Résumé de théologie dogmatique, Livre I : Fondements du savoir théologique

chartreux
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Re: Résumé de théologie dogmatique, Livre I : Fondements du savoir théologique

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SWS, Livre I, I, C4, §25 traduit par le chartreux a écrit : Section 25. Règles pour déduire la vérité révélée de la Tradition ecclésiastique.

Les règles pour l'application des lois mentionnées à la section précédente découlent des lois elles-mêmes. Les catholiques, qui croient en l'autorité divine de cette Tradition, obtiendront bien sûr des résultats différents des Protestants qui ne reconnaissent que sa valeur historique. Les catholiques appliqueront aussi les règles d'une manière différente, suivant que leur propos est de déterminer l'apostolicité d'une vérité, ou bien de l'exposer et de la défendre scientifiquement.

I. Pour un catholique il n'est pas nécéssaire de démontrer positivement à partir de documents contemporains que l'Église a toujours tenu une certaine doctrine. La rareté des documents, particulièrement ceux de la période juste après la période apostolique, rend d'ailleurs impossible cette tâche. La tradition présente, surtout si elle est attestée par une définition qui fait autorité, est suffisante pour démontrer l'existence passée de cette tradition, même si cette existence était seulement latente. Toute connaissance supplémentaire sur l'état passé de la Tradition est d'interêt purement scientifique. Mais quand la tradition présente n'est pas manifeste publiquement, et que les juges de la foi n'ont pas tranché une question controversée, on doit regarder les traditions du passé, c'est-à-dire faire appel à l'antiquité, comme le dirait S. Vincent de Lérins. Il n'est pas nécéssaire d'aller jusqu'à l'antiquité absolue : il suffit de trouver un temps où la tradition n'est pas contestable. Ainsi, au concile d'Éphèse par exemple, les décisions étaient basées sur le témoignage des Pères du quatrième siècle. Quand la tradition n'est manifeste ni dans le présent ni dans le passé, on peut parfois avoir recours au consentement des Pères et des théologiens de renom. Une incertitude temporaire et même une négation partielle d'une doctrine n'est pas en soi un argument conclusif contre la dite doctrine. L'opposition peut souvent d'avérer purement humaine et on peut bien souvent expliquer ses causes, en déterminant l'origine de cette opposition et en montrant que l'Église l'a combattue. Parfois, la difficulté provient de l'appel à des traditions purement locales, ou bien l'opposition est incohérente, variable, indéfinie, mélangée d'opinions nettement hérétiques ou destructices de la pensée et de la vie catholiques. Il serait facile de montrer que de tels traits s'appliquent à l'opposition gallicane à l'infaillibilité du Pape. Même quand l'étude de l'antiquité ne produit aucune certitude absolue, elle peut produire une certitude au moins morale, de sorte que la négation serait téméraire.

II. Une fois qu'une tradition a été établie, un catholique n'attache plus d'interêt à la vérification de sa continuité dans le temps, excepté à des fins purement scientifiques ou apologétiques. De plus, les hérétiques n'ont aucun droit d'exiger une preuve directe de l'antiquité d'une doctrine. Nous pouvons certes répondre à leurs arguments tirés de la Tradition, et leur montrer les traces de la doctrine aux différentes époques, mais il vaut mieux leur démontrer ce qu'est la notion catholique de tradition, qui est abondamment attestée historiquement.
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SWS, Livre I, I, C4, §26 traduit par le chartreux a écrit : Section 26. Les écrits des Pères.

I. Les Pères sont les représentants de la Tradition qui ont été reconnus par l'Église comme éminents en sainteté et en dons naturels et surnaturels, et qui sont nés dans les premiers âges de l'Église. Cette dernière caractéristique les distingue des docteurs qui eux sont nés plus près de nous, mais cela n'a qu'une influence secondaire sur leur autorité. Le concile d'Éphèse ou les anciens théologiens n'attachaient pas d'importance particulière à l'ancienneté des Pères. C'est l’Église elle-même qui a créé le titre de Doctor Ecclesiae, par lequel elle honore dans sa liturgie les Pères les plus illustres. Ce titre est aussi donné à beaucoup de saints plus tardifs, qui sont ainsi mis sur un pied d'égalité avec les Pères. On peut même dire que la canonisation d'un théologien lui donne jusqu'à un certain point la dignité d'un "Père". L'antiquité n'est cependant pas complètement dénuée d'importance, comme expliqué plus haut.

II. Le domaine doctrinal où s'applique l'autorité et l'infaillibilité des Pères est coextensif à celui de l'Église, dont ils sont les porte-paroles. Ce domaine ne concerne donc pas les vérités d'ordre purement naturel ou philosophique, ou les vérités révélées seulement par accident, car toutes ces choses-là ne font pas partie de l'enseignement public de l'Église. D'un autre côté, leur autorité ne se limite pas à leur témoignage de vérités révélées formellement et expressément, mais s'étend à toute l'interprétation dogmatico-théologique de l'integralité du dépôt révélé. L'autorité matérielle et formelle des Pères, c'est-à-dire le sujet dont ils traitent, et l'usage ecclésiastique de leurs écrits, est magnifiquement expliquée par S. Vincent de Lérins, quand il parle des Pères cités au concile d'Éphèse : "Dix est le nombre sacré des dix commandements, et seulement ces dix-là ont été invités à Éphèse comme maîtres, conseillers, témoins et juges ; (...) [et le concile], en tenant leur doctrine, en suivant leur avis, et en croyant leur témoignage, et en obéissant à leurs décisions, a rendu un jugement concernant les règles de la Foi" (numéro 30). On ne saurait trouver une meilleure réfutation de l'opinion moderne qui réduit l'autorité des Pères à celle de simples témoins historiques.
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SWS, Livre I, I, C4, §26 traduit par le chartreux a écrit : III. Il faut faire bien attention et distinguer l'autorité d'un seul Père de celle de plusieurs d'entre eux, et de l'autorité de leur consentement unanime. Il est évident que la première n'est pas infaillible, par ce que l'approbation donnée par l'Église à leurs écrits n'est pas une garantie de la vérité de chaque chose particulière qu'ils enseignent. Cette garantie supplémentaire a cependant été expressément accordée à certains de ces écrits, comme par exemple les Anathèmes de Saint Cyril. L'approbation de l'Église veut dire que : (1) que les écrits approuvés n'étaient opposés à aucune doctrine tenue par l'Église à l'époque de leur publication, et ne furent donc sujets à aucune censure ; (2) que les doctrines les plus célèbres de l'auteur, et celles sur lesquelles il a le plus insisté, sont positivement probables ; (3) qu'il y a une forte présomption que les expressions difficiles d'interprétation utilisés dans ces écrits doivent être comprises en accord avec la doctrine communément admise, et qu'on ne doit pas supposer de discordance sauf pour des motifs très graves ; (4) dans certaines circonstances extraordinaires ces écrits peuvant nous donner une certitude morale concernant une doctrine quand, par exemple, un illustre Père a, sans être contredit par l'Église, ouvertement imposé une doctrine comme catholique, et traité les négateurs de cette doctrine comme des hérétiques. Mais quand tous les Pères sont d'accord, leur autorité devient parfaite. L'unanimité des Pères a toujours été considerée comme égale en autorité avec l'enseignement de toute l'Église, ou les définitions des Papes et conciles. Mais comme il est impossible de déterminer les opinions de chaque Père sur chaque point de doctrine, et que le Saint-Esprit empêche l'Église d'attribuer à l'unanimité des Pères une doctrine qu'elle ne tient pas, il s'ensuit que l'unanimité des Pères doit être considerée comme pleinement démontrée dès lors que tous ceux qui traitent d'une doctrine donnée sont d'accord absolument ou moralement, qu'ils sont nombreux et vivent dans des époques et pays différents. Le nombre minimal exigé varie suivant la nature de la doctrine, qui peut être un sujet de la plus haute importance et ayant des conséquences quotidiennes, ou bien à l'autre extrême être très abstrait et spéculatif, et donc relativement moins important. Ce nombre varie aussi suivant l'autorité personnelle de chaque Père, de sa poistion dans l'Église, de l'opposition faible ou forte à la doctrine, et de bien d'autres circonstances.
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SWS, Livre I, I, C4, §26 traduit par le chartreux a écrit : L'unanimité des Pères peut prendre différentes formes suivant les doctrines. Si ils disent expressément qu'une doctrine est un dogme public de l'Église, la doctrine doit être acceptée immédiatement. Si ils affirment seulement que la doctrine est vraie et enseignée par l'Église, ce témoignage n'a pas le même poids. Une telle doctrine ne peut être traitée comme un dogme en se basant uniquement sur ce témoignage. Elle est cependant catholique, vraie et moralement certaine, et sa négation est censurable par ce que téméraire ou erronnée.


IV. L'autorité des Pères est tenue en haute estime par l'Église dans son interrpétation de l'Écriture. Ils ont fait de la Bible leur grand objet d'étude, tandis que les écrivains qui sont venus après eux ne s'en sont pas occupés si directement, et ont suivi les pas des Pères. L'unanimité des Pères est un règle positive et non exclusive, ce qui veut dire que notre interprétation doit s'accorder avec elle là ou elle existe, mais là ou elle n'existe pas nous pouvons licitement aller jusqu'à interpréter contre les opinions de certains Pères. Cette unanimité doit être vérifiée dans l'intégralité de leurs écrits et pas seulement de leurs commentaires, par ce que dans ceux-ci ils adoptent souvent un point de vue particulier plus pratique ou plus ascétique, tandis que dans leurs autres écrits leur propos est bien d'exposer le dogme catholique. En fait, dans les deux types d'écrits on trouve rarement un exposé sicentifique complet ; la plupart du temps les Pères choisissent une doctrine particulière qu'ils s'efforcent de tirer d'un texte qui sert alors de fondement à la doctrine. D'où la multitude de différences apparentes dans leurs exégèses respectives, différences que l'on peut cependant résoudre aisément en mettant bout à bout les différents passages .
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SWS, Livre I, I, C4, §27 traduit par le chartreux a écrit : Section 27. Les écrits des théologiens.

I. Par théologiens nous entendons des hommes formés en théologie, des membres ou des maîtres d'écoles théologiques qui sont nées après la période patristique, qui ont enseigné et transmis la doctrine catholique d'une manière strictement scientifique, sous la direction de leurs évêques. Le titre s'applique d'abord et avant tout aux étudiants du Moyen-Âge - ceux qu'on appelle les scolastiques ; puis à tous ceux qui ont suivi cette méthode scolastique dans les siècles suivants ; et enfin, à toute personne distinguée et approuvée écrivant sur la théologie, qu'elle suive les méthodes scolastiques ou pas. C'est un fait exceptionnel pour l'Église d'approuver publiquement et individuellement un théologien, et cela se fait par canonisation ou bien par l'attribution du titre encore plus honorifique de docteur de l'Église. Quand nous disons auteur approuvé, nous parlons de quelqu'un qui est généralement estimé pour sa science et pour l'esprit catholique de ce qu'il enseigne. Certains auteurs approuvés ont une importance reconnue, d'autres non. Ce que nous allons dire concernant l'autorité des théologiens ne doit pas s'appliquer indistinctement à tous les auteurs catholiques, mais seulement à ceux qui sont à la fois approuvés et importants (auctores probati et graves).

II. L'autorité des théologiens, comme celle des Pères, peut être considérée soit individuellement et partiellement, soit collectivement dans son ensemble. En règle générale, l'autorité d'un seul théologien (à l'exception des saints canonisés, et peut-être de certains autres auteurs de grande renommée) ne créé pas de présomption qu'aucun point de sa doctrine n'a été combattue par l'Église en son temps, ni à plus forte raison que sa doctrine soit positivement probable simplement par ce que lui la tient. Quand la majorité des théologiens approuvés et reconnus s'accordent cependant, il faut présumer que leur enseignement commun n'est pas opposé à celui de l'Église. De plus, si leurs doctrines sont fondés sur des arguments clairs, proposés sans arrière-pensée et ne rencontrant aucune opposition sérieuse, il faut présumer la probabilité positive des doctrines. Quand beaucoup ou même tous les théologiens affirment qu'une doctrine est une opinion commune (opinio communis) plutôt qu'une conviction commune (sententia conmunis), leur unanimité ne peut produire rien de plus qu'une probabilité. Ces questions ont été très longuement discutées par les théologiens moraux lors de la controverse du probabilisme. Cf. Lacroix, Théol. Mor., lib. I, tr. i, c. 2.
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SWS, Livre I, I, C4, §27 traduit par le chartreux a écrit : Le consentement des théologiens ne produit la certitude qu'une doctrine est catholique seulement quand d'une part la doctrine est proposée comme absolument certaine, et quand d'autre part le consentement est universel et constant (Consensus universalis et constans non solurn opinionis sed firmae et ratae sententiae). Si tous s'accordent à dire qu'une doctrine particulière est un dogme catholique et que sa négation est hérétique, alors cette doctrine est certainement un dogme. S'ils sont tous d'accord sur le fait qu'une doctrine ne peut être niée sans nuire à la vérité catholique, et qu'une telle négation mérite censure, alors cette doctrine est certainement un doctrine catholique en quelque façon. Si, enfin, ils s'accordent à dire qu'une doctrine est bien établie et démontrée, cela ne prouve pas que la doctrine est catholique, mais leur consentement montre que la doctrine appartient à l'intellect de l'Église (catholicus intellectus), et que par conséquent sa négation mérite d'être censurée pour imprudence.

Pie IX a fortement insisté sur ces principes concernant l'autorité des théologiens dans son bref, Gravissimas Inter (cf. infra, §29), et ces principes découlent évidemment de la doctrine catholique concernant la tradition. Bien que l'assistance du Saint-Esprit ne soit pas directement promise aux théologiens, l'assistance garantie à l'Église fait qu'ils ne peuvent professer unanimement une erreur ; car sinon les fidèles qui les suivent seraient eux aussi tous trompés. Le consentement des théologiens implique le consentement de l'épiscopat, suivant ce que dit S. Augustin : Error cui non resistitur approbatur, et veritas quae non defenditur opprimitur, "Ne pas s'opposer à une erreur, c'est l'approuver ; ne pas défendre une vérité, c'est la rejeter." (Decr. Grat., dist. 83, c. "error"). Et la simple raison naturelle nous dit que l'unanimité garantit la vérité : "ce qui se trouve le même parmi un très-grand nombre n'est point erreur, mais tradition." (Tertullien, supra, §21, I.2).
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SWS, Livre I, I, C4, §27 traduit par le chartreux a écrit :
L'Église estime les docteurs médievaux presque autant que les Pères. La substance de leur enseignement, ainsi que leur méthode de traitement ont été approuvées par l'Église (cf. Syllabus, prop. xiii), et l'encylique Aeterni Patris de Léon XIII sur l'étude de S Thomas.

Ajout des traducteurs anglais : après ce que livre a été publié, le code de droit canon de 1917 est venu confirmer et même renforcer ce que dit Scheeben ici concernant S. Thomas ("Les professeurs doivent ordonner les études de philosophie rationnelle et de théologie, de même que la formation des élèves dans ces disciplines, selon la méthode du docteur Angélique, et s'en tenir religieusement à sa doctrine et à ses principes." CIC 1366,2).
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SWS, Livre I, I, C5, §28 traduit par le chartreux a écrit : Chapitre 5. La règle de foi.

Section 28. La règle de foi, considérée dans sa généralité, et dans son sens actif.

I. La nature et la dignité de la Parole de Dieu exigent que la soumission à cette Parole ne doit pas être laissée à l'arbitraire des hommes, mais rendue obligatoire. L'Église doit faire ne sorte que tous ses membres adhèrent en commun, unanimement et complètement, à l'expression publique et sociale de la Parole.

II. La règle de foi a été donnée à l'Église par l'acte même de Révélation et sa promulgation par les Apôtres. Mais pour que cette règle soit toujours efficace de façon actuelle et permanente, elle doit être continuellement promulguée et appliquée par l'apostolat vivant, qui doit imposer à tous les membres de l'Église une foi docile en toutes les vérités révélées, et unir ainsi l'Église enseignante et enseignée en une parfaite unité de foi. Ainsi la promulgation originelle est la règle lointaine de foi, et la promulgation continuelle par l'Église enseignante est la règle prochaine de foi.

III. Le fait que tous les membres de l'Église professent une même foi est la meilleure preuve que la règle catholique de foi fonctionne. Cette universalité n'est pas la règle de foi elle-même mais sa conséquence. Les membres sont certes individuellement tenus de régler leur croyance d'après celle de la communauté, mais cette croyance universele est produite par l'action de l'apostolat enseignant, dont les membres sont à leur tour soumis au Chef. Ainsi la règle catholique de foi se réduit en dernière analyse à l'autorité enseignante souveraine du Saint-Siège. Cela fut affirmé il y a longtemps dans la profession de foi du Pape Hormisdas : "Obéissant ainsi en tout au Siège Apostolique et soutenant tous ses décrets, j'espère pouvoir être avec vous dans la communion enseignée par le Siège apostolique, qui est le fondement inébranlable de la réligion chrétienne ; et je promets également de ne pas mentionner pendant les Saints Mystères les noms de ceux qui sont excommuniés de l'Église Catholique, c'est-à-dire ceux qui ne sont pas en accord avec le Siège Apostolique."
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SWS, Livre I, I, C5, §28 traduit par le chartreux a écrit : IV. L'acte ou la collection d'actes qui institue la règle de foi catholique est désignée par le terme technique "proposition de l'Église" (Propositio Ecclesiae, sess. iii, chap.3). Elle est appelée "proposition" par ce que c'est une promulgation d'une loi qui est déja contenue dans la révélation, et qui impose de croire à ce qui est proposé, et "de l'Église" par ce qu'elle émane de l'Église enseignante et est adressée à l'Église enseignée ; et pas au sens où elle émanerait de la communauté entière.

V. La manière dont la proposition est faite, et la forme qu'elle prend, dépendent de la nature des vérités proposées et de l'apostolat enseignant. La proposition ordinaire de la règle de foi se confond avec l'exercice ordinaire de l'apostolat enseignant ; par ce que la Parole de Dieu par sa nature même inculque l'obéissance de la foi, et est communiquée aux fidèles avec l'intention expresse d'imposer la croyance. Ainsi tout enseignement ordinaire est nécéssairement une promulgation de la règle de foi et une injonction de croire ; par conséquent la règle de foi est tout naturellement non-écrite. Mais une proposition de l'Église prend la forme d'un statut ou d'une loi écrite quand elle est promulguée par une décision solennelle. De telles décisions ne sont cependant pas des lois à proprement parler, mais sont seulement des redéclarations faisant autorité, de lois déja établies par Dieu ; et dans la plupart des cas elles n'imposent que ce qui est déja la pratique commune. Les deux formes, écrite et non-écrite, sont égales en autorité, mais la forme écrite est plus précise. Les deux dépendent en dernière analyse de l'autorité du Chef de l'apostolat. Aucune sentence judiciaire en matière de foi n'est valide si elle n'est pas prononcée ou approuvée par lui ; et la force légale de la règle non-écrite vient de son approbation tacite.
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SWS, Livre I, I, C5, §28 traduit par le chartreux a écrit :
VI. L'autorité d'une proposition de l'Église, qui oblige à obéir à ses décrets et qui garantit leur infaillibilité, ne se limite pas aux matières de foi divine et de révélation divine, bien que ceux-là en soient les sujets principaux. L'apostolat enseignant, pour pouvoir mener à bien sa tâche de préserver la foi non seulement dans l'essentiel mais aussi dans son intégralité, soit étendre son activité au-delà du domaine de la foi divine et de la révélation divine. En ce qui concerne ces sujets plus extérieurs l'apostolat n'exige qu'une acceptation obéissante et non pas la foi divine ; il s'agit donc d'une règle de savoir et de conviction théologique plutôt qu'une règle de foi divine. Il existe donc dans l'Église, à côté de la règle de foi et de façon complémentaire, une règle de pensée théologique ou de conviction religieuse, à laquelle doit se soumettre intérieurement et extérieurement tout catholique. Tout refus de se soumettre à cette loi implique une révolte spirituelle contre l'autorité de l'Église et un rejet de sa véracité surnaturelle, et constitue, sinon une négation directe de la foi catholique, au moins une négation directe de la profession catholique.

VII. Les actes judiciaires, législatifs et autres des membres de l'apostolat enseignant ne sont pas tous des règles obligatoires de foi et de pensée théologique, mais s'apparentent putôt à des réglementations policières. Ces mesures disciplinaires peuvent sous certaines circonstances commander un assentiment confiant et respectueux, dont le refus serait un manque de respect et une témérité. Quand par exemple l'Église interdit l'enseignement de certains points de doctrine, ou commande l'enseignement d'une opinion de préférence à une autre, la soumission extérieure est requise, mais il y a aussi une obligation de considérer l'opinion préférée comme moralement certaine. Quand une décision judiciaire concerne une point de doctrine, mais n'a pas été donnée ou approuvée par l'autorité suprême, la décision n'impose en soi qu'une obéissance extérieure. Les points de doctrine exprimés, recommandés, et mentionnés avec insistance dans des allocutions papales et encycliques mais non définies expréssement, peuvent obliger soit une obéissance simple soit un assentiment complet suivant les cas. Il faut donc distinguer trois degrés dans le règle de foi : (1) la règle de foi en matière directement révélée, qui commande l'obéissance de la foi ; (2) la règle de foi en matière théologiquement reliées à la Révélation, qui commande le respect et la soumission extérieure, et indirectement un certain assentiment intérieur ; (3) la règle de foi en matière disciplinaire, qui commande la soumission et la révérence.

La différence est importante entre les règles de savoir théologique et les mesures disciplinaires. Celles-ci commandent une obéissance universelle et inconditionnelle, tandis que celles-là ne commandent que le respect et la révérence. Le libéralisme moderé, representé au XVIIième siècle par Holden (Analysis Fidei), et au XVIIIième par Muratori (De Ingeniorum Moderatione) et Chrismann (Regula Fidei), est une tentative de concilier le libéralisme extrémiste avec la foi catholique, en abandonnant ces distinctions et en réduisant toutes les décisions à des définitions formelles de foi ou de simples réglementations policières.
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