Défense des Papes et de la Papauté par S. Robert Bellarmin

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Abbé Zins
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Poursuivons, avec le De Romano Pontifice, de Saint Robert Bellarmin.
Saint Robert Bellarmin [i]De Romano Pontifice[/i] a écrit :
Saint Robert Bellarmin De Romano Pontifice

Livre IV Du Pouvoir Spirituel du Souverain Pontife


Ch. V Des décrets sur mes moeurs.



La troisième proposition peut être celle-ci : Le Pontife Romain ne peut errer non seulement dans les décrets en matière de foi, mais pas non plus dans les décrets se rapportant aux moeurs qui sont prescrits pour toute l’Eglise, et aux choses nécessaires au salut ou en celles concernant par soi le bien et le mal.

Nous disons 1° que le Pontife ne peut errer en ses préceptes portés pour toute l’Eglise, parce que, comme nous l’avons dit plus haut, dans les préceptes et jugements particuliers, il n’est point absurde (de tenir) qu’il puisse errer. Nous ajoutons 2° et aux choses nécessaires au salut ou en celles concernant par soi le bien et le mal, car il n’est point erroné de dire que le Pontife pourrait errer dans les autres lois, par exemple en établissant une loi superflue, ou moins prudente, etc..

Et pour l’exposer plus amplement par des exemples, il ne peut se faire que le Pontife erre en prescrivant quelque vice comme l’usure, ou en interdisant une vertu comme la restitution, car ce sont des matières qui sont de soi bonnes ou mauvaises ; ni il ne peut se faire qu’il erre en prescrivant quelque chose contraire au salut comme (l’observance de) la circoncision ou du sabbat ou en interdisant quelque chose nécessaire au salut comme le Baptême ou l’Eucharistie, bien qu’elles ne soient point par soi bonnes ou mauvaises, mais il n’est point absurde de dire qu’il puisse se faire qu’il ordonne ce qui n’est point bon ou mal en soi, ni contre le salut, mais cependant inutile, ou qu’il le prescrive sous une peine très (trop) grave, bien qu’il n’appartienne point aux subordonnés de douter à ce sujet, mais d’obéir simplement.
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Abbé Zins
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Saint Robert Bellarmin [i]De Romano Pontifice[/i] a écrit :
Saint Robert Bellarmin De Romano Pontifice

Livre IV Du Pouvoir Spirituel du Souverain Pontife


Ch. V Des décrets sur mes moeurs.



Démontrons à présent cette proposition.

1° Que le Pape ne puisse errer dans les préceptes moraux en matières nécessaires au salut : car, alors, toute l’Eglise serait gravement meurtrie et errerait en des matières nécessaires, ce qui est contraire à la promesse du Seigneur : « Quand viendra cet Esprit de vérité, Il vous enseignera toute vérité.» (Jn. 16,12). Ce qu’il faut comprendre (au minimum) de la vérité nécessaire au salut.

2° Parce que Dieu délaisserait alors son Eglise en des choses nécessaires, quand (tout) en lui prescrivant de suivre le Pontife il permettrait que le Pontife erre en des choses nécessaires. Or, assurément, si Dieu n’abandonne aucun être dans les choses nécessaires, combien d’autant moins son Eglise ?

Que le Pontife ne puisse errer en matière de moeurs pour ce qui est par soi bien ou mal se prouve (aussi) du fait qu’autrement l’Eglise ne pourrait pas vraiment être dite Sainte, comme elle l’est proclamée dans le Symbole des Apôtres. Car Elle est dite Sainte principalement du fait de sa sainte profession, comme nous l’avons montré ailleurs, en tant qu’Elle professe une loi et une doctrine sainte, qui n’enseigne rien de faux, ni ne prescrit rien de mal.

Egalement, car, autrement, Elle errerait nécessairement aussi en matière de foi. En effet, la foi Catholique enseigne que toute vertu est bonne, tout vice est mauvais : si le Pape errait en prescrivant des vices ou en interdisant des vertus, l’Eglise serait tenue de croire que des vices seraient bons, et des vertus mauvaises, si Elle ne voulait point pécher contre la conscience.
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Abbé Zins
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Livre IV Du Pouvoir Spirituel du Souverain Pontife


Ch. VI Du Pontife, en tant qu’il est une personne particulière



4e proposition. Il est probable et l’on peut pieusement croire que le Souverain Pontife, non seulement comme Pontife ne puisse errer, mais en outre comme personne particulière ne puisse être hérétique, en croyant avec pertinacité quelque chose de faux contraire à la foi.


On le prouve 1° parce que cela paraît requis par la suave disposition de la Providence de Dieu. En effet, non seulement le Pontife ne doit ni ne peut prêcher d’hérésie, mais en outre il doit toujours enseigner la vérité, et le faire sans doute, puisque le Seigneur lui a commandé de confirmer ses frères, et pour cela a ajouté : « J’ai prié pour toi, en sorte que ta foi ne défaille point.», pour qu’au moins ne défaille point la prédication de la vraie foi en ton trône ; mais comment, je le demande, confirmerait les frères et prêcherait toujours la vérité un Pontife hérétique, même si Dieu pourrait tirer d’un coeur hérétique la confession de la vraie foi, comme Il a placé autrefois des paroles en la bouche de l’ânesse de Balaam, mais d’une façon violente qui n’est point selon la manière de la Providence de Dieu de disposer tout avec suavité.

On le prouve 2° par les faits, puisque jusqu’ici aucun ne fut hérétique ou pour le moins on ne saurait prouver avec certitude d’aucun qu’il aurait été hérétique. Ce qui est donc un signe que cela ne pourrait être. Voyez chez Pighius qui en traite plus amplement.
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Ch. VII Réponses aux objections tirées de la raison



Les arguments qui s’y opposent sont fondés en partie sur la raison, en partie sur divers cas concernant des Pontifes.

La première raison est que de multiples canons exposent que le Pontife ne peut être jugé, à moins qu’il ne soit trouvé dévié de la foi. Il peut donc dévier de la foi, si ces canons sont justes. L’antécédent vient du canon si Papa, 40e distinction du Ve Concile sous Symmaque, du VIIIe Concile 7e acte, de la 3e lettre d’Anaclet, de la 2e d’Eusèbe, du 2e sermon d’Innocent III en l’anniversaire de sa consécration comme Pontife.

Je réponds 1° que tous ces canons traitent de l’erreur du Pontife en tant que personne, non en tant que juge. Car si un Pontife pouvait être hérétique, il le serait seulement en niant quelque vérité définie auparavant ; mais il ne peut pas être hérétique quand lui-même définit un nouveau point. (dum ipse aliquid non (?) ou (novi) ? definit.) En effet, il ne s’oppose point alors à un point défini par l’Eglise. Tandis que les canons cités traitent expressément de l’hérésie, et donc de l’erreur du Pontife non en tant que juge mais en tant que personne.

Je dis 2° que ces canons ne veulent point dire que le Pontife même comme personne privée puisse errer, mais seulement que le Pontife ne peut être jugé ; néanmoins, parce qu’il n’est pas entièrement certain si le Pontife peut ou non être hérétique, par conséquent, par plus grande précaution, ils ajoutent la condition à moins qu’il ne devienne hérétique.
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Abbé Zins
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Ch. VII Réponses aux objections tirées de la raison



La deuxième raison est que si seul le Pontife peut infailliblement définir les dogmes de la foi, alors les Conciles ne sont point utiles, ou pour le moins pas nécessaires.
Je réponds que cela n’en découle pas. Car même si l’infaillibilité est dans le Pontife, cependant lui-même ne doit point négliger les moyens humains et ordinaires par lesquels on peut arriver à la vraie connaissance d’un point ; ce moyen plus ou moins ordinaire est celui des Conciles, plus ou moins importants, comme l’exemple en a été donné en premier par les Apôtres. Car, assurément, tant Pierre que Paul auraient pu trancher infailliblement toute controverse même seuls, pourtant ils convoquèrent un Concile (Act. Ch, 15).

Ensuite, les définitions de foi viennent principalement de la Tradition Apostolique, et afin de connaître le consensus des Eglises quand une question est soulevée, il n’y a point de meilleur moyen pour déterminer la sentence de toute l’Eglise et quelle tradition observent les Eglises du Christ, que le rassemblement d’Evêques de toutes les provinces, et que chacun rapporte l’usage de son Eglise.

En outre, les Conciles sont très désirables et souvent nécessaires pour mettre véritablement fin à des controverses, et afin que non seulement des décrets en matière de foi soient portés, mais aussi qu’ils soient observés ; en effet, quand a lieu un Concile général, tous les Evêques y souscrivent et professent en recevoir les décrets, et ensuite les prêchent en leurs Eglises, tandis que lorsqu’il n’y a point de Concile général il n’est point aussi aisé de réduire en pratique les décrets portés en matière de foi. Car alors, certains prétextent l’ignorance de ces décrets, d’autres se plaignent de ne point avoir été appelés (et consultés), d’autres encore prétendent que le Pontife a pu errer.

Toutefois, cela se rapporte davantage à la matière d’un autre ouvrage (de S. Robert) : cf. des Conciles, L. I ch. 10 et 11.
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Ch. VII Réponses aux objections tirées de la raison



La troisième raison est que si le Pontife était le juge infaillible de la foi, seraient hérétiques, ou au moins impliqués en une pernicieuse erreur et pécheraient gravement ceux qui affirmeraient pertinacement quelque chose de contraire à une définition d’un Pontife ; or cela est faux, puisque Cyprien a résisté pertinacement au Pape (S.) Etienne ayant défini que les hérétiques ne devaient point être (re)baptisés, comme cela résulte de la lettre de ce même Cyprien à Pompéius, et pourtant non seulement il ne fut point hérétique, mais en outre il ne pécha point mortellement. En effet, le péché mortel n’est effacé que par la pénitence, même si quelqu’un meurt pour la foi : néanmoins, l’Eglise honore Cyprien comme un saint, lui qui ne semble pas avoir jamais repoussé cette erreur.

Ce qui est confirmé par (S.) Augustin qui (L. I de Baptismo ch. 18 et ailleurs) dit que les Eglises ont hésité sur cette question (Ecclesias nutasse de illa quaestione) et que Cyprien et d’autres avaient pu diverger entre eux, la charité étant sauve, tant qu’il n’y avait point eu de définition d’un Concile général ; et donc (S.) Augustin n’a point pensé que le Jugement du Pontife Romain était indubitable.

Sur ce cas de Cyprien, je réponds que Cyprien ne fut certes pas hérétique, tant parce que ni jusqu’à présent sont censés manifestement hérétiques ceux qui disent que le Pontife pourrait errer, que parce sans doute le Pape (S.) Etienne n’a pas défini comme de foi que les hérétiques ne devaient point être rebaptisés, bien qu’il ait ordonné de ne pas les rebaptiser, comme il résulte du fait qu’il n’a pas excommunié Cyprien et les autres tenant le contraire, de même aussi qu’à l’opposé Cyprien en un Concile de 80 Evêques a défini que les hérétiques devaient être rebaptisés, mais en protestant ne point l’affirmer à tenir comme étant de foi, et ne point vouloir se séparer pour cela de ceux qui tenaient le contraire.

Ne s’y oppose point ce qu’ont écrit Eusèbe (Hist. L. 7 ch. 4) et (S.) Augustin (L. De unico Baptismo ch. 24), que le Pape (S.) Etienne non seulement a ordonné de ne point rebaptiser ceux baptisés par les hérétiques, mais aussi a prescrit que devaient être excommuniés ceux qui n’obéiraient point. Car même s’il a prescrit que devaient être excommuniés ceux qui n’obéiraient point, ce ne fut là rien d’autre qu’une menace. On constate en effet par le livre de (S.) Vincent de Lérins sur les nouveautés profanes et (S.) Augustin (loc. cit.) que (S.) Etienne et (S.) Cyprien demeurèrent toujours en communion.

Et par là est répondu aussi à ce qui a été ajouté en confirmation. Il fut encore possible de penser librement autrement après la définition du Pontife, parce que le Pontife n’a pas voulu définir de foi la chose elle-même sans un Concile général : mais il a voulu seulement entre temps faire observer l’antique coutume.
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Abbé Zins
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Ch. VII Réponses aux objections tirées de la raison




Quant à savoir si Cyprien aurait péché mortellement en n’obéissant pas au Pontife, cela n’est pas tout à fait certain (non est omnino certum).

Puisque d’un côté il semble [de fait] ne pas avoir péché mortellement, car il n’a point péché si ce n’est par ignorance : il a en effet pensé que le Pontife a erré pernicieusement, et tenant cette opinion il était tenu aussi de ne point obéir, puisqu’il ne devait point agir contre la conscience.(1)

Or l’ignorance de Cyprien semble ne pas avoir été crasse, ni affectée, mais probable, et par là excusant du péché mortel. Lui-même savait que le Pontife n’avait point défini comme de foi, et en même temps il constatait que le Concile des 80 Evêques pensait comme lui.

A ce sujet, S. Augustin expose clairement (L I contre les Donatistes, ch. 18 ou 28) que Cyprien a péché seulement vénialement, la charité étant sauve, et par conséquent a pu facilement être purgé par le martyre ; et au ch. 19 ou 29, il dit que ce péché fut comme une tache en la candeur d’une sainte âme qu’une abondante charité a recouvert.

Toutefois, d’un autre côté [en soi], il semble avoir péché mortellement, puisqu’il n’a point obtempéré à un expresse précepte apostolique, et a éprouvé sans mesure un Pontife tenant ce qui est juste. Car même si (S.) Etienne n’a point défini ce point comme de foi, il a néanmoins fermement prescrit de ne pas rebaptiser les hérétiques, comme le mentionne Cyprien lui-même en sa lettre à Pompéius, commandement auquel Cyprien aurait dû se conformer, et soumettre son jugement au jugement de son supérieur, et au moins il aurait dû ne point proférer des paroles outrageantes contre le Pape (S.) Etienne comme celles écrites en la lettre à Pompéius, où il le traite d’orgueilleux, d’incompétent, d’esprit aveugle et défectueux.

C’est pourquoi (S.) Augustin (L. 48 ad Vinc.), s’efforçant de défendre Cyprien autrement déclare, ou que cet écrit n’est pas de lui, ou qu’il s’est repenti par la suite de cette erreur et a changé de sentence avant sa mort, bien que cette rétractation ne soit point mentionnée.

(1) Ici, le Saint Docteur s’efforçant de défendre Cyprien, comme il le dit lui-même de S. Augustin à la fin de ce passage, pousse l’argumentation jusqu’à la limite entre le encore licite et le déjà illicite. Car il sait bien que l’on n’a point à préférer son propre jugement à celui de l’autorité légitime de l’Eglise, des exceptions demeurant possibles vis-à-vis de telle autorité supérieure particulière. C’est pourquoi il envisage ensuite la possibilité contraire, à savoir celle d’un péché grave. Tout ceci, à partir des éléments historiques et des documents les relatant alors à sa disposition, sans préjuger que les faits n’aient pu être autres dans la réalité.
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Ch. VII Réponses aux objections tirées de la raison




La quatrième raison est que le Concile Africain, en sa Lettre au Pape Célestin, déclare qu’un Concile provincial peut moins errer en son jugement qu’un Pontife Romain, à moins que peut-être, quelque soit celui qui croit, Dieu puisse inspirer la justice à notre examen et la dénier à un nombre incalculable de prêtres réunis en Concile. Or il est certain qu’un Concile provincial peut errer, par conséquent un Pape peut d’autant plus errer.

Je réponds que ce Concile ne parle pas ici d’un jugement en matière de foi, mais de jugement d’un fait, à savoir de cas d’Evêques et de Prêtres qui accusaient unanimement quelqu’un. Dans ce genre d’affaires judiciaires nous convenons (fatemur) que le Pontife n’a point une assistance du Saint-Esprit par laquelle il ne puisse point errer. Ajoutons que nous ne sommes pas nécessairement tenus de croire tout ce que disent ces Evêques en cette lettre, surtout quand il apparaît suffisamment qu’ils sont remontés contre les fautes d’Apiatus venu se refugier auprès du Pontife Romain, ne comporte nul excès en la manière de s’exprimer. Ce que ne contredit pas le fait que le Concile Africain fut confirmé par Léon IV, dist. 20, can. de libellis. Car ont été confirmés les décrets du Concile, mais pas la lettre.

L’ultime raison est que Nilus, en son libelle sur le Primat, tient le raisonnement qui suit. Le Pontife Romain peut tomber en d’autres vices comme l’avarice, l’orgueil, et donc aussi dans le vice de l’hérésie. En effet, Saint Paul (I Tim. 1) écrit que certains ont fait naufrage dans la foi qui auparavant avaient perdu la bonne conscience. Le Pape peut aussi nier Dieu par les faits en vivant mal, selon ceci : « Ils confessent connaître Dieu, mais le nient en actes.» (Tit. 1). Il peut donc aussi nier en parole, car il apparaît plus facile de nier en parole qu’en faits.

Je réponds au premier argument que l’on peut justement déduire de cela que le Pape puisse de par sa propre nature [en soi] tomber dans l’hérésie mais pas [en fait] en raison de l’assistance spéciale de Dieu que le Christ a imploré pour lui en sa prière. Or le Christ a prié pour que sa foi ne défaille point, mais pas pour qu’il ne tombe point en d’autres vices.

Je dis pour le second que l’Apôtre en ce passage n’entend point n’importe quelles mauvaises oeuvres, mais celles qui procèdent d’une infidélité du coeur. Il parle en effet des Juifs non sincèrement convertis à la foi qui, quoique professant qu’ils connaissent Dieu, le nient cependant par les actes, puisqu’en interdisant certains aliments comme immondes par nature, ils démontrent qu’ils ne le reconnaissent point vraiment comme Créateur de toutes choses. Tandis que le Pape ni ne fait, ni ne peut faire de telles oeuvres. Toutefois, si l’on entendait ces faits de tous les péchés, il est faux qu’il soit plus facile de nier Dieu en parole qu’en actes. Car celui qui nie en parole nie absolument et expressément, tandis que celui qui nie ne actes ne nie qu’implicitement et d’une certaine manière pas absolument.
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Ch. VIII Des erreurs faussement imputées à des Pontifes Romains, à Pierre, Lin, Anaclet, Télesphore, Victor, Zéphyrin, Urbain, Pontien, Corneille et Marcellin, qui furent non seulement Pontifes mais en outre Martyrs.



Venons-en maintenant à chacun des Pontifes que nos adversaires prétendent avoir erré.

Pierre est le premier Pontife Romain que Nilus, en son libelle sur le Primat du Pontife Romain, a inscrit comme ayant erré en matière de foi, non pas une fois mais deux. Et, par cet argument, il pense avoir démontré le mieux qu’il soit possible que les Pontifes Romains peuvent errer dans la foi. Car nul, parmi les Pontifes Romains, n’a reçu de Dieu de plus grands privilèges que Pierre. Or que Pierre ait erré est manifeste dans les divines lettres. Car il a nié le Christ (Mt. 26) et a obligé les Nations à judaïser (Gal. 2).

Les centuriones de Magdebourg (L. 2 ch. 10 col. 558, 559, 560) à ces deux errances ajoutent 13 chutes du Bienheureux Pierre.

Nous répondons que Saint Pierre, quand il a nié le Christ, n’avait encore point commencé à être le Souverain Pontife. (a) On constate en effet que le Principat Ecclésiastique lui fut donné par le Christ quand le Seigneur, après sa Résurrection, lui a dit : Simon, fils de Jean, pais mes brebis (Jn. 21,17). Par conséquent, cette négation de Pierre n’est point à compter parmi les errances de Pontifes Romains. J’ajoute, en outre, que le Christ fut nié par Pierre en parole, non en son coeur (ore non corde) ; Pierre a donc perdu en cela la confession de la foi, non la foi elle-même, comme nous l’avons montré plus haut (ch. 3).

Quand au fait qu’il serait arrivé à Saint Pierre de forcer les Gentils à judaïser, ce ne fut point une erreur de prédication mais de comportement, comme le remarque Tertullien dans son livre des prescriptions contre les hérétiques. En effet, Saint Pierre n’a point fait le moindre décret obligeant à judaïser, mais a plutôt enseigné le contraire (Act. 15) (1) ; toutefois, à Antioche, afin de ne point scandaliser les Juifs récemment convertis à la foi, il s’est écarté une fois de la table des Gentils et, par son exemple, a comme forcé d’une certaine manière Barnabé à judaïser. (2)

Cependant, nous ne nions pas qu’un Pontife puisse donner par son exemple l’occasion d’errer, mais nous nions qu’il puisse prescrire ex cathedra à toute l’Eglise quelque erreur à suivre. Pourtant les (mauvais) exemples des Pontifes ne seraient point pernicieux pour l’Eglise comme le seraient les doctrines (erronées), puisque le Seigneur nous a instruit en déclarant : Faites ce qu’ils disent, ne faites point ce qu’ils font (Mt. 23,3). Voyez ce que nous avons dit plus haut (ch. 28).
(a) Cette attribution fausse est également faite et rabâchée par les FSSPX, même après qu'on le leur ait maintes fois rappelé ce que précise ici le Saint Docteur, champion de la défense de la Papauté.

(1) et surtout a été le premier à pratiquer, justifier et commander le contraire pour le Baptême du Centurion Corneille (Act. ch. 10s)

(2) D’où les reproches publics de Saint Paul, constatant que pour éviter de scandaliser les Juifs récemment convertis Saint Pierre était en train de scandaliser sans s’en rendre compte les Gentils convertis. Ceci, donc, en un comportement seulement externe et avec une bonne intention, en outre avant la décision solennelle prise peu après au Concile de Jérusalem de ne point vouloir obliger les Gentils convertis à judaïser (Act. 15).

Tandis que Saint Paul, dans le même souci de conduire de nouveaux Juifs à recevoir plus aisément l’Evangile, alla, peu après le Concile de Jérusalem, jusqu’à faire circoncire Timothée (Act. 16,3), ce qui était bien plus que de simplement s’abstenir à un repas de viandes anciennement défendues par la loi mosaïque, comme l’avait fait Saint Pierre à Antioche.

Le Docteur Commun, le grand Saint Thomas, explique de façon détaillée en divers endroits qu’en cette période transitoire du passage de la législation mosaïque à celle de l’Evangile, certaines prescriptions rituelles quoique déjà caduques étaient soit devenues indifférentes et libres, soit étaient alors encore licites pourvu que plus tenues pour nécessaires et obligatoires.
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Ch. VIII Des erreurs faussement imputées à des Pontifes Romains, à Pierre, Lin, Anaclet, Télesphore, Victor, Zéphyrin, Urbain, Pontien, Corneille et Marcellin, qui furent non seulement Pontifes mais en outre Martyrs.



Le second, (S.) Lin, qui a succédé aussitôt à Saint Pierre sur le Siège pontifical, est tourné en dérision par les centuriones de Magdebourg (L. 2 ch. 10 col. 627) du fait d’avoir ordonné que les femmes n’entrent point dans l’Eglise sans avoir la tête couverte d’un voile (ne foeminae in Ecclesiam ingrederentur capite linteis non cooperto).

Voici leurs propos : Il institua qu’aucune femme (digne préoccupation épiscopale assurément) n’entre en une église sans avoir la tête couverte d’un voile.

Qu’auraient-ils dit si (S.) Linus avait ajouté qu’il fallait le faire à cause des Anges ? Sans aucun doute ils auraient clamé y voir une superstition. Mais je crois que les centuriones ont tout simplement oublié que c’est précisément ce qu’a fait l’Apôtre (S.) Paul, sans juger indigne de ses préoccupations de prescrire (I Cor. 2) que les femmes aient la tête voilée à cause des Anges.

Ce que (S.) Ambroise commente en expliquant que cela est surtout à observer dans l’Eglise par révérence envers les Prêtres, que les Ecritures appellent des Anges.
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