la main du Dieu, dont il se sert pour combattre et pour vaincre son ennemi, qui est le péché, et pour les sanctifier (4).

« Que leurs corps doivent être des hosties vivantes, saintes, agréables à Dieu, et dignes d'être immolées à la gloire de sa divine Majesté (5).

« Que ces mêmes corps doivent être les temples du Dieu vivant (6).

« Qu'ils sont membres de Jésus-Christ (7), os de ses os, chair de sa chair, une portion de lui-même, et comme ses saintes reliques; et par conséquent, qu'ils doivent être animés de son esprit, vivants de sa vie, et revêtus de sa sainteté; et que le Fils de Dieu doit vivre non seulement dans leurs âmes, mais aussi dans leurs corps; et que l'on doit voir sa vie dans notre chair mortelle, selon la divine parole (8). »

Or si un corps de mort, et une chair de péché telle qu'est la nôtre, est obligé de porter véritablement toutes ces saintes qualités et d'être orné d'une si grande sainteté, qui peut douter que le corps virginal de la Mère de Dieu ne les ait possédées avec une très sublime perfection, et qu'il n'en ait porté les effets en un très haut degré ?
N'est-il pas vrai que ce bienheureux corps est le vaisseau le plus pur et le plus utile à la gloire de celui qui l'a fait, et le plus rempli de bonnes œuvres qui ait jamais été ?
N'est-il pas vrai qu'après la victime adorable qui a été immolée sur la croix, on n'a jamais offert à Dieu rien de si saint que le très pur corps de la Reine des Saints ?
N'est-il pas vrai que c'est le plus auguste et le plus digne de tous les temples de la Divinité, après celui du corps très sacré du Fils de Dieu ?
N'est-il pas vrai que c'est le premier et le plus noble des membres du corps mystique de Jésus ?

(1) « Nunc magnificabitur Christus in corpore meo, sive per vitam, sive per mortem. » Philip, I, 20.
(2) « Glorificate et portate Deum in corpore vestro. » I Cor. VI, 20.
(3) «Erit vas in honorem sanctificatum, et utile Domino, ad omne opus bonum paratum. » II Tim. II, 21.
(4) «Ita nunc exhibete membra vestra servire justitiae in sanctificationem. »Rom. VI, 19.
(5) « Obsecro... ut exhibeatis corpora vestra hostiam viventem, sanctam, Deo placentem. »Rom. XII, 1.
(6) « Vos estis templum Dei vivi. » II Cor. VI, 16
(7) « Nescitis quoniam corpora vestra, membra sunt Christi ?» I Cor VI, 16
(8) « Ut et vita Jesu manifestetur in corporibus nostris... in carne nostra mortali. » II Cor. IV, 10, 11.
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Laetitia
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Re: Le Cœur Immaculé de Marie

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Qui peut dire combien la maison de Dieu reçoit de lustre et d'ornement de ce précieux et admirable vaisseau ? Qui peut penser combien la très sainte Trinité est glorifiée dans ce saint temple, et par le sacrifice de cette incomparable hostie ? Qui peut douter que l'esprit de Jésus ne soit pleinement vivant dans toutes les parties du corps de sa divine Mère, et d'une vie la plus noble et la plus parfaite de toutes les vies, comme dans le plus noble et le plus excellent de tous ses membres ? Qui peut douter que ce corps sacré ne soit plus animé, possédé et régi par ce même esprit que par son âme propre ? Qui peut douter que Dieu ne soit plus honoré dans ce corps de la Vierge Mère, que dans tous les corps et dans tous les esprits les plus saints qui soient en la terre et au ciel ? Qui peut douter enfin que cette Vierge très fidèle n'ait glorifié Dieu en son corps et en toutes les manières possibles ?

Elle l'y a glorifié en pratiquant ce qui est signifié par ces paroles de saint Paul. Longtemps auparavant qu'elles fussent proférées : Mortificate membra vestra (1) : « Mortifiez vos membres »; car elle a continuellement mortifié les siens par jeûnes, abstinences et autres macérations, et par une entière privation de tous les contentements de la nature : n'ayant jamais bu, ni mangé, ni dormi, ni pris aucune récréation pour la satisfaction de ses sens, mais pour la seule nécessité, et pour obéir à la divine Volonté qui régnait parfaitement en son âme et en son corps, et qui la gouvernait en toutes choses.

Elle l'y a glorifié par le très saint usage qu'elle a fait de tous ses membres et sentiments, dont elle n'a jamais usé que pour la gloire de Dieu et selon sa très sainte volonté. Elle l'y a glorifié par l'exercice continuel de toutes sortes de vertus, qui avaient établi leur trône non seulement dans son âme, mais aussi dans tous les sens et dans tous les membres de son corps.
« Vous l'eussiez vue toujours joyeuse parmi les souffrances, dit saint Ignace martyr, forte dans les afflictions, contente dans la pauvreté, portée à servir tout le monde, même ceux qui l'affligeaient, ne leur témoignant jamais aucune froideur. Elle était modérée dans la prospérité, toujours tranquille et gaie. Elle était pleine de compassion envers les affligés, courageuse pour s'opposer aux vices, constante en ses saintes entreprises, infatigable ès travaux, invincible en la défense de la religion (2) »

« De quelles paroles me servirai-je, dit saint Jean Damascène, pour exprimer la gravité de vos démarches, l'honnêteté de votre vêtement, la bonne grâce de votre visage ? Votre habit était très modeste ; votre marche posé et compassé était très éloigné de toute légèreté; votre conversation était doucement grave et gravement douce; vous fuyiez tout à fait la fréquentation des hommes; vous étiez très obéissante et très humble, nonobstant vos très hautes contemplations; en un mot, vous avez toujours été la demeure de la Divinité (3). »

Voilà comme la bienheureuse Vierge a porté et glorifié Dieu en son corps, dont elle soit louée et glorifiée à jamais par tous les corps et par tous les esprits qui sont en l'univers.

La cinquième excellence de ce très noble corps est comprise en ces divines paroles, que la sainte Église révère tellement qu'elle ne les prononce jamais sans mettre le genoux en terre; paroles qui comblent le ciel de joie, la terre de consolation et l'enfer de terreur; paroles qui sont le fondement de notre religion et la source de notre salut éternel, Verbum caro factum est : « Le Verbe a été fait chair (4) »

Quelle est cette chair de laquelle il est fait mention ici avec tant de respect ? C'est la très pure chair de la Vierge Mère, que le Verbe éternel a tellement honorée qu'il s'est uni personnellement à elle et l'a rendue sa propre chair, en sorte que l'on peut dire avec saint Augustin que la chair de Marie est la chair de Jésus, et que la chair de Jésus est la chair de Marie : Caro Jesu est caro Mariae (5). O dignité incompréhensible de la chair de Marie ! excellence admirable de son corps virginal! Oh! quelle vénération est due à un corps qui est doué de tant et de si rares perfections! Oh! quel honneur mérite un corps que Dieu a tant honoré, comme nous venons de voir et comme nous verrons encore dans les sections suivantes !

(1) Colloss. III, 5.
(2) « Quae in persecutionibus et affliclionibus est hilaris, in penuriis et indigentiis non querula, injuriantibus grata et modesta in re laeta. Miseris el afflictis condolet coafflicta, et subvenire non pigrescit. Contra vitiorum autem pestiferos conflictus, in pugna fidei disceptans, enitescit. Nostrae novae religionis et poenitentiae est magistra, et apud fideles omnium operum pietatis ministra. » Epist, I ad S.Joannem, in Biblioth. vet. Patr. tomo 1.
(3) « Quonam modo ncescum tuum gravitate plenum describam? quomodo amictum? Quomodo venustatem oris? senilem illam in juvenili corpore prudentiam? Honestus vestitus fuit, mollitiem et luxum omnem fugiens. Gressus gravis, nec praeceps, nihil fractum ac molle habens. Mores severi, et hilaritate temperati, per quos nullus ad te viris accessus pateret .. Parentibus morigera et obsequens eras. Animus humilis in sublimissimis contemplationibus... Quid demum aliud quam Deo dignum domicilium ? » Orat. 1 Nat. B. Virg.(4) Joan. I, 14.
(5) Serm. de Assumpt.
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Laetitia
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Re: Le Cœur Immaculé de Marie

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SECTION PREMIERE.- Louanges que le Saint-Esprit, le Fils de Dieu, et plusieurs Saints donnent à tous les saints membres du sacré corps de la bienheureuse Vierge.


Certainement il faut bien dire que le corps vénérable de la Mère de Dieu est une chose merveilleusement digne et relevée, et qu'il n'y a rien en elle qui ne soit digne d'un très grand honneur, puisque le Saint-Esprit prend lui-même la peine, dans le Cantique des cantiques, de faire le panégyrique, non pas seulement des perfections de son âme, mais aussi des excellences de toutes les parties de son corps, c'est-à-dire: de sa tête, de ses cheveux, de ses yeux, de son nez, de sa bouche, de sa langue, de ses lèvres, de ses joues, de son cou, de ses mamelles, de ses pieds, enfin jusqu'aux plus petites choses, telles que sont les cheveux de son cou, donnant à chacune sa louange particulière.
Je sais bien que ces louanges regardent plus les perfections de l'âme de la très précieuse Vierge, qui sont cachées en son intérieur, que celles de son corps qui paraissent en son extérieur, celles-ci n'étant que les figures de celles-là.
Mais je sais bien aussi que cela n'empêche pas que les extérieures et corporelles ne méritent les éloges qui leur sont donnés par la bouche du Saint-Esprit, pour les raisons alléguées dans la section précédente.

On ne peut s'égarer en suivant les traces de cet adorable Esprit qui nous a été envoyé du ciel pour être notre lumière et notre conduite. Aussi plusieurs saints Pères et signalés Docteurs, entrant dans ses inclinations, ont écrit et publié hautement les louanges du sacré corps de la Mère du Sauveur, et de ses saints membres.

Nous avons ouï saint Jean Damascène parlant sur ce sujet, dans la section précédente.
Je pourrais vous faire parler ici un excellent auteur qui n'est pas moins saint que savant. C'est Richard de Saint-Laurent, Pénitencier de la célèbre église de Rouen, qui florissait il y a plus de quatre cents ans, lequel, dans le second des douze livres qu'il a faits à la louange de la bienheureuse Vierge, nous fait voir que nous sommes obligés de rendre un honneur particulier à tous les membres et sentiments de son corps virginal, parce qu'ils ont tous été employés à rendre plusieurs services à notre adorable Sauveur pendant qu'il était en ce monde, et coopérer avec lui par ce moyen à l’œuvre de notre Rédemption. Ce saint docteur dit quantité de belles choses sur cette matière, que vous pourrez voir dans son livre (1).

(1) De laud B. V. lib 2, partit. 2.

(à suivre)
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Laetitia
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Re: Le Cœur Immaculé de Marie

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Mais il n'y a rien de si beau que ce que le Docteur des docteurs et le Saint des saints, Jésus-Christ Notre Seigneur, a dit lui-même sur ce sujet. Il n'appartient qu'au Fils unique de Marie de louer dignement sa très bénite Mère en tous les membres sacrés de son très pur corps, et en toutes les perfections de son âme sainte, qui sont figurées par les excellences de son corps, ainsi que vous l'allez voir par ses paroles qui sont rapportées dans les livres de sainte Brigitte, approuvés de trois Papes, Urbain VI, Boniface IX et Martin V, et de deux Conciles généraux, du concile de Constance et de celui de Bâle. Voici comme le Fils de Dieu parle à sa très digne Mère (1) : « Je suis couronné Roi en ma divinité, sans commencement et sans fin. La couronne qui n'a ni commencement ni fin signifie ma puissance, qui n'a point commencé et ne finira jamais. Mais j'ai encore une couronne que je regarde en moi, et je suis moi-même cette couronne, et c'est la couronne qui est préparée à celui qui m'aimera de tout son cœur. C'est vous, ma très douce Mère, qui avez gagné et attiré sur vous cette divine couronne, par justice et par amour. Car tous les Anges et tous les Saints rendent témoignage que votre amour a été plus ardent envers moi et que votre chasteté a été plus pure que tout autre amour et toute autre pureté.

Aussi est-il vrai que votre précieux chef a été comme de l'or pur et brillant, et vos beaux cheveux comme les rayons du soleil; parce que votre très pure virginité, qui est en vous comme le chef de toutes les vertus, et qui y a étouffé tous les dérèglements de la sensualité, étant jointe à une très profonde humilité, a merveilleusement éclaté devant moi et m'a été très agréable. C'est pourquoi, c'est à bon droit que vous êtes appelée Reine, et que vous portez une couronne qui vous donne une autorité souveraine sur toutes les créatures. Votre incomparable pureté vous donne la qualité de Reine, et votre éminente dignité vous met la couronne impériale sur la tête.

« Votre front angélique a été orné d'une blancheur nonpareille, qui signifie la pudeur de votre âme qui porte en soi la plénitude de la plus haute science et la douceur de la plus profonde sapience.
« Vos très pudiques yeux ont été si lumineux devant mon Père, qu'il se contemplait en eux comme dans un beau miroir, d'autant qu'il voyait dans les yeux de votre âme que vous ne vouliez rien que lui, et que vous ne désiriez aucune chose que selon sa très adorable volonté.
« Vos bénites oreilles ont été très pures et très saintes, spécialement quand vous les avez ouvertes à la voix de l'Archange saint Gabriel, lorsqu'il vous a déclaré mes desseins, et que moi, qui suis Dieu, ai été fait chair dedans vous.
« Vos très chastes joues ont été embellies d'un très beau teint, c'est-à-dire d'un teint blanc et vermeil; parce que le bon exemple de vos louables actions et la beauté lumineuse de vos saintes mœurs m'ont donné un contentement indicible. Certainement mon Père recevait tant d'éclat de vos mœurs, qu'il m'ont donné un contentement indicible. Certainement mon Père recevait tant d'éclat de vos mœurs, qu'il n'a jamais détourné ses yeux de dessus vous, et c'est par l'amour qu'il vous a porté et que vous avez eu pour lui que son amour et sa grâce ont été donnés à tous.
« Votre divine bouche a été comme une lampe toujours ardente et luisante: ardente au dedans et luisante au dehors, parce que les paroles et les affections de votre âme ont été ardentes au dedans par les divines lumières dont elle a été enflammée, et luisantes au dehors par la disposition très louable de vos actions extérieures et par le très bel accord de toutes vos vertus. Véritablement, ma très chère Mère, la parole de votre bouche a attiré ma divinité en vous, et la ferveur de votre divine douceur ne me permettait point de me séparer jamais de vous, parce que vos paroles sont plus douces que le miel.
« Votre sacré cou est droit et élevé d'une façon très noble et très belle; d'autant que la justice et la sainteté de votre âme la tient toujours dressée vers moi, de telle sorte qu'elle n'a jamais penché vers aucun mal. Et comme le cou n'a aucun mouvement que celui qu'il reçoit de la tête, aussi toutes vos intentions et toutes vos actions n'avaient aucun mouvement que par ma divine volonté.
« Votre bienheureuse poitrine a été remplie de la suavité de toutes les vertus, de telle sorte qu'il n'y a aucun bien en moi qui ne soit en vous; d'autant que vous avez attiré en vous toute sorte de bien par la douceur de vos mœurs, quand il a plu à ma divinité d'y faire son entrée, et mon humanité d'y prendre sa demeure et de se repaître du lait de vos saintes mamelles.
« Vos saints bras ont été doués d'une excellente beauté, par l'éclat de la véritable obéissance et par la souffrance des travaux. C'est pourquoi vos mains ont été dignes de toucher ma divine humanité, et moi, qui suis Dieu, ai pris mon repos entre vos bras.
« Votre ventre virginal a été très pur, comme de l'ivoire et comme un vase enrichi de pierres précieuses, parce que la force de votre conscience et la ferveur de votre foi ne s'est jamais affaiblie ni attiédie, non pas même dans les plus pressantes tribulations. Les murailles de ce ventre sacré, c'est-à-dire de votre foi, ont été comme un os très brillant; ce qui marque l'excellence de votre prudence, de votre justice, de votre force, de votre tempérance et de vos autres vertus, les quelles ont reçu leur perfection de votre éminente charité.
« Vos pieds sacrés étaient très purs, comme embaumés de la douce odeur de plusieurs herbes odoriférantes; d'autant que votre espérance et toutes les affections de votre âme étaient toujours droits à moi, qui, suis votre Dieu, et répandaient une odeur très agréable par votre bon exemple, qui était capable d'attirer tout le monde à vous imiter.
« Enfin vos très pures entrailles m'ont été si désirables, et les vertus de votre âme si agréables, qu'étant descendu du plus haut des cieux, non seulement je n'ai pas dédaigné, mais j'ai pris un très singulier contentement de faire ma demeure dedans vous. C'est pourquoi, ma très chère Mère, cette couronne, laquelle n'est autre que moi-même, qui suis Dieu et qui avais dessein de me faire homme, n'a dû être mise sur autre tête que sur la vôtre, parce que vous êtes véritable ment Vierge et Mère, et la souveraine Impératrice de toutes les reines.
« Voilà les éloges merveilleux que Notre-Seigneur donne aux sens et aux membres sacrés du corps virginal de sa très précieuse Mère, pour nous apprendre qu'il n'y a rien en elle qui ne soit digne d'être honoré de toutes les créatures, puisque le Créateur même l'a tant exaltée.

(1) Filius loquitur: Ego sum coronutus Rex in Deitate mea sine principio et sine fine, nec initium habet corona mea nec finem, significans potestatem meam, quae non habuit principium neque babebit finem. Verum ego aliam, coronam habui custoditam in me, quae quidem corona sum ego ipse Deus. Haec autem corona praeparata fuit ei quae maximum charitatem haberet ad me, et hanc coronam, dulcissima Mater mea, vicisti, et traxisti ad te cum justitia et charitate. Nam de hoc testimonium perhibent Angeli et alii Sancti, quod in te ardentior fuit charitas ad me, et castitas tua purior omnibus, quae placuit mihi super omnes.
« Caput quippe tuum fuit quasi aurum fulgens, ct capilli quasi radii solis. Quia tua mundissima virginitas, quae est in te quasi caput omnium virtutum, et continentia omnium illicitorum motuum, placuerunt et fulserunt in conspectu meo cum omni humilitate. Ideo merito vocaris coronata Regina super omnia quae creatu sunt: Regina propter munditiam, coronata propter excellentem dignitatem.
« Frons tua fuit incomparabilis albedinis, significans verecundium conscientiae tuae, in qua plenitudo est humunae seientiae, et dulcedo divinae Sapientiae lucet in ea super omnes. Oculi tui fuerunt, in conspectu Patris mei, sic lucidi, quod se speculabuntur in eis, quia in spirituali visu tuo et intellectu animae tuae videbat Pater omnem voluntatem tuam, quod nihil volebas nisi ipsum, et nihil desiderabas nisi secundum ipsum. Aures tuae fuerunt mundissimae, et apertae tanquam fenestrae pulcherrimae, quando protulit tibi Gabriel velle meum, et quando ego Deus factus sum in te caro. Genae tuae fuerunt de optimo colore, scilicet albo eL rubicundo, quia fama operum tuorum laudabilium, et pulchritudo morum tuorum placuerunt mihi, quibus quotidie inflammabaris. Vere ex pulchritudine morum tuorum guadebat Deus Pater, et nunquam avertit oculos suos a te, et ex charitate tua omnes obtinuerunt charitatem.
« Os tuum fuit quasi lampas intus ardens, et lucens ab extra, quia verba et affectiones animae tuae fuerunt ardentes interius divina intelligentia, et exterius splendentes ex dispositione laudabili tuorum motuum corporalium, et concordantia pulcherrima tuarum virtutum. Vere, Mater charissima, verbum oris tui traxit quodammodo Dei tatem meam in te, et fervor divinae dulcedinis tuae nunquam sepa rabit me a te, quia verba tua dulcia sunt super mel et favum.
« Collum tuum est nobiliter erectum et pulcherrime elevatum, quia justitia animae tuae plene est erecta ad me, et secundum velle meum mobilis, quia nunquam inclinata fuit ad aliquod malum su perbiae. Sicut enim collum curvatur in capite, Sic omnis intentio et operatio tua flectebatur ad voluntatem meam.
« Pectum tuum plenum fuit omni virtutum suavitate, in tantum quod non est bonum in me quod non sit in te, quia traxisti omne bonum in te, ex morum tuorum dulcedine, quando Deitati meae placuit intrare ad te, et humanitati meae habitare tecum, et bibere lac ma millarum tuarum.
« Brachia tua pulchra fuerunt per veram obedientiam et tolerantiam laborum. Ideo corporales mAnus tua tractaverunt Humanitatem meam, et quietus fui inter brachia tua cum Deitate mea.
« Venter tuus fuit mundissimus sicut ebur, et sicut locus ex vir tuosis lapidibus splendidissimus, quia constantia conscientiae tuae et fidei nunquam tepuit, sed nec in tribulatione potuit vitiari. Hujus itaque ventris, id est fidei tuae, parietes fuerunt quasi aurum fulgen tissimum,in quibus notatur fortitudo virtutum tuarum, et prudentia tua, et justitia, et temperantia, cum perfecta perseverantia, quia ipsae omnes virtutes tuae perfectae fuerunt divina charitate.
« Pedes tui mundissimi et loti erant, quasi pleni herbis odoriferis, quia spes et affectus in me tui erant recta ad me Deum tuum, et odorifera ad aliorum exemplum et imitationem.
« Hic itaque locus ventris tui, tam spiritualis quam corporalis, tantum mihi erat desiderabilis, et tantum anima tua mihi placita, quod a summo caelo descendere ad te, et in te morari non abhorrui, imo suavissime delectatus sum. Ideo, Mater charissima, corona illa quae custodiebatur in me, quae quidem coronae sum ego Deus qui debebam incarnari, nulli debuit imponi nisi tibi, quia es vere Mater et Virgo, et Imperatrix omnium reginarum. »
Revel. S. Birgittae, lib 5, in libro Quaest., rev. 4.
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Laetitia
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Re: Le Cœur Immaculé de Marie

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SECTION II.- Continuation du même sujet.

Le Fils de Dieu ne se contente pas de célébrer lui-même les louanges de tous les sacrés membres du saint corps de sa glorieuse Mère; mais il a inspiré aussi cette dévotion à plusieurs de ses Saints, comme nous avons déjà vu dans les deux sections précédentes, et comme nous allons le voir encore en celle-ci.

C'était un des exercices de la piété du bienheureux Herman, de l'Ordre de Saint-Dominique, l'un de ses premiers enfants, et compagnon de Saint Hyacinthe (1), qui avaient tous des tendresses extraordinaires pour leur divine Mère. Voici les bénédictions qu'il donnait tous les jours aux bénis membres de la Mère de toute bénédiction :

« Béni Soit votre sein maternel, Ô glorieuse Vierge, dans lequel toute la gloire et la grandeur du ciel a été renfermée l'espace de neuf mois.
Béni soit votre Cœur très aimable, qui est le sanctuaire de tous les mystères de notre Sainte religion.
Bénites soient vos chastes mamelles, qui ont donné la nourriture à celui qui nourrit toutes choses.
Bénites soient vos Saintes mains, qui ont tant de fois emmailloté le Créateur de l'univers.
Bénis soient vos bras sacrés, qui ont porté celui qui porte toutes choses par sa divine vertu.
Bénite soit votre poitrine virginale, sur laquelle a reposé celui qui est le repos éternel des bienheureux.
Bénite soit votre divine bouche, qui a eu si souvent le bonheur d'être collée aux lèvres adorables sur lesquelles la Divinité est assise.
Bénis soient tous les autres membres de votre saint corps, par le moyen duquel la malédiction a été détruite, et la bénédiction nous a été donnée. »


Parmi ces bénédictions, ce bienheureux enfant de la Mère de belle dilection prenait un particulier contentement, et s'éjouissait avec elle des joies qu'elle avait reçues en chacune des actions qui sont marquées dans les susdites bénédictions; puis il passait aux vertus intérieures qu'elle avait pratiquées dans ces mêmes actions.

« Bénite soit, disait-il, Ô Vierge sainte, votre divine foi;
bénite soit votre admirable confiance;
bénite soit votre ardente charité; bénite soit votre très profonde humilité; bénite soit votre immaculée pureté;
bénite soit votre modestie angélique; bénite soit votre force invincible. »


Et ainsi il bénissait toutes les autres vertus de la Mère des vertus, et se réjouissait de ce qu'elles étaient toutes en un degré très éminent dans sa divine Mère, et de ce qu'elle avait donné une gloire souveraine et un contentement ineffable à la très sainte Trinité en les pratiquant si parfaitement.

A chaque bénédiction il ajoutait la Salutation angélique, et enfin il les terminait toutes par ces dévotes paroles : Jesu suavissime, dignare me meam tuamque Matrem, super omnes speciosam, ore laudare, corde admirari et imitatione subsequi :

« Très doux Jésus, faites-moi la grâce, s'il vous plaît, que ma bouche soit employée à louer, mon cœur à admirer, et tout ce qui est en moi à imiter votre sainte Mère et la mienne, qui est la plus admirable et la plus aimable de toutes vos créatures. »

Ce pieux exercice du bienheureux Herman, au regard de la Reine du ciel, obligea cette Mère de grâce de le combler de tant de faveurs, qu'elles ne se peuvent exprimer. Entre autres, elle lui obtint de Dieu un si grand don et une telle efficace pour annoncer la parole de Dieu, lui ayant miraculeusement délié la langue qu'il avait grasse et bégayante, et lui ayant ouvert l'esprit pour entendre les saintes Écritures, qu'il serait bien difficile de raconter les fruits qu'il fit par ses ferventes prédications, tant en Allemagne, d'où il était, qu'en Pologne où il fut envoyé avec saint Hyacinthe par leur bienheureux Père saint Dominique.

Ce favori de la Mère de Dieu, le bienheureux Herman, n'est pas le seul que Notre-Seigneur a excité de bénir et louer ainsi les saints membres de son vénérable corps. Voici encore d'autres semblables bénédictions, conte nues dans l'oraison suivante qu'il a inspirée à sainte Brigitte, et qui est rapportée dans ses livres imprimés en latin, immédiatement devant le dernier livre qui est la fin de ses œuvres.

(1) Le bienheureux Herman fut reçu par saint Dominique lui-même dans l'Ordre des Frères Prêcheurs, en 1216, en même temps que saint Hyacinthe, et envoyé avec lui en Pologne, où il devint prieur du premier monastère dominicain fondé en ce pays. Le P Eudes semble avoir tiré ce qu'il dit ici d'un ouvrage intitulé Ephemeris seu calendariurn SS. Genitricis Dei Mariae, auctore Ant. Balinghem S. J., au 7 avril, n. 6. Nous n'avons pu découvrir ce volume. Voici un autre témoignage sur le bienheureux Herman : De hoc beato Hermanno scribit Nicolaus Jansenius in lib. De Beneficiis F.F. Prae dicat. a B. Virg. collatis, cap. 12, in hunc modum: « Ei non paucis annis continuum ferme exercitium fuit oratio et meditatio; sed praecipuo quodam affectu Deiparam complectebatur. Inter caeteras vero meditationes quas crebro repetebat, solitus erat distincte contemplari partes nobiliores corporis Virginei. Et quidem expendebat Cordis ejus magnitudinem, quo Deum prae rebus omnibus adamavit, et quod forma triangulari, Deus unus et trinus solus implevit. Considerabat majestatem virginalis uteri, in quo, velut throno, novem mensibus Deus homo recubuit. Admirabatur nobilitatem uberum quae homini Deo lac infudere, praestantiam manuum quae pannis involvere, felicitatem brachiorum quae indormientem toties gestavere, ac caeterorum denique membrorum excellentiam, ad quodlibet dicens Ave Maria. » Apud Migne, Sumn., aur. tom. 3, col, 709-710.
(à suivre)
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