formation à l'humilité du chanoine Beaudenom

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Alexandre
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III.La prudence respectant un attrait sagement reconnu.

Nous l'avons vu, les saints pour la plupart s'acharnent à se rabaisser; ils éprouvent une joie amère à s'accabler des qualificatifs les plus humiliants, et trouvent dans le sentiment sans cesse renouvelé de leur propre abjection, le stimulant de leur ferveur.
Par contre, nous voyons des âmes, fort généreuses pourtant, qui s'arrêtent moins à cet ordre de sentiments et qui y rencontreraient quelque gêne. Elles peuvent avoir, autant que ces saints, le sentiment profond de leur misère, mais elles en cultivent moins l'impression. Ce sont souvent des âmes particulièrement pures: le mal ne les a point marquées de ses stigmates déshonorants; la tentation elle-même a respecté tant d'innocence. comment s'indigner contre ce que l'on connaît à peine!
Chez d'autres encore le sens du beau est tellement développé qu'il se détourne instinctivement de toute laideur.
Rien qu'au contact de ces choses sur leur pensée; il leur semble à toutes qu'une sorte de flétrissure les atteint; leur coeur se resserre et leur élan vers Dieu se décourage.
Serait-il juste de condamner ces répugnances?
Serait-il sage de les violer?
Nous ne le croyons pas.
Les caractères que nous venons de décrire, signalent à la prudence une disposition providentielle qu'elle a le devoir de faire respecter.
Ne vous troublez pas! dira-t-elle à ces âmes: cet ordre de motifs va moins bien à votre humilité; telle autre pourra lui convenir davantage...
Il n'est pas essentiel à la vertu de les envisager tous, il suffit qu'elle en retienne qui la déterminent. Le meilleur pour telle âme n'est pas toujours le plus renommé ou le plus excellent... mais bien celui qui, mieux en rapport avec sa nature, suscite les plus grands efforts.
Sans doute les motifs d'abjection portent l'humilité fort loin; mais le motif du Tout de Dieu ouvre aux âmes contemplatives des horizons non moins étendus. L'essentiel est que votre humilité soit pratique et généreuse.
Qu'elle le devienne sous telle ou telle bonne influence, cela importe moins à la vertu. Face à face avec la pensée de l'infini, vous vous sentez toute petite; quels que soient les succès de vos oeuvres ou les dons de votre prière, vous ne vous élevez pas en vous-même; quelle que soit la misère du prochain, vous ne la méprisez jamais; vous vous faites constamment douce, indulgente et bonne. Si l'humiliation vous arrive, vous la regardez avec des yeux habitués à contempler le Calvaire et vous lui ouvrez vos bras comme pour étreindre Jésus avec sa croix. (L'humilité que nous décrirons dans la cinquième semaine, sous ce titre: Transformation, répondra peut-être à l'attrait de plusieurs.)

Si même votre attrait ne vous porte pas spécialement vers l'humilité, pourquoi le contraindre? L'humilité, comme les autres vertus, mérite un culte général: mais, pas plus que ses soeurs, elle n'a droit à un autel à part dans chaque temple. Votre nature par ses tendances, parfois même par ses défauts; votre éducation par son développement et ses habitudes d'esprit; votre vie par ses rencontres, vous ont constitué apte à telle vertu plutôt qu'à telle autre. Tout cela résulte d'une disposition providentielle et marque une voie. Dans cette voie, vous marcherez plus librement et vous irez plus loin. Cultivez donc, selon votre attrait, par exemple la pureté d'intention, l'union de pensée avec Dieu ou la reconnaissance.
Cultivez l'abnégation, la pauvreté, l'oubli de vous-même, le dévouement aux autres. développez surtout l'amour divin, avec ses ardeurs et son intimité.
Hors de là, vous dépérirez comme la plante transportée dans un sol qui ne lui convient pas; tandis que là vous étendrez votre ramure, vous répandrez le parfum de vos fleurs et vous donnerez à Dieu les fruits qu'il attend.

Suite pour la première méditation de la cinquième et dernière semaine: Transformation.
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Alexandre
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PREPARATION A LA CINQUIEME SEMAINE

Aux dernières pages de ce livre, nous avons analysé les deux tendances que l'humilité a charge de conduire: l'estime de soi, le désir de l'estime des autres. Ensemble, elles ont pour objet, nous l'avons vu, la sauvegarde de notre personnalité, l'une par l'affirmation de notre propre valeur, l'autre par la recherche de l'estime qui nous protège.
Là est leur rôle, là est aussi leur danger. En elles-mêmes, ce sont deux forces aveugles qui dépasseraient leur objet si la vérité et la justice ne venaient les guider et au besoin les contraindre. En effet, poussant trop loin la sauvegarde du moi ou plutôt son exaltation, elles feraient de notre personnalité exclusive le principe et le but: le principe, comme si le bien venait surtout de nous et non pas de Dieu; le but, comme si nous avions le droit de rechercher notre gloire plutôt que la sienne. Un tel renversement des rôles ne serait pas seulement une injustice et une injure, il serait un grave désordre; il aurait beau trouver quelque excuse dans cette sorte d'inconscience qui généralement l'accompagne, il n'en produirait pas moins ses mauvais effets dans notre vie morale.
la vaillante humilité ne le souffrira point et, s'armant de la parole de l'archange, elle s'écrie à son tour: Quis ut Deus? Arrière ces prétentions insensées! Qui donc est le véritable auteur de tout bien? Qui donc mérite avant tout la louange?
Notre orgueilleuse personnalité ainsi reléguée à sa place, voilà Dieu remit sur son trône. Toutes nos vertus viendront la reconnaître comme le premier principe d'où elles émanent; et tous nos actes se dirigeront vers lui comme vers leur fin nécessaire. Or, ces deux devoirs sont la base de la vie chrétienne, la règle de son activité, la condition de son mérite.
En les faisant respecter, l'humilité justifie donc son titre de fondement et de gardienne des vertus. Nous allons voir maintenant qu'elle en mérite un autre encore plus beau, car elle est leur couronnement. Ainsi, aux dernières pages de ce livre, l'humilité va se montrer à nous, terminant sa carrière comme un beau jour, dans un éclat de triomphe.
Ce rôle nouveau procède d'une conception nouvelle. Les deux tendances que l'humilité s'est jusqu'ici contentée de vaincre, elle va les transformer. Tant qu'elles inclinaient du côté de la terre, elles les a contenues; elle va maintenant les affranchir, en les dirigeant du côté du ciel. Ainsi, rien de ce que Dieu a créé ne sera détruit; l'estime de soi deviendra l'admiration du divin en nous; et le désir de l'estime des autres cherchera le regard même de Dieu.
Ces dispositions transformées trouveront pour s'étendre une sphère plus vaste; elles se reposeront sur des objets plus sûrs; leur beauté se dégagera de tout alliage; et, finalement, leur action se portera de Dieu vers le prochain, par une extension d'ordre surnaturel.
Elevons donc nos espérances comme nos regards; c'est le moment: l'humilité défensive est fortement établie; ses ennemis sont démasqués et connus; la paix règne de toutes parts; marchons à de pacifiques conquêtes. La vertu que nous allons poursuivre a été celle des saints et par excellence celle de Marie; elle sera en quelque manière, celle de notre éternité.
Ah! Que je voudrais m'élancer vers ce onde nouveau! Que je voudrais donner à mon être vulgaire cette transformation supérieure! Ce que j'y ferai aussi moi-même, ne puis-je pas le commencer déjà? Si je dois être divinisé un jour en vous contemplant face à face, pourquoi ne me transformerai-je pas ici-bas, en essayant de vous contempler à travers les ombres transparentes de la mystérieuse création.
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Alexandre
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CINQUIEME ET DERNIERE SEMAINE DE LA FORMATION A L'HUMILITE

PREMIERE MEDITATION, XXIXè Exercice: Transformation de l'estime de soi

Premier point: Les dons de Dieu.
Deuxième point: L'humilité les fait resplendir.

Préparation pour la veille. Si je veux m'estimer foncièrement, je dois chercher en moi ce qui vient de Dieu surtout dans l'ordre surnaturel. En y découvrant des merveilles de grandeur je comprendrais sans doute la haute dignité chrétienne. Ce sera le suprême essor de cette tendance qui s'appelle l'estime de soi. Je parcourrai donc, sans scrupule comme sans exagération, le sommaire des dons de Dieu. Si je monte assez haut, je verrai mes qualités personnelles émanant de lui, et la beauté de mon âme comme un reflet tombant de sa propre beauté; ou mieux, je cesserai en quelque sorte de me voir moi-même, tant je me sentirai envahi par le divin.
Il faut porter à cette méditation un esprit dégagé des idées vulgaires et disposé à une juste admiration; un esprit large qui ne s'arrête pas aux objections mesquines. Il faut y porter surtout un grand esprit de foi.
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Alexandre
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MEDITATION

Prélude. demander la grâce de comprendre ces vérités comme si elles m'apparaissaient pour le première fois; de les pénétrer de les sentir, d'en être impressionné.

I. Les dons de Dieu.

1/ Ce que je suis en tant qu'homme: chef d'oeuvre de la création terrestre,
_souverain dominateur de la matière,
_petit monde dans lequel l'univers vient se refléter par l'intermédiaire des sens et se transformer en idée par l'effort de l'intelligence,
_sorte de ciel où Dieu se fait connaître comme auteur de toutes choses et pressentir comme infini,
_liberté morale au moyen de laquelle je suis le maître de mes actes et de ma destinée...
Ah! pourquoi ces magnificences me sont-elles si familières! On estime si peu ce que l'on a toujours connu! Pour admirer, l'homme a besoin de s'étonner. Mais qu'on y songe bien, une lueur d'intelligence est supérieure à l'immensité des cieux étoilés! Mais un acte de volonté est une force plus haute que tout le mouvement des mers! mais l'admirable instinct des animaux ensemble, n'atteint pas à la valeur d'une pensée!

2/ Toutefois, l'éclat de ces dons naturel pâlit à l'apparition des dons de la grâce; ceux-là sont de telle condition que la toute-puissance ne saurait créer un être à qui ils fussent naturels, comme la raison est naturelle à l'homme.
La grâce ne peut être qu'une transformation. Mais aussi, quelle transformation! C'est la nature divine participée, avec son besoin de l'infini et son aptitude à le contempler face à face.
C'est une vie divine au sein de notre être grossier, et, parce qu'elle est divine, une vie que Dieu seul peut exercer en nous: chacun de nos actes surnaturels a besoin de son mouvement, soit pour naître, soit pour durer. Ah! si nos yeux s'ouvraient tout à coup, nous verrions ce Dieu, l'Etre souverain, en quelque sorte à notre service, travaillant sans cesse à nous diviniser!...
Tout cela est certain, mais nous reste caché.
Oh! le croire, le croire avec enthousiasme! ce serait du moins l'entrevoir et ce serait commencer à se bien connaître.

3/Un lien plus tendre m'unit à Jésus. Jésus est mon ami, il me donne son coeur et ses biens.
_Jésus est mon frère, il a pris ma nature.
_Jésus est quelque chose de moi: c'est ma grande gloire; ou plutôt je suis quelque chose de lui et c'est mon grand bonheur. Je lui appartiens comme la petite cellule, perdue au fond de mes organes, et qui reçoit sa vie de l'action du cerveau; comme le petit flot de sang qui soulève la plus lointaine de mes artères et qui me vient au coeur;
_union mystérieuse ici-bas radieuse au ciel;
_principe incomparable de dignité pour qui sait comprendre: je suis une part de l'être mystique de Jésus; je peux le diminuer ou l'accroître; je suis un besoin pour son bonheur, je puis être une déception pour ses espérances. Il m'est donné de le laisser vivre en moi pleinement, ou de lui préférer, hélas! la triste expansion de ma vie propre, par la recherche désordonnée des quelques joies et des quelques applaudissements de ce monde.

Ne trouves-tu pas, ô mon âme, que ces grandeurs suffisent à satisfaire le sens de l'estime de soi et à fonder ta noblesse? quelle noblesse plus ancienne que celle qui vient de l'Eternel?
Quelle noblesse plus illustre que celle qui descend du Très-Haut?
_Par Jésus, je suis issu du sang d'un Dieu et ma vie se nourrit d'un aliment divin. Attendrai-je le ciel pour être fier de ces gloires?
Le ciel les fera resplendir, c'est vrai; mais la grâce, déjà, m'en enrichit.
Les dédaignerai-je parce qu'elles me sont communes avec d'autres êtres? Subissent-elles par ce fait une déchéance? Le bien des autres diminuerait-il mon bien propre? Loin de là, il augmente de mille manières, et par les exemples qu'il m'offre, et par les secours charitables qu'il m'apporte, et par les vertu spéciales qu'il me donne à exercer.
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Alexandre
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II. L'humilité fait resplendir les dons de Dieu.

1/ L'incrédule est un vrai grand aveugle qui traverse la création sans y découvrir Dieu.
L'orgueilleux voit peut-être Dieu dans la nature mais il ne le voit pas en soi. Ce qu'il fait, il se l'attribue; ce qu'il est, même dans ses fonds, il se le croit personnel.
Ce n'est pas ordinairement présomption, mais inconscience.
Le tort du plus grand nombre n'est pas d'écarter Dieu, il est plutôt de l'ignorer.
A mesure que l'humilité répand sur cet aveuglement sa belle lumière, l'évidence de l'action apparaît, s'étend et finit par envahir tout notre domaine, comme fait, à son lever, le soleil sur notre terre. La grandeur de l'homme ici-bas est de chercher Dieu. S'il le cherche dans la nature, il le découvre partout et jusque dans le plus petit grain de sable; s'il le cherche en lui-même il le trouve dans tout son être et dans le plus petit de ses actes. Il s'ensuit que l'humble ne se préfère foncièrement à personne, et que lorsqu'il s'admire lui-même, il s'admire en quelque sorte à genoux.

2/Autrefois, derrière le char du triomphateur, la prudence d'un grand peuple plaçait un héraut d'armes chargé de lui répéter cet avertissement:" Souviens-toi que tu es un homme." Cette voix est ici celle de l'humilité: souviens-toi dans toutes ces grandeurs que tu n'es qu'un homme, qu'un néant! Tiens ton rang, défends ton honneur, prends des initiatives, insiste et lutte au besoin, mais en faisant tous ces actes légitimes, souviens-toi, souviens-toi! Ne perds jamais de vue l'origine de tes dons; ne cesse jamais d'envisager la fin dernière de tes actes.

3/Si l'estime de soi était simplement l'estime de l'oeuvre de Dieu en tout homme, elle ne serait pas un sentiment personnel, mais une forme d'adoration. Cette estime vise ces dons en tant qu'ils sont nôtres. C'est là que l'humilité a besoin de nous tenir les yeux ouverts, pour nous montrer ces dons toujours bornés et fragiles, modérant ainsi l'inclination naturelle qui porte à les grossir. En même temps, elle s'oppose de toutes ses forces à la vaine complaisance que l'on serait tenté prendre; et elle défend, comme une injustice, toute préférence qui entraînerait le moindre dédain pour autrui.
Sans doute l'estime de soi reste une vertu délicate: elle serait, sans la grâce, une tentative imprudente. La timidité craintive, trop souvent peut-être, prend le parti de fermer les yeux.
Ce n'est point sagesse: les dangers peuvent être conjurés et le sentiment intense de la dignité personnelle ne saurait trouver ailleurs des mobiles d'égale puissance. Ce sentiment est une sorte de royauté; et cette royauté, dans sa domination fortement établie, proscrit le mal avec un dédain instinctif et invincible. Dans la majesté de ses goûts, elle tend à ce qui est le plus noble. D'un trône élevé on voit de très loin ce qui est bas et vulgaire.
Si l'on pouvait pénétrer dans l'âme d'un saint on marcherait de surprise en surprise. Le sentiment de l'estime de soi se présenterait splendidement accru: les saints se savent fils de Dieu, participant à sa nature, futurs héritiers de sa gloire. Ils sont hautement fiers de l'amitié de Jésus, de la ressemblance qu'il imprime en leur âme, de l'action constante qu'il exerce au plus intime de leur être. Ces sentiments les poussent sans cesse vers une perfection qui les grandira toujours; et leur ambition prenant un essor plus qu'humain, conçoit la prétention de grandir Dieu lui-même, en travaillant pour sa gloire. Les voit-on timide et incertains en face des entreprises les plus hardies, des dangers les plus manifestes? De quel oeil regardent-ils l'abaissement suprême, le mal? De quelle horreur ne sont-ils pas soulevés en face de ces assauts? Cherchez bien et nulle part vous ne trouverez une pareille exaltation du sentiment de la dignité personnelle, exaltation pleine de grandeur et de force; toute douce et toute paisible en même temps, parce qu'elle se développe dans l'atmosphère pure et calme du vrai, du bien et du beau par excellence.

Résolution. Admirer en soi les dons de Dieu, pour donner au sentiment de la dignité personnelle son mobile plus haut. Ne pas me contenter d'une vue superficielle qui n'apprend rien et n'émeut pas.
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Alexandre
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DEUXIEME MEDITATION DE LA CINQUIEME SEMAINE

XXXè Exercice: Transformation du désir de l'estime

Premier point: Désirer l'estime de Dieu.
Deuxième point: Désirer lui plaire.
Troisième point: Désirer lui faire plaisir.

Préparation pour la veille. Le désir d'être estimé et le désir de plaire sont si voisins qu'ils semblent constituer plutôt deux manifestations de la même tendance. Ils sont pourtant distincts: le désir de l'estime vise l'approbation et aspire à un jugement favorable: c'est plutôt à l'esprit qu'il s'adresse. Le désir de plaire signale une tentative vers le coeur: on veut une estime affectueuse.
La distance est plus grande entre le désir de plaire et celui de faire plaisir. Celui-là est de sa nature assez personnel: il envisage le bien qu'il apporte à l'estime. Celui-ci, sans être toujours désintéressé, cherche d'abord le bien des autres.
Ce qui les rapproche pourtant, c'est que le second découle du premier comme l'effet de sa cause: qui veut plaire cherche généralement à faire plaisir. Le désir de plaire se prêtera-t-il lui aussi à la pénétration du divin? Comment, un tel sentiment très humain de son fonds, pourrait-il se transformer sans cesser d'être lui-même?
Eh bien! ici encore, plongeons nos regards dans l'âme d'un saint. Y voyons-nous réduit et inerte le désir de plaire? NON, mille fois non, nous le trouvons lui aussi étendu et plus actif, mais surtout plus noble.
Un nouveau monde lui est apparu, déroulant à ses regards des perspectives transcendantes, c'est le monde des êtres surnaturels: Dieu et Dieu partout.
Jésus plus spécialement nôtre et en Jésus tout ce qui se relie à lui, les anges et les hommes.
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MEDITATION

Prélude. Demander la grâce de s'ouvrir à ces belles pensées, d'attirer en soi ces sentiments féconds et de donner à sa vie cette haute orientation.

I. Peut-on désirer l'estime de Dieu.

Si nous avions avec Dieu des relations familières, nous désirerions vivement son estime: on recherche l'estime des personnes qui entourent, plus particulièrement celle des grands. L'obtenir c'est se rapprocher d'eux, c'est entrer dans leur sphère et participer à leur supériorité. Mais Dieu est un Etre invisible et qui semble lointain. L'estime qu'il ferait de nous, ne peut nous arriver par aucune voie extérieure: nous ne l'entendrons pas formuler par des paroles; nous ne la lirons pas dans son regard.
Est-ce à dire que toute voie d'entente nous soit fermée? Les sentiments de Dieu sont-ils secrets qu'ils ne se trahissent d'aucune manière? A défaut d'une parole et d'un regard direct, n'avons-nous pas les saintes présomptions qui naissent de ces affirmations positives?
Ne savons-nous pas, d'une façon certaine, que Dieu estime tout bien, le bien d'un acte passager comme le bien d'une qualité permanente?
Ainsi donc, en accomplissant un acte vertueux, en perfectionnant nos qualités, nous sommes assurés de gagner son estime; et cette estime croît avec la grandeur de nos actes et l'éminence de nos vertus.
Seule la foi vive comprend ces choses, seul l'amour en peut faire sa vie. Hélas! ma pauvre âme n'a peut-être qu'une foi sans lumière intime, un amour sans nobles besoins! Lui sera-t-il donc inutile d'entreprendre une méditation trop haute encore pour elle? N'y trouvera-t-elle que des idées incertaines? N'y puisera-t-elle aucun désir? O Dieu, auteur de toute lumière,éclairez-moi! O Dieu, créateur de tout bon sentiment, animez-moi! Daignez abaisser à ma portée les vérités qui sont à la portée des saints.
Sans voir aussi loin qu'eux, je verrai la même vérité; sans aller aussi loin qu'eux, je tendrai au but qu'ils ont atteint. Vous faites vos oeuvres par degrés, ô Dieu sage! eh bien! aujourd'hui j'essaierai de faire quelques pas vers le désir de vous plaire.
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II.Comment s'exerce le désir de plaire à Dieu?

C'est le désir d'attirer son attention d'une façon particulière, de vivre dans la bienveillance de son regard, et finalement de se faire aimer de lui davantage, car c'est à cet objet que se termine normalement le désir de plaire, même dans l'ordre humain.
Désir d'obtenir quelque admiration, l'admiration est la souveraine expression de l'estime; elle est nécessaire à un grand amour. Comment se faire admirer de Dieu? Par tout effort généreux, par tout acte remarquable, par tout sentiment élevé: ce qui est commun n'y suffit pas, il y faut quelque supériorité. Le dévouement s'offre d'abord; de là le regard se porte vers le sacrifice. L'immolation est, dans notre ordre déchu, l'acte le plus noble.
L'immolation suppose d'ailleurs une grande force d'âme, qualité souverainement estimable. Donc se dévouer à la cause de Dieu, s'y sacrifier au besoin; immoler ses goûts quand ils sont des obstacles; accueillir la peine avec douceur et les menaces de l'avenir avec une courageuse confiance: voilà les moyens de prétendre à l'admiration du grand appréciateur de toute chose.
Désirer charmer Dieu. C'est plus qu'attirer son attention; c'est plus que mériter son estime, c'est commencer à gagner son coeur.
Dans ce désir se trouve un stimulant très personnel: être pour lui cet objet qui charme son regard, qui fait battre son coeur. Dans cette naissante persuasion quel épanouissement pour l'âme! Toutes ses facultés sont à l'aise, que dis-je, sont animées, elles vivent, elles grandissent. Quel principe de perfectionnement!
Pour charmer, il faut avoir de la beauté, il faut manifester des qualités aimables!
Quelle vigilance en tout: sur leurs paroles, sur leurs attitudes, sur les moindres détails de leur vie!...
O mon Dieu, pour plaire à vos regards, pour charmer votre coeur, je serais donc sans goût, sans élan, sans persévérance! Ce désir me semble être étranger et j'en cherche la cause. Peut-être s'épuise-t-il ailleurs?, peut-être aussi manque-t-il d'aliments? Une vie intérieure médiocre est une triste pourvoyeuse!...
Oh! la pureté du coeur, oh! l'intimité de la prière!; oh! l'intensité du désir! Charmer Dieu!..., mais pour y songer seulement, il faut une piété délicate.

Ah! si je m'établissais dans cette disposition sainte?
Si je donnais à ma vie cette orientation?
Si je consacrais à ma méditation des heures si longues?
Si, durant le jour je cherchais plutôt le regard à qui je veux plaire?
Ce regard cherché sera surtout le vôtre, ô Jésus, homme Dieu, ô Jésus mon frère. Vous plaire et vous plaire particulièrement; me faire aimer de vous; obtenir de votre bouche un doux éloge ou l'attendre au ciel..., quel champ ouvert à mon désir de plaire! Aucune limite ne le restreint. Votre attention, ô Jésus, se fixe sur moi jour et nuit; votre âme est sensible à toute ordre de prévenance; elle en saisit les moindres délicatesses avec leurs nuances infinies.
Ce que je ne sais pas expliquer; ce que j'éprouve, même sans trop le comprendre, ô merveille!
Vous le lisez distinctement dans mon coeur.
O Jésus, vous êtes, à vous seul, tout un monde plus étendu, plus plein, plus animé que le monde des hommes dont on se dispute l'estime; et cette estime, on ne l'obtient que rarement, on n'en jouit qu'au milieu des craintes, on ne la fixe jamais d'une façon durable; car enfin ce monde passe et s'évanouit avec la fumée de son estime. Vous, ô Jésus, vous emportez au Ciel, pour les faire éternels, tous les sentiments que j'aurais ici-bas provoqués dans votre grand coeur, toute la part d'estime que je serai parvenu à mériter de vous.
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III. En quoi consiste le désir de faire plaisir à Dieu.

Le désir un peu personnel d'attirer les regards de Dieu et de lui plaire, s'élève insensiblement au désir désintéressé de lui faire plaisir. Lui donner quelque joie, quelque gloire; se dévouer, s'immoler, pour que ces actes l'honorent; s'embellir de vertus pour que cette vue le contente!... A force de vouloir charmer Dieu, on s'est épris de ces charmes! à force de se dépouiller de ce qui l'eût éloigné, on ne garde à aimer par dessus tout que sa souveraine amabilité: le désir de plaire est le générateur du désir de lui faire plaisir.

Il y a tout une vie nouvelle dans cet ordre plus élevé de sentiments. Les qualités mises en jeu pour plaire, s'épanouissent ici sous une forme plus belle, plus tendre, plus parfaite. On en arrive à se répéter sans cesse: pourvu que Dieu soit content! On vit la joie qu'on lui donne, mais parce qu'on la sent en lui... On se console de ses propres peines, en songeant qu'il est heureux... Le détachement de soi-même se fait d'une façon si douce qu'on en a conscience à peine; et d'une façon si complète que Dieu règne en toutes parts... On assure ainsi à la vertu un fondement plus inébranlable et un couronnement plus haut. Le caprice de l'inconstance n'y trouve aucune prise et l'orgueil lui-même semble disparaître... en se perdant au sein de Dieu.

O Dieu si aimable et si aimé, puisqu'il existe tant de belles âmes qui semblent ainsi passées en vous, et n'avoir d'autre vie que la vôtre, d'autre désir que votre bien, d'autres joies que vos joies; de grâce, faites descendre jusqu'à ma bassesse quelques mouvements de ces attraits.
Si je n'ai pas l'aile assez forte pour planer constamment dans ces hauteurs, permettez-moi du moins de m'y élever aux heures où je médite; il en restera dans ma vie active des souvenirs, des impressions et de salutaires regrets!


Résolution. M'appliquer cette parole du premier martyr saint Etienne: "Je vois les Cieux ouverts et Jésus à la droite du Père." Aujourd'hui je chercherai le regard de Jésus, un regard qui me dise: tu me plais!___Que ne pas tenter pour l'obtenir!
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TROISIEME MEDITATION DE LA CINQUIEME SEMAINE

XXXIè Exercice: Désir de plaire et de faire plaisir au prochain.

Premier point: Dieu vu dans le prochain.
Deuxième point: Jésus dans le prochain.
Troisième point: Règles pratiques.

Préparation pour la veille. _Se montrer indulgent, facile et bon pour toutes les personnes qui nous entourent; chercher habituellement à leur faire plaisir, et laisser sentir à chacune cette chaude affection qui dilate, voilà un idéal que la pauvre nature humaine ne saurait pleinement réaliser avec ses seules forces. Trop de calculs intéressés, trop d'inconstances dominent ses sentiments; et d'autre part, trop de laideurs morales déparent son objet. Il faut qu'une beauté d'ailleurs l'illumine. L'homme ne peut donner à l'homme cet amour idéal qu'en le revêtant de l'amour divin, voilà pourquoi nous ne saurions trop méditer ce conseil qui est l'âme de loi nouvelle: voyez Dieu dans le prochain; regardez le prochain sur la poitrine du Sauveur.
Ce conseil de paix, de perfection et de vrai bonheur, l'avons-nous bien compris? Pénètre-t-il nos sentiments, éclate-t-il dans nos actes?
Hélas! c'est à peine s'il entre dans nos convictions!
Nous le redisons comme une formule apprise, mais vaine. Qu'attendons-nous pourtant? Que Dieu fasse un miracle et nous le crie du haut du ciel? Ce n'est point sa coutume.
Que le divin Maître vienne visiblement prendre par la main chacune des personnes qu'il nous donne à aimer et nous la présente lui-même?
Mais ne le fait-il pas invisiblement, chaque jour?
N'est-il pas dans l'hostie de la messe; et, par la communion, ne se donne-t-il pas à chacun? que voulez-vous de plus?

O divin Maître, ouvrez mes yeux, ces yeux de la foi qui vous découvre! Faites que demain, en vous retrouvant partout dans ce prochain, pour lequel je n'aurais souvent que de l'amertume et presque toujours que de l'indifférence, je commence à l'aimer de cet amour que je vous porte, ô Jésus!
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