Bien et Mal, création ex nihilo, causalité

chartreux
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Re: Bien et Mal, création ex nihilo, causalité

Message par chartreux »

Merci pour cette longue réponse M. l'abbé.
Abbé Zins a écrit : sam. 13 juin 2020 15:34 quand vous apprendrez à mieux connaître RG, vous verrez qu’il est difficilement égalable en (...) sa vie dépravée.
Puis-je vous demander si vous avez des preuves de cette grave accusation ?

Ce n'est pas que la question m'intéresse beaucoup en elle-même, mais plutôt que j'ai souvent l'impression d'un certain laissez-aller parmi nous autres catholiques, quand il s'agit d'accusations diverses concernant les ennemis ou assimilés de l'Église, que nous avons tendance à tort à relâcher notre vigilance et à accepter trop vite tout ce qui semble apporter de l'eau à notre moulin ... Témoin la triste affaire de l'affabulateur Léo Taxil où ceux qui se sont faits avoir au début ont beaucoup contribué à décrédibiliser les catholiques dans l'opinion ...

Pour prendre un autre exemple, si malfaisant qu'ait été l'affreux théologastre Calvin (comme disait Mgr Gaume), je me refuserai toujours à croire à une certaine accusation le concernant tant que j'en trouverai pas une confirmation dans une source irrécusable. Cette accusation, qu'après sa mort on aurait constaté sur son corps la présence de telle maladie vénérienne, je l'ai vue dans des dizaines de travaux d'apologètes catholiques se citant entre eux, sans preuve solide.
Si vis pacem
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Re: Bien et Mal, création ex nihilo, causalité

Message par Si vis pacem »

 
chartreux a écrit : ven. 19 juin 2020 20:34  
Merci pour cette longue réponse M. l'abbé.
Abbé Zins a écrit : sam. 13 juin 2020 15:34 quand vous apprendrez à mieux connaître RG, vous verrez qu’il est difficilement égalable en (...) sa vie dépravée.
Puis-je vous demander si vous avez des preuves de cette grave accusation ?

[…]
 
 
Je me permets, avant qu’il ne soit répondu à votre question, de finir d’exposer la doctrine de saint Thomas sur l’origine et la nature du mal toujours pendante.
E. Masson - Mal in Dictionnaire de Théologie Catholique a écrit :  
d) Finalité du mal. — Textes : Sum. theol., Ia, q. XIX, a. 9 ; q. XLVIII, a. 2 ; C. Gent., c. IV et VI ; De malo, q. I, a. 3.
     Solution. — a. Le mal ne peut jamais être objet direct d'intention : « Le mal, en tant que tel, ne peut être objet d'intention, ni voulu ni désiré de quelque façon ; car tout ce qui est appétible a raison de bien, auquel s'oppose le mal en tant que tel. » De malo, q. I, a. 3. Cette doctrine repose sur les deux axiomes connus : Bonum est quod omnia appetunt (Aristote, Ethic, I, 1) ; Omnia bonum et optimum concupiscunt (Pseudo-Den, De div. nom., c. VI).
     b. Mais il peul être objet indirect d'intention. « Il se pourra qu'un mal termine accidentellement l'appétit, en tant qu'il sera joint à un bien (que l’appétit désire ou peut désirer), et ceci se remarque en chacun des trois appétits. » (Ia, q. XIX. a. 9.) Le lion qui tue un cerf, cherche sa nourriture (donc un bien pour lui) qu'il ne peut se procurer qu'en égorgeant cet animal.
     c. Partant le mal peut être volontaire, voulu, non per se, mais per accidens. C'est le cas du capitaine qui jette à l'eau les marchandises pour sauver le navire. Son intention porte sur la fin, un bien, le salut du navire ; mais il veut se débarrasser des marchandises, non simpliciter, mais causa salutis. (Cf. C. Gent., l. III, c. vi, n. 2.)
     d. Le mal ne concourt pas per se au bien de l'univers, mais seulement per accidens. Principaux textes : I Sent., dist. XLVI, q. I, a. 2 et 3 ; Sum. theol., Ia, q. XXII, a. 2, ad 2 ; q. XLVIII, a. 2 ad 2 ; C. Gent., l. III, c. XXI et XCIV. — Voir article Providence
 
 
Si vis pacem
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Re: Bien et Mal, création ex nihilo, causalité

Message par Si vis pacem »

 
E. Masson - Mal in Dictionnaire de Théologie Catholique a écrit :  
2. Le mal dans la créature raisonnable. La créature raisonnable étant, seule parmi toutes les créatures, faite pour le bonheur proprement dit, son mal, parmi tous les autres maux, mérite une considération toute spéciale. Ce sera le mal moral. (Cf. Ia, q. XLVIII, a. 5.)

Le mal de la créature raisonnable est double : le mal de la coulpe et le mal de la peine. « La peine et la coulpe ne divisent pas le mal pris d'une façon pure et simple ; il s'agit du mal dans les choses volontaires. » (Ia, q. XLVIII, a. 5 ad 2.)

a) Le mal de la coulpe. Textes : En plus des textes qui seront signalés pour chacun des points particuliers, Sum. theol., Ia-IIæ, q. LXXII et suivantes.
     a. Son sujet. Textes : Sum. theol., Ia, q. XLVIII, a. 5. ; Ia-IIæ, q. LXXII, a. 6 ; De Malo, q. I, a. 4 ; q. II. a. 7 ; II Sent., dist. XXXV, a. 1.
     Solution. Le mal de la coulpe, c'est le mal de l'action de la créature raisonnable, c'est-à-dire la faute ou le péché « qui n'est pas autre chose qu'un acte humain mauvais. Or, le fait d'être, en tant qu'acte humain, lui vient de ce qu'il est volontaire ». (Ia-IIæ, q. LXXI, a. 6) Le sujet de la coulpe c'est donc l'opération volontaire.
          α) A parler en général, toute action est bonne comme, à parler en général, tout être est bon : l'être et le bien coïncident, et l'action est être. Mais la nature même du bien requiert la plénitude de l'être, et toute nature créée prête à déficience : l'action créée peut donc déchoir.
          β) De même qu'on appelle mauvaise la chose qui manque de ce qu'elle devrait avoir, de même on appelle mauvaise l'action déchue de sa rectitude. (Cf. Ia-IIæ, q. XVIII, a. 1.)
          γ) Cette déchéance ne peut être que le fait de la volonté (voir infra : cause de la coulpe) ; d'où, culpa non potest esse nisi in his quæ per voluntatem sunt. (II Sent., dist. XXXV. a. 1.)
     b. Sa nature. Textes : les mêmes que plus haut, ajouter C. Gent., l. III, c. IX ; Sum. Theol., Ia-IIæ, q. LXXI, a. 6 ; Ia-IIæ, q. LXXII, a. 1.
     Solution : α) C'est l'insubordination de l'opération à la fin à laquelle elle aurait dû être subordonnée. Peccatum est in his quæ nata sunt finem consequi cum non consequuntur. (II Sent., dist. XXXV, a. 1.)
          β) Cette insubordination prive l'acte de la mesure qu'il devrait avoir, privation qui constitue l'élément « acte mauvais ». (Ia-IIæ, q. LXXI, a. 6.) « D'autre part, la mesure, pour toute chose, se prend en raison d'une certaine règle qui, si elle n'est pas appliquée, fait que la chose n'a pas de mesure. » (Ibid.)
          γ) Or, il y a pour la volonté une double règle, l'une immédiate et homogène, qui est la raison humaine ; l'autre qui est la première règle, et qui est la Loi éternelle, ou la raison même de Dieu. (Ibid.)
          δ) En définitive, l'insubordination atteint donc à travers la raison, le principe dernier lui même qui impose la fin dernière.
          ε) Cette insubordination provient de la subordination de l'acte coupable à une fin exclusive de la fin légitime.
     c. Sa cause subjective, la seule qui soit décisive. — Textes : II Sent., dist. XXXIV, a. 3, ad 4 ; Sum. theol., Ia-IIæ, q. LXXV, a. 1, in fine, et a. 2 ; De malo, q. I, a. 3 ; C. Gent., l. III. c. X.
     Solution. — C'est la volonté défaillante de celui qui opère.
          α) Le mal de la coulpe est dans l'acte désordonné. Considéré du côté de l'acte, il peut avoir une cause par soi, comme tout autre acte ; considéré du côté du désordre, il a une cause efficiente accidentelle, (car il n'est pas simple négation, mais privation).
          β) Toute cause accidentelle se ramène à une cause par soi. Le désordre de la coulpe sort donc de la cause même de l'acte.
          γ) La cause de l'acte est la volonté. La cause du désordre ou le défaut de l'acte provient donc aussi de la volonté ; mais de la volonté défaillant actuellement, en ce sens qu'actuellement elle ne se soumet pas à sa règle. La coulpe résulte de ce que l'on pose l'acte avec un tel défaut. (Cf. Ia, q. XLIX, a. 1, ad 3.)
          δ) La cause du mal moral qu'est la coulpe ne doit donc pas se rechercher ailleurs que dans l'agent, c'est-à-dire, en dehors de la volonté insoumise à sa règle, la raison.
          ε) Partant, Dieu n'est pas cause du mal moral : c'est la volonté toute seule, préalablement mise en acte par Dieu, relativement à la volition du bien en général ou de tel vrai bien particulier, qui se détermine à ne pas suivre sa règle, détermination en laquelle consiste la coulpe (sur la causalité divine, Ia-IIæ, q. LXXIX, a. 1 et 2; cf. De malo, q. I, a. 3). — Saint Thomas étudie les causes objectives du péché, dont nous n'avons pas à nous occuper ici, dans la Ia-IIæ, q. LXXV et suivantes.
 
 
Si vis pacem
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Re: Bien et Mal, création ex nihilo, causalité

Message par Si vis pacem »

 
E. Masson - Mal in Dictionnaire de Théologie Catholique a écrit :  
b) Le mal de la peine. Textes : Sum. theol., Ia-IIæ, q. LXXXVII. On peut consulter aussi les deux questions XII et XIII du Suppl. consacrées à la Satisfactio.
La raison de peine consiste en une sorte de revanche juste et nécessaire prise par l'ordre que la faute avait troublé contre le désordre qui est l'essence même de la coulpe. Il suit que toute coulpe entraîne nécessairement et fatalement l'obligation à la peine. « Tout ce qui est contenu sous un certain ordre forme une sorte de tout par rapport au principe de cet ordre. Il suit de là que tout ce qui s'élève contre un certain ordre, doit être déprimé par cet ordre même, ou par le principe de cet ordre. Le péché étant un acte désordonné, il est manifeste que quiconque pèche agit contre un certain ordre. Par suite, il faudra qu'il soit déprimé par cet ordre (contre lequel il agit). Cette dépression est cela même qui constitue la peine. » (Ia-IIæ, q.) LXXXVII, a. 1.)
     a. Sujet de la peine. Textes : Sum. theol., Ia, q. XLVIII, a. 5 ; De malo, q. I, a. 4 ;
     Solution. — Le mal de la coulpe consistant dans l'opération, le sujet de la peine ne sera pas cette opération mauvaise elle-même, mais le sujet de l'opération, celui qui agit. Culpa est malum ipsius actionis, pœna autem est malum agentis. (De malo, q. I, a. 4.)
     b. Sa nature. Textes : Les mêmes que précédemment ; y ajouter De malo, q. I, a. 5.
     Solution. — Bien que l'opération ne soit pas le sujet de la peine, la dépression qu'est la peine devra cependant l'atteindre. Aussi consiste-t-elle dans la soustraction des biens nécessaires à l'opération : biens de l'âme, biens du corps, biens extérieurs ; Malum pœnæ est privatio ejus quo voluntas potest uti quocumque modo ad bonam operationem ... Multi pœnas non comprehendunt nisi corporales, vel quæ afflictionem sensui ingerunt ... sed etiam privatio gratiæ et gloriæ pœnæ quædam sunt ... Ipsa autem substractio boni increati, vel cujuscumque alterius ab eo qui indignus est, rationem pœnæ habet. (De malo, q. I, a. 5.)
     c. Sa cause. Textes : Ajouter aux textes précédents : Sum. theol., Ia-IIæ, q. LXXXVII, a. 1.
     Solution : — α) La cause de la peine est le principe de l'ordre violé (celui- qui impose la fin et l'ordre de l'opération à la fin). Or, « il est trois ordres sous lesquels la volonté humaine se trouve contenue : l'ordre de la raison, l'ordre de ceux qui gouvernent extérieurement, enfin l'ordre universel du gouvernement divin. Chacun de ces ordres est troublé par le péché, car celui qui pèche agit et contre la raison, et contre la loi humaine, et contre la loi divine. Il
encourt donc une triple peine : l'une de la part de lui-même, c'est le remords de la conscience, l'autre des hommes, la troisième de Dieu ». (Ia-IIæ, q. LXXXVII, a. 1.) Mais de même que la coulpe est en définitive, l'insubordination de l'opération au principe suprême qui impose la fin dernière, de même la cause de la peine est en définitive, Dieu, principe dernier de l'ordre violé. Deus est auctor pœnæ (De malo, q. I, a. 5), sans préjudice d'ailleurs du droit de l'homme, car « la peine juste peut être infligée et par Dieu et par l'homme ». (Ia-IIæ, ibid.)
          β) Le péché n'est donc pas directement la cause de la peine, il l'est cependant au sens de disposition. « Il est une chose que le péché cause directement, c'est de constituer l'homme digne de peine. » (Ibid. )
     d. Son effet. Textes : les mêmes que plus haut.
     Solution. — α) la cause subjective du péché est la volonté défaillante ; la peine devra donc atteindre là. Effectivement, il est de l'essence de la peine qu'elle soit contraire à la volonté ; elle a pour effet de contrarier la volonté de l'opérateur. Est de ratione pœnæ quod voluntati repugnet, (De malo q. I, a. 4) ; ut sit contraria voluntati (Ia-IIæ, q. XLVI, a. 6 ; q. LXXXVII a. 6.) Differt pœna a culpa per hoc quod est secundum voluntatem et contra voluntatem esse. (De malo, q. I, a. 4.)
          β) Tous les maux qui atteignent l'opérateur, lors même qu'ils ne siégeraient pas dans la volonté, ne l'atteignent qu'en fonction de la volonté.
          γ) Cette opposition ou contrariété peut être ou à la volonté actuelle, ou à la volonté simplement habituelle, ou enfin à l'inclination naturelle de la volonté. (De malo, q. 1, a. 4.) — D'où : Incommoda vel damna quæ quis nesciens patitur, licet non sint contra voluntatem actualem sunt tamen contra voluntatem naturalem vel habitualem, ut dictum est. (Ibid., ad 11.)
     e. Son but. Textes : Sum. theol., Ia-IIæ, q. LXXXVII, a 1 et 6  ; IIa-lIæ, q. LXI, a. 4.
          α) L'acte du péché rend l'homme obligé à la peine, en tant qu'il constitue une transgression de l'ordre de la justice divine, ordre auquel l'homme ne revient que par la réparation de la peine qui ramène l'égalité de la justice ; en ce sens que celui qui a plus accordé à sa volonté qu'il ne le devait, doit, selon l'ordre de la justice divine, souffrir, de gré ou de force, quelque chose qui soit contre ce qu'il voudrait. (Ia-IIæ, q. LXXXVII, a. 6.) Le but de la peine est donc essentiellement de compenser par cette contrariété la contrariété dont la volonté de l'agent s'est rendue coupable à l'égard du Principe ordonnateur, en se révoltant contre lui et contre la fin légitime imposée par lui.
          β) Il existe des buts accessoires de la peine, que signale saint Thomas, (ibid., ad 3) : le rétablissement de l'ordre de la justice violé par le péché, la guérison des puissances de l'âme, volonté et autres facultés que la coulpe précédente avait désordonnées ; l'éloignement et la réparation du scandale causé, « les peines sont encore requises pour rétablir l'égalité de la justice et pour éloigner le scandale des autres, afin qu'ils soient édifiés par la peine comme ils avaient été scandalisés par la faute ».

Pour une exposition plus complète, voir articles : Péché, Pénitence, Satisfaction.
 
 
Si vis pacem
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Re: Bien et Mal, création ex nihilo, causalité

Message par Si vis pacem »

 
chartreux a écrit : ven. 19 juin 2020 20:34  
Merci pour cette longue réponse M. l'abbé.
Abbé Zins a écrit : sam. 13 juin 2020 15:34 quand vous apprendrez à mieux connaître RG, vous verrez qu’il est difficilement égalable en (...) sa vie dépravée.
 
Puis-je vous demander si vous avez des preuves de  cette affirmation ?
 
 
chartreux a écrit : jeu. 11 juin 2020 13:00  
Je ne vois pas (en tout cas dans le passage que j'ai cité) ce qui motive votre accusation de bouffonnerie.
 
 
Oh trois fois rien … Juste que le fait de pontifier sur certaines notions que l’auteur n’appréhende pas du tout dévoilent la vacuité de son "enseignement". Cette situation fait immanquablement penser à celle que nous rapportent les Goncourt dans leur Journal à propos de Zola parlant de Lourdes, à savoir : « que notre grand homme était, dans ce moment, bouffon à force de pontifier ... »

Pontifier … le mot est on ne peut plus exact puisque le passage que vous citez est issu d’un article publié en 1909-1910 dans les quatre premiers numéros (XI-1909 ; II-1910) de la revue La Gnose. Cet article ― avant que de paraître chez Gallimard ― sera repris à l’occasion de la mort de René Guénon, en 1951, dans Les études traditionnelles (VI-1951, pp. 145-161). Or Marie France James dans son ouvrage intitulé Ésotérisme, occultisme, franc-maçonnerie et christianisme aux XIX° et XX° siècles nous précise à propos de cet auteur :
Marie France James - Ésotérisme, occultisme, franc-maçonnerie et christianisme aux XIX° et XX° siècles. Paris, 1981, pp. 144-145 a écrit :  
l’année suivante, [1909, il avait alors 23 ans] évincé de l’ordre Martiniste suite à sa tentative de rénovation de l’ordre du Temple, il est sacré évêque gnostique sous le nom de Palingénius et assume aussitôt la direction du nouvel organe de l’Église gnostique de France La Gnose ...
 
Et Noële Denis-Boulet qui l’a fréquenté et bien connu, de préciser à ce sujet :
Noële Maurice-Denis Boulet - L’ésotériste René Guénon. Souvenirs et jugements, La Pensée Catholique, n° 77, 1962, p. 21, note 2 a écrit :  
Ils étaient presque tous évêques”, disait plaisamment Pierre Germain qui était entré, lui aussi dans cette église ; “aux réunions il n’y avait qu’une vieille dame et moi pour représenter les simples fidèles.”
 
L’un de ses sbires, Jean Reyor (Marcel Clavelle), de nous expliquer alors :
Jean Reyor - Dossier confidentiel inédit, p. 44 a écrit :  
Il est clair que, si on n'admet pas que Guénon était chargé d'une “mission” qui impliquait investigation dans les différents milieux à prétentions traditionnelles justifiées ou non, son appartenance successive et parfois simultanée aux milieux les plus opposés peut légitimement sembler inquiétante : évêque gnostique et maçon collaborant à une revue antimaçonnique, musulman collaborant à une revue pour le rayonnement du Sacré-Coeur, etc ...
 
Martiniste, « initié par des maîtres hindous », gnostique, maçon, musulman ... collaborant à des revues catholiques … cela n’impliquerait-il pas un minimum de culture catholique ? :
Lettre de Guénon à Reyor/Clavelle a écrit :  
Schuon, qui connaît le Christianisme beaucoup mieux que moi…
 
Pendant ce temps, Noële Denis-Boulet qui l’a fréquenté et bien connu, disait de lui :
Noële Maurice-Denis Boulet - L’ésotériste René Guénon. Souvenirs et jugements, La Pensée Catholique, n° 77, 1962, p. 23 a écrit :  
… [son] discours supposait une méconnaissance tellement absolue qu’elle en était stupéfiante chez un homme élevé dans le catholicisme.
 
Noële Maurice-Denis Boulet - L’ésotériste René Guénon. Souvenirs et jugements, La Pensée Catholique, n° 77, 1962, p. 23 a écrit :  
… Certes, son ignorance, son incompréhension du christianisme étaient totales ...
 
Noële Maurice-Denis Boulet - L’ésotériste René Guénon. Souvenirs et jugements, La Pensée Catholique, n° 78-79, 1962, p. 157-158 a écrit :  
Je me suis souvent demandé pourquoi il négligeait ainsi les huit premiers siècles de notre ère chrétienne … aux yeux du spécialiste de l’antiquité, la période IV°-VIII° siècles constitue l’époque la plus importante pour la formation de la théologie chrétienne. Or Guénon l’exclut de son étude, comme aussi les Pères antérieurs au IV°. Je ne crois pas qu’on puisse trouver dans toute son œuvre une seule citation de patristique.
 
Vous avez dit effarant !?
 
Si vis pacem
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Re: Bien et Mal, création ex nihilo, causalité

Message par Si vis pacem »

 
Le niveau moral n’est guère plus réjouissant :
Noële Maurice-Denis Boulet - L’ésotériste René Guénon. Souvenirs et jugements, La Pensée Catholique, n° 77, 1962, p. 24 a écrit :  
C’est en février 1912 que la petite revue (La Gnose) cessa de paraître. Je sais maintenant (mais j’avais toujours ignoré) qu’il avait acquis alors l’initiation au çoufisme, et cela l’année même de son mariage avec la bonne Berthe. Je suis convaincue que Mme Guénon ignora toujours cette initiation musulmane, inconciliable, de par le droit canonique, avec un mariage chrétien. Telle que je la connus, tel qu’était son milieu de famille, elle n’aurait jamais accepté d’épouser Guénon, si elle eût su qu’il était musulman. Le curé du village n’aurait pu célébrer, sans une dispense alors à peu près impossible à obtenir, le mariage religieux (juillet 1912). René trompa donc sur ce point et le curé, et ses beaux-parents, et sa première femme elle-même … Mais cette dissimulation entraînait pour lui de cacher soigneusement son islamisme à Pierre Germain, à moi-même, à tous les amis d’alors, catholiques ou catholicisants. Une “fuite” vis-à-vis de Berthe aurait pu être dramatique : il se devait de tout faire pour l’éviter. Aussi ne nous présentait-il que l’aspect hindou de sa doctrine.
 
Nous la voyons insister un peu plus loin sur ce trait :
Noële Maurice-Denis Boulet - L’ésotériste René Guénon. Souvenirs et jugements, La Pensée Catholique, n° 78-79, 1962, p. 140 a écrit :  
j’ai l’étrange privilège de n’avoir fréquenté Guénon que pendant sa période au moins apparemment catholique, alors qu’il était l’époux d’une femme qui, tant par son éducation, que par conviction personnelle, n’aurait jamais consenti à épouser un musulman ni un franc-maçon (si elle avait pu savoir que René était alors déjà initié à l’Islam et que son maçonnisme était tout autre chose qu’un passage dans les loges en vue de les combattre) ...
 
Enfin, faisant une comparaison avec Descartes, tous deux tourangeaux, elle nous donnera ce trait plus assassin qu’il n’y paraît :

il lui ressemblait par certains traits physique et moraux (ainsi par sa prudence diplomatique : “sur la scène du monde je m’avance masqué” disait Descartes) … »
 
 
Comment un catholique peut-il dans ces conditions citer un personnage si sulfureux sans passer pour irresponsable ? Cela ne donnerait-t-il pas à entendre que l’on peut le côtoyer sans aucun danger spirituel et (/ ou) moral ?
 
Si vis pacem
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Re: Bien et Mal, création ex nihilo, causalité

Message par Si vis pacem »

 
chartreux a écrit : ven. 19 juin 2020 20:34  
Ce n'est pas que la question m'intéresse beaucoup en elle-même, mais plutôt que j'ai souvent l'impression d'un certain laissez-aller parmi nous autres catholiques, quand il s'agit d'accusations diverses concernant les ennemis ou assimilés de l'Église, que nous avons tendance à tort à relâcher notre vigilance et à accepter trop vite tout ce qui semble apporter de l'eau à notre moulin ... Témoin la triste affaire de l'affabulateur Léo Taxil où ceux qui se sont faits avoir au début ont beaucoup contribué  à décrédibiliser les catholiques dans l'opinion ...
 
Oserais-je réitérer le conseil déjà exprimé antécédemment ? :
Si vis pacem a écrit : lun. 20 mai 2019 20:25
Je vous conseille d'étudier sérieusement avant que de suivre bien gentiment ce que d'autres vous assènent si péremptoirement ... en attendant, peut-être vous faudrait-il ne pas parler de ce que vous ne connaissez pas ...


chartreux a écrit : ven. 19 juin 2020 20:34  
Pour prendre un autre exemple, si malfaisant qu'ait été l'affreux théologastre Calvin (comme disait Mgr Gaume), je me refuserai toujours à croire à une certaine accusation le concernant tant que j'en trouverai pas une confirmation dans une source irrécusable. Cette accusation, qu'après sa mort on aurait constaté sur son corps la présence de telle maladie vénérienne, je l'ai vue dans des dizaines de travaux d'apologètes catholiques se citant entre eux, sans preuve solide.
 
A la lecture de votre position si tranchée, je doute que cet ouvrage qui servit de référence aux « dizaines de travaux d'apologètes catholiques se citant entre eux » soit une preuve solide à vos yeux. Je ne crois pas en effet, que ce soit la « source irrécusable » que vous cherchez. Mais y a t’il vraiment une source considérée irrécusable par l’un ou l’autre des partis ? Poser la question c’est y répondre ... et à cette aune, cependant, il serait facile, je pense, de mettre en cause de nombreux évènements historiques.

Nous pouvons cependant tenter de départager les uns et les autres. Saint Thomas nous enseigne par le document que nous venons de laisser que
E. Masson - Mal in Dictionnaire de Théologie Catholique a écrit :  
L'acte du péché rend l'homme obligé à la peine, en tant qu'il constitue une transgression de l'ordre de la justice divine, ordre auquel l'homme ne revient que par la réparation de la peine qui ramène l'égalité de la justice ; en ce sens que celui qui a plus accordé à sa volonté qu'il ne le devait, doit, selon l'ordre de la justice divine, souffrir, de gré ou de force, quelque chose qui soit contre ce qu'il voudrait. (Ia-IIæ, q. LXXXVII, a. 6.) Le but de la peine est donc essentiellement de compenser par cette contrariété la contrariété dont la volonté de l'agent s'est rendue coupable à l'égard du Principe ordonnateur, en se révoltant contre lui et contre la fin légitime imposée par lui.
 
Or cette doctrine transpire tant des paroles de Jérôme Bolsec :
Jérôme Bolsec - Histoire de la vie, mœurs, actes, doctrine, constance et mort de Jean Calvin. Paris, 1577, f° 39r a écrit :  
... La mort des iniques et des méchants est très mauvaise et ceux qui ont en haine la justice et le droit périront malheureusement ...
 
que de celles de Théodore de Bèze :
Théodore de Bèze - Vie de Calvin. Genève, 1681, p. 110 a écrit :  
... Mais enfin la mort honteuse que Dieu leur fit souffrir, fut une preuve convaincante de la justice des Jugements du Ciel, et que Dieu n’épargne les méchants, que pour les punir ensuite avec plus de rigueur.
 
Ceci étant posé, voici le jugement d'un autre protestant : 
William Cobbett - Histoire de la réforme protestante en Angleterre et Irlande. Paris, 1826, p. 120 a écrit :  
Jamais peut-être le monde ne vit dans un même siècle une collection de misérables et de scélérats tels que Luther, Zwingle, Calvin, Bèze et les autres célèbres réformateurs de la religion catholique. Tous, de l'aveu même de leurs propres sectaires, étaient diffamés par les vices les plus honteux. Le seul point de doctrine sur lequel ils fussent d'accord entr'eux était l'inutilité des bonnes œuvres. Leur vie sert à prouver combien ils étaient sincères dans leurs principes, et il n'en est pas un seul parmi eux dont les actions n'aient pas mérité toutes les rigueurs de la justice humaine.
 
Je vous laisse conclure ...
 
chartreux
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Re: Bien et Mal, création ex nihilo, causalité

Message par chartreux »

Merci à nouveau pour toutes ces nouvelles (pour moi en tout cas) informations, cher SiVis.
Si vis pacem a écrit : sam. 20 juin 2020 16:39 Comment un catholique peut-il dans ces conditions citer un personnage si sulfureux sans passer pour irresponsable ? Cela ne donnerait-t-il pas à entendre que l’on peut le côtoyer sans aucun danger spirituel et (/ ou) moral ?
chartreux a écrit : sam. 13 juin 2020 14:31 Il me semble que cela se résume à des questions d'opportunité. Une discussion sur un texte hétérodoxe peut produire soit une publicité inutile et même néfaste, soit une mise au point utile pour une ou plusieurs âmes perplexes. Mais Dieu seul connaît le futur, et comme critères disponibles il n'y a guère que l'appréciation individuelle.
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