Controverse Georges Salet - Abbé V.M. Zins (8/1986 - 5/1988)

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Abbé Zins
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Re: Controverse Georges Salet - Abbé V.M. Zins (8/1986 - 5/1

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Georges SALET
à VERSAILLES

le 18 Décembre 1987

Monsieur l'Abbé,

Votre petit mot du 11 Décembre m'a rejoint ici à la campagne où je séjourne jusqu'à la semaine prochaine.

Votre question est donc maintenant (je copie textuellement)

"la légitimité de la déclaration que J.P. II est hérétique (formel) dépend-elle du fait de l'hérésie (formelle) publique de J.P.II"
Ou bien
"Est-ce le fait de l'hérésie (formelle) publique de J.P. II qui dépend de la légitimité de la déclaration" ?


Autrement dit, soient les propositions A et B2 (1)

(1) La proposition A telle que vous la formulez aujourd'hui est identique à la manière dont j'avais compris votre proposition A de votre avant dernière lettre.

Par contre, votre proposition B2 d'aujourd'hui est différente de la proposition B de votre avant dernière lettre telle que je l'avais comprise, soit :

B1 - "Jean Paul II est matériellement hérétique"
La proposition B telle que vous la formulez aujourd'hui est différente et c'est pourquoi je l'appellerai B2

A - "La déclaration que Jean Paul II est hérétique (formel) est légitime".

B2 - "Jean Paul II est publiquement hérétique formel"

Vous demandez : a-t-on
"B2 implique A"
ou "A implique B2"

je note d'abord que vous semblez penser que si l'une des deux implications "A implique B" et "B implique A" est vraie, alors l'autre est fausse ou réciproquement. Si vous pensez cela, c'est une erreur car, a priori, ces deux implications pourraient être toutes les deux vraies ou toutes les deux fausses mais passons.

1' - Bien que les propositions B1 et B2 soient différentes (je dirai plus bas ce que je pense de B2), ma réponse sera identique à celle donnée dans ma dernière lettre :

Dès lors que la proposition B comporte l'affirmation que Jean Paul II est hérétique (et peu importe comment), on a

A implique B

Mais, de par la définition même de l'implication, il n'en résulte pas que B est vrai ; pour tirer une telle conclusion, il faudrait prouver que A est vrai c'est à dire qu'il y a eu une déclaration de l'Eglise de l'hérésie de J. P. II et surtout que cette Déclaration a été légitime.

Or, non seulement il n'y a eu aucune Déclaration de l'Église mais à supposer qu'elle ait eu lieu, on ne pourrait affirmer sa légitimité qu'en affirmant, avec St. Bellarmin et tous les tenants du "Depositus est", que cette déclaration est légitime parce que le Pape est déjà déchu du Pontificat pour cause d'hérésie.

Autrement dit, et je l'ai dit maintes fois, le "sophisme de St. Bellarmin" (que j'appellerai d'ailleurs "le sophisme du Depositus est" si je publie quelque chose parce qu'il est le même chez tous) consiste à reconnaître que la déclaration d'hérésie ne serait pas légitime en vertu du principe que le premier Siège ne peut être jugé par personne si le Pape était vraiment Pape mais qu'elle est légitime parce que l'affirmation d'hérésie qu'elle contient est vraie.

Donc, bien que l'implication "A implique B" soit vraie, on ne peut en déduire la vérité de B2 puisque A est une proposition dont on n'affirme la vérité que par un raisonnement sophistique.

J'insiste : c'est par un sophisme que Saint Bellarmin, et avec lui tous ceux qui soutiennent sous une forme quelconque le "Depositus est", ont prétendu que A était une proposition vraie en s'appuyant précisément sur la proposition B2 qu'il faudrait justement démontrer.

Cependant, B1 est vrai, non pas en vertu de l'implication : "A implique B" mais parce que la vérité de B1 résulte d'une constatation objective (voir ma lettre précédente.)

Mais ce n'est plus le cas de la proposition B2 parce que vous ajoutez à B le mot "formel".

2̊ – On n'a pas (que B désigne B1 ou B2)
B implique A

A supposer, en effet, que B soit vrai (c'est à dire que Jean Paul II est hérétique), cela ne donnerait pas la légitimité à une Déclaration d'hérésie de la part de l'Eglise.

La légitimité d'une Déclaration quelconque ne saurait, en effet, dépendre de sa vérité.

N'importe qui peut faire une déclaration juste mais elle n'est légitime que si elle émane de quelqu'un habilité à la prononcer et à la condition que cette autorité se prononce selon les modalités de droit.


REMARQUE FINALE

Je ne saisis pas du tout pourquoi vous cherchez à lier la question de la légitimité d'une Déclaration d'hérésie à l'hérésie publique de Jean Paul II.

Saint Bellarmin avait lié cette légitimité, non pas à l'hérésie du Pape mais au fait que celui–ci n'était plus pape du fait de son hérésie ce qui n'est pas la même chose. Toute l'argumentation de Bellarmin et de tous les partisans du "depositus est" repose sur cette idée que la Déclaration de vacance du Siège pontifical pour cause d'hérésie est légitime parce que le Pape est hérétique formel ce qu'il faudrait précisément démontrer.

Il conviendrait d'ailleurs de préciser ce que vous entendez exactement par "hérésie publique formelle" de Jean Paul II car cette expression me parait fort ambiguë.
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Abbé Zins
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Re: Controverse Georges Salet - Abbé V.M. Zins (8/1986 - 5/1

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Abbé ZINS
TOURS

à M. Georges SALET
Versailles

Saint Thomas, Evêque et Martyr
Mardi 29 décembre 1987

Monsieur,

Profitant de l’occasion que j’ai de vous écrire à ce jour, je désire commencer par vous souhaiter, ainsi qu’à votre épouse, mes meilleurs voeux pour la nouvelle année : voeux de santé corporelle et spirituelle, voeux de lumière et de force pour être fidèle à la Vérité dans les dures circonstances que nous allons vivre sous peu.

Par votre lettre du 8/12, vous avez répondu clairement à la première de mes deux questions ; ce qui va me permettre de répondre clairement à l’ensemble de votre lettre du 17/9, mieux que je ne l’ai fait dans ma réponse du 21/9 (dont l’entête comporte 11/9 au lieu de 21/9).

Mais tant le 8/12 que le 18/12, vous changez les termes de ma 2e question, ce qui embrouille les choses au lieu de les clarifier.

Je vais donc vous la poser à nouveau sous une forme un peu différente, en vous demandant d’y répondre le plus brièvement possible et surtout en conservant les termes mêmes de ma question (par ex. : en ne transformant pas “dépend de” en “implique”), et de plus sans recourir à une formulation mathématique :

“Une hérésie (formelle) publique est-elle un fait objectif ou bien le caractère formel et public de l’hérésie dépend-il d’une déclaration que l’on en ferait ? ”

Plus votre réponse sera claire et concise (en collant au texte même de la question), et plus elle me permettra de répondre clairement à votre lettre du 17/9.

D’avance, je vous en remercie.

Salutations en Jésus et Marie.
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Abbé Zins
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Re: Controverse Georges Salet - Abbé V.M. Zins (8/1986 - 5/1

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le 3 Janvier 1988

Georges SALET
en vacances

Monsieur l'Abbé

Je suis depuis Noël à Villers sur mer et j'ai profité d'une relative période de liberté pour parcourir les N° de "Sub tuum" que vous avez bien voulu m'adresser et que je n'avais pu examiner jusqu'ici.

J'ai parcouru notamment ce que vous avez écrit sur les publications de "Michel Martin" et ses idées.

Vous avez tenu à souligner quelle avait été mon action en ce qui concerne la "liberté religieuse" et je vous en remercie.

Vous êtes, par contre, beaucoup plus critique sur d'autres de mes travaux et c'est votre droit. Je vous reconnais, en effet, le droit absolu de dire ce que vous pensez sur tout ce que j'ai publié, en l'agrémentant même de jugements sur mon compte dont je ne me formalise aucunement.

(Sous la réserve, évidemment, que vous me citiez exactement et avec toutes les références nécessaires ce que vous avez fait, du moins il me semble.)

Il doit être bien entendu, par contre, que vous ne publierez absolument rien des lettres que je vous adresse et ceci pour trois raisons évidentes.

Le lecteur peut toujours, lorsqu'il est devant une critique de textes publiés, se reporter à ces textes s'il juge nécessaire de remettre les choses dans un contexte plus étendu. Ce n'est évidemment pas possible lorsqu'il s'agit d'une lettre dont il ne peut avoir connaissance que par les extraits que vous en donnez.

Ce que j'écris dans les lettres que je vous adresse suppose que vous avez déjà connaissance de certaines choses dites antérieurement par moi oralement ou par écrit.

Lorsque je publie un article, je m'efforce qu'il fasse un tout. Je n'ai pas le même souci dans une lettre. J'y écris plus rapidement et sans donner de détails souvent nécessaires à une exacte compréhension de ma pensée.

Il doit donc être entendu que vous ne devez ni citer, ni même mentionner les lettres que je vous adresse. Ceci vaut, évidemment, pour tout ce que je vous ai écrit sur le "sophisme de Saint Bellarmin" et que je compte publier avec beaucoup plus de détails en l'appelant "le sophisme du depositus est". (ce qui ne m'empêchera pas de parler de Saint Bellarmin).

Je me plais à reconnaître que dans vos articles, vous n'avez pas trahi la pensée exprimée dans mes lettres mais enfin, vous les avez quand même mentionnées et ce que vous disiez sur elles était à la limite. Et c'est pour éviter tout incident entre nous que je vous demande de respecter la règle suivante :

1. Liberté totale de dire tout ce que vous voudrez sur ce que je publie (sous réserve, évidemment, de ne pas tomber dans une critique malhonnête que la loi civile elle-même réprouve et sanctionne.)

2. Aucune liberté pour critiquer ou citer ce que je vous écris dans mes lettres dont la destination est privée et destinée uniquement à une recherche commune de la vérité.
Je pense que vous êtes d'accord sur ces deux points. [ (1) ]


[ (1) ] De fait, cet échange, mentionné dans un n° de STP auquel G. Salet fait allusion là, n’avait été jusqu’ici ni cité ni publié, pas même partiellement. Vue sa longueur, il ne l’aurait sans doute jamais été, au moins par moi de mon vivant, sans ce nouveau moyen d’internet.
Sa publication intégrale réduit en outre à rien le principal inconvénient souligné par mon correspondant, à savoir l’impossibilité de remettre tel extrait en son contexte. Elle respecte donc ce que le Professeur Salet précisait quant à une publication intégrale formant précisément un tout : Le lecteur peut toujours, lorsqu'il est devant une critique de textes publiés, se reporter à ces textes s'il juge nécessaire de remettre les choses dans un contexte plus étendu.
En outre, il s’agit là d’un débat purement doctrinal, ne mettant en cause aucune personne privée et ne lésant donc quiconque.]


Je rentre à Versailles le 12 ou le 13 Janvier et je vais probablement trouver à mon retour un amoncellement de lettres de voeux auxquelles il va me falloir répondre ce qui va retarder encore le travail utile. Mais enfin, je me dis que nous sommes tous "des serviteurs inutiles" et que la simple laveuse de vaisselle qui exécute sa tâche obscure par amour travaille tout aussi efficacement, et peut-être même beaucoup plus, au règne de Jésus-Christ et au salut des âmes que les "intellectuels" comme nous.

Je cède cependant à la coutume en vous adressant tous mes voeux pour une année qui sera certainement très dure.

N. B.
Vous m'avez adressé les 10 premiers numéros de "Sub Tuum" à l'exception des numéros 1 et 4. Je serai heureux de les recevoir si vous en avez encore. Je ne vous assure pas du tout que je les lirai mais je n'aime pas les trous dans les collections.

Il est entendu que je continue à vous adresser "de Rome..." en échange de "Sub tuum".
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Abbé Zins
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Re: Controverse Georges Salet - Abbé V.M. Zins (8/1986 - 5/1

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Abbé ZINS
TOURS

à M. Georges SALET
Versailles

Vigile de l'Epiphanie Mardi 5 janvier 1988

Monsieur,

Dans l'ensemble, votre attitude m'est décidément sympathique.

Publier vos lettres, bien différentes des mots très courts de F. Mc. Kenna qui s'y prêtaient très bien, n'est guère envisageable du fait de leur longueur, et de plus de leur nombre. [ (1) ]


[ (1) Ce qui n’avait point été fait jusqu’ici, et ne l’aurait sans doute jamais été (au moins par moi-même) sans l’opportunité présente offerte par “internet” et ces publics “forum” ou “tribunes”. De plus, la présente publication “in extenso” réduit à rien l’inconvénient mis ici en avant d’explications partielles qui seraient tirées de leur contexte. ]


Néanmoins, je ne vois pas de faute à en citer des passages précis qui peuvent confirmer, développer et expliciter vos écrits publics plus succincts, pour autant que je ne fais point dire à ces passages autre chose que ce que vous y exprimez vraiment, comme vous avez eu l'amabilité et l'objectivité de le déclarer dans votre lettre du 3/1/1988.


En vous écrivant, j'ai conscience de m'adresser à un directeur de Bulletin, et je suppose qu'il en est de même pour vous à mon endroit.

Votre lettre me laisse supposer que vous n'aviez point encore reçu mon mot du 29/12/87 vous exprimant mes voeux et vous reposant ma 2e. question sous une autre forme ; ou bien que vous avez voulu me faire comprendre que vous remettiez à plus tard votre réponse, en raison des nombreuses lettres de voeux à faire.

Il vous est sans doute pénible que je vous repose trois fois la même question, mais il me semble qu'il en a été ainsi parce que nous n'avons pas la même conception de ce qu'est l'hérésie formelle.

La conception catholique que je fais mienne est exprimée en "Sub Tuum" n° 3 p.12-14.

Votre réponse précise à ma 2e. question telle qu'elle est formulée dans mon mot du 29/12, mieux encore avec votre définition de ce qu'est l'hérésie formelle, de ce qui fait qu'elle est formelle, me permettra une réponse précise à l'argumentation de votre lettre du 17/9/87.

Avant d'en publier la teneur dans un article sur le soi-disant "sophisme du depositus est", il me semble que vous devriez étudier de plus près ma réponse sur le plan théologique dans le n° 10 de S.T., et la réponse que je vais vous faire sur le plan mathématique dès que j'aurai votre réponse à ma 2e. question.

Car votre réponse précise à ma lère question va me permettre de vous montrer plus facilement votre erreur, même sur le plan mathématique, dans votre tentative de démonstration d'un sophisme chez saint Robert.

Et pour ne point vous paraître présomptueux et vous inviter plus fortement à avoir la sagesse d'attendre cette réponse sur le plan mathématique (qui correspond évidemment à celle fondée sur la théologie) avant de publier à ce sujet, je puis déjà vous dire que j'ai suivi votre conseil en consultant, non pas un élève de seconde C, mais un étudiant de math spe qui lui-même a consulté un professeur agrégé en mathématique, lesquels sont tous deux d'avis que l'erreur de raisonnement (sous sa forme mathématique) est de votre côté et non dans la réponse que je vais vous faire sur ce 1er. point et que je leur ai déjà soumises.

Comme je ne vous demande qu'une réponse succincte et très précise à ma 2e. question, elle ne devrait guère vous prendre de temps si votre conception est déjà claire et précise sur ce 2e. point. Comme c'est mon cas, je ne serai pas long à vous répondre dès que j'aurai l'ultime précision que je vous demande, ce qui donc, à moins d'un retard de votre côté, ne retardera point la publication que vous envisagez.

Que Dieu fasse triompher la Vérité en nos intelligences et la Charité en nos coeurs.

P.S.: Erratum : Dans l'entête de ma lettre du 21/9, il faut lire 21/9 et non 11/9.
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Re: Controverse Georges Salet - Abbé V.M. Zins (8/1986 - 5/1

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Georges SALET
à VERSAILLES

16 Février 1988

Monsieur l'Abbé,

Veuillez m’excuser de n’avoir pas encore répondu à vos dernières lettres. Vous en trouverez la raison dans le N° “de Rome...” que vous recevrez en même temps que cette lettre.

Mon ami et collaborateur H. Le Caron est mort le 13 janvier dans les circonstances que j’explique.

Cela m’a considérablement affecté et a engendré chez moi une dépression nerveuse qui sera sans doute momentanée.. Mais on m’a ordonné le repos. J’ai tenu cependant à commencer le long dernier numéro consacré tout entier à l’affaire de “l’Action française”.

Priez pour ma santé mais on me fait remarquer que j’aurai 81 ans en avril et que je dois comprendre (ce qu’effectivement je comprends mal) que je ne suis plus un jeune homme !!

Cependant, je vous assure que je vous répondrai. J’ai un très solide fond de santé et je suis persuadé que cette (faible) dépression ne sera que momentanée.

Bien que je sois privé de la collaboration de H. Le Caron, je n’en ai pas moins tous les moyens de continuer ma publication et c’est surtout la perte d’un ami très très cher qui m’affecte.

Mais j’ai la conscience très nette qu’il m’aidera du haut du Ciel auquel il accède dorénavant, ayant fait un acte de total abandon à la volonté de Dieu.

Ayez donc un peu de patience et je reprendrai notre dialogue le plus tôt possible.

Salutations amicales respectueuses.
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Re: Controverse Georges Salet - Abbé V.M. Zins (8/1986 - 5/1

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le 2 Avril 1988

Georges SALET
à VERSAILLES

Monsieur l'Abbé,

Comme je vous le disais dans une lettre écrite rapidement en Février, j'ai été très fatigué après la mort de mon ami et collaborateur Le Caron de Choc-gueuse. Je supppose que vous avez bien reçu cette lettre.

Je reçois ici à Villers où je suis pour une quinzaine le N° 11 de votre "Sub Tuum" et je vois que vous y parlez beaucoup du "Una cum".

Bien que je ne sois pas un latiniste chevronné, il me semble que la traduction que vous donnez p. 8 est bonne mais, comme cela est habituel chez vous, vous faites une erreur de raisonnement dans les conséquences que vous en tirez. Vous écrivez, en effet p. 11 :

"Nommer J.P. II au Canon de la messe revient à manifester extérieurement et solennellement
1 - qu'on le tient pour Pape
2 - bien pensant et professant la foi catholique venant des Apôtres
3 - C'est le reconnaître et proclamer publiquement Chef de l'Eglise Catholique, Vicaire du Christ,
4 - avec tout ce qui en découle."


D'accord sur 1 et sur 3 mais pas sur 2. (Votre proposition 4 est ambiguë mais passons.)

Votre traduction ne fait que confirmer ce que j'ai toujours soutenu : Le "Una cum" signifie uniquement qu'avec le Pape, (on reconnaît donc bien que J. P. II est le Pape), on demande à Dieu "d'agréer et de bénir ces dons ...... en premier pour votre sainte Eglise Catholique " et pas le moins du monde de se déclarer en union avec ses erreurs.

2 ne se déduirait de 1 que si l'Eglise enseignait que le Pape ne peut jamais errer publiquement dans la foi. Je répète alors ce que j'ai écrit de nombreuses fois et sur lequel je ne vois vraiment aucune raison de revenir.

En énumérant des conditions à l'infaillibilité pontificale, le premier Concile du Vatican a proclamé du même coup qu'un pape peut errer publiquement dans la foi lorsqu'il enseigne sans se placer dans les conditions de l'infaillibilité.

Certes, le "Una cum" est incompatible avec le "Sedevacantisme" mais nullement avec la triste réalité d'un Pape qui trahit gravement les devoirs de sa charge dont le premier est de confirmer ses frères dans la foi.


Vous me demandez depuis déjà un certain temps de vous dire ce que je pense être l'hérésie publique formelle.

Je ne vous répondrai pas encore aujourd'hui pour trois raisons :

1) Dans votre lettre du 5 Janvier 88, vous ne me donnez votre accord pour ne rien publier de mes lettres que du bout des lèvres. Je ne pense pas avoir rien inventé sur la question de l'hérésie formelle mais tant que vous ne m'aurez pas fait clairement la promesse que je vous ai demandée, je ne vous répondrai que lorsque j'aurai eu le loisir de rechercher des définitions précises d'auteurs incontestables.

Je ne pense pas que l'aboutissement de cette recherche modifie le fond de ma réponse mais il peut en modifier la lettre. Comme l'expérience m'a montré que vous lisez rapidement, il serait donc possible que, de très bonne foi je le précise, vous me compreniez mal et rapportiez inexactement ma pensée. Comme il s'agit là d'une question fondamentale, je préfère donc me couvrir d'une autorité incontestable. Je répète que je ne vous soupçonne en aucune manière de malhonnêteté intellectuelle mais il pourrait fort bien y avoir entre nous un malentendu, ne serait-ce que parce que je ne me serais pas expliqué assez clairement.

2) Tout ce que je lis de vous m'ancre dans l'idée que, comme je vous l'ai déjà dit à maintes reprises, ce qui pêche chez vous, c'est la rigueur du raisonnement. Je n'ai fait que parcourir votre N° 11 dans lequel vous m'en donnez un nouvel exemple.
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Re: Controverse Georges Salet - Abbé V.M. Zins (8/1986 - 5/1

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Suite L GS du 2 Avril 1988

Vous écrivez sur moi à la page 40 sous le titre : Michel Martin chancelant ! (chancelant !)

Après avoir cité une partie ce que j'ai écrit dans le "In memoriam" consacré à mon ami Le Caron (en passant sous silence la double coïncidence de la date du 18 Janvier), vous écrivez :
"C'est la débâcle" !!!

Vous m'attribuez ensuite gratuitement des intentions qui ne sont pas les miennes et vous poursuivez en faisant une erreur de raisonnement. Commençons par ce dernier point. Vous écrivez :

"Il semble que la Providence en ait assez des positions "entre deux chaises" et qu'Elle oblige peu à peu chacun à choisir son camp : celui de Jésus crucifié ou celui des crucificateurs...."

Ainsi, selon vous, assister à la nouvelle messe, c'est se placer dans le camp des crucificateurs !

Alors, voudriez-vous répondre à ceci : On m'a appris que la Messe est le renouvellement du sacrifice de la Croix ; bien entendu, il s'agit des messes valides mais je suppose que vous admettez que la nouvelle messe, si mauvaise et si ambigue soit-elle, est valide dès lors qu'elle est dite par un prêtre qui veut faire ce que veut l'Eglise, ce qui est généralement le cas.

La nouvelle messe, aux conditions que je viens d'indiquer, si mauvaise et ambiguë soit-elle, n'est donc pas, comme les protestants et les "conciliaires" l'enseignent, un mémorial du Sacrifice du Calvaire mais son RENOUVELLEMENT.

Vous êtes, je le sais, d'accord avec moi sur tout cela.

Vous prétendez qu'y assister, c'est se placer dans le "camp des crucificateurs". La logique veut alors que vous disiez que la Vierge et Saint Jean qui ont assisté au Sacrifice du Calvaire, s'étaient placés dans le camp des crucificateurs. Vous devriez donc les condamner et déclarer que ceux qui ont eu raison, ce sont les autres Apôtres qui ont préféré s'enfuir.
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Re: Controverse Georges Salet - Abbé V.M. Zins (8/1986 - 5/1

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Suite L GS du 2 Avril 1988

Passons maintenant à ce que vous prétendez que je veux dire "entre les lignes" : "Si Mgr. Lefebvre sacre des évêques sans l'accord de J.P. II, je n'assisterai plus aux messes célébrées par les prêtres qui le suivront dans ce schisme ...etc."

Sachez que je vais à la messe pour deux raisons :

- Le dimanche parce que l'assistance à la messe est un précepte.
- Pour recevoir les sacrements.

Je ne vais pas aux messes dites par des prêtres farfelus pour lesquels j'ai un doute qu'ils veuillent faire ce que veut l'Eglise mais je vais, selon mes possibilités, aux autres messes avec, certes, une préférence pour celles de Saint Pie V dites par des prêtres en règle avec la Hiérarchie. (Je n'ai pas besoin, je pense, de répéter ce que j'ai dit longuement dans mon N° 54 sur l'indult de Saint Pie V, etc.)

Ceci dit, je n'ignore pas que le schisme et l'hérésie ne font pas perdre le pouvoir d'ordre. Je n'éviterais donc pas, par principe, comme vous le prétendez, les messes dites par les prêtres de Mgr. Lefebvre s'il sacrait irrégulièrement des évêques mais j'éviterais d'assister à celles dites par les deux ou trois prêtres de cette communauté qui m'ont adressé des lettres d'injure (sauf s'ils m'en manifestaient un regret).


En conclusion, vous avez fait, en ce qui concerne mon attitude sur la messe, une erreur théologique et un jugement téméraire à mon endroit. Je ne vous en veux nullement mais je me demande si vous ne seriez pas devenu un peu sectaire comme le sont devenus certains prêtres de Mgr. Lefebvre qui se sont indignés que, pour les raisons que j'ai longuement exposées dans mon "In memoriam", un homme comme lui qui combattait depuis 25 ans pour la vraie foi, (cf. son dernier livre "Dieu est il antisémite ?" publié aux Editions "Fideliter") ait eu des obsèques dans sa paroisse et non pas à St. Nicolas du Chardonnet.

Ayant toujours le préjugé favorable, je suppose que vous n'avez pas un tel sectarisme mais ce que vous avez écrit dans votre dernier numéro me fait craindre que je ne me trompe.
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Re: Controverse Georges Salet - Abbé V.M. Zins (8/1986 - 5/1

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Suite et fin de la L GS du 2 Avril 1988

3) Vous écrivez dans votre lettre du 5 Janvier 1988 :

"Votre réponse précise ...... va me permettre de vous montrer plus facilement votre erreur, même sur le plan mathématique (souligné par vous) dans votre tentative de démonstration d'un sophisme chez saint Robert."

Permettez moi alors de parler comme St. Paul dans sa Deuxième Épître aux Corinthiens :

"Ce que je vais dire au sujet de mes titres de gloire, je ne le dis pas selon le Seigneur mais comme si j'étais en état de folie. Puisque tant de gens se glorifient selon la chair, je me glorifierai aussi" (XI-17)
"Cependant, de quoi que ce soit qu'on ose se vanter - je parle en insensé - moi aussi je l'ose.
Sont-ils ministres du Christ ? Ah je vais parler en homme qui extravague, je le suis plus qu'eux" (XI-21, puis 23)


Alors, je dirai de même :

Sont-ils mathématiciens ? Ah je vais parler en homme qui extravague, je le suis plus qu'eux. je suis sorti de l'Ecole Polytechnique dans les premiers ; toute ma carrière dans le corps du Génie Maritime qui conçoit et construit les navires de guerre (et que j'ai quitté avec le rang d'Amiral) a consisté à faire des recherches nécessitant l'utilisation constante de l'outil mathématique ; mes travaux, du moins ceux qui n'étaient pas couverts par le secret militaire, m'ont valu de nombreuses récompenses dont un prix de l'Académie des Sciences ; ils sont connus sur le plan international et c'est la raison pour laquelle on a créé pour moi une chaire d'enseignement dans l'enseignement supérieur.

J'admets fort bien que vous contestiez mes positions théologiques et ceci pour la double raison que la Théologie est une science difficile et que, en cette matière, je suis "autodidacte". Les théologiens professionnels eux-mêmes sont divisés sur bien des questions et vous savez comme moi que tant que l'Eglise ne s'est pas prononcée infailliblement, certaines questions restent libres.

Mais sur le plan mathématique, les questions que vous m'avez posées dans vos diverses lettres me montrent avec évidence que vous n'y comprendrez jamais rien. Cela n'a rien de déshonorant et c'était le cas d'un esprit aussi éminent que l'Abbé Dulac que j'ai intimement connu. Mais lui ne prétendait pas me donner de leçons en matière mathématique et scientifique.

Il est vrai que vous me dites avoir consulté un étudiant en Mat. Sp. et un professeur agrégé qui, dites vous, vous auraient donné raison contre moi.

Je ne mets pas en doute leur compétence sur le plan mathématique mais le seul fait que vous vouliez attendre ma définition de l'hérésie formelle pour me faire part de mon erreur sur le plan mathématique me confirme que vous n'avez toujours pas saisi en quoi consiste le sophisme du "Depositus est".

Une erreur de ma part sur le plan mathématique serait tout à fait indépendante du contenu des propositions que j'ai appelées A, B, etc. Si alors, comme vous le prétendez, votre professeur agrégé estime que j'ai commis une erreur sur le plan mathématique, demandez lui de bien vouloir l'exposer dans un écrit mathématique signé de lui et dans lequel il ne sera question que des signes "implique", de propositions A, B, etc. sans la moindre allusion au contenu de ces propositions. Adressez moi alors ce document et, si j'y trouvais une erreur, j'entrerais en rapport avec lui et soyez bien certain que nous nous mettrions vite d'accord ..... sur votre dos ! Car il est sans exemple qu'il y ait jamais eu une véritable divergence entre deux mathématiciens compétents sur la rigueur d'une démonstration mathématique.

Je ne suis pas pressé d'avoir ce document car j'ai des articles plus urgents à écrire, notamment la réfutation de la nouvelle position du Père de Blignières. Mais un article beaucoup plus étoffé que ce que je vous ai écrit à titre privé sur le "Sophisme du Depositus est" et sur l'hérésie des Papes est toujours dans mes projets.
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Abbé Zins
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Re: Controverse Georges Salet - Abbé V.M. Zins (8/1986 - 5/1

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Abbé Zins à Tours
Jeudi en l'Octave de Pâques
7 avril 1988

à Monsieur Georges Salet

Monsieur,

Le ton de votre lettre du 2 avril m'est, comme celui des précédentes, fort sympathique.
Je note votre façon de voir concernant l'assistance à la synaxe conciliaire, qui est beaucoup plus grave que celle que j'ai exposée comme possible à mes lecteurs, en l'introduisant par : "cela semble vouloir dire" etc.

Voyez-vous, la synaxe conciliaire que vous nommez "nouvelle messe" ressemble beaucoup à celle de Cramer ou anglicane : or, après du reste le Pape de l'époque, Léon XIII a démontré que ce rite anglican [ (1) ] était invalide.

En appliquant les principes énoncés ou plutôt rappelés dans son Encyclique "Apostolicae Curae", on arrive à la même conclusion en ce qui concerne la synaxe conciliaire.

Mais tel n'est point notre propos d'en débattre à présent, ce qui nous disperserait davantage, et cela devant être étudié dans une des futures séries de Sub Tuum, s'il plaît à Dieu.


[ (1) ] Concernant les sacres, mais les principes de démonstration sont pareillement applicables à la fausse Cène anglicane.
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