II.§767 a écrit :
L'évangéliste dit (Luc 2:50) que la très-pure Marie et saint Joseph n'entendirent point le mystère de ces paroles, parce qu'il leur fut alors caché. Et cela provint de deux causes : d'une part, moissonnant dans la joie après avoir semé dans les larmes, ils furent tout absorbés par le bonheur de revoir leur riche trésor qu'ils avaient retrouvé. D'autre part ils n'arrivèrent pas assez tôt pour se mettre au courant de la matière qu'on avait traitée dans cette conférence. Outre ces raisons, il y en eut une autre pour notre très-prudente Reine : c'est, que le voile qui lui cachait l'intérieur de son très-saint Fils, où elle eut pu connaître tout ce qui s'était passé, ne fut écarté de ses yeux que quelque temps après qu'elle l'eut retrouvé.
II.§777 a écrit :
La variété des saints, aussi bien que leurs diffèrents degrés, exaltent dans le silence l'ouvrier de tant de sainteté (Ps. 18:2) ; les petits augmentent la grandeur des grands, et ils honorent tous ensemble la très-pure Marie, qui les surpasse glorieusement par son incomparable sainteté, et au bonheur de laquelle ils participent sous le rapport sous lequel ils l'ont imitée ; pour concourir à cet ordre, dont la perfection rejaillit sur tous. Et si l'auguste Marie est le couronnement qui a relevé tout l'ordre des justes, par là même elle a été l'instrument ou le motif de la gloire que tous les saints ont à un certain degré. Il suffit de considérer le temps que notre Seigneur Jésus-Christ mit à travailler en elle, et celui qu'il employa en tout le reste de l'Église, pour découvrir, quoique de loin, son excellence dans le mode qu'il suivit pour former cette image de sa sainteté. Car pour fonder l'Église et l'enrichir, pour appeler les apôtres, pour enseigner le peuple et pour établir la nouvelle loi de l'Évangile, il ne fallut que trois ans de prédication, pendant lesquels il accomplit surabondamment cette oeuvre que son Père éternel lui avait recommandée (Joan. 6:38), et il justifia et sanctifia tons les fidèles : mais pour imprimer en sa bienheureuse mère l'image de sa sainteté, il n'employa pas seulement trois ans, mais trente ans, pendant lesquels il opéra continuellement en elle par la force de son amour et de sa puissance divine, sans aucun intervalle où il ait cessé d'ajouter grâces sur grâces, dons sur dons, bienfaits sur bienfaits, sainteté sur sainteté. Et en outre il se réserva de la retoucher de nouveau, et ce fut par les faveurs qu'elle reçut après que Jésus-Christ son très-saint Fils fut monté à son Père, comme je le dirai dans la troisième partie. La raison se trouble, les paroles manquent à la vue de cette grande Dame, parce qu'elle fut élue comme le soleil, et que les yeux de l'homme n'en sauraient supporter la splendeur, non plus que ceux de toute autre créature.