Martyrs du Japon (Saint Alphonse)

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Abbé Zins
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Martyrs du Japon (Saint Alphonse)

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Saint Alphonse-Marie de Liguori a écrit :
Martyrs du Japon

Avertissement


Je joins ici les victoires des martyrs qui, dans les îles du Japon, ont souffert la mort en confessant leur foi en Jésus-Christ. J'ai choisi, dans leur histoire, les traits les plus héroïques et les plus admirables par lesquels ils ont signalé leur zèle pour la religion chrétienne. J'espère que mes amis lecteurs seront très satisfaits de voir, au milieu d'une nation barbare, tant de fidèles chrétiens, hommes, femmes, enfants, vieillards, dès qu'ils eurent embrassé la foi, rechercher avec avidité l'avantage de mourir pour Jésus-Christ, et témoigner leur joie de souffrir pour lui les plus cruels tourments.

Pour me conformer au décret d'Urbain VIII je déclare qu'en donnant dans cet ouvrage le nom de saint ou de martyr à quelque serviteur de Dieu, je n'entends l'appeler ainsi que selon la foi humaine, puisqu'il est réservé à l'Eglise de décerner ces titres d'autorité divine, quand il plaira au Seigneur.



Note :

(....)

Ce fut le 15 août 1549 que saint François Xavier aborda le Japon, pour y prêcher Jésus-Christ. Quarante ans après, on y voyait un grand nombre de serviteurs du vrai Dieu dans toutes les conditions, principalement dans la noblesse, et jusque sur le trône ; la religion chrétienne était dominante dans plusieurs royaumes ; en sorte que, vers le commencement du XVIIe siècle, suivant les meilleurs auteurs, l'Eglise du Japon pouvait compter environ deux millions de fidèles.

LE TRADUCTEUR
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Abbé Zins
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Saint Alphonse-Marie de Liguori a écrit :
Martyrs du Japon

CROIX MIRACULEUSE TROUVÉE PRÈS D'ARIMA. PERSÉCUTION DANS LE
ROYAUME DE BUNGO. JORAM MACAMA. COURAGE DES CHRÉTIENS.
1586-1589.



Nos prêtres européens qui entreprirent d'évangéliser le Japon, eurent d'abord un heureux succès ; mais, dès l'année 1586, Dieu fit connaître par plusieurs signes l'approche de la longue et sanglante persécution qui menaçait cette Eglise naissante. Entre autres présages, le suivant est particulièrement remarquable.

Le roi d'Arima, nommé Protais, bon et zélé chrétien, eut une vision dans laquelle lui apparurent deux personnages d'un extérieur céleste, qui lui adressèrent ces paroles :

« Sachez que, sur les terres de votre domination, se trouve le signe de Jésus ; honorez-le et aimez-le beaucoup, car il n'est point l'ouvrage des hommes.»

Six mois après, Il arriva qu'un chrétien fervent nommé Léon, des environs d'Arima, envoya son fils Michel à la forêt, couper du bois à brûler. En arrivant, le jeune homme aperçut un arbre comme desséché, de l'espèce de ceux que, dans le pays, on appelle Tara ; il l'abat, le fend en deux et trouve, comme incrustée au milieu, une croix de couleur brune et d'une forme régulière. A la vue de ce prodige, tout le monde fut frappé d'étonnement.

Dès que le roi en eut connaissance, il se rendit lui-même sur les lieux, et, en voyant cette croix, il s'écria : « Voilà le signe de Jésus, qu'on m'a dit caché sur mes domaines, et qui n'a point été fait de main d'homme.»

Ensuite, il se mit à genoux, et, après l'avoir vénérée en versant des larmes, il la fit transporter à Arima, où, par ses ordres, elle fut encadrée sous une superbe glace. Cette croix miraculeuse opéra la conversion de vingt mille habitants du pays.


(*) Protais était son nom de baptême, et il prit le nom de Jean en recevant la Confirmation. On verra sa mort héroïque au § 7.

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Abbé Zins
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Saint Alphonse-Marie de Liguori a écrit :
Mais venons aux martyrs. La persécution, commencée par l'empereur en 1587, devint sanglante, environ trois ans après, dans le royaume chrétien de Bungo ; et la première victoire que j'y trouve décrite, est celle du bon vieillard de Funaï, appelé Joram Macama.

Il était soldat lorsqu'il embrassa le christianisme, et il avait ensuite converti toute sa famille ; depuis, il travaillait à instruire les païens et à aider les fidèles. Le roi de Bungo, ayant apostasié, ordonna à trois de ses officiers de le faire mourir.

Ils allèrent le trouver ; mais redoutant la valeur dont Joram avait fait preuve à la guerre, ils prirent avec eux, pour leur sûreté, une escorte de cent hommes. Prévenu de leur arrivée, Joram prit congé de sa femme et de ses enfants, les envoya dans une autre résidence, et resta seul dans sa maison, où il se prépara à la mort ; il ne voulut pas même garder près de lui son épée ; et la nuit dans laquelle il devait être tué, il l'employa tout entière à prier devant un crucifix.

Vers minuit les soldats s'approchèrent de la maison pour voir s'il était en armes ; le saint vieillard, qui les aperçut, leur dit de ne rien craindre, parce que, loin de les fuir, il les attendait.

Aussitôt il prit une croix en main, se passa un chapelet au cou, et se mit à genoux, rendant grâces à Dieu qui le faisait mourir pour son nom, et remerciant les soldats eux-mêmes qui, par la mort qu'ils allaient lui donner, lui procuraient une félicité éternelle ; ensuite après avoir reçu trois coups dans la poitrine, il présenta sa tête, en prononçant les noms de Jésus et de Marie, et trois coups de cimeterre lui ôtèrent la vie.

Les fidèles s'empressèrent d'enlever son corps et de l'ensevelir ; ce qui mit le roi dans une telle fureur, qu'il fit mourir sa femme et ses enfants, et beaucoup d'autres chrétiens.
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Abbé Zins
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Saint Alphonse-Marie de Liguori a écrit :
II. PERSÉCUTION EXERCÉE PAR L'EMPEREUR TAICOSAMA. BEAU ZÈLE DES CHRÉTIENS.

VINGT-SIX MARTYRS CRUCIFIÉS A NANGASAKI.



Les premiers actes de cruauté du tyran jetèrent l'épouvante parmi tous les chrétiens ; cependant, lorsqu'ils apprirent la mort généreuse de Joram et des autres fidèles, spécialement celle d'un autre chrétien zélé, nommé Joachim, supplicié aussi par ordre du roi, au lieu de se laisser abattre, ils parurent en public avec un chapelet au cou, témoignant par là que, loin de redouter la mort, ils la désiraient.

Une dame du nom de Marie, à qui le roi, avant son apostasie, avait fait présent d'un chapelet, eut le courage de le porter sous ses yeux dans le palais même ; et comme le prince lui en demandait la raison : « Seigneur, répondit-elle, c'est Votre Majesté qui m'a donné ce chapelet, et je me glorifie de le porter. »

Voyant donc les fidèles, résolus à mourir, et craignant quelque trouble, le tyran prit le parti de dissimuler pour le moment la haine qu'il leur avait vouée, se promettant d'en tirer vengeance en temps plus opportun.
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Abbé Zins
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Saint Alphonse-Marie de Liguori a écrit :
II. PERSÉCUTION EXERCÉE PAR L'EMPEREUR TAICOSAMA. BEAU ZÈLE DES CHRÉTIENS.

VINGT-SIX MARTYRS CRUCIFIÉS A NANGASAKI.



Taïcosama, parvenu au trône impérial en 1582, favorisa d'abord les missionnaires ; mais, quatre ou cinq ans après, ayant conçu de la défiance et de l'aversion contre eux, il porta un édit qui proscrivait la religion chrétienne dans tout l'empire. Cependant il n'en vint pas dès lors aux derniers excès ; durant plusieurs années, il se contenta d'interdire toute manifestation religieuse, et la foi continua de se propager sans éclat.

En 1596, le 9 décembre, excité de nouveau contre les serviteurs du vrai Dieu, l'empereur donna ordre au gouverneur de Méaco et à celui d'Ozaca, où les religieux de Saint-François s'étaient établis, d'arrêter ces Pères, et de dresser une liste des chrétiens qui fréquentaient les églises.

Voici ce que le père Pierre-Baptiste, supérieur des Franciscains, écrivit alors à un religieux de son Ordre :

« Le premier jour qu'on nous donna des gardes, les chrétiens se confessèrent et passèrent toute la nuit en prière ; on nous avait assuré que nous devions être mis à mort le lendemain. Je donnai la communion à tous nos frères comme pour la dernière fois. Chacun se pourvut ensuite d'une croix, pour la porter à la main en allant au supplice. Nos chrétiens me ravissent le coeur par le désir ardent qu'ils ont de mourir pour Jésus-Christ ; à la nouvelle que ceux-ci étaient condamnés à mort, beaucoup d'autres sont venus de divers endroits pour s'unir à eux. Il faut mourir un jour ; nous désirons tous que ce soit pour la gloire de Dieu, et nous le prions de nous en faire la grâce ; aidez-nous à l'obtenir de sa divine bonté.»

On vit en cette circonstance une foule de traits admirables dont nous citerons quelques-uns. Le prince Juste Ucondono, était un illustre général que Taïcosama, qui lui devait l'empire, avait dépouillé de ses biens et de ses dignités pour avoir refusé d'abjurer la foi, depuis dix ans déjà il vivait dans l'exil avec son vieux père, sa femme, et sa nombreuse famille, tous s'estimant heureux de souffrir pour Jésus-Christ.

Au bruit de la persécution, il alla prendre congé du roi de Canga, sous la surveillance duquel il était placé, et dont il s'était fait un ami par l'ascendant de sa vertu. Celui-ci lui assura que la cour ne pensait pas à lui ; mais le noble Ucondono répondit : « Mon prince, le plus grand bonheur que je puisse avoir en ce monde, c'est de mourir pour la foi que je professe. Quelles que soient les assurances que vous me donnez, je vais me préparer à la mort.» Et il partit aussitôt pour Méaco.
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Abbé Zins
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Saint Alphonse-Marie de Liguori a écrit :
II. PERSÉCUTION EXERCÉE PAR L'EMPEREUR TAICOSAMA. BEAU ZÈLE DES CHRÉTIENS.

VINGT-SIX MARTYRS CRUCIFIÉS A NANGASAKI.



La ferveur des deux fils de Genifonio, qui était païen et premier ministre de l'empereur, et qui ignorait que ses fils eussent reçu le baptême, ne fut pas moins grande que celle du prince Juste Ucondono.

L'aîné, âgé de vingt ans, se nommait Paul Sacondono. Il jouissait des bonnes grâces de l'empereur, et commandait une forteresse éloignée de la capitale. Ayant ouï dire que tous les Pères, ainsi que l'évêque, étaient arrêtés, et qu'on allait mettre à mort tous les chrétiens, il expédia sur-le-champ deux courriers, l'un à Méaco et l'autre à Ozaca, pour s'assurer de la vérité. En attendant, il se mit à chercher le moyen le plus propre pour arriver au martyre.

Il pensa d'abord à se montrer en public dans la capitale, pour être saisi ; mais, craignant que personne n'osât mettre la main sur lui, si on le voyait dans son costume ordinaire, il se fit couper les cheveux et se déguisa en ecclésiastique, résolu de paraître ainsi avec huit de ses serviteurs chrétiens et fidèles.

Un seul d'entre eux donnait lieu à quelque doute sur sa constance, parce qu'il était baptisé depuis peu ; Sacondono lui conseilla de ne pas s'exposer avec les autres ; mais il répondit généreusement : « Seigneur, je sais bien ce que vaut le salut éternel de mon âme ; puisque le martyre est le plus court chemin pour y arriver, je le préfère, et je ne fais pas plus de cas de cette vie que de la poussière de mes pieds.»

Satisfait de cette réponse, le jeune seigneur se retira dans son cabinet, et là, prosterné à terre, il pria Dieu avec ferveur de le rendre digne de mourir pour son amour; puis, il écrivit à ses parents, pour leur apprendre qu'il était chrétien, et qu'il avait pris la résolution de mourir pour sa foi. Dans cette disposition, il fit une confession générale, et se prépara à la mort.

Son frère se nommait Constantin. Il arrivait à Méaco avec un de ses cousins, appelé Michel, lorsqu'on y reçut la nouvelle fatale ; il s'écria : « Oh! comme nous sommes venus à temps pour être martyrs ! » Il se rendit aussitôt à Fucimo auprès de son père, et lui déclara qu'il était chrétien. Le ministre, qui aimait tendrement son fils, fut stupéfait ; il le prit à part, et lui dit : « Mais, mon fils, si l'empereur me commande de mettre à mort tous les chrétiens, il faudra donc que je vous fasse mourir avec eux ? »

Constantin répondit : « Mon père, je vous ai déclaré que je suis chrétien, non pour éviter la mort, mais afin que régliez vos intérêts. Pour moi, je suis prêt à mourir par la main des bourreaux, et même par la vôtre, plutôt que de désobéir à Dieu ; vous ne voulez pas, je pense, que je me précipite en enfer pour plaire au prince.»

Genifonio communiqua ce sujet d'affliction à sa femme, et tous deux s'abandonnèrent à la plus vive douleur. Survint alors Michel auprès de sa tante désolée, qui le supplia de persuader à Constantin de ne pas courir à une mort si prématurée. Mais l'un et l'autre s'en retournèrent à Méaco, pour y trouver l'occasion d'être inscrits sur la liste des martyrs.

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Abbé Zins
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II. PERSÉCUTION EXERCÉE PAR L'EMPEREUR TAICOSAMA. BEAU ZÈLE DES CHRÉTIENS.

VINGT-SIX MARTYRS CRUCIFIÉS A NANGASAKI.



Dans ce même temps, deux autres gentilshommes vinrent aussi à Méaco, afin d'y sacrifier leur vie pour la foi ; et n'ayant pu obtenir ce qu'ils désiraient, ils prièrent leurs amis de les avertir , si un moment favorable se présentait.
Nous devons encore mentionner un gentilhomme de Bungo, nommé André Ongazavara, qui, après le martyre du bon Joram, dont nous avons parlé au paragraphe précédent, enleva de nuit la croix qu'il portait au cou. Depuis cette époque, il vivait retiré à Ozaca, avec son vieux père, sa femme et son jeune enfant. Lorsque ce brave chevalier apprit qu'on formait une liste de chrétiens destinés à la mort, non seulement il se prépara généreusement à mourir, mais il voulut encore y disposer son père, qui, parvenu à l'âge de quatre-vingts ans, n'était baptisé que depuis six mois. Il avait été toute sa vie un redoutable guerrier, et conservait encore sa verdeur. André l'exhorta donc à conquérir la palme du martyre, en l'avertissant qu'on l'obtient, non par la force des armes, mais par l'humilité et la patience.

« Mais, quoi ! s'écria là-dessus le vieux soldat ; un homme d'honneur peut-il se laisser tuer comme un lâche ? » André, comprenant que tout cet orgueil lui venait de son peu de connaissance des maximes chrétiennes, lui dit : « Mon cher père, vous avez donné trop de preuves de votre valeur, pour qu'on pense jamais à vous reprocher comme une lâcheté de donner votre vie sans défense pour Jésus-Christ. Toutefois, si cette manière d'agir ne vous plaît pas, retirez-vous au moins pour quelque temps à la campagne ; vous conserverez ainsi votre vie et votre honneur.» Encore plus indigné, il répliqua qu'il avait toujours été incapable d'une pareille bassesse, pire que la première, puisque c'était fuir pour sauver sa vie.

Mais André vit son but atteint par une autre voie ; car le bon vieillard passa alors tout ému dans l'appartement de sa belle-fille, qu'il trouva occupée à préparer ses habits de fête ; il s'aperçut en même temps que les domestiques prenaient leurs chapelets, leurs croix, leurs reliquaires.

Il demanda ce que cela signifiait, et on lui répondit d'un air joyeux que tous se disposaient à mourir pour Jésus-Christ. Ce peu de paroles et cet exemple firent une telle impression sur son esprit, que, renonçant aux maximes du monde, il prit aussi un chapelet, et dit qu'il voulait mourir avec eux.
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On vit également en cette circonstance la générosité de plusieurs dames chrétiennes de Méaco. Ayant appris que la persécution était déclarée, elles se réunirent chez l'une d'entre elles, nommée Marie, pour être toutes prêtes au martyre ; chacune avait eu soin d'apporter sa robe nuptiale, c'est-à-dire, celle avec laquelle elle voulait mourir. Il s'y trouvait une personne d'un rang très élevé, qui, craignant d'échapper aux poursuites de la justice, s'était rendue secrètement chez Marie pour aller à la mort avec les autres.

Marie avait auprès d'elle une petite fille adoptive, appelée Gratia, de l'âge de dix ans ; elle l'engagea à retourner chez son père, pour s'éloigner du danger d'être aaussicrucifiée ; mais l'enfant répondit avec fermeté : « Non ; je veux mourir avec vous, puisque je suis chrétienne. Ne craignez pas pour moi ; tant que je serai avec vous, je n'aurai pas peur de la mort.» Marie fut extrêmement consolée d'entendre de la bouche de sa chère enfant un langage, qui était un effet de la gràce.

Tout étant prêt, une de ces dames dit à ses compagnes : « Je suis résolue de mourir pour la foi ; mais je vous prie, si jamais vous me voyez trembler à l'aspect de la mort, je vous conjure de me traîner de force aux pieds des bourreaux, afin je ne manque pas d'avoir part à votre couronne.»

Telles étaient les dispositions de ces fervents néophyites, au moment où l'on croyait que tous les fidèles allaient être livrés au supplice de la croix ; mais, pour la plupart, le Ciel se contenta de leur bonne volonté. Le gouverneur Méaco, quoique païen, fit tout son possible pour adoucir les ordres sanguinaires dont l'empereur le chargeait, et il obtint enfin que le nombre des victimes fût réduit à vingt-quatre.

L'empereur avait commandé qu'on leur coupât le nez et les oreille s; mais le gouverneur ne leur fit couper que l'extrémité de l'oreille gauche ; ce qui fut exécuté 3 janvier 1597, sur la grande place de Méaco. Les vingt-quatre condamnés, placés ensuite sur huit charrettes, furent promenés ignominieusement par les rues de la ville, précédés d'un officier qui portait, au bout d'une pique, un écriteau sur lequel on lisait la sentence rendue contre eux, pour avoir prêché la loi chrétienne proscrite dans l'empire.
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Le peuple entier était ému jusqu'aux larmes, en voyant la modestie, la douceur, et la joie même, de tous ces prétendus criminels ; en sorte que leur humiliation se changeait en triomphe. Beaucoup de chrétiens allèrent jusqu'à supplier les soldats de les mettre au nombre des condamnés, pour mourir avec eux ; mais cette faveur leur fut refusée.

Quand les martyrs furent de retour à la prison, ils s'embrassèrent les uns les autres avec transport, se réjouissant de la bienheureuse mort qui les attendait ; ce qui saisit les gardes d'étonnement, et leur fit dire : « Quels sont ces hommes qui se réjouissent ainsi au milieu des tourments et des opprobres ? »

Le lendemain, 4 janvier, on les fit monter sur des bêtes de somme, pour les transporter à Nangasaki, lieu de leur supplice, où ils n'arrivèrent qu'un mois après. En passant par Ozaca et, Sacaïa, ils y furent donnés en spectacle au peuple, comme à Méaco ; mais l'effet fut encore tout opposé à celui qu'on voulait produire.

Dans ce long trajet, les rigueurs de la saison n'ajoutèrent pas peu aux souffrances de nos bienheureux ; néanmoins, elles n'empêchaient pas de nombreux fidèles de les accompagner, leur donnant partout des marques de sympathie et de vénération. Deux fervents chrétiens entre autres, Pierre Sukegiro et François Fahelenté, n'avaient pas cessé un instant de les suivre et de les assister dans leurs besoins avec un courage invincible.

Leur foi et leur charité furent dignement récompensées ; car les gardes, voyant que rien ne les rebutait, finirent par s'emparer d'eux, à leur grand contentement, et les retinrent avec les condamnés, en ajoutant leurs noms aux autres sur la liste ; c'est ainsi que le nombre des martyrs fut porté à vingt-six.
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Ils arrivèrent à Nangasaki le 4 février ; le lendemain, on les conduisit sur une colline située près de la ville, où l'on avait préparé les instruments du supplice. A la vue des croix qui les attendent sur leur Calvaire, ces courageux athlètes se livrent aux transports de la joie, et chacun d'eux se rend avec empressement à son poste.

Aussitôt, on les attache à leurs croix avec des cordes par les bras et les jambes et par le milieu du corps, selon l'usage du pays, on leur met un collier de fer, puis on les dresse simultanément et on les fixe en terre, tous sur une même ligne, le visage tourné au midi, vers la ville. Alors, le père Pierre-Baptiste entonne le cantique Benedictus, et ses compagnons unissent leurs voix à la sienne.

Bientôt après, on les perce chacun de deux lances, qui, enfoncées par les côtés, se croisent dans la poitrine, et sortent par les épaules. En ce moment, la multitude innombrable de fidèles qui entourent la colline, s'élancent au cri de Jésus ! Marie ! forcent les haies de soldats, et envahissent l'enceinte, pour recueillir le sang des martyrs dans des linges et se procurer quelque partie de leurs vêtements. On assure qu'on vit briller sur leurs corps une lumière céleste, que, pendant longtemps, des étoiles apparurent en grand nombre sur la colline.*

(*) Ces vingt-six martyrs, béatifiés par Urbain VIII en 1627, ont été canonisés avec une pompe extraordinaire par Pie IX, le 8 juin 1562, jour de la Pentecôte, en présence d'environ trois cents évêques venus de toutes les parties du monde. Leur fête est fixée au 5 février, jour où ils ont consommé leur sacrifice.Voici quels étaient leurs noms et leurs qualités :

Six religieux Franciscains, savoir : trois prêtres, le Pierre.Baptiste, âgé de cinquante-deux ans, Martin de Aguirre ou de l'Ascension, trente ans, et François Blanco, trente ans, tous trois Espagnols ; un clerc, Philippe de Jésus ou de Las Casas, vingt-trois ans, né au Mexique ; deux frères lais, François de Saint-Michel, cinquante-quatre ans, Espagnol, et Gonzalve Garcia, vingt-cinq ans, né aux Indes, de parents portugais.

Dix-sept laïcs japonais, qui, avant d'aller au supplice, furent reçus dans le Tiers-Ordre de Saint-François, savoir : Michel Cozaki et son fils Thomas, âgé de quatorze ans ; Antoine, treize ans ; Paul Ibarki et son frère cadet, Léon Garazuma, avec leur neveu Louis, enfant de onze ans ; Paul Suzuki ; François, médecin de Méaco, quarante-six ans ; Côme Toja ou Takia ; Thomas Danki ; Bonaventure ou Ventura ; Gabriel, dix-neuf ans ; Jean Kisnia ou Kimota ; Joachim Saquir ou Saccakibara, quarante ans ; Mathias, substitué à un autre du même nom ; François Fahelente ; Pierre Sukegiro.

Trois Jésuites Japonais, savoir : le père Paul Miki, âgé de trente-trois ans, avec deux novices, Jean de Goto, dix-neuf ans, et Jacques Kisaï, soixante-quatre ans, qui firent leurs vœux le jour même de leur martyre. Les Jésuites n'étaient pas alors compris dans l'arrêt de condamnation ; mais le gouverneur d'Ozaca fit prendre les trois qui se trouvaient dans cette ville, et les joignit aux Franciscains, contre lesquels cette persécution était principalement dirigée. Le traducteur.

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