Un Saint Solitaire franciscain: Benoît-Joseph Labre

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Alexandre
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L'imitation de Marie, chapitre II, alin.4: "Heureux celui qui se considérant en ce monde, comme un voyageur et comme un étranger, garde pour compagnon Jésus et pour hôte Marie."

Poursuivons avec notre récit:
"Pieux entretiens avec le P.Temple

Un tel pèlerin pouvait-il passer inaperçu à Lorette?
Parmi les compagnons que Benoît y rencontra se trouvait un vieillard de 88 ans, Georges Zitli. Ce personnage, peu ordinaire lui-même, était un ancien ministre de la cour de Perse et gouverneur de Téhéran. Victime d'une révolution de palais, il s'était expatrié en Moscovie et avait abjuré l'islamisme. Il mena dès lors la même vie dévote et errante de Benoît, rencontra celui-ci à Lorette et à Rome, recueillit sur son compte maint trait édifiant, et conçut pour son jeune émule autant d'admiration que d'amitié.
Un jeune clerc sacriste de la basilique, dom Valeri, aborda Benoît un soir que celui-ci, après la fermeture des portes, s'était assis près du clocher, la tête appuyée sur la main, les regards tournés vers le ciel comme pour continuer sa méditation, et l'interrogea longuement. Plusieurs fois il le revit, tantôt les yeux fixés sur le tabernacle dans un élan de prière ardente, tantôt étendu sur la pierre, la tête reposant sur son paquet de hardes. Sa première réflexion qu'il avait affaire à un grand Saint ou à un grand fou. Mais il ne tarda pas être fixé: "Ah! vraiment c'est une âme sainte, embrasée de l'amour de Dieu!"
L'un des pénitenciers de la basilique, le P.Almerici, le vit arriver à son confessionnal, soupirant et sanglotant. "Mon père, je suis un ingrat, rempli d'iniquités, indigne de vivre sur la terre!"
Comprenant qu'il était en présence d'une âme très élevée et d'une conscience très délicate, celui-c l'interrogea sur les défauts auxquels un vagabond pouvait être le plus porté, notamment le vice impur. Benoît lui avoua les rudes assauts que lui livrait le démon dans sa chair et les austérités il recourait pour en triompher, ajoutant qu'avec l'aide du Seigneur, il n'avait jamais consenti à une suggestion honteuse, quelle qu'elle fût. Le père pleinement convaincu de l'innocence de ce serviteur de Dieu, et le voyant solidement établi dans la voie de la perfection, lui donna alors sa simple bénédiction et lui intima l'ordre de communier.
L'ayant, une autre fois, longuement entretenu de la Sainte Trinité et de la Passion: "Je croyais, témoigna-t-il, entendre sainte Thérèse. J'étais confus et surpris, mais je jouissais d'avoir rencontré une âme choisie de Dieu pour être élevée à la connaissance de ces sublimes mystères."
Benoît lui ayant confié qu'il était à son onzième pèlerinage, il lui donna rendez-vous à l'année suivante, mais le Saint lui répliqua: "Mon père, je dois aller dans ma patrie!"
C'est avec le pénitencier français de Lorette, le P.Temple, que notre pèlerin nourrit les relations les plus assidues et les plus intimes, au point que le récit de leurs entretiens constitue un vrai corps de leur doctrine mystique.
Après avoir longtemps fait peu cas des récits de dom Valéri et de ses premières impressions personnelles, l'éminent religieux résolut d'étudier pour de bon son pénitent.
"Quel est votre régime, lui demanda-t-il d'abord.
- J'ai coutume, répondit le pèlerin, de me contenter ce qui m'est offert par charité.
- Et si l'on vous offre rien?
- Il y a la porte des couvents.
- Et s'il n'y en a pas, dans l'endroit, où se fasse une distribution de vivres?
- Il y a des épluchures que l'on jette par les fenêtres des maisons, et où je trouve toujours quelque écorce de pomme ou d'orange, quelque feuille de chou, des fruits gâtés ou d'autres rebuts dont je mange suffisamment pour me sustenter jusqu'au lendemain.
- Mais enfin,si vous ne les trouvez pas, voulez-vous tenter Dieu et le forcer à faire des miracles?
- Alors je vais dans la campagne: il ne manque pas, le long des haies des chemins, de racines et d'herbages dont je me nourris, de fossés ou de mares où je me désaltère."

Le pénitencier, à qui la précision de termes et l'assurance de ton chez son interlocuteur ne permettaient aucun doute su ses rebutantes singularités, prit un regard sévère, et lui demanda si un pareil genre de vie avait eu l'approbation de ses directeurs spirituels.
"Tantôt oui, tantôt non, selon l'inspiration de Dieu, répondit Benoît, et je leur ai toujours obéi."
Le père se fit plus rude, exigea passeports et papiers, attestations de confessions et de communions: benoît exhiba les premiers, resta muet sur le chapitre des secondes, gardant, tel Jésus au prétoire, les yeux baissés et les mains croisées sur sa poitrine.
Etait-ce opiniâtreté ou humilité? Etait-ce un démon ou un saint que ce bizarre pèlerin? Le P.Temple supplia ses confrères du cuvent de l'assister de leur prières.
Il allait s'en rendre compte, au cours des conférences qu'il tiendrait avec son pénitent en six séances de plusieurs heures chacune, dont il nous a transmis les conclusions.
" L'union mystique de Benoît avec Dieu était perpétuelle. Il eût voulu, pour ne pas cesser d'en goûter les charmes, supprimer de sa vie les heures de sommeil. S'éveillait-il à quelque heure que ce fût, il se tournait vers Dieu. Etait-il affligé de sécheresses spirituelles, il les offrait à Dieu en union avec le sauveur à Géthsémani. Les créatures elles-mêmes, loin d'être pour lui une occasion de distraction, lui servaient de sujet d'oraison. La prière était son occupation habituelle, son travail, sa récréation, ses délices. Il mettait une confiance toute filiale dans le Dieu qui avait tant souffert pour lui.Il évitait de traverser les pays hérétiques, et s'il lui arrivait d'entendre des mécréants ou d'éprouver quelque tentation contre la foi, il se réfugiait en Dieu par un vigoureux Credo, une oraison jaculatoire. Comme François d'Assise, il était un charbon embrasé, tout absorbé dans la flamme du divin amour. Au seul nom de Dieu, il se dressait, s'enflammait, et toutes les fibres de son coeur semblait résonner, comme les cordes de la lyre sous l'archet."
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Alexandre
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Message par Alexandre »

"Abordant le chapitre de la charité envers le prochain, le P.Temple découvrit dans l'âme de son pénitent la même élévation.
"Comme il voyait en ses compagnons de misère les membres de Jésus-Christ, il leur faisait l'aumône de tout ce qu'il avait. Ses bienfaiteurs, pas un seul jour il ne les oublia devant Dieu. Il visitait les malades, leur prêchait le résignation, et la confiance. Ses insulteurs et ses agresseurs: Oh! ceux-là étaient ses vrais amis; il en convertit, par sa mansuétude, plusieurs qui, précisément, allèrent se confesser au P.Temple. et avec quelle tristesse ne présidait-il pas les châtiments, éternels ou temporels, que Dieu réserve aux pécheurs.
"Il n'avait de sévérité qu'à l'égard de lui-même. C'est ainsi qu'il n'avait jamais eu de complaisance coupable dans l'usage de ses sens. Son emploi du temps était rigoureusement tracé le matin, examiné le soir. Il pratiquait une obéissance joyeuse, la patience dans les épreuves, le détachement absolu même des choses insignifiantes, la recherche ingénieuse de la souffrance..."
Malheureusement, ces sublimes entretiens cessèrent subitement le troisième jour.
Le dernier venait d'avoir lieu, au confessionnal. Le saint ne s'était pas éloigné de trois pas que les pèlerins, s'approchant du pénitencier, s'écrièrent: "Oh! mon père quel grand saint vous avez confessé!"_"C'est un nouvel Alexis" disait celui-ci, "c'est un Louis de Gonzague", disait celui-là...
A ces mots, Benoît fût pris de peur comme si la foudre eût éclaté à ses côtés. On le vit, contre son habitude, accélérer le pas et sortir de la basilique. c'était fini: dès lors, il évita de rencontrer son confesseur et fréquenta la nef opposée à la place qu'occupait ce dernier.
Quelques jours plus tard, il quittait Lorette. Les années suivantes, à chacun de ses retours successifs, le P.Temple chercha à renouer des relations avec Benoît: ce fut en vain; le Saint, intraitable dans son humilité, parvint à déjouer tous ses calculs, même ses tentatives de lui faire l'aumône.
Le père savait le motif de cette rupture et en souffrait. Il contemplait inlassablement son ancien pénitent tandis que celui-ci était en méditation à la basilique. "C'est un saint, et un grand saint, répétait-il en parlant de lui, un séraphin d'amour, un ange de la terre, ou, si l'on veut, un citoyen exilé du ciel."
L'exil était encore sur le point de prendre fin, et le Saint n'ignorait pas qu'il ne reviendrait plus à Lorette.
"A l'année prochaine!" lui souhaitait Barbe Sori. "Si je ne reviens pas , lui dit-il en souriant, nous nous reverrons en Paradis!"
L'abbé Verdelli lui adressa le même adieu, reçu le même rendez-vous au Ciel.
Dans la riche basilique lorétaine, le saint Pèlerin, moins heureux que sainte Thérèse de l'Enfant-Jésus, pèlerine d'un jour, n'a point retrouvé de place: lui-même, de la-haut, a dû inspirer aux hommes cet oubli. Mais les mendiants, eux, ne laissent pas prescrire son souvenir et usent encore aujourd'hui du nom de leur saint prédécesseur pour apitoyer sur leur sort les pèlerins de Notre-Dame."

Card. Pie: " Saint Alexis, vers lequel un attrait particulier appelait notre Bienheureux, et cependant dont il cessa de visiter le sanctuaire (Lorette), parce que son humilité s'était effarouchée du rapprochement trop naturel qu'on pouvait faire entre lui et cet illustre déserteur de la maison paternelle. Mais la société la plus douce de Benoît Labre, c'est jésus et sa Mère. Le sanctuaire où s'est accompli le mystère de l'incarnation, le sanctuaire témoin de toutes les vertus intimes de la famille, Benoît, qui porte aussi le nom de Joseph, et qui honore grandement le chaste époux de la divine Vierge, voudrait ne s'en détacher jamais; et, en réalité, il ne s'en détacherait pas, si le sens chrétien dont il est pénétré ne lui avait fait découvrir dans Rome une source encore plus féconde de vie chrétienne que partout ailleurs. Là il passe des jours, et quand il le peut, ses nuits dans les églises; il va vénérer toutes les mémoires des saints apôtres et des martyrs; il est si assidu devant l'adorable Sacrement, qu'on l'a baptisé le pauvre des quarante heures.
Voyez-le tantôt immobile comme une statue, tantôt emporté vers Dieu par un mouvement de tout son être qui se traduit dans sa posture extérieure."
"A travers les déchirures de ses vêtements, la lumière de la grâce, je dirais presque de la gloire, ruisselle de toute part. "Voyez donc ce pauvre, s'écriait un jour une femme, comme il est bon! Comme il est beau!"


https://nominis.cef.fr/contenus/saint/1 ... lexis.html
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Alexandre
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"La région lorétaine

Ne quittons pas la région lorétaine sans saluer les lieux circonvoisins auxquels restent attaché le souvenir du Saint.
A Cossignano, dom Michel santucci l'avait trouvé un matin appuyé contre la porte de sa demeure, récitant le De profundis en un latin qu'il prononçait à la française. il obtint de lui qu'il lui donnât, entre temps, des leçons de sa langue maternelle. Les exercices portèrent sur les sermons, récemment parus, de l'abbé Clément, prédicateur du Roi.
Le lecteur s'animait quand l'orateur réclamait, pour confondre la philosophie du siècle, des mystiques, des immolés. Il se levait, pour lire avec chaleur: "Notre unique désir est de sauver nos frères et de devenir, s'il le faut, victimes d'anathème pour les sauver!" les conversations portèrent sur les pieux usages de la Charteuse et de la Trappe, sur l'état de l'Eglise de France, sur la regrettable proscription de l'ordre des Jésuites. Le maître improvisé n'accepta de son respectable élève que son hospitalité et s'empressa de distribuer les vêtements qu'il avait reçu de lui.
Une famille de Montacavallo garde avec piété la pesante gourde en grès qui alourdissait sa besace, et les sandales trouées que le saint Pèlerin laissa, à Osimo, en échange de plus utilisables.
Au petit village de Numana, on vénère, au-dessus de l'autel, le crucifix miraculeux dit de Sirolo."
"Le Christ, de forme carolingienne, au corps droit, aux bras tendus horizontalement, une couronne sur la tête, saigna, dit la légende, sous le coup de pique sacrilège d'un juif. Et depuis lors, un vieux dicton des Marches déclare: "Qui va a Loreto et ne va pas a Sirolo, voit la Mère et le Fils."
"Benoît, en le contemplant, le comparait à celui de Lillers (à 15km environ d'Amettes, Pas de Calais) qu'il était allé "servir" dans son enfance, Christ aux "aux cinq cent miracles", ou plutôt Saint-Sang Miracle, dont l'histoire est analogue: mais, en Artois, c'est sous la balle d'un arquebuse d'un huguenot que le prodige aurait eu lieu."
"En face se dresse le plateau de Castelfidardo, dominé aujourd'hui par le mausolée piémontais et la statue de Cialdini montrant à ses Garibaldiens la direction de Rome. Benoît Labre prévoyait-il que sur ces pentes, moins d'un siècle plus tard, sus l'uniforme chevaleresque des zouaves pontificaux, tomberaient, pour la cause du Saint-Siège, de jeunes Artésiens, élèves du Petit Séminaire d'Arras, à qui l'appel au sacrifice se serait fait entendre au cours de la grandiose procession organisée en son honneur en 1860?
Un jour de 1781, à son départ de Rome, l'abbé Mancini chargea le saint pèlerin d'un message pour l'abbesse du monastère de sainte Claire à Mont Lupone: "Je vous envoie, lui écrivait-il, le saint Pauvre qui passe sa vie en oraison."
Il suffisait à celui-ci de faire un léger détour par Macerata et la mer pour atteindre le couvent, à quelques milles de Lorette. Il y parvint le matin du Jeudi Saint.
Oublieux de ses fatigues, il commença par assister à l'office, puis se présenta au parloir. L'abbesse, ayant pris connaissance du message, vint à la grille, suivie de ses religieuses. Entre elle et le saint Pauvre commença une conversation toute spirituelle: "Dieu exposait Benoît, est gravement offensé. Les péchés des hommes, la mondanité de trop d'ecclésiastiques, l'inobservance du Carême, le développement du luxe, le progrès des idées nouvelles impies et subversives, tout cela appelle un châtiment, qui sera suivit de miracles de conversion. Cela ne tardera guère, quoique cela ne soit pas encore pour le présent." C'était la seconde fois que les lèvres prophétiques de Benoît annonçait la grande Révolution.
Il s'était tu, ayant aperçu les religieuses réunies au parloir et le dévisageant à l'envi.
"pauvre malheureux!" s'écria l'une d'elles à son aspect.
"- Malheureux, répliqua Benoît, ceux qui sont dans l'Enfer et qui ont perdu Dieu pour l'éternité!"

Ayant accepté à peine quelques aliments, il se leva tout à coup et sortit précipitamment: devant lui, à ses pieds, il avait vu la pieuse
Mère abbesse s'agenouiller et lui demander sa bénédiction.
" Eh bien! lui demanda dom Mancini à son retour à Rome, comment vous ont reçu les religieuses de Mont Lupone?
- Elles se sont moquées de moi, répondit-il, en se recommandant à mes prières comme si j'étais quelque chose de bon, tandis que je ne suis qu'un vil pécheur!"
"Près de là, au village de saint-Martin, de bons laboureurs, les Palotti, gens pratiques, l'ayant mis à l'abri d'une pluie torrentielle, jugèrent l'occasion propice pour tirer parti d'un saint qui devait être, pensaient-ils, dans les secrets de Dieu. Ils l'interrogèrent donc sur les bons numéro d'une loterie prochaine. On devine l'indignation de Benoît. "Ceci n'est pas l'affaire des pauvres!" répliqua-t-il.

Card.Pie: "Concupiscence de la chair, concupiscence des yeux, orgueil de la vie: voilà la triple puissance que le christianisme entend briser. Or le monde moderne a cassé ce triple anathème; et, des trois choses renversées par le Christ, il a fait la triple colonne du temple de l'humanité émancipée, le trépied de la chaire où elle trône et d'où elle rend ses oracles... Au-dessus du sensualisme abaissé qui s'arrête et qui se complaît dans la jouissance animale, s'élève le sensualisme raisonné qui veut devenir une doctrine et prétend à la dignité de l'idée. Conservatorisme donc et communisme ou socialisme; spiritualisme et matérialisme; libéralisme et despotisme; déisme et même athéisme: tout cela, comme on le voit, forme un concert assez discordant, et présente la religion moderne sous des noms et des aspects assez divers...
Or mes Frères, à cette génération qui ne connaît, ne sert et n'adore que la nature, voici que la providence vient opposer un phénomène inattendu. C'est un homme qui foule au pied tous les dons, tous les droits, tous les avantages même les plus légitimes de la nature; c'est un homme qui, prenant les préceptes et les conseils de l'Evangile pour la règle unique de son esprit et de ses actions, abandonne sa famille, son patrimoine, traite son corps en ennemi, épouse la pauvreté, l'abjection, le mépris, et ne vit ici-bas que pour Dieu; c'est un homme qui immole complètement les sens humain et la prudence de la chair pour n'obéir qu'à la sagesse surnaturelle; un homme qui prise si haut la virginale intégrité de la foi, la pureté de l'orthodoxie, qu'il ne peut supporter la rencontre d'un hérétique, et qui n'hésite point à tripler la fatigue d'un voyage pour éviter de mettre le pied sur une terre protestante."
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Alexandre
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"Fabriano.

S'il y eut, sur la route de Rome à Lorette, une étape préférée du saint Pèlerin, ce fut bien la petite cité intrapennine de Fabriano.
Il put y vénérer dans la crypte de l'église Saint-Blaise, en châsse d'or, et de pierres précieuses, le corps de st Romuald, le jeune saint pauvre et pénitent qui fonda, au XIè siècle, l'ordre des Camaldules. Il aimait aussi visiter l'église Saint-Jacques le Majeur, en attendant d'aller à Compostelle: le recteur, l'abbé Paggetti, recueillit dans son hôpital le pèlerin, sans d'ailleurs réussir à le faire user de lit ou de nourriture. Il lui suffisait de si peu pour nourrir "son misérable corps: il mio corpaccio, sa carcasse". Sa confession générale et ses confidences plongèrent le recteur dans l'admiration.
Dans l'intervalle, le pèlerin avait fait connaissance de Vincenza Rocca, une pauvre veuve qui lui avait offert du fil pour recoudre ses hardes en lambeaux. Celle-ci ne tarda pas à la conduire chez les trois soeurs Vincenza, Romualda et Virginia Fiordi, dont la dernière était, depuis neuf ans, retenue au lit par une cruelle maladie d'estomac.
"loué soit Jésus-Christ!" salua doucement Benoît -"Qu'il soit loué toujours!" répondirent-elles. Le Saint s'était assis au près du lit. Il écouta avec compassion le long calvaire de Virginia. Il lui représenta que ses douleurs étaient un effet de la bonté de Dieu à son égard, et l'engagea à les accepter saintement, jusqu'au jour, lointain encore, où elle passerait de ce lit en Paradis. Au cours de l'entretien, il lui révéla main secret de sa vie passée. celle-ci était pénétrée de bonheur: "C'est Jésus-Christ ou quelque saint du Ciel qui me parle, pensait-elle... Chaque mot qu'il prononçait m'était d'une si grande consolation! Je sentais en moi comme une force venue du Paradis."
L'heure du repas était venue. Le saint Pauvre, invité, accepta de manger très peu, après avoir récité tout la prière." Il me faut peu, répondit-il aux instances de ses hôtesses: le surplus ne serait bon qu'à préparer aux vers une plus grande pâture."
Durant tout le repas, Virginia et ses soeurs étaient suspendues à ses lèvres et oubliaient de manger; elles s'extasiaient devant ce pauvre en haillons qui "parlait de Dieu comme personne n'en avait parlé".
"Mais comment, interrogea Vincenza, devons-nous aimer Dieu, et quels sont les signes de cet amour?"
C'est alors que Benoît leur exposa, en l'appliquant à la situation de ses interlocutrices, cette parabole:
"Pour aimer Dieu, dit-il, il faut trois coeurs en un seul.

Le premier doit être tout de feu envers Dieu,
et nous faire continuellement penser à Dieu,
parler habituellement de Dieu,
agir constamment pour Dieu,
et surtout supporter avec patience le mal qu'il lui plaît de nous envoyer
pendant toute la durée de notre vie.

Le deuxième doit être tout de chair envers le prochain
et nous porter à l'aider dans ses besoins spirituels par l'instruction,
le conseil, l'exemple et la prière; il doit surtout s'attendrir pour les pécheurs
et plus particulièrement pour ses ennemis,
et demander au Seigneur de les éclairer pour les amener à la pénitence;
il doit être aussi plein de compassion pour les âmes du Purgatoire.


Le troisième doit être tout de bronze pour soi-même,
et faire abhorrer toute sorte de sensualité,
résister sans relâche à l'amour de soi, abjurer la volonté propre,
châtier le corps par le jeûne et l'abstinence,
et dompter toutes les inclinations de la nature corrompue;
car plus vous vous haïrez et plus vous maltraiterez votre chair,
plus grande sera votre récompense dans l'autre vie." (la prière des Trois Coeurs de saint Benoît-Joseph labre)


"Abordant la question du sacrement de pénitence, il fit le récit d'un songe qu'il avait eu.
" Je voyais, dit-il, trois processions différentes de pénitents.
La première était peu nombreuse, et composée de personnes vêtues de blanc;
La deuxième offrait de longues files avec des robes de couleur rouge;
et la troisième se composait d'une grande multitude portant des habits lugubres et de couleur noires."
Il expliquait alors comment les premières étaient les âmes purgées de tout péché et destinées aux célestes parvis, les secondes vouées à l'expiation du Purgatoire, les troisièmes condamnées à l'Enfer par leur mauvaises confessions.
"Oh! soupira-t-il, combien d'âmes sont précipitées dans les gouffres éternels par les mauvaises confessions! Elles y tombent, malheureusement, aussi pressées que les flocons de neige en hiver!"
Mais la présence du Saint chez les dames Fiordi s'était ébruitée. On affluait de tout le voisinage dans la petite chambre; on lui amenait des enfants à bénir. Parmi ceux-ci, Benoît avisa une petite fille de dix ans et, lui appliquant un passage de l'Evangile qui la concernait, lui prédit son entrée chez les Capucines di Castello.
L'entretien n'évoque-t-il pas ceux du Sauveur au puits de Jacob ou à Béthanie?
Il avait duré cinq heures. Pour remercier ces dames de leur bon accueil, le Saint demanda,du papier et écrivit la prière fameuse: "Jésus, roi de gloire, est venu en paix..." (écrite en entier ci-dessous) "qui vaudrait à leur maison, leur promit-il, d'être préservé de la foudre, de l'incendie et des tremblements de terre. Promesse qui se réalisa miraculeusement pour les Rocca et les Fiordi neuf ans après, lors d'un séisme qui détruisit la ville."

Prière de saint Benoît-Joseph Labre:

"Jésus, roi de gloire, est venu en paix, Dieu s'est fait homme, le Verbe s'est fait chair.
Jésus-Christ est né de la Vierge Marie.
Jésus-Christ allait en paix au milieu d'eux.
Jésus-Christ a été crucifié.
Jésus-Christ est mort.
Jésus-Christ a été enseveli.
Jésus-Christ est réssuscité.
Jésus-Christ est monté au ciel.
Jésus-Christ triomphe, Jésus-Christ règne.
Jésus-Christ gouverne.
Que Jésus-Christ nous délivre de tout mal, Jésus est avec nous!
Ainsi soit-il."


Card. Pie: "Car enfin, Dieu s'est encore réservé des moyens de se faire entendre; sa voix a des accents qui dominent toujours tous les bruits de la terre. cet homme méprisé du monde, le ciel lui donne pour auréole les miracles; l'Eglise lui donne pour piédestal, les autels: deux marques de distinction qui réveilleront toujours les esprits même les plus distraits.
Cet homme donc est un signe levé contre les siècle qui l'a vu naître et resplendir d'une gloire posthume. Il est un étendard déployé contre les doctrines et les tendances de l'une et l'autre époque. C'est un principe de la science que les contraires sont guéris par les contraires. Tout était contesté dans le code moral de Jésus-Christ: voici ce code observé dans sa dernière rigueur. L'Evangile était déclaré absurde, impossible: le voici pratiqué au pied de la lettre. Le remède est proportionné au mal, la résistance à l'attaque.
Seigneur tout-puissant, cette fois encore vous aurez choisi ce qu'il y a de plus faible pour confondre ce qu'il y a de plus fort."
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Alexandre
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Re: Un Saint Solitaire franciscain: Benoît-Joseph Labre

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"Assise. L'Italie

Le 18 novembre 1770, venant de Lorette, le saint Pèlerin vint à Assise.
La bourgade qui domine, des flancs du Mont Subasio, la plaine de Foligno, dans un de sites les plus pittoresque de l'Ombrie, ne possédait encore, à la fin du XVIIè siècle, que de rares habitants: des espaces déserts entouraient ses vingt églises et ses douze couvents de religieux mendiants.
Mais n'était-elle pas assez peuplée de souvenirs chers à la piété de Benoît? La basilique inférieure, la crypte et le tombeau du patriarche, l'église Sainte-Claire et le Christ miraculeux qui parla peut-être à Benoît, comme il avait parlé à François, pour lui demander de voler au secours de son Eglise, l'austère couvent de Saint-Damien, avec la fenêtre témoin du miracle eucharistique accordé à la foi de sainte Claire, avec le jardinet qui entendit le chant de Frère Soleil, puis l'Eglise nouvelle et celle de saint Ruffin, emplacement de la naissance et du baptême de saint François, les Carceri, théâtre des prédications aux petits oiseaux et de la fuite du démon, Sainte-Marie-des-Anges et la Portioncule, berceau des ordres franciscains, et point de départ pour le Ciel de celui qui chanta: "Bénis sois-tu mon Dieu , pour notre soeur la mort!"... Que de lieux propices à la méditation du saint Pèlerin, bien plus, à ses transports enthousiastes! Amant, lui aussi, de la Pauvreté, de l'Humilité, de la Virginité, le saint Pauvre d'Amettes n'allait-il pas produire en sa personne les traits et renouveler en son siècle les merveilles du saint Pauvre d'Assise?
Voulant s'attacher par un lien durable au Père Séraphique dont il voulait devenir l'imitateur, Benoît se fit inscrire, à Assise, dans l'Archiconfrérie du Saint-Cordon, à laquelle il resta fidèle jusqu'à sa mort.
Deux ans plus tard, il renouvela son pèlerinage à assise et le compléta par un premier séjour à l'Alverne. C'est là qu'en 1224 saint François avait reçu les stigmates. Fixant ses regards sur le tableau qui représentait cette scène, Benoît enviait les dards brûlants qui avaient transpercé les membres de son saint modèle, et suppliait le Ciel de le transformer, lui aussi, en image de Jésus-Christ.
L'année 1771, quittant encore Lorette, Benoît était descendu le long de l'Adriatique vers le Mont Gargan, et y avait fait ses dévotions à l'Archange saint Michel. A Bari, il ne se contenta pas de vénérer saint Nicolas en sa basilique, il entreprit une campagne de charité en faveur des prisonniers, dont les supplications, lancées à travers leur barreaux, l'avaient ému. Pour eux, il s'en allait par la ville, chantant les litanies de la Sainte Vierge, et tendant son chapeau, avec un succès qui faisait la consolation de ses malheureux protégés.
Un jeune vaurien l'injuria et lui lança des pierres. Atteint à la cheville, le saint Pauvre ramassa le projectile ensanglanté, le baisa, et l'alla tranquillement, tout en boitant, déposer au bord du chemin, sous les regards des passants indignés. L'on apprit peu après que le malandrin avait lui-même reçu d'un de ses pareils une pierre à la cheville et que la blessure avait dégénéré en gangrène mortelle.
Un habitant qui l'avait accueilli lui demanda de lui laisser en souvenir quelque avis spirituel. Au même instant, le marteau de l'horloge sonna l'heure. "Eh bien, dit le Serviteur de Dieu, chaque fois que vous entendrez cette cloche, souvenez-vous que vous n'êtes pas maître de l'heure suivante, et pensez en même temps à la Passion qu'a voulu souffrir Notre-Seigneur pour nous mettre en possession de l'éternité."
"Allusion prophétique et avertissement, continue le chroniqueur, car mon aïeul, quoique à la fleur de l'âge et en parfaite santé, mourut peu après."
Traversant la chaîne des Apennins par mauvaise saison, le Saint arriva à Naples vers la mi-décembre, à temps, vraisemblablement, pour assister au prodige de la liquéfaction du sang de saint Janvier, en la chapelle de la cathédrale, qui abrite fastueusement le chef du saint Martyr.
Sur le chemin de retour vers Rome, il fit halte à l'abbaye du Mont Cassin, illustrée par le grand saint Benoît, son patron principal, et où il laissa un nom en bénédiction.
On trouverait encore, sur les passeports et visas du saint Pèlerin, sur les registres des couvents ou des institutions hospitalières, sans perler des livres de famille ni des traditions particulières, d'innombrables localités italiennes marquées par son passage: Quargnento et Turin, en Piémont; dans les Abruzzes, Subiaco, où il vénéra de nouveau le grand patriarche d'Occident et sa soeur sainte Scholastique; en Romagne, Faênza, Argenta, Ravenne; on le rencontra en Lombardie à Milan, au tombeau de saint Charles Borromée dans la riche cathédrale, ou bien auprès de saint Ambroise, devant les corps de saint Gervais et Protais; on le rencontra à Vérone, au tombeau de saint Zénon... C'est dans toute l'Italie que le saint français avait porté le lumineux et bienfaisant spectacle de sa pénitence et de ses vertus.

Card.Pie: " Benoît Labre a concilié en lui ce double signalement que les prophètes avaient donné au Christ. C'est le rebut du monde, et c'en est l'élite. Un type supérieur se révèle à travers cette écorce grossière. Cette physionomie offre un mélange si rare, un assemblage de traits si disparates, qu'il est comme impossible d'en détacher son regard. Ecoutez. Un jour, un artiste français cheminait dans les rues de Rome, l'esprit tout plein du sujet qu'il voulait rendre. Il avait entrepris d'exprimer sur sa toile la figure du Christ humilié. Tandis qu'il errait, absorbé par sa préoccupation, tout à coup, il est comme tiré d'un rêve; il vient de discerner un visage qui répond, du moins en partie, à son idéal. A force d'instances, il parvient à faire poser à cet inconnu dont l'accent lui a révélé l'origine française. Plus il étudie ce mystérieux compatriote, plus il lui paraît que les traits de l'exemplaire divin se sont imprimés dans les traits de cet homme; après les avoir fidèlement calqués, il s'applaudit de posséder un modèle précieux de la tête du Sauveur."

Vrai portrait de notre Saint:
ttps://www.alamyimages.fr/photo-image-saint-be ... 06992.html
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Alexandre
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Re: Un Saint Solitaire franciscain: Benoît-Joseph Labre

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"Pèlerinages en chrétienté

Suisse, Allemagne, Belgique

D'autres pays en chrétienté, la Suisse, l'Allemagne, la Belgique, l'Espagne, la France pour moins favorisés qu'ils furent, ne manquèrent pas toutefois de recevoir dans leurs sanctuaires notre saint Pèlerin.
La Suisse s'enorgueillit de posséder Einsiedeln, dans la régions des lacs de Zurich, de Zug, de Schwyz et d'Uri, à l'abbaye Notre-Dame des Ermites, une statue miraculeuse de la Vierge Noire, que 200 000 personnes venaient annuellement vénérer. Des fêtes retentissantes en ont célébré, en 1934, dans un sanctuaire somptueux, le millénaire.
"Après la maison de la Sainte Famille à Lorette, déclarait saint Charles Borromée, je ne sache pas d'endroit où mon âme ait été plus qu'à Einsiedeln, enflammée de pieuses ardeurs."
Nous savons que Benoît y vint cinq fois. Cependant la destruction totale des archives par plusieurs incendies survenus au cours des siècles nous a privé de traits originaux relatifs à ces passages.
En revanche, d'abondantes anecdotes illustrent ses pèlerinages dans le reste de la Suisse.
A Wirlingen, au canton de Zurich, le curé ayant remarqué ses stations à l'église, réussit à l'attirer au presbytère; il éprouva un grand bonheur à l'entretenir de choses spirituelles et à pouvoir compter sur ses prières. Bien volontiers, il lui remit un vieux bréviaire que celui-ci avait sollicité.
A Mariastein, près de Bâle, où Marie est honorée sous le nom de Notre-Dame de la Pierre, le Pèlerin passa trois jours en prières dans la crypte du couvent. Chaque soir, il se rendait au village de Metzerlen, à une demi-heure de là, où une famille lui avait offert l'hospitalité. Il prenait alors son unique repas et consentait à passer la nuit dans la maison. Il finit même par accepter une paire de chaussures que les hôtes compatissants, touchés de sa misère, lui avaient acheté.
Il parlait du Bon Dieu et des saints Anges d'une manière si touchante que les personnes qui l'entendirent n'oublièrent jamais ses pieuses paroles et qu'au jour de son départ elles appelèrent un peintre verrier pour dessiner on portrait. C'est devant ce portait que la famille prit l'habitude de réciter désormais la prière du soir.
Sur la route d'Einsiedeln, Benoît venait à Soleure vénérer les reliques de saint Ours et de saint Victor, martyrs de la Légion thébaine, et prier au sanctuaire d'Oberdorf. Malmené par la police qui ne goûta pas ses allures, il fut soigné à l'hôpital, ensuite il gagna Fahr, puis Menzigen. Tous les couvents suisses qui l'avaient reçu obtinrent dans la suite de grandes grâces par son intercession.
En 1776, nous trouvons notre saint Pèlerin en Allemagne, à Coblentz.
Trois personnes pieuses, les soeurs Kronenthal, l'ayant remarqué à l'église des Jésuites, le conduisirent chez elles et lui servirent de la soupe. S'étant éloignées par respect mais l'observant néanmoins de façon indiscrète, elles le virent prier avec ferveur et élever la tasse vers le ciel avant de la consommer. En se retirant, les yeux baissés, il leur dit avec reconnaissance: "Dieu vous le rendra!" puis le salua d'un "Loué soit Jésus-Christ!" avant qu'elles n'eussent eu le temps de lui demander son nom. Ce ne fut que plus tard qu'elles le reconnurent, à son portrait que des millions de gravures répandaient dans l'univers; et, devenues toutes trois octogénaires, elles redisaient ses louanges.
Benoît se regarda de pénétrer à l'intérieur du pays, craignant d'y rencontrer l'hérésie.
Sur sa venue possible à Saint-Hubert, dans le Luxembourg belge, et dans les régions de Gand et de Charleroi, nous n'avons pas de certitudes absolues.
La tradition veut qu'en 1772, ayant quitté l'Italie pour se rendre en Espagne, il y soit passé.Il aurait alors accompli un pèlerinage à Notre-Dame de Gaverland; il aurait séjourné là neuf jours, et aurait couché dans la grange d'un certain joseph Van Broeck, laquelle est aujourd'hui convertie en chapelle, tandis que la statue du Pèlerin est exposée dans l'église d'un monastère voisin.
Sur la route, à Goutroux, une église lui est aussi consacrée.
On peut légitimement présumer qu'il s'agissait bien, dans ces passages, de Benoît-Joseph Labre, et non de quelques pieux mendiants comme on en rencontrait alors tant en Europe."

Card.Pie: "Pour être un grand chrétien et être un saint, il n'est pas nécessaire d'avoir en soi "l'étoffe d'un grand homme", d'un homme distingué selon le monde. Il est vrai, partout où l'Eglise proclame la sainteté, c'est qu'il y a constaté l'héroïsme.Nul chrétien n'est admis aux honneurs de la béatification, s'il n'est juridiquement établit qu'il a pratiqué, dans un degré héroïque, non seulement les vertus théologales de foi, d'espérance et de charité, mais encore les vertus cardinales de justice de prudence, de force et de tempérance, ainsi que les vertus morales qui en sont les annexes. On sait avec quelle rigueur, l'Eglise instruit ses sortes de procès. Benoît-Joseph a donc été un héros dans le sens le plus élevé de ce mot, puisqu'il est un saint."
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Alexandre
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"L"Espagne

Dans la catholique Espagne nous le trouvons, au contraire, avec certitude, quand en 1773, il se dirigea vers Compostelle.
Ses premières étapes furent Barcelone, et surtout Montserrat. En cette dernière localité, le vieux monastère de Notre-Dame est blotti, au coeur du massif, dans une vaste anfractuosité. c'est là que saint Ignace de Loyola, renonçant à la carrière militaire pour se consacrer au service du Christ et de Marie, était venu, à l'âge de trente ans, suspendre ses armes. Nous aimons à nous représenter les transports de bonheur avec lesquels notre saint Pèlerin goûta les charmes de cette abbaye bénédictine: recueillement, au milieu d'une nature sauvage et solitaire, psalmodie pieuse de l'office divin, modulation suave du Salve Regina aux pieds de la Sainte Vierge.
Il s'arrêta ensuite à Manrèse, dans la grotte où l'auteur des Exercices spirituels avait consacré une année entière à la prière, aux austérités et aux jeûnes, avant de lancer dans l'univers sa conquérante compagnie. Quid protest? se redit-il avec le saint fondateur, pour approfondir encore l'abîme qui le séparait du monde et de ses vanités.
A Saragosse, il vénéra Notre-Dame du pilier, la Virgen del Pilar, dans la seconde cathédrale de la ville. A Burgos, il logea quelques temps dans l'hospice de San Juan, destiné aux pèlerins, et alla vénérer le Saint Christ, soit à la Cathédrale, dans la Capilla del Santissimo Christo, soit en l'église Saint-Gil.
Enfin il parvint, à travers le Léon et la Galice, au terme de son voyage.
Compostelle! Santiago! Ville de légende, dont le nom avait été acclamé bien des fois, depuis le Moyen-Age, par des nuées de pèlerins, dès que ceux-ci, du haut du Monte del Goso, mont de la joie, avaient aperçu les tours de l'illustre sanctuaire. C'étaient des excommuniés et des pénitents, reconnaissables à leur vêtement et à leur croix rouge, et qui venaient implorer leur pardon, des suppliants, qui venaient demander une grande grâce, des fervents, assoiffés de prière et de mortification. Il s'y mêlait de faux pèlerins et des mendiants. Ils venaient en chariot, à cheval, le plus souvent à pied, de tous les points du monde: de Hollande, de Belgique, de Westphalie, même d'Angleterre, qui y envoyait, au XIVè siècle, 7000 personnes en dix ans. Ils venaient surtout de France, et le chemin de Santiago, raviné par les pluies, mal entretenu, tout jalonné d'hôpitaux et d'auberges, à l'enseigne du Saint, qui assuraient à tous humaine assistance, s'appelait le Camino francès.
Arrivés dans la ville sainte, ceux-ci entraient dans l'église par la porte occidentale, portico de la Gloria, "un des plus beaux fleurons, a-t-on pu dire, de l'art chrétien". En y pénétrant, ils touchaient la colonne du porphyre qui portait , au trumeau du portail central, la statue assise de l'apôtre tenant le bourdon de pèlerin, sur laquelle une cavité marque encore la place des ces attouchements innombrables.*Le grand Pèlerin que Benoît Labre était par vocation, ne pouvait omettre de se joindre, au moins une fois, aux dévots pèlerins de Santiago. Nous savons qu'il fit à Compostelle trois neuvaines en l'honneur de la Sainte Trinité, envers qui sa dévotion allait croissant avec les lumières qu'il recevrait du ciel.
Il avait fait une partie de la route d'arrivée avec un français de Saint-Bernard de Comminges; il prit le chemin du retour en compagnie d'un basque de Bilbao. Ce dernier était un vieillard cruellement éprouvé dans sa famille; ayant fait connaissance du jeune artésien, il fut si touché de ses vertus qu'arrivé en Biscaye, il voulut le conduire jusqu'aux Pyrénées.

Notre-Seigneur Jésus-Christ à soeur Marie Lataste: "Ceux qui s'imposent des sacrifices, qui volent au-devant de la souffrance, de la mortification et de la douleur pour marcher sur mes traces, pour imiter l'exemple que je leur ai donné, sans aviser à la récompense, mais portant sans la rejeter, ceux-là, ma fille, sont présentés par moi à mon Père dans le ciel, et mon Père les bénit sur la terre et les bénira à jamais dans le ciel.
Ceux qui s'imposent des sacrifices, qui recherchent des tribulations, et qui se détachent de plus en plus d'eux-mêmes, uniquement par amour pour Dieu, par connaissance pour ses bienfaits, sans même désirer le ciel, si telle était sa volonté, ceux-là sont les plus agréables à Dieu. Il vient en eux, il les transforme en Lui par l'effusion de toutes ses grâces, et leur accorde le plus haut degré de gloire dans le ciel."
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Alexandre
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Re: Un Saint Solitaire franciscain: Benoît-Joseph Labre

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"La France-1-

C'est à l'occasion de son voyage d'Italie à Compostelle, et à la fin de l'année 1772 que Benoît Labre avait retraversé la France.
Etait-il revenu dans le Nord? Il semble bien que non, ni à Notre-Dame de Liesse, quoiqu'on en ait prétendu, encore moins dans sa province natale, à laquelle il avait dit un adieu définitif: In Galliam, non tamen in Picardiam, dira Algiani dans le procès d'information.
C'est dans le bourbonnais que nous le trouverons arrivé le 6 janvier 1773, peut-être sous la secrète attirance de Sept-Fons et de Paray-le-Monial, où il dut séjourner incognito.
Il passa à Autun, au tombeau de saint Symphorien.
A Moulins, il logea d'abord chez les Moret, où il pratiqua une austérité surprenante: un seul repas par jour, après le coucher du soleil, et composé de pain grillé trempé dans l'eau. Il distribuait à d'autres tout supplément, en murmurant: "Dieu m'a nourri aujourd'hui: il me nourrira bien demain!" Le soir il faisait la lecture à de nombreux auditeurs qu'attirait sa sainteté. La nuit, il continuait seul la lecture, à la chandelle. Un genre nouveau de pénitence était entré dans sa vie: la discipline; on l'entendit se flageller et l'on découvrit dans sa paille une cordée armée de pointes de fer. Les Fanjou découvrirent dans son havresac ses instruments de flagellation.
Descendant du grenier dès la pointe du jour, il partait à la cathédrale. Il y passait la journée, embrasant d'un même coup d'oeil le tabernacle et la statue de la Madone, une statue devant laquelle avait prié sainte Jeanne d'Arc.
C'est pourtant en cette collégiale que Benoît allait essuyer la première des humiliations qui l'attendait à Moulins.
Peu de temps avant son arrivée, un vol sacrilège avait été perpétré dans le lieu saint: les employés en soupçonnaient l'étranger, dont l'assiduité leur parut suspecte et le recueillement hypocrite.
"Holà! le vagabond, hors d'ici, et qu'on ne vous y revoit plus!" C'était la voix sévère du Vicaire du chapitre, autrement dit de l'archiprêtre de la cathédrale, qui avait retenti. Benoît essuya avec une résignation attristée l'injuste accusation et, devant la sommation que lui intimait le digne chanoine, il se retira.
Il adopta pour ses dévotions l'église Saint-Pierre non sans avoir au préalable, cette fois, sollicité du curé sa permission. Hélas! nouvelle épreuve, le prêtre sacristain trouva que c'était manquer de respect envers le Dieu de l'Eucharistie que de s'approcher de lui en pareil accoutrement: il lui refusa systématiquement la sainte communion à chacune de ses présentations à la table sainte. Il fallut l'intervention du bon curé pour réprimer ce zèle intempestif.
L'animosité de ses ennemis n'en désarma pas pour autant. Le soupçonneux et obstiné vicaire du chapitre, non content d'avoir interdit l'accès de la collégiale à celui qu'il considérait comme un fripon, cherchait à le faire chasser de la ville. On chuchota qu'il n'avait pas la tête bien saine, qu'il pouvait mettre le feu pendant les veilles prolongées, que d'ailleurs on était sur le point de l'arrêter, pour le mettre en prison, et l'on pressa Moret de l'éconduire. Le délicat jeune homme, insensible pour lui-même à ces clameurs, mais inquiet pour la tranquillité de ses bienfaiteurs, chercha un autre refuge.
Il le trouva grâce à l'obligeance d'une Tertiaire de Saint François. Cette femme, touchée de la dévotion du saint Pauvre, et sachant qu'il était lui-même de la Confraternité du Saint-Cordon, obtint pour lui un asile dans la rue de la Flèche, chez un tailleur d'habit nommé Fanjou.
il s'y établie encore au grenier, et ne fit qu'accentuer ses pénitences, restant quelque fois, en raison du carême, deux ou trois jours sans manger.
Dieu manifesta, si nous en croyons les pièces du procès d'Autun, par d'éclatants prodiges l'innocence de son serviteur.
Le Jeudi-Saint, Benoît, ayant réuni douze pauvres dans la cour de ses hôtes, leur fit une distribution de pain et de pois. Il en avait une très petite quantité, et néanmoins, lorsque les invités furent rassasiés, ils emportèrent encore leurs écuelles pleines: tous furent convaincus que Dieu venait de renouveler, à la prière du Saint, la multiplication des pains.
Non moins merveilleuse fut la façon dont le Ciel récompensa les bienfaiteurs du saint Pauvre.
Pendant les fêtes de Pâques, le tailleur, atteint depuis vingt ans d'une cruelle maladie, eut un violent accès qui lui occasionna d'atroces souffrances. Ses deux filles alarmées réclamèrent les prières de leur hôte. "Ce ne sera rien, maître, assura Benoît, à qui Dieu avait fait connaître l'efficacité de sa prière, ce ne sera rien."
Et en effet, les douleurs de celui-ci, s'apaisant sur l'heure, disparurent dans la journée si complètement que le tailleur ne les connut plus durant les dix années qu'il vécut encore.
Un soir, l'on avait, chez les Fanjou, aperçu , à travers les fentes de la porte, un éclat si vif dans le réduit du chemineau qu'on avait cru à un incendie. on avait aussitôt regardé furtivement de plus près, et l'on avait découvert tout simplement l'occupant en extase, soulevé au-dessus du sol et rayonnant d'une éblouissante lumière.
De quelle vénération croissante les hôtes du Saint ne l'aurait-il pas , dès lors, entouré?"

Notre-Seigneur Jésus-Christ à soeur Marie Lataste: "Je suis pierre de scandale pour les juifs qui rejettent les ignominies de la croix et ne veulent point que je règne sur eux. Mieux eût valu pour eux que je ne fusse jamais venu au monde. Je suis pierre de scandale pour les hérétiques qui refusent les dogmes de ma religion: leur raison sera brisée contre ma divinité et mes mystères. Je suis pierre d'achoppement pour les mauvais chrétiens qui rougissent de moi, de ma religion, de mes maximes, de mes préceptes. Je refuserai de les connaître au jour du jugement; mais ils seront reconnu par le roi du monde et règneront avec lui dans les ténèbres et les abîmes de l'enfer.
Le Fils d'un roi doit-il rougir de sa naissance, de son titre de prince, des honneurs qu'il voit rendre à son Père, et qu'il lui rend lui-même? Je suis l'auteur de la royauté éternelle communiquée à l'homme, communication qui se fera au ciel, dans le sein de Dieu, ou près de Satan, et avec Satan, dans le sein de la malédiction et des souffrances de l'enfer.
Ah! ne vous brisez jamais contre moi, ma fille: approchez-vous de moi avec confiance et vous vivrez avec mon Père dans l'éternité."
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Alexandre
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Re: Un Saint Solitaire franciscain: Benoît-Joseph Labre

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"La France -2-

Hélas! la malveillance aussi grandissait. Devant les menaces qui étaient proférées contre son bienfaiteur, affecté douloureusement lui-même non par les avanies de ses ennemis que par le renom de sainteté que lui faisaient ses amis, le Pèlerin décida de reprendre sa route vers l'Espagne.
Hâtons-nous d'ajouter, pour l'honneur de la ville et du diocèse de Moulins, que pasteurs et fidèles offrirent plus tard à leur saint visiteur de dignes réparations et lui vouèrent un culte solennel. Par une chapelle intérieure, par un tableau de représentation au Colisée, par une fête annuelle avec panégyrique, l'humble saint est rentré dans la cathédrale d'une façon triomphale que n'avaient pas prévue ses calomniateurs.
Etait-il dit que la France lui réserverait tant de mésaventures!
Comme Benoît arrivait à Saint-Bertrand de Comminges, aux confins des Pyrénées, des appels au secours interrompirent sa pieuse méditation. Il accourut. dans un petit bois, un homme gisait, blessé par des bandits. Laver les plaies de ce malheureux avec l'eau d'une fontaine voisine, les panser avec des lambeaux de vêtement, quoi de plus naturel pour notre bon Samaritain? Mais voici que deux cavaliers survinrent, attirés, eux-aussi, par les cris de la victime: prenant le va-nu-pied pour l'agresseur, ils l'amenèrent à la ville et l'incarcérèrent. Ce ne fut que 24 heures après que, sur les indications du blessé, ils le relâchèrent. Les autorités locales lui offrirent même, pour le dédommager de leur méprise et lui permettre de refaire sa santé, un abri à l'hôpital. L'amant de la Croix, qui avait éprouvé une grande joie intérieure dans cette ressemblance avec le divin prisonnier de la Passion, accepta d'y passer quinze jours: le temps suffisant pour que le blessé, son protégé, se rétablît lui aussi, et fût en mesure de l'accompagner en Espagne, à Notre-Dame de Montserrat, en pèlerinage d'actions de grâces.
On montre encore, à Saint-Bernard, l'étroite geôle où Benoît fut incarcéré, sous l'une des portes de la ville,, ainsi que l'hospice où il fut recueilli, et des ex-voto témoignent du culte fidèle dont sa relique est l'objet à la cathédrale.
Ce fut vraisemblablement à son retour que Benoît parcouru la France méditerranéenne.
le Languedoc garde pieusement le souvenir de son passage , à Montagnac, à Montpellier, à Lunel.
Dans le Vaucluse, il s'arrêta à Carpentras, où son nom est donné à un quartier de la ville, à Piolenc, à Valréas.
En Provence, ce fut à Tarascon, à Arles, à Aix.
Dans cette dernière ville, il fréquenta le vallon de Chicalon, où il avait son gîte pour la nuit, et l'église Saint-Jean-de-Malte. "C'est au vénérable Labre que je dois ma vocation", déclarait Mère Raymond, fondatrice des Soeurs du Saint-Sacrement, à qui, comme elle était jeune encore et volage, le Saint avait adressé la parole sur un ton prophétique.
A Garguier, il alla vénérer saint Jean-Baptiste.
Il se rendit prier à la grotte de la Sainte-Baume, à Saint-Maximin, à Barjols.
A Rians, il conféra au charitable fermier Belon, en reconnaissance, le don inattendu de remettre, de père en fils, les entorses et les luxations.
A Fréjus, il bénit la famille Chabert d'un barbier-chirurgien qui, devant l'impécunieux client, s'était montré d'une humanité très douce.
Sorti de cette région hospitalière, comme il gagnait Nice, il eut maille à partir avec des brigands de l'Estérel, ceux-ci piqués sans doute d'être tombé sur un si maigre gibier!
Les premiers jours d'avril, semaine de Pâques de l'année 1774, les registres de Saint-Louis-des-Français notèrent son retour et se présence à Rome.
Pourtant c'est encore cette même année, qu'il visita l'Alsace, la Lorraine, la Franche-Comté: nous le retrouvons à Nancy, Gray, Besançon, Beaume-les-Dames, Saint-Claude, Couzance.
Grâce à ses retours, l'enfant de l'Artois n'avait pas cessé d'être, comme on l'appelait en Italie, "le Saint Français."

Notre-Seigneur Jésus-Christ à Soeur Marie Lataste: "Mon coeur, qui dira jamais l'intensité de ta douleur pendant les trois heures où je restais sur la croix? Mon âme, n'étais-tu pas noyée dans un océan d'amertume le plus amer? O vie de mon corps! n'aurais-tu pas été mille fois anéantie, si ma divinité ne t'avait retenue? Non, ma fille, jamais le monde, depuis son existence, n'a vu de peine semblable à ma peine en ce moment. Compatissez comme vous le faites à mes souffrances; souffrez avec moi, et dans vos souffrances dites-vous à vous-même que jamais vous n'approcherez de tout ce que j'ai souffert moi-même. Souffrez un peu pour moi, puisque j'ai tant souffert pour vous."
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Alexandre
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Re: Un Saint Solitaire franciscain: Benoît-Joseph Labre

Message par Alexandre »

"La France -3-

Il n'est pas exagéré d'évaluer à plus de 30 000 kilomètres, soit plus des trois quarts du méridien terrestre, la distance qu'avait parcourue, en moins de treize ans, le saint Pèlerin.*Quel étrange pèlerin!Il avait gardé la tunique et le scapulaire des novices de Sept-Fons, qu'on lui avait abandonnés à sa sortie du monastère. Pour ceinture, une corde, qui serait bientôt sa corde de Tertiaire franciscain, et à laquelle pendaient une écuelle et une gourde. Aux pieds, des souliers trop grands, troués, ajustés avec des ficelles; parfois aucune chaussure; sur la tête, un chapeau tricorne en feutre noir. A ses épaules étaient suspendues une besace qui contenait tout son bagage: l'Imitation de Jésus-Christ, le Nouveau Testament, les quatre tomes du bréviaire, qu'il récitait tous les jours, un nécessaire de couture, une boîte en fer blanc contenant ses papiers. Un crucifix de cuivre brillait sur sa poitrine; un rosaire pendait à son cou, un autre glissait dans ses doigts.
Tel est l'aspect misérable sous lequel toutes les estampes, à Einsiedeln comme à Rome et en France, représentent le pèlerin en marche, sous lequel tous les peintres ds pays qu'il traversait, Bley, Cavallucci, Gagliardi, Rossi, Caricchia, Labruzze, Bastellini... s'empressèrent, souvent à la dérobée, de fixer ses traits.
Dans ses lointaines et continuelles pérégrinations, le Saint goûtait enfin pleinement la dilatation de l'âme et l'épanouissement de la joie que le cloître n'avait pu lui procurer. La pratique de la pénitence et de la mortification, du renoncement et de l'humilité s'offrait à lui infiniment plus variée qu'elle n'eût pu faire à la Chartreuse ou à la Trappe.
Assurément, il rencontrait sur les grands chemins, dans les asiles de nuit, et jusque dans les hospices, moins de bons chrétiens que de mécréants et de vauriens, mais c'était là, à ses yeux, un trait de ressemblance plus parfaite avec Celui qui avait voulu "se mettre au rang des scélérats". En revanche, comme le Fils de l'homme, il n'avait même plus "une pierre où poser sa tête".
Poussant le détachement plus loin que ne le faisaient les Religieux eux-mêmes, il réalisait à la lettre la parole de l'Apôtre: "Vous n'avez point ici bas de demeure stable." En quelque lieu qu'il se rendît, il était étranger et voyageur, et pouvait plus facilement regarder comme en passant les choses de la terre pour placer au Ciel sa demeure.
En vérité, cette voie aux mille ramifications qui le conduisait aux multiples sanctuaires de la Chrétienté, c"était bien sa voie providentielle, celle où il réalisait sa sainteté, celle qui le conduisait au Ciel."

Saint Jean Cassien, institutions livre 6, "l'impureté": "L'Apôtre considère la chasteté comme la sainteté
"La volonté de Dieu, dit-il, est votre sanctification."Et pour que nous comprenions bien ce qu'il veut dire par sanctification, c'est seulement la justice, la charité, l'humilité, la patience, par lesquelles nous croyons nous sanctifier, il explique très clairement ce qu'il appelle sanctification" en verset I Thess.4.4,5.


Card.Pie:"Laissez-moi le dire ainsi Benoît Labre, c'est le révolutionnaire retourné, c'est la contre-révolution en personne, c'est l'homme de XVIIIè et du XIXè siècle,au rebours. Aussi ne le cherchez point parmi les philosophes ou les encyclopédistes, point parmi les constituants ou les conventionnels, point parmi les présidents de districts ni parmi les patriotes renommés. Non, à l'heure où s'ouvriront les Etats généraux qui préluderont au renversement de la monarchie, à l'heure où la plus ancienne dynastie du monde descendra les marches de l'échafaud, Benoît-Joseph, par une mort prématurée et par les prodiges accomplis autour de sa tombe ou dus à son invocation, aura déjà commencé à monter les degrés de l'autel sur lequel il doit être publiquement honoré au siècle suivant."
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