Homélie pour le deuxième dimanche de l'Avent.

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Laetitia
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HOMÉLIES SUR LES ÉVANGILES DE TOUS LES DIMANCHES DE L'ANNÉE
par M. GRANET Curé archiprêtre de Séderon
Avec approbation de Mgr l'Évêque de Valence.
1860

DEUXIÈME DIMANCHE DE L'AVENT.

ÉVANGILE.

Saint Jean envoie à Jésus-Christ. - Éloge de saint Jean.

« Jean ayant appris dans la prison les œuvres de Jésus-Christ, il envoya deux de ses disciples, lui dire : Êtes-vous celui qui doit venir, ou devons-nous en attendre un autre ? Et Jésus leur répondit : Allez rapporter à Jean ce que vous avez entendu et ce que vous avez vu. Les aveugles voient, les boiteux marchent, les lépreux sont guéris, les sourds entendent, les morts ressuscitent, l'Évangile est annoncé aux pauvres. Et heureux est celui qui ne prendra point de moi un sujet de scandale. Lorsqu'ils s'en furent allés, Jésus s'adressant au peuple, leur parla de Jean en cette sorte : Qu'êtes-vous allés voir dans le désert ? Un roseau agité par le vent ? qu'êtes-vous allés voir ? Un homme vêtu avec mollesse ? Vous savez que ceux qui s'habillent de cette sorte sont dans les maisons des rois. Qu'êtes -vous donc allés voir ? un prophète ? Oui, je vous en assure, et plus que prophète. Car c'est de lui qu'il a été dit : Voilà que j'envoie mon ange devant vous, qui vous préparera la voie par où vous devez marcher. » (Matth. , XI, 2-10. Luc., VII, 19-27. Marc., 1, 2. )


HOMÉLIE.

Il semble que je devrais, mes frères, profitant des paroles de l'Évangile que vous venez d'entendre, et de l'exemple de la vie pénitente et mortifiée que Jean-Baptiste menait, vous entretenir de la pénitence et de la mortification ; soit afin de vous engager par là, à vivre chrétiennement pour rendre moins terrible ce jugement dont nous parlions dimanche dernier ; soit aussi pour nous préparer à la fête de Noël que nous célébrerons bientôt. Mais cela nous éloignerait trop du plan que nous nous sommes proposé dans ces instructions.

Faisons donc comme dimanche dernier, et tirons de l'explication de l'Évangile les leçons qui peuvent servir à notre avancement spirituel, au bien de nos âmes et à notre salut.

Or Jean ayant appris dans la prison les œuvres merveilleuses de Jésus-Christ, il envoya deux de ses disciples, lui dire : Êtes-vous celui qui doit venir sauver le monde ? ou devons-nous en attendre un autre ? (2, 3.)

Nous lisons dans l'histoire de Jésus-Christ que le Sauveur s'était choisi des apôtres, comme s'il eût eu besoin d'un secours étranger pour promulguer l'Evangile, et qu'après leur avoir donné leur mission, il les avait envoyés pour prêcher dans toute la Judée. Et lui aussi prêchait de son côté, comme saint Matthieu nous le marque, au premier verset du chapitre d'où l'Évangile de ce jour est tiré. Mais une chose qui n'est point marquée ici, et qu'il est bon de mentionner pour en faciliter l'intelligence, c'est que Notre-Seigneur accompagnait la prédication d'un grand nombre de miracles. Nous pourrions citer, entre autres, l'eau changée en vin aux noces de Cana ; la guérison du serviteur d'un officier, de la belle-mère de saint Pierre, de l'hémorroïste, du paralytique de 38 ans, la délivrance de plusieurs possédés, la résurrection de la fille de Jaïre, prince de la Synagogue, et en dernier lieu, celle du fils de la veuve de Naïm. Il semble même que c'est cette résurrection qui a déterminé plus particulièrement Jean-Baptiste à envoyer au Sauveur la députation dont nous avons à parler, selon la remarque que fait saint Luc. Le bruit de ce miracle, dit-il, se répandit dans toute la Judée et dans tous les pays d'alentour, de sorte que les disciples de Jean lui rapportèrent tout cela. (Luc., VI, 17, 18. )

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C'est donc dans la prison, où il avait été jeté par les ordres de l'incestueux Hérode, que Jean apprend les œuvres de Jésus-Christ. Mais comprenant à la manière dont parlaient ses disciples, qu'ils regardaient la réputation de Jésus-Christ comme injurieuse à leur maître, et le voyaient avec une certaine jalousie, et voulant les guérir de leur mauvaise disposition, il prend le parti d'en envoyer deux auprès de Jésus pour lui demander s'il était celui qui devait venir, ou s'il fallait en attendre un autre.

Il semble, au premier abord, que Jean interroge par ignorance : ce qui pourtant n'est point, et même ne peut pas être, comme toute la vie du saint Précurseur en fait foi, et qu'il est impossible d'admettre que la grâce et la lumière du Saint-Esprit lui aient manqué dans sa prison. Mais alors, pourquoi lui fait-il adresser cette demande : s'il est celui qui doit venir ? C'était pour préparer peut-être ses disciples à la foi, et les attacher à Jésus-Christ, en leur montrant en lui un maître plus puissant, dont il n'était pas digne de délier la chaussure. Nous disons donc, avec saint Jérôme, que Jean n'interroge point par ignorance : il se conduit comme Jésus-Christ, qui demandait à ceux qui lui montraient le tombeau, en quel endroit avait été mis le corps de Lazare, afin de les préparer à la foi et à la résurrection du mort qu'il allait opérer à leurs yeux. (Joan. , XI, 34. )

C'est ainsi que Jean, mis en prison par Hérode, et sur le point d'être sacrifié à la prière d'une infâme danseuse, envoie à Jésus-Christ ses disciples, afin qu'à la vue des miracles et des prodiges qu'il opérait, ils crussent en lui et pussent s'instruire par les questions qu'ils étaient chargés de faire.

Saint Jean-Chrysostome dit de plus que nous devons apprendre par là que rien ne doit ralentir notre zèle quand il est question de la gloire de Dieu, de notre salut ou de celui de nos frères, et qu'il faut nous oublier pour Dieu.

Tant que Jean-Baptiste fut avec ses disciples, il leur parlait sans cesse de Jésus-Christ, leur communiquait ses convictions, et leur recommandait de croire en lui. Mais, sur le point de les quitter, il sent son zèle devenir plus vif et plus ardent, parce qu'il craint de laisser dans leur cœur le moindre germe d'erreur et qu'ainsi ils ne demeurent éloignés, séparés de Jésus-Christ, auquel il avait voulu les donner tous dès le commencement.

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Et remarquons son amabilité, si toutefois il nous est permis de nous servir de ce terme. Il ne leur dit pas d'aller à Jésus, parce qu'il vaut mieux que lui. Ce langage ne les eût point persuadés ; ils l'auraient attribué à l'humilité de leur maître, ils lui seraient demeurés plus fidèles que jamais. Que fait-il donc ? Il attend qu'ils viennent eux-mêmes lui raconter les miracles du Sauveur, et alors, il envoie deux de ses disciples pour qu'ils apprennent, par leur propre expérience et par les choses dont ils seront témoins, quelle est la distance qu'il y a entre Jésus-Christ et lui ( S. J. Chr. ) ; que c'était là celui qu'il leur avait prêché ; que l'autorité de ses paroles fut relevée par les œuvres du Christ ; et qu'afin qu'ils n'eussent pas à en attendre un autre que celui auquel les œuvres rendent témoignage. (S. Hil. )

Êtes-vous celui qui doit venir? ou devons-nous en attendre un autre ?
Telle était la question précise adressée à Jésus-Christ, et à laquelle pourtant il ne répond pas ; mais il nous instruit. En effet, la conduite qu'il tient envers les envoyés de Jean nous apprend la condescendance et la charité que nous devons à nos frères ; nous suggère ces ménagements et ces industries pieuses qu'il faut employer envers les faibles, les pauvres pécheurs, afin de faciliter leur retour à Dieu, sans les forcer à rougir de leur ignorance et de leurs désordres. Jésus-Christ connaissait donc les intentions de Jean, et entrant dans le dessein qu'il avait eu en lui envoyant deux de ses disciples, prévient leur scandale, dissipe et éclaire leur incrédulité, les instruit par les miracles qu'il opère devant eux, et leur donne un témoignage aussi irrécusable qu'il était éclatant : celui des œuvres, plus admissible encore et plus éclatant que celui des paroles.
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Or, à l'heure même, dit saint Luc, Jésus délivra plusieurs personnes des maladies et des plaies dont elles étaient affligées et des malins esprits qui les possédaient, et il rendit la vue à plusieurs aveugles. (VII, 21. ) Ce fut alors que Jésus-Christ, s'adressant aux disciples de Jean, leur répondit : Allez, rapportez à Jean ce que vous avez entendu, et ce que vous avez vu. Les aveugles voient, les boiteux marchent, les lépreux sont guéris, les sourds entendent, les morts ressuscitent, l'Évangile est annoncé aux pauvres. (4 et 5. )

Jésus-Christ ne répondait donc point directement à la question qui lui était faite. Il ne pouvait même pas, dans cette circonstance, leur dire : C'est moi qui suis le Christ, prédit par les prophètes, comme il dit plus tard, aux soldats que Judas conduisait au Jardin des Oliviers pour se saisir de sa personne : C'est moi qui suis Jésus de Nazareth que vous cherchez, Ego sum. (Joan., XVII, 5. ) Cette réponse eût pu les blesser, et leur faire dire, ou du moins penser, que le témoignage qu'il se rendait ainsi à lui-même était faux. (Joan. , VIII, 13. ) Mais la réponse, quoique indirecte, prouvait avec évidence aux disciples de Jean et à ceux qui étaient là, qu'il était réellement le Messie promis au monde, et qu'il ne fallait pas en attendre un autre. C'est qu'il ne fallait rien moins, en effet, qu'une puissance divine pour opérer des prodiges semblables à ceux dont nous parle l'Évangile. De plus, Jésus-Christ réalisait ce qu'Isaïe avait annoncé du règne du Messie.
Dieu viendra lui-même et vous sauvera. Alors les yeux des aveugles verront le jour, et les oreilles des sourds seront ouvertes. Le boiteux bondira comme le cerf, et la langue des muets sera déliée. (xxxv, 4 et suiv.)

Il est évident que Jésus-Christ fait allusion à ces paroles du Prophète, et dès lors il y a pour les disciples de Jean une double preuve, celle des miracles dont ils sont témoins ou dont on leur a parlé, et celle de l'accomplissement des prophètes. (Lig. , t. I, p. 263. )

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On demande à Jésus-Christ, dit un pieux auteur, s'il est le Messie, et sa réponse est d'opérer des miracles. Montrez ainsi, chrétien, par vos œuvres ce que vous êtes. Ces miracles que Jésus-Christ opérait sur les corps, sa grâce les opère encore tous les jours sur les âmes. Elle nous éclaire l'esprit, elle rectifie notre volonté, elle nous purifie de la lèpre du péché, elle nous fait entendre sa voix, elle nous fait revivre à la justice, elle se plaît à instruire les humbles des voies du salut. Mais comme le Sauveur voulait être prié, pour opérer sur les corps, ordinairement aussi il n'opère sur nos âmes, que quand nous le recherchons avec son secours, et qu'autant que nous sommes fidèles à répondre à ses premières démarches. ( Lall., Sur S. Luc, VII, 22. )

Or, mes frères, parmi ce grand nombre de prodiges que Jésus-Christ opère, pour montrer qu'il est réellement le Messie, il en est un que nous devons surtout remarquer, et qui n'est pas moindre que tous les autres : c'est l'Évangile annoncé aux pauvres. Que nous entendions par là les pauvres d'esprit, d'affections, ou ceux qui sont privés des biens de la terre, qu'un monde orgueilleux regarde à peine, et qu'il appelle dédaigneusement des prolétaires, des déshérités de la fortune ; le prodige n'en est pas moins grand, et les paroles du Sauveur ont toujours la même force. Il est dit dans le prophète, parlant des fonctions du Messie, que c'est pour les remplir que l'esprit du Seigneur s'est reposé sur lui : car il l'a rempli de son onction et l'a envoyé pour annoncer sa parole à ceux qui sont doux et humbles, c'est-à-dire, aux pauvres : Ad annuntiandum mansuetis misit me. (Isa. , LXI, 1. ) Et cela se vérifie aujourd'hui. Nous voyons, en effet, dit saint Jérôme, que dans la prédication de l'Évangile, il n'y a plus de différence entre la foule et les hommes d'une naissance illustre, entre les pauvres et les riches, les savants et les ignorants, les hommes libres et les esclaves. Telle est la justice rigoureuse, et la vérité de ce divin précepteur du genre humain, pour qui tous ceux qui peuvent être instruits et sauvés sont égaux à ses yeux, et qui a toujours dans son cœur une place pour celui qui veut s'y réfugier.

Et déjà il nous montre ce qu'il veut faire, plus tard, pour les pauvres et les malheureux, qui, malgré toutes les utopies modernes, et les systèmes inventés par la philanthropie du siècle, seront toujours la classe la plus nombreuse de la société. Il devait anathématiser les riches qui, ayant leur consolation sur la terre (Luc., VI, 24), et mettant toute leur confiance dans leurs trésors (Marc., x, 23 ), ne savent pas faire de leur fortune l'usage que la Providence est en droit d'attendre d'eux, ou ne s'en servent que pour contenter leurs passions et se perdre. Il devait déclarer bienheureux les pauvres, pourvu qu'ils soient soumis et résignés à leur sort par amour pour Dieu, et à cause de leur ressemblance avec Jésus- Christ. Il a bien voulu naître, vivre et mourir pauvre pour nous, malgré qu'il fût riche, et c'est dans cette pauvreté volontaire qu'il a constitué toute notre abondance et nous a enrichis. (II Cor., VI, 9. )
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Et bienheureux est celui qui ne prendra point de moi un sujet de scandale ! (23. ) Paroles étranges, sans doute, et qui cependant ont aujourd'hui, comme alors, une triste application. Le scandale que les Juifs prirent de Jésus-Christ fut pour eux le plus grand des malheurs. Mais ce qu'il dit ici regardait directement les disciples de Jean : ils s'étaient scandalisés de ce que Jésus-Christ ne prescrivait pas à ses disciples un genre de vie aussi austère que celui qu'ils pratiquaient eux-mêmes, et nous les verrons, plus tard, se joindre aux Pharisiens pour lui en faire des reproches. (Matth. , IX, 14. )

Or, ils trouvaient ici tout ce dont ils avaient le plus grand besoin : la preuve de la mission de Jésus-Christ, établie par les miracles opérés sous leurs yeux, et un préservatif contre tout ce qui pouvait les aliéner de sa personne. (Lig., t. I, p. 262. ) Et tout cela nous montre combien la bonne opinion que les disciples de Jean avaient de leur maître était profondément enracinée dans leur cœur, et combien grande aussi était la vénération du peuple pour le saint Précurseur.

Il semble qu'en voyant tous les prodiges que Jésus-Christ opérait, il y avait lieu à une admiration sans bornes, plutôt qu'à un scandale contre lequel le Sauveur prémunissait les fidèles. Et cependant, des hommes encore faibles dans la foi se scandalisèrent gravement lorsqu'ils le virent condamné à une mort ignominieuse après tant de miracles. C'est pour cela que saint Paul disait qu'il prêchait Jésus-Christ crucifié, qui est un scandale pour les Juifs, et qui paraît une folie aux Gentils. (I Cor., 1, 23. ) Car, en effet, n'est-ce pas un scandale et une folie pour eux de voir l'auteur de la vie mourir ainsi pour des pécheurs.

Mais pour l'homme de foi, ce sacrifice le rend encore plus redevable à celui qu'il l'a enduré, et ce Jésus mourant est d'autant plus digne de ses hommages et de son adoration, qu'il a subi pour lui de plus profondes humiliations et des ignominies plus grandes. Nam tanto Deum ab hominibus dignius honorandus est, quanto pro hominibus et indigna suscepit. (S. Grég. )
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Heureux donc encore une fois est celui qui ne prendra point du Sauveur un sujet de scandale ! Je dis ceci pour nous précisément parce que tous les jours les paroles de Jésus-Christ ont leur application. Hélas ! mes frères, qu'il est grand le nombre de ces lâches chrétiens pour qui Jésus-Christ est un sujet de scandale !

Jésus-Christ est pour nous un sujet de scandale, quand nous repoussons les dogmes et les maximes de l'Évangile ; quand nous trouvons la mort dans les moyens qu'il nous avait laissés pour nous donner la vie ; c'est-à-dire, quand nous ne voulons pas nous approcher des sacrements, ou que nous nous en approchons dans des dispositions coupables ; quand nous nous moquons des prescriptions de l'Église, notre mère, ou que du moins nous refusons de nous y soumettre.

Oui, Jésus-Christ est pour nous un sujet de scandale, quand, par un lâche respect humain, indigne d'un homme de cœur, nous avons honte de manifester notre foi, nous rougissons d'appartenir à Jésus-Christ et de pratiquer nos devoirs de chrétiens. C'est apostasier par nos œuvres, et désavouer Jésus-Christ dans la crainte de déplaire à des gens auxquels, dans le fond, nous serions bien fâchés de ressembler.

Et cette vaine crainte est peut-être l'un des plus dangereux écueils pour les chrétiens. Car remarquons bien que la colère ne fait que des emportés, la volupté que des impudiques, l'amour de l'argent que des avares, et ainsi des autres passions qui déshonorent l'homme. Mais pour le respect humain, il produit seul tous les crimes, jusqu'aux injustices les plus criantes, les calomnies les plus atroces, jusqu'à l'homicide enfin. Est-ce que Pilate ne condamna pas lâchement à mort Jésus-Christ dont il avait reconnu juridiquement l'innocence ?

Heureux donc serons-nous si nous voulons surmonter cette honteuse faiblesse, ne rougir jamais de Jésus-Christ, et si nous savons nous montrer en tout, partout et toujours chrétiens soumis, fidèles et fervents.

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Tout ce que nous venons de dire suffisait aux disciples de Jean pour les rassurer sur le Christ par les miracles dont ils avaient été témoins. Aussi, l'Évangéliste nous dit-il qu'ils se retirèrent. Mais il fallait prévenir les inconvénients que pouvaient avoir les questions des envoyés, pour la foule qui ignorait les intentions qui les avaient dictées. Elle aurait pu supposer que Jean, après avoir rendu témoignage à Jésus-Christ, pensait maintenant d'une manière différente, que son témoignage était léger et vain, qu'il voulait faire de l'opposition, ou que son esprit était affaibli par les souffrances de la prison.

Jésus-Christ va répondre à tout, et comme il y avait dans ses auditeurs plus d'ignorance que de malice, il leur parle avec beaucoup de bonté, et leur montre que Jean n'a point démérité de sa première réputation. Il profite, en quelque sorte, de cette circonstance pour faire de saint Jean-Baptiste le plus magnifique et le plus bel éloge qu'un homme ait pu recevoir, puisqu'il était décerné par l'Homme-Dieu, qui, étant la lumière, la justice et la sagesse, ne pouvait ni se tromper, ni vouloir tromper personne. Si donc il loue Jean, c'est qu'il le mérite réellement, et qu'il est digne des louanges qu'il lui donne.

Lorsque les deux disciples s'en furent allés, Jésus-Christ s'adressant au peuple, leur parla de Jean en cette sorte : Qu'êtes-vous allés voir dans le désert ? Un roseau agité par le vent ? (7.) Remarquons bien que Jésus-Christ ne parle pas comme un homme qui affirme que Jean est semblable à ce roseau agité par le vent : mais il le nie formellement. Et ce roseau que signifie-t-il ? Une âme charnelle : à peine est-elle atteinte par la calomnie, ou amollie par les caresses du monde, qu'elle se laisse fléchir aussitôt et va en tout sens. Le vent de la faveur souffle-t-il pour elle ? elle se livre à l'orgueil, au contentement, à la joie : on obtient d'elle tout ce qu'on veut. Est-ce au contraire celui de la calomnie, de la détraction, de l'injustice qui souffle du côté d'où venait la faveur ? elle change avec lui, et la voilà tout entière à la vengeance et à la fureur.
Aussi Jean n'était-il point un roseau agité par le vent : les bienfaits ne le rendaient point flatteur, ni l'injustice colère et emporté ; les prospérités de ce monde ne l'enflaient point, et il ne se laissait point abattre par l'adversité ; les événements, les fluctuations de la vie ne lui enlevaient point la rectitude et la stabilité de sa conduite. (S. Grég. )

En un mot, sa vie tout entière était exempte de légèreté, ou plutôt elle était le modèle le plus parfait d'une constance et d'un courage à toute épreuve. Sa pénitence ne s'est jamais démentie, son zèle pour la gloire de Dieu outragé a été inflexible en présence d'un monarque incestueux et d'une femme impudique, et tant qu'il lui reste un souffle de vie, il crie à l'un et à l'autre. Ce que vous faites est défendu : Non licet (Matth., XIV, 4. )

Enfin, la fermeté dans la foi au Messie, qu'il a montré du doigt, et baptisé dans les eaux du Jourdain, son humilité, au-dessus de tout éloge, résistent à toutes les avances qu'on lui fait : il déclare qu'il n'est point le Christ, mais simplement la voix de celui qui crie dans le désert.
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Et si maintenant, mes frères, comparant notre conduite à la sienne, nous faisons un retour sur nous-mêmes, que trouverons-nous ? Où est notre constance dans le bien ? aujourd'hui nous sommes à Dieu, à Jésus-Christ, à la vertu, et demain au démon, au monde, au vice. S'il nous arrive de tomber dans le mal, nous prenons de bonnes résolutions, nous disons que nous voulons revenir à Dieu et ne pas mourir dans un aussi triste état : mais nous renvoyons à demain, à demain que Dieu ne nous a point promis, et qui ne devient jamais aujourd'hui, comme le Seigneur nous l'a dit par la bouche de son Prophète. (Ps. XCIV, 8. )

Où est notre courage quand il faut nous opposer au mal dont nous sommes témoins, que nous devrions reprendre, ou du moins condamner ? Nous craignons de déplaire au monde, d'offenser les coupables et nous abandonnons lâchement la défense de la vertu.

Où est notre foi en Dieu, en ses promesses, en ses menaces ? Si nous croyions en Dieu, si nous le regardions comme notre Seigneur et comme notre Père, nous l'adorerions, nous lui obéirions, nous l'aimerions et nous le servirions mieux que nous ne le faisons. (Matth. , 1, 6. )

Si nous espérions en ses promesses, nous vivrions de manière à les mériter, et si nous craignions ses menaces, nous ne nous exposerions pas à tomber à chaque instant dans la main terrible de la juste colère et de ses vengeances, car nous saurions qu'on ne se moque pas impunément de lui : Deus non irridetur. (Gal. , VI, 7. )
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Message par Laetitia »

Apprenons donc par l'exemple de saint Jean, à ne point ressembler à un fragile roseau. Fermons les oreilles et restons fermes au bruit que le monde fait autour de nous pour nous distraire et nous détacher de Dieu. Soyons calmes et tranquilles au milieu des tribulations auxquelles nous sommes exposés, sachant qu'elles opèrent un poids immense de gloire sans rapport avec elles. (II Cor., IV, 17. )

Sommes-nous attaqués par des langues ennemies ? ne nous livrons point à la colère, prions pour nos ennemis, laissons à Dieu le soin de la vengeance, ou plutôt pardonnons du fond de nos cœurs, et Dieu nous pardonnera nos propres offenses malheureusement si nombreuses.

Que les prospérités ne nous rendent point orgueilleux, ni durs envers nos frères, et que l'adversité ne nous abatte pas. Soyons contents de notre sort, et si nous voulons l'améliorer, ce que Dieu ne nous défend point (II Cor. , XII, 14), que ce ne soit jamais aux dépens de la justice et de la conscience.

Cherchons avant tout, selon l'ordre de Jésus-Christ, le royaume de Dieu et sa justice, persuadés que jamais rien ne nous manquera. (Luc., XII, 31. )

Enfin persévérons dans le bien au milieu des scandales et des défections qui nous environnent, et marchons d'un pas ferme et assuré à la conquête de cette couronne immortelle de gloire à laquelle Jésus-Christ nous a rendu nos droits par son sang et sa mort. (S. Grég.)

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