Les âmes recueillent des suffrages conformes aux bonnes œuvres qu'elles ont accomplies pendant leur vie terrestre.
Chacun recevra ce qui est dû aux bonnes ou mauvaises actions qu'il aura faites pendant qu'il était revêtu de son corps. ( II, Cor. ?. 10. )
La Justice divine proportionne les châtiments aux fautes commises. Celui qui aura été dur envers les pauvres, ne trouvera ni compassion ni miséricorde après la mort. Celui qui aura été idolâtre de son corps et l'esclave des sens, sera condamné à des tourments épouvantables.
La divine Miséricorde proportionne de même les récompenses aux vertus pratiquées. Celui qui aura été charitable envers les pauvres, sera secouru dans le purgatoire par le suffrage de l'aumône; celui qui aura pratiqué la mortification, sera soulagé par des suffrages de pénitence, et ainsi du reste.
L'empereur d'Allemagne, Othon IV, avait été le généreux bienfaiteur des monastères, et s'était imposé pour Dieu de grandes austérités. Aussi après sa mort, il reçut beaucoup de soulagement dans ses peines par les œuvres de miséricorde et les pénitences des maisons religieuses.
Ce prince était mort dans une grande réputation de vertu et de piété; cependant il revint de l'autre vie pour réclamer des suffrages à une de ses tantes, abbesse d'un fervent monastère. Or, il s'adressait bien, car cette religieuse était douée de vertus éminentes, et le ciel l'avait favorisée du don des miracles.
Cette sainte abbesse, se trouvait une fois à l'aube du jour, vers une fenêtre du parloir, lorsqu'elle entendit frapper légèrement à la porte. Tout-a-coup, cette porte s'ouvrit d'elle-même et la religieuse vit s'avancer l'empereur, son neveu, dans l'attitude d'un suppliant:
« Je suis, lui dit-il, d'une voix plaintive, passé à l'autre vie, et je languis dans les tourments du purgatoire. Ah! si vous avez pour moi quelque compassion, envoyez, je vous en supplie, des messagers dans plusieurs monastères afin qu'on récite en souvenir de mon âme dix mille fois le psautier, et que la fin de chaque psaume soit accompagnée de dix coups de discipline, pendant lesquels on récitera un Pater et un Ave. Cet acte de miséricordieuse charité exercé en ma faveur par les monastères auxquels j'ai fait tant de bien pendant ma vie me délivrera du purgatoire j'en ai l'assurance »
Ce prince pouvait bien parler ainsi, lui qui l'année même de sa mort avait dépensé des sommes immenses pour la subsistance des monastères, parce qu'une grande disette désolait alors la contrée.
Les couvents avertis par l'abbesse, se hâtèrent d'offrir à Dieu les suffrages demandés.
Peu de jours après, l'empereur apparut a sa pieuse tante dans le même lieu; mais quelle différence! il était resplendissant de gloire et environné d'une lumière si éclatante, que les yeux de la religieuse en étaient tout éblouis. Il lui adressa les plus tendres remerciements, et l'invita à bénir avec lui la divine Miséricorde. Les souffrances de cette âme étaient finies pour jamais, elle allait jouir de la félicité des cieux.
(V. Thom. de Catimpré, Apum, liv. II, c. 53, n° 19; Théoph. Raynaud, Heter, Spirit., p. II, lect. 3, 6e point, qu. 6e.)