John Lane traduit par le chartreux a écrit : L'appartenance à l'Église et la profession de foi
Je voudrais parler d'un petit sophisme qui est très populaire en ce moment ; avec un certain nombre d'autres il embrume les esprits des gens et non seulement il les empêche de voir la gravité et la profondeur de la crise actuelle de l'Église, mais il menace aussi la compréhension la plus élémentaire de ce qu'est l'Église et la façon dont elle sauve les âmes. Comme bien d'autres sophismes, celui-ci prend pour point de départ des vérités certaines de théologie, vérités reliées entre elles (et tout n'est-il pas relié à tout en théologie, en dernière analyse), mais les combine entre elles de manière inappropriée pour aboutir à une conclusion hétérodoxe.
John Lane sur l'appartenance à l'Église
John Lane sur l'appartenance à l'Église
Re: John Lane sur l'appartenance à l'Église
John Lane traduit par le chartreux a écrit :
Voici ce que dit ce sophisme : puisqu'une personne reste membre de l'Église aussi longtemps que, trompée de bonne foi, elle croit sincèrement ses hérésies compatibles avec la doctrine catholique, il s'ensuit que l'Église peut être composée de gens qui professent tout et n'importe quelle hérésie, du moment que la hiérarchie ne réagit pas. Dans une telle situation, il n'y a que des hérétiques cachés partout, et l'unité de l'Église en matière de foi se réduit à une soumission purement verbale au magistère. Il suffit de se dire catholique pour l'être, à moins d'être contredit par les évêques - ce qui n'arrive jamais de nos jours.
C'est ainsi qu'une hérésie (dire que l'Église peut être privée de sa première marque d'unité, la profession de foi) semble découler de principes vrais et certains de théologie morale et de droit canon.
Nous sentons tous sans doute qu'il y a quelque chose qui ne va pas dans ce raisonnement, mais peu semblent capables de voir où précisément se situe l'erreur. Je pense que c'est un exemple d'"arbres qui cachent la forêt" et de vérités théologiques prises en dehors de leur contexte légitime, ainsi que je vais l'expliquer.
Re: John Lane sur l'appartenance à l'Église
John Lane traduit par le chartreux a écrit :
Tout d'abord, il n'est pas vrai (et cela s'observe aisément) qu'aucun de ceux qui se disent catholiques aujourd'hui ne se montrent pertinaces dans leurs déclarations hérétiques. Il n'est que trop courant, par exemple, d'entendre quelqu'un dire que l'Église condamne le divorce, mais que il ou elle n'est pas d'accord. C'est un hérétique public, qui déclare ouvertement son refus du magistère, et qui ne saurait donc être catholique. Son hérésie est publique et son appartenance à l'Église est chimérique. Il ou elle a quitté l'Église par ses actes. Un très grand nombre de soi-disant catholiques correspondent à cette description, si bien que l'Église est bien plus petite que ne se l'imaginent les mondains mal informés.
Mais c'est sur une autre erreur que je veux attirer l'attention du lecteur. Pour cela il nous faut d'abord placer quelques considérations doctrinales en bon ordre.
Re: John Lane sur l'appartenance à l'Église
John Lane traduit par le chartreux a écrit :
La première vérité que notre esprit doit fixer est que l'Église est chargée d'enseigner la vérité à tous, et elle est particulièrement aidée et guidée dans sa tâche par l'Esprit saint, qui est l'âme de l'Église. Et l'Église accomplit de fait sa tâche, dans tous les âges et toutes les générations, puisque telle est sa raison d'être. Si Dieu avait voulu déposer sur la terre une révélation sous forme écrite que les générations postérieures consulteraient ensuite pour se sauver, Il aurait pu le faire. Mais Il ne l'a pas fait. Au lieu de cela, Il a révélé la vérité et l'a confiée à une entité surnaturellement constituée qu'Il a promis d'assister jusqu'à la fin des temps dans la tâche de présenter la révélation divine aux hommes, et ceci en tous temps, ce qui inclut notre temps. Tel est le sens de l'expression "magistère vivant". Cette idée s'oppose au "magistère mort" des protestants et semi-traditionalistes, un magistère qui a parlé dans le passé mais qui ne parle plus aujourd'hui, et qui a laissé des traces sondées par des exegètes-archéologues. Les protestants situent leur magistère mort dans la Bible ; les semi-traditionalistes situent le leur dans les textes d'avant Vatican II. (Soyez patient avec moi et ne me faites pas dire ce que je ne dis pas - je ne suis pas sur le point de vous inviter à adhérer aux erreurs de Vatican II, ni de vous faire rejeter le moindre décret faisant autorité dans le magistère).
Re: John Lane sur l'appartenance à l'Église
John Lane traduit par le chartreux a écrit :
La deuxième vérité qui est une conséquence de la première, est que ceux qui ne sont pas soumis à ce magistère vivant ne sont pas catholiques. La troisième vérité, qui découle des deux premières, et que l'Église jouit toujours d'une parfaite unité dans sa profession de foi. Autrement dit, tous les catholiques professent exactement les mêmes doctrines divinement révelées.
Dans Satis Cognitum, Léon XIII explique clairement ce point :
Pénétrée à fond de ses principes et soucieuse de son devoir, l'Eglise n'a jamais rien eu de plus à coeur, rien poursuivi avec plus d'effort, que de CONSERVER DE LA FAÇON LA PLUS PARFAITE L'INTÉGRITÉ DE LA FOI. C'est pourquoi elle a regardé comme des rebelles déclarés, et chassé loin d'elle tous ceux qui ne pensaient pas comme elle, sur n’importe quel point de sa doctrine. Les Ariens, les Montanistes, les Novatiens, les Quartodécimans, les Eutychiens n'avaient assurément pas abandonné la doctrine catholique tout entière, mais seulement telle ou telle partie : et pourtant qui ne sait qu'ils ont été déclarés hérétiques et rejetés du sein de l'Eglise ? Et un jugement semblable a condamné tous les fauteurs de doctrines erronées qui ont apparu dans la suite aux différentes époques de l'histoire. «Rien ne saurait être plus dangereux que ces hérétiques qui, conservant en tout le reste l'intégrité de la doctrine, par un seul mot, comme par une goutte de venin, corrompent la pureté et la simplicité de la foi que nous avons reçue de la tradition dominicale, puis apostolique» (Auctor, Tractatus de Fide Orthodoxa contra Arianos). Telle a été toujours la coutume de l'Eglise, appuyée par le jugement unanime des saints Pères, lesquels ont toujours regardé comme exclu de la communion catholique et hors de l'Eglise quiconque se sépare le moins du monde de la doctrine enseignée par le magistère authentique. Epiphane, Augustin, Théodoret ont mentionné chacun un grand nombre des hérésies de leur temps. Saint Augustin remarque que d'autres espèces d'hérésies peuvent se développer, et que, si quelqu'un adhère à une seule d'entre elles, par le fait même, il se sépare de l'unité catholique. «De ce que quelqu'un, dit-il, ne croit point ces erreurs (à savoir les hérésies qu'il vient d'énumérer), il ne s'ensuit pas qu'il doive se croire et se dire chrétien catholique. Car il peut y avoir, il peut surgir d'autres hérésies qui ne soient pas mentionnées dans cet ouvrage, et quiconque embrasserait l'une d'entre elles, cesserait d'être chrétien catholique» (De Haeresibus, n. 88).
Re: John Lane sur l'appartenance à l'Église
John Lane traduit par le chartreux a écrit :
Un peu plus loin, le Saint Père ajoute :
Pour conclure, puisqu'il est évident que Dieu veut absolument dans Son Eglise l'unité de foi, puisqu'il a été démontré de quelle nature Il a voulu que fut cette unité et par quel principe Il a décrété d'en assurer la conservation, qu'il nous soit permis de nous adresser à tous ceux qui n'ont point résolu de fermer l'oreille à la vérité et de leur dire avec saint Augustin : «Puisque nous voyons là un si grand secours de Dieu, tant de profit et d'utilité, hésiterons-nous à nous jeter dans le sein de cette Eglise, qui, de l'aveu du genre humain tout entier, tient du siège apostolique, et a gardé, par la succession de ses évêques, l'autorité suprême, en dépit des clameurs des hérétiques qui l'assiègent et qui ont été condamnés soit par le jugement du peuple, soit par les solennelles décisions des Conciles, soit par la majesté des miracles ? Ne pas vouloir lui donner la première place, c'est assurément le fait ou d'une souveraine impiété ou d'une arrogance désespérée. Et si toute science, même la plus humble et la plus facile, exige, pour être acquise, le secours d'un docteur ou d'un maître, peut-on imaginer un plus téméraire orgueil, lorsqu'il s'agit des livres des divins mystères, que de refuser d'en recevoir la connaissance de la bouche de leurs interprètes, et, sans les connaître, de vouloir les condamner ?» (De utilitate credendi, cap. XVII, n. 35).
Re: John Lane sur l'appartenance à l'Église
John Lane traduit par le chartreux a écrit :
Pour que tout cela soit bien clair, ajoutons que l'unité de profession de foi dont l'Église jouit à chaque instant est la conséquence de l'activité de la hierarchie, aidée par l'Esprit Saint. Cette activité est à la fois positive et négative. D'un côté elle enseigne, développe son enseignement, et règne en accord avec la révélation divine, exigeant la profession de foi orthodoxe - spécialement dans la liturgie et autres actes publics - et de l'autre elle condamne l'erreur, reprend les errants, et si nécéssaire expulse les obstinés, pour le bien de tous les autres. L'enseignement officiel de l'Église est fixé dans les textes de son magistère, dont les lois engagent perpetuellement les fidèles. Sa prédication au jour le jour est et doit toujours être en harmonie avec les proclamations plus solonnelles. En tout temps et tout lieu, s'il n'y a pas d'évêque en exercice, l'unité des fidèles est maintenue par la conservation docile de la doctrine antérieurement transmise. Saint Paul nous dit "Prends pour règle les saines paroles que tu as entendues de moi, dans la foi et la charité (amour) qui est en Jésus-Christ." (II Tim, 1.13).
Re: John Lane sur l'appartenance à l'Église
John Lane traduit par le chartreux a écrit :
Dans la plus grande partie de la terre d'aujourd'hui, on ne voit rien de tout cela arriver, et ce depuis une cinquantaine d'années. Au lieu de tout cela, la hiérarchie de la "nouvelle Église" enseignent l'erreur et l'hérésie et imposent un culte faux aux catholiques, prétendument au nom de l'Église. La nouvelle messe exprime une foi différente de la vraie messe ; de même des textes de Vatican II et des nouveaux catéchismes. Toutes ces choses ont dégouté, déprimé, et finalement fait apostasier quelque chose comme cinquante mille prêtres qui ont perdu leur vocation dans la décennie à partir de 1965. Et ce nombre incroyablement grand n'est encore rien à côté du nombre de religieux qui abandonnerent leur vocations, et le nombre de laïques qui cesserent de pratiquer. Aucune autre crise dans l'Église n'est comparable à la présente, que ce soit en profondeur ou en étendue. Comme le dit l'abbé Matthias Gaudron dans son Catéchisme de la crise dans l'Église :
Non seulement le nombre de ceux qui se considèrent comme membres de l'Église diminue constamment, mais même la majorité de ceux qui sont officiellement dans l'Église n'ont plus la foi catholique! Quelqu'un qui nie une vérité de foi a perdu la foi, car la foi doit être entière. Si 72% des catholiques ne croient plus en l'enfer, pas même un catholique sur trois n'a la foi aujourd'hui.
Re: John Lane sur l'appartenance à l'Église
John Lane traduit par le chartreux a écrit :
Il est incontestable que ce résultat est le fruit de la prédication et autres activités de la hiérarchie actuelle. La philosophie scolastique, la révélation divine, et le simple bon sens sont tous d'accord pour dire que la cause se reconnaît à son effet, car "les chiens ne font pas des chats".
La désunion, manifeste et étendue, est le fruit du "magistère" et de la liturgie de Vatican II. Cette désunion est impossible dans l'Église catholique car sa hiérarchie ne le permettrait pas. Dieu a tout disposé pour que cette Église soit toujours une, sainte, catholique, apostolique. Toute institution qui n'a pas ces quatre notes n'est pas l'Église.
Comparons brièvement la situation actuelle avec la crise moderniste pendant le règne de Saint Pie X. Certains hommes se mirent à professer des hérésies. Le Saint-Siège les corrigea, condamna leurs erreurs, et enfin excommunia ceux qui persistaient dans l'erreur. Finalement l'hérésie fut professée par un petit nombre pendant une courte période, et ainsi l'Église conserva son unité visible, qui n'est pas affectée par une petite minorité de cas douteux (les modernistes les plus extrêmes quitterent l'Église d'eux-mêmes) ; ainsi ce petit nombre fut repris et certains parmi eux furent excommuniés (protégeant ainsi les autres fidèles de leur contact, pour la sécurité du troupeau), rendant l'unité de l'Église encore plus manifeste. Aujourd'hui, le nombre de catholiques de nom - et le Vatican accepte tous les catholiques de nom comme membres réels - qui professent la vraie foi à la fois dans l'adoration publique et tous les autres actes extérieurs- y compris les paroles dites- est une portion extrêmement faible de l'ensemble. Autrement dit, la communauté que le Vatican considère comme étant la vraie Église est essentiellement désunie sur le plan de la foi, et le Vatican ne fait rien pour y rémedier. Ni la grande majorité des évêques non plus d'ailleurs. Une telle communauté n'est pas l'Église, par ce que sa hiérarchie n'est pas la hiérarchie de l'Église, puisqu'elle n'agit pas comme la hiérarchie de l'Église. On pourrait écrire un essai entier sur la cause doctrinale de cette nouvelle attitude de la hiérarchie, fondée sur l'hérésie de Vatican II suivant laquelle l'Église inclut tous les baptisés. Ceux qui adhèrent à cette hérésie ne vont évidemment pas réprimer l'erreur, car ils n'y attachent aucune importance.
Re: John Lane sur l'appartenance à l'Église
John Lane traduit par le chartreux a écrit :
À ce stade, remémorons-nous les vérites essentielles que nous avons énoncées plus haut, dans le bon ordre pour qu'elles nous apparaissent plus clairement. Notre Seigneur Jésus-Christ a établi une institution infaillible et vivante, pour préserver et apporter aux hommes de tout temps les vérités qu'Il a révélées. L'activité de cette institution est à la fois positive et négative - elle prêche la vraie foi, condamne les erreurs, et reprend ceux qui errent. La mission temporelle du Saint-Esprit, qui est l'âme de l'Église, l'assiste en tout temps infailliblement. La conséquence de cette activité divinement assitée et l'unité de la profession de foi. Ce qui veut dire que l'Église possède une unité manifeste de personnes qui professent toutes la même vraie foi. Toute église qui ne possède pas cette unité manifeste n'est pas l'Église. Toute personne qui ne professe pas la vraie foi en commun avec les autres membres de l'Église, n'est pas catholique.
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