Sermon du Vénérable Louis de Grenade pour le IVe dimanche de Carême

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Laetitia
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Sermon du Vénérable Louis de Grenade pour le IVe dimanche de Carême

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Sermon du Vénérable Louis de Grenade pour le IVe dimanche de Carême :
Dixit Dominus ad Philippum : Unde ememus panes , ut manducent hi ? Hoc autem dicebat tentans eum , etc.

Jésus dit à Philippe : Où pourrons - nous acheter du pain pour tout ce monde ? Il disait cela pour le tenter. Joan . VI, 5 .

« Jésus alla au delà de la mer de Galilée , ou lac de Tibériade, et une grande foule de peuple le suivait, parce qu'ils voyaient les miracles qu'il faisait sur les malades. » Il y avait bien d'autres causes pour lesquelles ils suivaient le Christ , mais l'Evangéliste donne surtout celle -ci, c'est qu'il guérissait de maladies désespérées. Le Seigneur pouvait bien opérer d'autres miracles plus magnifiques aux yeux de ce peuple grossier, des signes du ciel tels que les demandaient les pharisiens, et qu'opérèrent Jésus, fils de Navé, et le prophète Isaïe , dont l'un arrêta le soleil , et l'autre le fit rétrograder ; mais notre Jésus, se souvenant de son nom, s'attachait de préférence à faire des miracles utiles aux hommes, et qui fussent à la fois des signes et des bienfaits : des signes qui attestaient la puissance de sa divinité , des bienfaits qui montraient sa sollicitude pour le genre humain. Il n'est donc pas étonnant, s'il était suivi d'une grande foule d'hommes, puisque ses œuvres leur étaient aussi utiles qu'elles étaient glorieuses pour lui-même. Par un mouvement naturel, tous les hommes cherchent partout leur guérison et leurs avantages.

Le Seigneur, ayant donc vu cette multitude, dit à Philippe : « Où achèterons-nous du pain pour tout ce monde ? Il disait cela pour le tenter ; car il savait bien ce qu'il ferait. » Grande et subtile tentation , en effet; et rien d'étonnant , que Philippe y ait été pris. Car si le Seigneur lui eût demandé : Que ferons-nous pour rassasier une telle foule ? Philippe eut peut- être répondu : Seigneur, vous savez tout; c'est à vous de le savoir , à nous d'obtempérer à vos conseils et à vos ordres. Mais comme il se servit du mot acheter, Philippe ne comprenant pas la force de la tentation cachée sous ce mot , crut que le Seigneur l'interrogeait simplement sur l'achat de pains, et répondit avec assez d'à-propos que deux cents deniers ne suffiraient pas pour cet objet. Le Seigneur en effet avait coutume de confier ce soin à ses disciples , et ils crurent qu'il en avait chargé le traître Judas , lorsque, la veille de la passion , il lui dit : « Ce que vous faites, faites-le vite. » Ils crurent, dis-je, que le Seigneur l'avait chargé d'acheter tout ce qui était nécessaire pour la fête . Cette tentation ayant donc été dirigée si subtilement par le Seigneur, il nous faut rechercher ce que le divin Maître avait en vue. Car son intention n'est pas du tout à négliger.
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Laetitia
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Pour traiter plus facilement cette question , commençons par établir que, si l'on ne considère que la vie présente, il y a trois espèces d'hommes : ceux qui n'obéissent qu'à leurs passions, ceux qui obéissent à la raison seulement, ceux qui se règlent d'après la foi, supérieure à la raison.

Les premiers , à la manière des brutes, se laissent conduire par leurs appétits et par leurs passions. Aussi le Prophète a dit : « L'homme étant dans l'honneur n'y est pas demeuré stable ; il est devenu semblable aux bêtes. » Ps. XLVIII , 13. Car, comme les brutes, privées de la raison , ne suivent que leurs appétits ; de même il y a des hommes assez oublieux de leur religion et de la dignité humaine, pour négliger la foi et la raison, et se porter, tête baissée, là où les entraîne la fougue de la passion. Ils diffèrent peu des bêtes, puisque, comme les bêtes, ils n'usent ni de la raison ni du jugement, et se laissent
entraîner par l'impétuosité de la passion .

Les seconds s'élèvent au dessus de la brute, et règlent leur vie d'après la raison, qui est le propre de l'homme. Quoiqu'ils soient dans une condition meilleure que les premiers, la raison seule cependant ne les garantit pas de toute erreur; c'est un guide peu sûr. En effet, depuis la chute du premier homme, la raison humaine, si elle n'est éclairée de la lumière de la foi, ne suffit aucunement pour vivre selon Dieu. Privée de cette lumière , quoique sur certains points elle voie assez clair, sur d'autres points cependant elle est sujette à d'étranges hallucinations. C'est ainsi que Cicéron proscrit toute violence, à moins qu'on n'ait été provoqué. Or, cette opinion est en opposition avec la doctrine du Sauveur, qui ordonne d'aimer nos ennemis, de faire du bien à ceux qui nous font du mal, et de prier pour eux. Matth . v , 44. Précepte contenu, non -seulement dans l'Evangile, mais aussi dans la loi ; puisque le Législateur a dit : « Ne te venge point, et ne garde point de ressentiment contre ton prochain. » Levit . xix , 18. Le même Cicéron, dans son Traité Des devoirs, dit qu'un cœur noble ne veut obéir à personne, excepté à celui qui lui donne de bons conseils et des enseignements, ou qui lui commande, en vertu d'une autorité légitime, une chose utile. Tout au contraire, l'apôtre saint Pierre veut que nous soyons soumis à toute créature humaine par amour pour Dieu . I Petr. II , 13. Enfin de la raison découle la prudence humaine, qui, bien qu'elle tienne le gouvernail de la vie humaine, est fréquemment en opposition avec les traditions divines. Celles-ci prescrivent aux pasteurs de l'Eglise de se conduire modestement, de soutenir leur dignité par la foi et par les vertus plutôt que par la splendeur de leur maison; mais la sagesse humaine l'entend autrement; elle veut d'autres usages, sous prétexte de mieux maintenir l'autorité et la dignité.

On voit donc que la raison humaine n'est pas un guide infaillible , et qu'il faille suivre en toutes circonstances.
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Enfin, il en est d'autres qui,mieux inspirés, ne suivent ni leurs passions, ni la seule raison, mais qui règlent leur vie d'après la foi et les institutions divines : tel ce saint roi qui disait : « Votre parole est le flambeau qui éclaire mes pas, et la lumière qui luit, dans le sentier où je marche. » Ps.CXVIII, 105. Et encore : « Votre loi est l'objet de ma méditation; vos justifications sont ma sagesse. » Testimonia tua meditatio mea est , et consilium meum justificationes tuæ ; ou, comme d'autres traduisent : justificationes tuæ consiliarii mei sunt. Ibid . 99. C'est comme s'il avait dit : Seigneur, je prends conseil, non des maximes humaines, mais de vos préceptes ; ce sont eux qui me dirigent et me règlent. C'est là la vie propre du chrétien, la vraie voie qui mène au ciel, celle où ont marché tous les saints.

Dans cette voie a marché le père de tous les croyants, Abraham, lorsque, sur l'ordre du Seigneur, il quitta patrie, parents, alliés,amis, maisons et champs ; il allait, ne sachant où, dit l'Apôtre , et préférant au sens et à la prudence de l'homme, le jugement et l'ordre de Dieu. Dans cette voie a marché Moïse qui, sans craindre l'animosité d'un roi, osa , simple pâtre, sur l'ordre du Seigneur, arracher à la tyrannie de ce roi un peuple opprimé. C'est en marchant dans cette voie qu'il ordonna à la mer de s'entrouvrir, à la roche de faire jaillir l'eau ; que par ses prières plus que par ses armes il dispersa et terrassa des peuples belliqueux. Le propre caractère du fidèle, est donc de fouler aux pieds tous les conseils de la sagesse humaine, quand ils contredisent les arrêts de la sagesse divine.

Ainsi lorsque, dans l'Evangile, le Seigneur nous prescrit de ne nous préoccuper ni du boire, ni du manger, ni de tous les autres besoins de la vie, parce que le Père céleste, qui sait tout, s'en inquiète pour nous, pourvu que nous lui soyons dociles et soumis ; il exige de nous que, malgré les cris de la raison, et l'absence apparente de tout moyen de salut, nous jetions en lui toutes nos sollicitudes, assurés de trouver en lui seul un appui plus efficace que dans toutes les richesses de Crésus. Je le répète avec confiance, on reconnaît un chrétien à ce qu'il a une foi vive, qu'il y conforme sa conduite, et qu'il écoute, non la raison, quand elle fait opposition à la foi, mais les commandements de Dieu. Car sur beaucoup d'autres vertus, nous sommes d'accord à certains égards avec les philosophes ; nous nous en éloignons principalement en ceci, que ne connaissant pas la foi, ils n'avaient d'autre guide que la raison toute nue; tandis que nous, ne tenant pas grand compte de la raison humaine, nous prenons pour guides , dans toutes nos actions, la foi et la lumière divine .

Cette foi, cette confiance , on ne saurait dire avec quelle insistance le Seigneur l'exige de nous ; avec quelle sévérité, dans presque tous les livres des Prophètes, il accuse ceux qui négligeant le secours de cette foi, ne comptent que sur les appuis humains. Pourquoi, lorsque , sous Samuël, le peuple lui demanda un roi, le même Seigneur fut-il si indigné, qu'il leur reprocha leur témérité par des signes célestes , et qu'il dit à Samuël : « C'est, non pas vous, mais moi qu'ils rejettent, afin que je ne règne pas sur eux ? . I Reg . VIII, 7 . - Que dites-vous, Seigneur; ne seront-ils pas encore sous les soins de votre Providence, quand ils auront des rois, aussi bien que quand ils avaient des juges ? — Sans doute ; mais ils étaient bien plus dépendants de la Providence divine sous des juges que Dieu élisait fréquemment, que sous des rois qui devaient leur puissance, non à l'élection, mais à l'hérédité. Aussi se plaint-il vivement d'être repoussé par eux, en ce que, comme les gentils, ils prétendaient consolider leur gouvernement, non par la foi et par l'espérance , mais par les armes, et par les conseils de la prudence humaine. Et en effet, comme Samuël résistait à leurs veux, ils lui dirent: « Non , nous voulons un roi qui nous gouverne, nous voulons être comme toutes les autres nations.Notre roi nous jugera, il marchera à notre tête, et il combattra pour nous dans toutes nos guerres. » Ibid . xix , 20. C'était déclarer assez hautement qu'ils voulaient faire comme les autres nations, et s'appuyer sur les secours et les conseils humains, plutôt que sur la volonté de Dieu .
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Laetitia
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L'auteur et le consommateur de notre foi, ainsi que l'appelle l'Apôtre, Notre-Seigneur Jésus-Christ qui a si souvent recommandé cette foi dans les Lettres évangéliques, l'exige absolument de nous, et dans la circonstance présente il examine si Philippe, après avoir été témoin de tant de miracles, avait fait assez de progrès dans la foi pour que, là où la raison humaine ne promettait aucune assistance, il trouvât par la foi ce que la raison était impuissante à saisir. Mais le disciple, encore faible après avoir reçu de son Maître tant de leçons sur la foi, n'était pas encore arrivé au point de croire que, sans approvisionnements, on pût rassasier une telle multitude . Au surplus, rien d'étrange qu’un pêcheur ignorant en fût là, puisque Moïse, ce grand législateur, tomba dans le même aveuglement, en doutant qu'on put trouver dans le désert assez de vivres pour tant de milliers d'individus, qu'il avait tirés de l'Egypte. Le même Moïse et son frère Aaron commirent cette même faute aux eaux de Contradiction ; ce qui les priva l'un et l'autre de l'entrée en la terre promise. Num. xx, passim. Ne nous étonnons point que de si grands hommes se soient ainsi trompés. Ce genre de foi est très difficile; il est placé au-dessus de la nature et de la portée de l'homme.

En effet, l'homme est une créature raisonnable , et rien ne lui est plus propre que la raison ; il faut donc, pour la dédaigner et lui préférer les lumières de la foi , dépouiller l'homme en quelque sorte, et s'élever au-dessus de la nature de la raison. Aussi,malgré tous nos cris et tous nos efforts pour persuader-au peuple d'en agir ainsi, avons-nous bien de la peine à obtenir de quelqu'un qu'il s'appuie sur Dieu seul, là où les secours humains font défaut, qu'il abandonne à Dieu seul le soin de ses affaires, qu'il se contente de lui obéir, le laissant veiller sur sa créature et la diriger. Car combien y en a -t- il qui, appuyés sur la vérité divine, préfèrent aux remèdes visibles les invisibles, et aux biens de la terre les biens du ciel ? Plus cependant le Seigneur met d'insistance à exiger de nous cette foi, plus il s'engage à nous secourir. En effet, comment la bonté, la vérité divine pourra-t-elle manquer à celui qui, confiant en elle, s'est dépouillé docilement de tout appui humain, pour ne voir qu'elle seule, ne dépendre que d'elle seule, n'espérer que d'elle seule, comptant pour rien tous les autres secours humains, comme fragiles et impuissants ?

Certes, il n'y aurait plus de bonté, de vérité divine, si les secours d'en haut manquaient à une telle foi, à une telle obéissance. Aussi le Seigneur dit-il par la bouche d'Isaïe : « Examinez afin de juger selon l'équité, assistez l'opprimé, faites justice à l'orphelin, défendez la veuve; après cela venez, et accusez-moi. » Quærite judicium, subvenite oppresso, judicate pupillo, defendite viduam, et venite et arguite me. Isa. I, 17. Ce verbe accusez a une rare énergie. C'est comme s'il avait dit : Si vous faites tout cela, et que je vous manque en quelque chose, je vous permets d'accuser ma bonne foi, et de me reprocher de n'avoir pas rempli ma promesse; je vous autorise à objecter contre ma bonté, que je suis ingrat envers vos services et vos offrandes; et contre ma Providence, que je me décharge du soin de veiller sur ceux qui ont confié à ma tutelle leurs personnes et tous leurs intérêts; je vous permets de décrier ma puissance, si je suis assez faible, assez impuissant pour laisser sans secours ceux qui pour moi ont méprisé tous les appuis humains. Voyez-vous, frères, que votre confiance et votre sécurité doivent être d'autant plus grandes, que vous avez moins compté sur les secours humains, en abandonnant à Dieu seul la tutelle de votre vie ? C'est donc là la foi que le Seigneur recherchait en Philippe, afin qu'en la personne de Philippe il nous instruisît tous, et nous insinuât ce qu'il exige principalement de nous.

Mais Philippe n'était guère encore avancé dans la foi, il ne croyait pas possible de nourrir cette multitude sans des approvisionnements, et il fit cette réponse dictée par une sagesse purement humaine : « Quand on aurait pour deux cents deniers de pain, cela ne suffirait pas pour en donner à chacun tant soit peu. » André n'avait pas fait plus de progrès, sa défiance était la même, car il dit : « Il y a ici un enfant qui a cinq pains d'orge et deux poissons, mais qu'est-ce que cela pour tant de gens ? – Faites- les asseoir, dit Jésus. Il y avait beaucoup d'herbe en ce lieu , et environ cinq mille hommes s'y assirent. Jésus prit donc les pains, etc. » Qu'avait besoin le Seigneur de prendre ces pains, lui qui, en vertu de sa divinité, pouvait de rien créer des pains ? Cinq pains étaient bien peu pour rassasier tant d'individus. Cependant, ce peu, le Seigneur ne crut pas devoir le négliger. On avait vu Elisée faire la même chose . Voulant payer les dettes de la veuve, Elisée lui demanda ce qu'elle avait chez elle. Sur la réponse qu'elle n'avait qu'un peu d'huile, le Prophète, en vertu de la puissance divine, fit si bien fructifier cette huile, qu'il y en eut assez pour payer les dettes, et pour pourvoir à tous les besoins de la veuve et de ses fils .

Par ces deux exemples , le Seigneur a voulu montrer que nous aussi, nous devons offrir quelque chose du nôtre, quelque peu que ce soit, si nous voulons qu'il répande sur nous ses trésors. Si nous refusons d'apporter ce peu qu'il exige de nous, il ne nous fera pas entrer en participation de ses richesses. N'est-ce pas un genre de commerce fort avantageux que celui où si peu est demandé à l'homme, en échange des immenses dons de la libéralité divine ? Ajoutons d'autres exemples. Dans le baptême, comme le dit saint Cyrille, le nouveau-né, plongé dans l'eau, et retiré de l'eau, représente la mort et la sépulture de Jésus-Christ, et par cette représentation, il s'approprie le fruit et le mérite de cette mort. Ainsi, par sa mort douloureuse le Christ nous a ouvert la voie à la vie : en figurant cette mort, nous en recueillons le fruit. Ce qu'il accorde n'est-il pas plus, que ce qu'il exige ? Des adultes il demande le souvenir de sa passion, afin de nous rendre participants de cette même passion ; en sorte que, ce qu'il a obtenu en mourant, vous l'acquérez en méditant pieusement et saintement sur sa mort. Que pouvait- il conférer de plus ? Que pouvait-il vous demander de moins ? Pour un verre d'eau donné à propos, il promet la vie éternelle, afin de montrer avec une pleine évidence, combien ce qu'il nous accorde est grand auprès de ce qu'il nous demande. Mais il ne recevra pas ce trésor, celui qui n'aura pas voulu donner ce peu. Quant à celui qui le donne, il peut dire avec l’Ecclésiastique : « Avec un peu de travail, je me suis acquis un grand repos. » Modicum laboravi , et inveni mihi multam requiem. Eccli. LI, 35. Frères, cette philosophie accuse fortement ceux qui, dormant toute leur vie , sans mettre la main à la charrue, renvoient uniquement à la miséricorde divine l'affaire de leur salut. Le Seigneur les condamne par l'exemple de ce miracle, où il ne voulut multiplier les pains, pour nourrir la foule, qu'après qu'on lui eût apporté les cinq pains d'orge.
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Laetitia
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Ayant pris les pains, il commença, dit saint Marc, par élever les yeux au ciel. O si quelqu'un eût eu l'intelligence assez éclairée pour pénétrer au fond des entrailles du Sauveur, pour contempler avec quelle ferveur, avec quelle religion il levait les yeux vers le ciel ! Ainsi , quand il se préparait à ressusciter Lazare, mort depuis quatre jours, il regarda le ciel, et- rendit grâces à son Père, qui allait le glorifier par ce nouveau et insigne miracle. De même que les hommes plongés dans le malheur se rappellent les autres calamités et les deuils qu'ils ont subis dans la vie, souvenirs qui ajoutent à leur douleur présente ; de même, le juste, en recueillant les bienfaits divins, se rappelle à l'esprit les bienfaits passés, qui redoublent son amour et sa reconnaissance envers le bienfaiteur. Ainsi le Sauveur, levant alors les yeux vers son Père, qui allait le couvrir de la gloire d'un éclatant miracle, appela à sa pensée tous les bienfaits reçus, et ceux qui devaient suivre : et ils provoquèrent une telle explosion de reconnaissance et d'amour envers ce bon Père, que nulle voix, humaine ou angélique, ne saurait l'exprimer. Aucune intelligence créée ne pouvant concevoir dignement la tendresse du Christ, et la bonté de son Père envers lui, aucune parole ne les peut célébrer.

« Ayant donc levé les yeux au ciel, il prit les pains. » Quoi de surprenant que ces pains aient été multipliés, en touchant ces saintes mains, créatrices de toutes choses ? Car, dit saint Augustin, « le pouvoir de multiplier les pains appartenait aux mains du Christ, dont le contact opéra la multiplication miraculeuse. » Aussi est-ce avec raison que, dans l'Evangile, ce chef de synagogue implorait le contact de la main du Christ, pour rappeler sa fille à la vie , et disait : « Venez lui imposer la main, et elle vivra. » Matth . ix , 18. « Les mains du Seigneur, dit l'Epouse, sont faites au tour, couvertes d'or et d'hyacinthes,» tornatiles, aureæ , plenæ hyacinthis, Cant. v , 14 , c'est-à-dire, pleines de dons célestes et de vertus. Elles sont, dit saint Bernard , pleines de miséricorde; et on y voit des ouvertures, par lesquelles s'échappent sur nous les bienfaits de sa tendresse.

A ces mains donc, frères, remettez, en suppliant et avec confiance, tous vos intérêts, si vous voulez que tout vous réussisse. Sans le secours de cette Providence, quoi de solide, de prospère, de stable peut-on attendre ici-bas de l'infirmité et de la prudence humaines ? Voulez-vous savoir ce que sont les prévisions humaines ? Écoutez le Sage : « Les pensées des hommes sont timides, et nos prévoyances sont incertaines. » Sap. ix , 14. Voulez–vous savoir ce qu'est la force, la puissance humaine ? Ecoutez Isaïe : « Votre force sera comme une étoupe sèche, votre ouvrage comme une étincelle ; le feu embrasera tout ensemble l'un et l'autre. » Erit fortitudo vestra quasi favilla stupe, et opus vestrum quasi scintilla, et succendetur utrumque simul. Isa .I, 31. Le même vous apprend en ces termes ce que c'est que l'effort de l'homme, dénué du secours divin : « Vous concevrez du feu, et vous enfanterez de la paille. » Concipietis ardorem, et parietis stipulam. Isa.XXXIII, 11 . Qu'est-ce donc que l'homme peut attendre de sa fragile nature ? Qu'est-ce donc qui peut sortir de grand ou de solide, d'un être dont l'intelligence est débile, les forces insignifiantes, les efforts vains, et l'habileté frivole ?

Mais avec nous est l'Eternel, qui ne néglige pas les choses humaines, qui présente son flambeau à l'égaré, qui promet son secours, qui appelle à lui par de magnifiques promesses ; afin que nous nous appuyions sur lui, et que nous placions en lui seul toutes les espérances de notre salut. Cela étant, que doit donc faire l'homme sage ? — Que tout ce qu'il entreprend, il le laisse diriger par la main de Dieu ; que par une prière humble et confiante il s'applique à obtenir que d'en haut il veuille bien lui tendre une main secourable, afin que sa barque vogue heureusement. Ce qu'a pu faire la main du saint patriarche Jacob, comment ne le pourrait pas la main du Tout-Puissant ? Le vieillard étant près de mourir, Joseph lui présenta à bénir ses deux fils, Manassé et Ephraïm, plaçant l'aîné à droite du vieillard, et le puîné à gauche ; mais Jacob, déplaçant ses mains, étendit la droite sur Ephraïm, et la gauche sur Manassé. Joseph, affligé, essayait de s'opposer à ce changement, et disait : « Vos mains ne sont pas bien, mon père ; car celui-ci est l'aîné; mettez sur lui votre main droite. » Gen. XLVIII, 18. Si le saint patriarche attachait assez d'importance au contact d'une main pieuse, pour qu'il crût que celui- là serait plus heureux, qu'aurait touché la main d'un juste ; que n'y a -t-il pas à espérer du contact de ces mains qui ont créé le monde ?
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Cette haute philosophie était bien comprise de tous les saints ; se défiant d'eux-mêmes dans toute entreprise, ils abandonnaient, avec humilité et avec confiance, tous leurs intérêts à la main de Dieu. Ainsi David, entouré de l'opulence royale, mettait cependant toute sa confiance, toute son espérance, non dans son arc et dans son épée, mais en Dieu seul. « Ces hommes, dit-il, mettent leur confiance dans leurs chariots et dans leurs chevaux ; mais nous, nous invoquons le nom de notre Dieu. Ils ont été abattus, et ils sont tombés ; mais nous, nous nous sommes relevés, et nous nous sommes tenus fermes. » Ps . xix , 8 , 9. Ainsi les hommes de Dieu, se défiant de leurs forces, de leur jugement et de leur prudence, avaient recours en tout à l'assistance divine. Un des saints Pères du désert tenait, dit-on, ce langage à Dieu : Seigneur, j'ignore ce qui m'est avantageux, mais je sais que ma docilité importe à votre gloire. Faisons une convention : Je travaillerai à votre gloire ; et vous, daignez veiller sur mon salut.

Que chacun de nous, frères, établisse avec Dieu un pacte semblable : de telle sorte cependant que, si les choses ne tournaient pas au gré de nos désirs, nous ne perdions pas courage aussitôt, puisque nous ignorons tout à fait ce qui nous est utile. « Il m'est arrivé, dit saint Augustin, bien des événements que je regardais comme devant m'être très préjudiciables ; et néanmoins, à la suite du temps, il se trouvait que rien ne pouvait m'arriver de plus heureux. » Le courageux épervier, se préparant à attaquer le héron volant dans les airs, ne se dirige pas droit sur lui ; il donne à son vol une direction oblique, et semble le fuir plutôt que le poursuivre ; bientôt cependant il change de direction, et, dès qu'il se trouve au -dessus de sa proie, il se laisse tomber rapidement sur elle, et il la déchire. Quelque chose d'à peu près semblable arrive fréquemment aux justes ; les événements, qui paraissaient devoir leur nuire d'après les prévisions humaines, finissent par leur être salutaires contre toute attente. Lorsque le saint patriarche Joseph fut vendu à des marchands allant en Égypte, qui eût cru que c'était le commencement de sa gloire ? C'est pourtant par cette voie que le Seigneur en fit le dominateur et le sauveur de l’Égypte. Telle est,mes frères, l'issue des choses confiées aux mains de Dieu , c'est-à-dire, à la divine Providence.

De ce qui vient d'être dit, quelle conclusion tirer ? La voici, frères : - Que, dans toute affaire, le fidèle implore le secours de la main de Dieu ; qu'il n'ose rien faire, rien entreprendre, rien méditer, rien résoudre, sans s'être assuré l'appui de cette main, c'est-à -dire, l'intervention de la divinité. Ainsi Moïse , allant occuper la terre promise, suppliait le Seigneur de daigner marcher avec son peuple. Autrement, disait-il, si vous ne marchez avec nous, ne nous tirez pas de ce lieu. Plutôt vivre dans ce désert aride et sans culture, que d'aller occuper, sans vous pour guide, l'heureuse terre de Chanaan. Ce saint homme savait que, sans la présence et la faveur de Dieu, il ne peut rien arriver aux hommes de prospère et d'avantageux. En effet, mes frères, quelle est la cause pour laquelle tant d'affaires ne répondent pas à nos yeux ? Pourquoi nos entreprises finissent-elles souvent si mal ? Pourquoi des résolutions que nous croyions sagement concertées ont-elles échoué ? pourquoi les choses qui, suivant nous, devaient nous apporter le repos de l'esprit, sont-elles devenues une source de soucis amers ? Pourquoi des épouses, choisies pour des fils, et qui paraissaient devoir faire l'honneur d'une famille, ont-elles imprimé à cette même famille le stigmate de l'ignominie ? Pourquoi ? – sinon, parce que confiants en nous-mêmes et en la prudence humaine seulement, nous n'avons pas consulté le Seigneur; nous n'avons pas imploré son appui; comme si nous devions rien faire sans sa participation, comme si les choses humaines ne dépendaient pas de lui, comme si nous croyions pouvoir en tout nous suffire à nous-mêmes sans qu'il nous aide. Ainsi furent trompés Josué, très-saint homme d'ailleurs, et avec lui les autres chefs, lorsqu'ils reçurent à composition les Gabaonites : et cela, dit l’Ecriture, parce qu'ils ne consultèrent pas le Seigneur. Josue , ix , 14 .

Quelle immense différence entre les efforts humains, et les œuvres qui se font avec l'assistance divine ! L'apôtre saint Pierre en offre un exemple frappant. Envoyé par le Seigneur pour jeter ses filets dans la mer, il répondit qu'il avait passé toute la nuit en vains efforts sans rien prendre ; mais peu après, sur l'ordre du Seigneur, ayant jeté ses filets, il prit une si grande abondance de poissons, qu'il en remplit deux barques. Luc. v , 7. Telle est la fécondité de l'assistance divine; tandis que les œuvres humaines sont si stériles, que non seulement les efforts humains sont vains et impuissants, mais que souvent même ils sont nuisibles, et perdent ceux qui les font. Saül en est un autre exemple. Plus il s'efforçait d'accabler David, et de se soutenir, de se conserver, lui et son trône, plus il rehaussait la gloire de David en le persécutant,
et se couvrait lui-même d'ignominie.
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Message par Laetitia »

Jésus, prenant donc les pains, les bénit, dit saint Luc , ix , 16. Décrivant cette bénédiction, saint Jean rapporte qu'il rendit grâces à son Père. Car c'était l'usage de Jésus-Christ Notre- Seigneur de ne pas rompre un morceau de pain sans célébrer les louanges divines et l'action de grâces. Aussi à la fin de la dernière cène, il récita une hymne avant de se retirer sur le mont des Oliviers. Rappelant ce bienfait du pain quotidien, le Prophète nous invite à louer le Seigneur, « qui a établi la paix dans nos frontières, et qui nous nourrit des sucs du froment. » Qui posuit fines tuos pacem, et adipe frumenti satiat te » . Ps. CXLVII, 14. Ce précepte fut accompli par le saint patriarche qui disait avec effusion : « Que vous bénisse le Dieu en la présence de qui ont marché vos pères, le Dieu qui m'a nourri depuis que j'ai reçu l'être. » Gen. XLVIII, 15. Le même patriarche reconnaissait tenir de Dieu ,non-seulement la nourriture, mais aussi tout ce qu'un vulgaire ignorant appelle les biens de la fortune, et qu'il attribue à la fortune : « Seigneur, disait-il, je suis indigne de toutes vos miséricordes et de la fidélité avec laquelle vous avez accompli les promesses faites à votre serviteur. J'ai passé ce fleuve du Jourdain n'ayant qu'un bâton, et je retourne maintenant avec ces deux troupes.» Gen. XXXII, 10. Contre ceux qui oublient ce bienfait de tous les jours, le Seigneur s'élève par l'organe de Jérémie : « Ils n'ont pas dit : Craignons le Seigneur qui nous donne à propos les premières et les dernières pluies , et qui nous conserve chaque année une abondante moisson. » Jerem . V , 24 .

Tout cela, frères, accuse fortement ceux qui, nageant dans l'affluence des biens de la terre, et assis chaque jour à une table couverte de mets de tout genre, ne lèvent jamais les yeux au ciel, ne regardent pas le dispensateur de tels présents, ne rendent pas, les actions de grâces dues pour tant de bienfaits. Il ne leur vient jamais à l'esprit de se demander de qui viennent tous ces biens dont leurs tables sont chargées et embellies ; et pourtant il n'est rien qui ne découle de cette source inépuisable de la bonté divine. Sur l'ordre de Dieu , et en vertu de sa providence, les fleuves coulent, les brises soufflent , la terre se couvre de fleurs et les forêts de feuillages, les animaux se multiplient, les mers procréent des poissons avec une merveilleuse fécondité , les cieux arrosent la terre à époques fixes par des pluies abondantes , enfin toute créature enfante pour les besoins de l'homme corporel. « Levez les yeux en haut, dit Isaïe , et considérez qui a créé les cieux , qui fait marcher dans un si grand ordre l'armée des étoiles, et qui les appelle toutes par leur nom . » Isa. XL, 26. « C'est lui qui envoie la lumière, et elle part aussitôt; il l'appelle, et elle lui obéit avec tremblement. Les étoiles répandent leur lumière , chacune au poste qui lui est assigné; appelées, elles ont dit : Nous voilà . » Qui emittit lucem , et vadit, et obedit illi cum tremore. Stella quoque steterunt in custodiis suis, vocatæ sunt, et dixerunt : Ad sumus. Baruch » , III, 33-35 .

Quand nous sommes comblés de tant de bienfaits, quand nous nageons dans une telle affluence des présents de Dieu, d'où vient une telle négligence , une telle léthargie ? d'où vient que nous sommes si ingrats, et si oublieux des magnifiques dons de la munificence divine ? Si un étranger accueilli par un hôte bienveillant, traité avec tous les égards et toutes les prévenances possibles, restauré par un copieux repas, partait le lendemain sans même dire adieu à son hôte, sans lui donner le moindre témoignage de reconnaissance, ne dirions - nous pas avec raison que c'est un insensé, ou un stupide, et un soliveau plutôt qu'un homme ?

Vous donc qui êtes dans l'abondance, nourri, pourvu de tous les biens par les largesses toutes gratuites de la divine miséricorde, ne laisserez-vous pas échapper de ce cour de fer au moins quelque parole de louange et de reconnaissance, qui proclame Dieu auteur de tous ces biens ? Pourquoi, assis à votre table somptueuse et chargée de superflu, n’agitez- vous pas dans votre pensée, combien de vos semblables ont à peine en ce jour un morceau de pain pour assouvir leur faim ? Combien croiraient nager dans les délices, s'ils jouissaient seulement des restes de votre table ? Combien , au prix d'immenses fatigues, de dangers effrayants affrontés sur terre et sur mer, combien, au péril non seulement de leur vie, mais même de leur âme, cherchent à gagner une nourriture que le Seigneur vous fournit assez largement pour que vous daigniez, au moins à ce titre, lui rendre grâces de ce qu'au milieu de tant d'indigents, de tant de malheureux, vous trouvez, par son bienfait, sans peine ni travail, abondance de toutes choses ?

Le Fils de Dieu, le Christ, rend grâces pour un pain d'orge; vous, pour tant de délices, vous ne remerciez pas le Seigneur. Si vous n'êtes point reconnaissant par justice, par devoir, soyez-le au moins par intérêt. Car la reconnaissance pour les bienfaits anciens, en attire de nouveaux et de plus grands. C'est l'accomplissement de ce mot de Salomon : « Les fleuves retournent au même lieu d'où ils étaient partis, pour couler encore. » Eccle . I, 7. Les bienfaits retournent à Dieu , lorsque nous l'en remercions, et que nous lui en payons comme le prix par l'action de grâces. Et ensuite les mêmes bienfaits refluent sur nous; parce que l'ingratitude est comme un vent brûlant, desséchant les courants de la grâce divine; tandis que la reconnaissance est comme le vent pluvieux du midi, qui verse sur nous la pluie abondante de la divine grâce .

Aussi le Prophète unit toujours à la prière les louanges divines ; en célébrant les bienfaits passés, il s'en prépare de nouveaux. Il dit : « Je louerai, j’invoquerai le Seigneur, et je serai délivré de mes ennemis. » Ps . XVII, 4. J'obtiendrai facilement son appui et sa miséricorde , en le servant, et en me montrantre connaissant de ses bienfaits passés. Ailleurs , où nous lisons : Sicut adipe et pinguedine repleatur anima mea, d'autres ont traduit : Tanquam adipe et pinguedine satiabitur anima mea , cum labiis exsultationis laudabit os meum . Ps. LXII, 6. « Mon âme sera rassasiée, et comme engraissée des viandes les plus délicieuses , lorsque ma bouche fera retentir vos louanges avec des transports de joie. » C'est-à-dire : Je serai dans l'affluence des délices spirituelles, je regorgerai de tous les biens, lorsque, Seigneur, je glorifierai dans des hymnes d'allégresse votre admirable bienfaisance à mon égard.

Voilà donc pourquoi le Sauveur, avant de distribuer les pains, rend grâces à son Père. C'est afin de nous engager, par son exemple, à témoigner la même reconnaissance pour les bienfaits sans nombre que nous en avons reçus; afin que, repassant chaque jour dans notre esprit avec une vive gratitude les bienfaits divins, nous rappelant tout ce qui nous a été départi, et célébrant sans interruption avec le Prophète les miséricordes de Dieu, nous méritions d'être comblés par lui chaque jour de nouveaux bienfaits, non-seulement dans la vie présente,mais encore dans la vie à venir .
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