Famille de Saint Grégoire le Grand

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Abbé Zins
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Famille de Saint Grégoire le Grand

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Famille de Saint Grégoire le Grand
(12 mars)

Petit-fils de celui qui, après avoir été marié, devint Pape sous le nom de Saint Félix III (1/3), fils du Sénateur Gordien dont les 3 filles furent des Vierges consacrées, dont deux Saintes :

Sa mère : Sainte Sylvie (3/11)

Ses tantes : Sainte Tharsille (24/12) et Sainte Emilienne (5/1)


A compléter
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gabrielle
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Re: Famille de Saint Grégoire le Grand

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Saint Grégoire le Grand, Pape

Et Docteur de l'Église


Le Saint dont nous entreprenons d'écrire l'histoire mérite le glorieux titre de Grand, par toutes les raisons qui peuvent élever un homme au-dessus de ses semblables : car il fut Grand en noblesse et par toutes les qualités qui viennent de la naissance et des ancêtres ; Grand dans les privilèges de la grâce dont le ciel le combla ; Grand dans les merveilles que Dieu opéra par son moyen, et Grand par les dignités de cardinal, de légat, de pape, où la divine Providence et ses mérites relevèrent.

Il naquit à Rome vers l'an 540. Gordien, son père, était sénateur et jouissait d'une fortune considérable. Mais il renonça au monde après la naissance de ce fils. et se consacra à Dieu ; lorsqu'il mourut, on le comptait parmi les sept cardinaux-diacre qui avaient soin, chacun dans son quartier, des pauvres et des hôpitaux. Sylvie, sa mère, suivant la même impulsion de la grâce, sanctifia aussi la dernière partie de sa vie, en servant Dieu dans un petit oratoire, près du portique de saint Paul. Grégoire était petit-fils de Félix III, pape très-saint, et neveu de la bienheureuse vierge Tarsile, qui mérita d'entendre. à l'heure de sa mort, la musique céleste, et de voir Jésus-Christ qui vint recevoir son âme bienheureuse.

Il avait reçu, de ses illustres parents, les plus heureuses dispositions pour la science et la vertu. Il apprit avec tant de facilité les lettres divines et humaines, qu'il était l'admiration de la ville de Rome. Ses actions étaient toujours accompagnées de modestie, et ses mouvements très-réglés dans les années de sa jeunesse. Pendant la vie de son père, il prit part au gouvernement de l'Etat: l'empereur Justin II l'éleva a la première magistrature de Rome;; i| dut en porter les insignes, qui consistaient en une robe de soie, enrichie d'une magnifique broderie et toute couverte de pierres précieuses. Mais i| est probable que son cœur était comme celui d'Esther, détaché de ce luxe, de cette pompe inséparable de son rang. Il est probable qu'il n'estimait déjà que les choses du ciel, puisqu'il trouvait tant de plaisir dans l'entretien des hommes de Dieu, des saints religieux, dans la prière et la méditation. Mais Dieu exige de lui davantage : il l'éclaire, il le presse ; Grégoire se fond(?), il rompt après la mort de son père, les derniers liens qui l'attachent au siècle.


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gabrielle
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Re: Famille de Saint Grégoire le Grand

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Il fonde six monastères en Sicile, et un autre à Rome, dans son propre palais, sous le nom de Saint-André (il porte aujourd'hui le nom de son saint fondateur, et appartient aux Camaldules ; c'est de là, dit M. de Montalembert, qu'est sorti, après treize siècles, un autre Grégoire, pape et moine, Grégoire XVI), y introduit la règle de saint Benoît et y prend lui-même l'habit en 573, sous l'abbé Valentin, à l'âge de trente-cinq ans, après avoir distribué aux pauvres ce qui lui reste de son patrimoine. Ainsi, dit son historien 1, et après lui M. le comte de Montalembert, Rome qui avait vu cet opulent patricien traverser ses rues avec des habits de soie, étincelants de pierreries, le vit avec bien plus d'admiration, couvert d'un grossier vêtement, servir les mendiants, — mendiant lui-même, — dans son palais devenu monastère et hôpital.

Il n'avait conservé qu'un seul reste de son ancienne splendeur : c'était une écuelle d'argent, dans laquelle sa mère lui envoyait tous les jours de pauvres légumes pour sa nourriture. Ce luxe ne dura pas longtemps. Un pauvre marchand qui avait, disait-il à notre Saint, fait naufrage et tout perdu, le supplia de le secourir. Grégoire donna ordre de lui compter six pièces de monnaie; mais le pauvre répliquant que c'était bien peu de chose, Grégoire lui en fit donner encore autant. Cependant le même mendiant se présenta de nouveau deux jours après au Saint, et le pria d'avoir pitié de son extrême misère. L'homme de Dieu, s'attendrissant sur les pressants besoins du pauvre, commanda à son procureur de lui donner encore six pièces ; mais ce dernier ne les ayant pas comptées, le Saint, dont le cœur était tout rempli de charité et incapable de rien refuser, donna au mendiant le dernier débris de son argenterie, l'écuelle dont nous avons parlé. A la suite de cette action, il fit un si grand nombre de miracles, qu'il soupçonna sous le naufragé quelque habitant du ciel. En effet, longtemps après, il eut une vision dont nous parlerons plus loin.



1. Paul, diacre, c. 2.

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gabrielle
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Re: Famille de Saint Grégoire le Grand

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_ Notre Saint se livrait avec tant d'ardeur à la lecture des livres saints ; ses veilles, ses mortifications étaient telles, que sa santé y succomba, et que sa vie même fut compromise. On l'obligea à prendre une nourriture plus fréquente et plus substantielle, ce qui l'affligeait beaucoup. Il était surtout inconsolable de ne pouvoir pas même jeûner le samedi saint, en ce jour où les petits enfants mêmes jeûnent, dit Paul, diacre. Ayant communiqué son chagrin au pieux moine Eleuthère, ils réunirent tous deux leurs prières pour obtenir de Dieu la délivrance d'un si grand malheur, et ils furent exaucés au-delà de leurs demandes.

Saint Grégoire avait un zèle si ardent pour le salut des âmes, qu'il s'étendait sur tout le monde. Il passa un jour par un marché où il vit de jeunes enfants d'une ravissante beauté que l'on exposait en vente. Apprenant qu'ils étaient Anglais, et que les habitants de ce pays n'avaient pas encore reçu la foi de Jésus-Christ, il en eut une si grande compassion, qu'il pleura, ajoutant ces paroles : « Quoi, faut-il que Satan possède les âmes de ces anges corporels ! » Il s'en alla aussitôt trouver le pape Benoît Ier, et le supplia instamment de lui donner sa bénédiction apostolique pour aller prêcher l’Évangile à ces insulaires. Le Pape lui accorda sa demande, et le Saint, avec quelques autres serviteurs de Dieu, se mit aussitôt en chemin pour cette mission ; mais quand on eut appris son départ dans la ville, le peuple en murmura si fort, que le Pape, allant à l'église de Saint-Pierre, se trouva environné d'une multitude de gens qui criaient : « Saint-Père, vous avez extrêmement offensé saint Pierre ; vous avez perdu Rome en permettant que Grégoire en sortît ». De sorte que Benoît fut obligé de le rappeler et de le faire revenir en son monastère. Le Saint en eut un extrême regret, et conserva toujours dans son âme un grand zèle pour la conversion des Anglais. Quelque temps après, il fut contraint de paraître en public, et de sortir de sa retraite; d'abord le pape Benoît Ier, en 577, le créa cardinal-diacre ou régionnaire. Ceux qui étaient revêtus de cette dignité, au nombre de sept, présidaient aux sept régions principales de Rome. « Il ne céda que bien malgré lui à l'autorité du Pontife. Quand un navire », disait-il, « n'est pas bien amarré au port, la tempête l'enlève au rivage même le plus sûr : me voilà replongé dans l'Océan du monde, sous un prétexte ecclésiastique. J'apprends, en la perdant, à apprécier la paix du monastère, que je n'ai pas su défendre assez quand je la possédais ».

Ce fut bien pire quand le pape Pélage II l'envoya comme apocrisiaire, ou nonce, auprès de l'empereur Tibère 1 pour traiter de quelques affaires de grande importance, dont la négociation demandait un homme aussi saint et aussi prudent. Se voyant obligé de sortir de son monastère, il emmena avec lui quelques-uns de ses religieux, pour continuer, en leur compagnie, les saints exercices qu'il avait coutume de pratiquer dans le cloître. Il fut reçu de l'empereur avec tout le respect imaginable, et obtint le secours de ses armes pour la défense de l'Italie opprimée par les Lombards : ce qui était le principal motif de sa légation. Ce fut en ce voyage qu'il contracta une étroite amitié avec saint Léandre, archevêque de Séville 2.


1. Les Moines d'Occident, t.II , p. 94.
2 Voir la vie de saint Léandre, t.II, p. 46, ou nous parlons plus longuement de cette amitié dès deux Saints

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gabrielle
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Il réfuta les erreurs d'Eutychès, patriarche de Constantinople, et reçut sa rétractation. Pendant ces six années, il édifia la cour de Constantinople par sa simplicité et sa modestie. Dieu le délivra en cette ville d'une maladie dangereuse et d'un naufrage pendant son retour. Il ramenait un général contre les Lombards, Smaragde, et de précieuses reliques pour l'Italie, surtout pour son monastère, entre autres le bras de saint André et la tête de saint Luc, apôtres. Il fut donc reçu comme un ange du ciel, ramenant la paix et le bonheur dans son pays. Peu de temps après (584), les religieux de Saint-André l'élurent abbé. Il goûta encore quelque temps dans cette maison les délices de la solitude.

« Tendrement chéri de ses frères, il s'associait paternellement à leurs épreuves, à leurs croix intérieures, pourvoyait à leurs nécessités temporelles et spirituelles, et admirait surtout la sainte mort de plusieurs d'entre eux. Il en a raconté les détails dans ses Dialogues, et semble y respirer d'avance le parfum du ciel. Mais l'affectueuse bonté qui l'inspira toujours, ne l'empêchait pas de maintenir avec une scrupuleuse sévérité les exigences de la règle. Il fit jeter à la voirie le corps d'un moine qui était aussi un habile médecin, et chez lequel on trouva trois pièces d'or, au mépris de l'article de la règle, qui interdisait toute propriété individuelle. Les trois pièces d'or furent jetées sur le cadavre, en présence de tous les religieux, qui durent répéter à haute voix le texte du verset : Pecunia tua tecum sit in perditionem : Que ton argent périsse avec toi 1. Une fois cette justice accomplie, la miséricorde reprit le dessus dans le cœur de l'abbé, qui fit célébrer pendant trente jours de suite la messe, pour délivrer cette pauvre âme du purgatoire ».

Saint Grégoire nous dit 2 qu'après la messe du trentième jour, le défunt apparut à l'un de ses frères, et lui apprit qu'il venait d'être délivré des peines qu'il endurait depuis sa mort 3.


1. Actes, VIII, 20. — 2. Dial., 1. VI, c. 55.
3. il parait, par la vie de saint Théodose le Cénobiarque, par l'oraison funèbre de l'empereur Valentinien, composée par saint Ambroise, et par plusieurs autres monuments de l'antiquité ecclésiastique, que dans les premiers siècles du christianisme on offrait des prières et des sacrifices solennels pour les défunts, le troisième, le septième, le trentième et quelquefois le quarantième jour après leur mort. On a donné le nom de grégoriennes aux messes que l'on dit trente jours de suite pour l'âme de quelque défunt, en mémoire de ce que saint Grégoire en avait fait dire un égal nombre pour le repos du moine Juste. (Voir Gavantus et les autres rubricaires.)
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gabrielle
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Re: Famille de Saint Grégoire le Grand

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La sollicitude de Grégoire dut bientôt franchir l'enceinte de son monastère. Rome fut désolée par de terribles inondations, suivies d'un fléau plus grand, la peste, qui répandit le deuil et la solitude dans presque toutes les maisons, et priva l'Eglise de son chef. Le pape Pélage mourut en 590. Le clergé, le sénat et le peuple demandèrent tout d'une voix que le diacre Grégoire lui succédât. Il fut le seul à s'opposer à son élection, mais en vain. Il eut beau écrire à l'empereur Maurice de s'y opposer ; Germain, préfet de Rome et frère de notre Saint, arrêta le courrier, retint les lettres, et en écrivit d'autres au nom du clergé, du sénat et du peuple, suppliant le prince de confirmer un choix si juste et si canonique. Cependant, la peste augmentait et faisait un si grand dégât dans la ville, qu'il semblait que Dieu eût répandu toute sa colère sur les Romains. Saint Grégoire les exhorta à faire pénitence et à reconnaître que ce châtiment venait du ciel à cause de leurs péchés. Il fit faire une procession générale, pendant trois jours, où parurent pour la première fois tous les abbés des monastères de Rome avec leurs moines, et toutes les abbesses avec leurs religieuses. L'image de la sainte Vierge, peinte par saint Luc, fut portée dans cette solennité, et l'on raconte que, partout où passait cette auguste figure, l'air corrompu s'écartait et lui cédait la place, et que saint Grégoire aperçut sur le sommet du mausolée de l'empereur Adrien, un ange qui remettait son épée dans le fourreau. (L'image de cet ange, debout sur ce superbe monument, lui a fait donner le nom de château Saint-Ange, et perpétue encore aujourd'hui la vision de saint Grégoire.) Notre Saint connut par là que le courroux du Dieu vivant était apaisé, et que la miséricorde allait prendre la place de la justice. En. effet, la peste cessa.

Ne voyant plus d'autre moyen d'échapper au souverain pontificat, Grégoire s'enfuit déguisé. Mais l'Epoux sacré de l'Eglise, qui l'avait nommé dans le ciel, le fit découvrir au moyen d'une colonne de lumière, qui paraissait au-dessus de lui et l'accompagnait partout où il allait. Il fut enlevé d'une caverne où il s'était caché, amené à Rome malgré toute sa résistance et enfin couronné dans l'église de Saint-Pierre, le 3 septembre l'an de Notre-Seigneur 590.


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gabrielle
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Re: Famille de Saint Grégoire le Grand

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Lorsque la nouvelle de son exaltation fut répandue dans toute la chrétienté, on lui écrivit un grand nombre de lettres pour le féliciter. Il y ré pondit par des larmes et des gémissements : « J'ai perdu », écrivait-il à Théoctiste, sœur de l'Empereur, tous les charmes du repos. Je parais monter au dehors, je suis tombé au dedans... Quoique je ne craigne rien pour moi, je crains beaucoup pour ceux dont je suis chargé... L'empereur (Maurice), en approuvant mon élection, ne m'a pas donné le mérite et les vertus nécessaires ». Au patrice Narcès : " Je suis tellement accablé de douleur, que je puis à peine parler ". Il ajoute qu'il est toujours triste, parce qu'il voit de quelle région tranquille il est tombé, et dans quel abîme d'embarras. A André, du rang des illustres : « En apprenant ma promotion à l'épiscopat, pleurez si vous m'aimez, car il y a ici tant d'occupations temporelles, que je me trouve par cette dignité presque séparé de l'amour de Dieu ».

Longtemps après, un jour que, plus accablé que jamais par le poids des affaires séculières, il s'était retiré dans un lieu secret pour s'y livrer dans un long silence à sa tristesse, il y fut rejoint par le diacre Pierre, son élève, son ami d'enfance et le compagnon de ses chères études. « Vous est-il donc arrivé quelque chagrin nouveau, lui dit le jeune homme, pour que vous soyez ainsi plus triste qu'à l'ordinaire ? — Mon chagrin, lui répondit le Pontife, est celui de tous mes jours, toujours vieux par l'usage et toujours nouveau par sa croissance quotidienne. Ma pauvre âme se rappelle ce qu'elle était autrefois dans notre monastère, quand elle planait sur tout ce qui passe, sur tout ce qui change; quand elle ne songeait qu'au ciel; quand elle franchissait par la contemplation le cloître de ce corps qui l'enserre ; quand elle aimait d'avance la mort comme l'entrée de la vie. Et maintenant il lui faut, à cause de ma charge pastorale, supporter les mille affaires des hommes du siècle et se souiller dans cette poussière. Et quand, après s'être ainsi répandue au dehors, elle veut retrouver sa retraite intérieure, elle n'y revient qu'amoindrie. Je médite sur tout ce que j'ai perdu. Me voici battu par l'océan et tout brisé par la tempête. Quand je pense à ma vie d'autrefois, il me semble regarder en arrière vers le rivage. Et ce qu'il y a de plus triste, c'est qu'ainsi ballotté par l'orage, je puis à peine entrevoir le port que j'ai quitté ».

Ces plaintes ne venaient pas seulement de son humilité ; ce vaste esprit voyait toute l'étendue du mal que Dieu l'appelait à guérir. L'Eglise était dans le plus déplorable état, souffrant en Afrique du donatisme, en Espagne de l'hérésie arienne, en Angleterre de l'idolâtrie, en Gaule de la simonie et des crimes de Frédégonde et des erreurs de Brunehaut ; en Italie des Lombards, peuple arien et rival de la puissance byzantine ; en Orient, de l'arrogance des patriarches de Constantinople, de la mauvaise volonté des empereurs, qui, ne pouvant plus défendre ni gouverner l'Italie, étaient jaloux de voir les Papes remplir ce rôle. Il sut conduire sa barque, ainsi agitée, avec une énergie et une habileté des plus rares. Romain, l'exarque de Ravenne, c'est-à-dire gouverneur de l'Italie, au nom de l'empereur de Constantinople, rompt avec mauvaise foi un traité qu'il avait fait avec les Lombards. Aussitôt ceux-ci, commandés par leurs ducs Arnulfe et Arigis, envahissent le centre et le midi de l'Italie. L'exarque ne protège point Rome ni Naples, et cependant il défend au Pape de traiter avec les Lombards, qui assiègent Rome et répandent tout autour cette désolation, cette stérilité qu'on n'a jamais pu réparer depuis.


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gabrielle
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Alors Grégoire se multiplie : capitaine, roi, pontife, père des Romains, il reprend l'exarque de sa mauvaise foi, ce qui lui attire la colère de l'empereur grec, assemble les troupes, paie leur solde, fournit aux barbares les contributions qu'ils exigent, nourrit et console son peuple. Enfin, après neuf ans d'efforts, il réussit à conclure, entre les Lombards et les Grecs, une paix qui se rompt bientôt. Il traite alors en son propre nom, et obtient du roi des Lombards une trêve pour Rome et son territoire. Il fait plus. Théodelinde, épouse d'Agilulfe, qui lui devait la couronne, était chrétienne et amie fidèle du saint Pape : ils unissent leurs efforts et ramènent de l'arianisme à la foi catholique, toute la nation des Lombards. Saint Grégoire délivra ensuite le territoire romain de tous les petits tyrans sortis du sein de l'anarchie ; et telle est l'origine de la puissance temporelle des Papes : « Seuls gardiens de Rome, ils en sont devenus maîtres 1 ».

Mais un joug bien plus insupportable que celui des barbares pesait sur l'Italie : c'était la domination grecque, l'empire d'Orient. Grégoire travailla habilement et courageusement à l'alléger, à l'adoucir ; il dénonça dans une lettre à l'impératrice, les fraudes, les rapines des fonctionnaires impériaux : en Sardaigne, ils vendaient à prix d'argent, aux païens, le droit de sacrifier aux idoles, et continuaient à prélever cet impôt sur ceux qui se faisaient baptiser; en Corse, ils accablaient les pauvres de tels impôts, qu'ils les réduisaient à vendre leurs enfants pour payer, et à chercher un refuge chez les Lombards. On saignait ainsi l'Italie sous prétexte de la défendre. Aussi Grégoire osa dire à l'impératrice : « On pourrait suggérer à l'empereur qu'il vaudrait mieux supprimer quelques dépenses en Italie, afin de supprimer les larmes des opprimés en Sicile ». Il ne fut pas moins ferme quand il s'agit de donner une leçon d'humilité à Jean le Jeûneur, patriarche de Constantinople, qui prenait dans ses actes le titre d'œcuménique ou universel, mot jusque-là réservé aux conciles généraux ou représentant toute l'Eglise. Se nommer ainsi, c'était s'attribuer à soi seul l'épiscopat, et ne regarder les autres évêques que comme ses inférieurs, ses vicaires. Jean ne donnait sans doute pas à ce nom une signification aussi étendue, mais il eut tort de prendre un titre si nouveau et si fastueux, lui, l'évêque d'un siège non fondé par les Apôtres, et qui n'avait d'autre mérite que d'être dans la capitale de l'empire, c'est-à-dire très-exposé à devenir trop dépendant de la cour impériale, à tomber dans, la domesticité, selon le terme de M. de Montalembert. L'humilité de saint Grégoire lui fournit des armes invincibles pour combattre cette prétention.


1.Ozanam, cité par M. de Montalembert.

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Il chargea son nonce à Constantinople de faire des remontrances au patriarche ; il lui écrivit, il écrivit à l'empereur : « Comprenez », dit-il à Jean, « quelle présomption c'est de vouloir s'appeler d'un nom que jamais vrai saint n'a osé s'attribuer. Ne savez-vous pas que le concile de Chalcédoine offrit cet honneur aux évêques de Rome, en les nommant universels? Mais pas un n'a voulu le recevoir, de peur qu'il ne semblât s'attribuer l'épiscopat à lui seul et l'ôter à tous ses frères ».

Dans une lettre à son nonce Fabien, il découvre l'artifice de Jean, qui faisait écrire l'empereur au Pape pour lui. « Il espère », dit-il, « autoriser sa vaine prétention si j'écoule l'empereur, ou l'irriter contre moi, si je ne l'écoute pas. Mais je, marche le droit chemin, ne craignant en cette affaire que Dieu seul. Ne craignez rien non plus ; méprisez pour la vérité tout ce qui paraît grand en ce monde, et, vous confiant en la grâce de Dieu et au secours de saint Pierre, agissez avec une souveraine autorité. Puisqu'ils ne peuvent défendre l'Italie des glaives des barbares, puisque l'Eglise a été obligée de sacrifier ses biens pour défendre l'Etat, c'est une trop grande honte qu'ils nous demandent, de sacrifier encore notre foi ».-


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Re: Famille de Saint Grégoire le Grand

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On admirera ce langage, si l'on se rappelle que Grégoire était sujet de l'empereur de Constantinople, et que personne n'eût alors osé parler avec une si noble indépendance.

Écrivant à l'empereur lui-même: « Quoi », s'écrie-t-il, « saint Pierre qui a reçu les clefs du ciel, le pouvoir de lier et de délier, la charge et la primauté de toute l'Eglise, n'a pas été appelé apôtre universel, et voici que mon pieux confrère Jean voudrait se faire nommer évêque universel? Il faut bien m'écrier : 0 temps ! ô mœurs ! toute l'Europe est à la discrétion des Barbares. Les villes sont renversées, les châteaux en ruine, les provinces dépeuplées ; la terre n'a plus de bras qui la cultivent; les idolâtres sévissent sur les fidèles jusqu'à la mort, et des prêtres qui devraient se prosterner sur le parvis dans les larmes et la cendre, cherchent à se faire des titres de vanité 1 ». Il rappelle à l'empereur que le siège de Constantinople a été occupé par Nestorius et Macédonius, hérétiques et hérésiarques. « Si donc », dit-il, « celui qui occupe ce siège était évêque universel, toute l'église tomberait avec lui. Pour moi, je suis le serviteur de tous les évêques, tant qu'ils vivent en évêques ; mais si quelqu'un élève la tête contre Dieu et contre la loi de nos Pères, j'espère qu'il ne fera pas courber la mienne, même avec le glaive ». Il opposa à cette dangereuse vanité de l'évêque de Constantinople quelque chose de plus fort encore que ses réprimandes : ce fut sa propre humilité. « Il avait imprimé le sceau de cette humilité même, en prenant, le premier parmi les Papes, dans l'intitulé de ses actes officiels, ce beau nom de serviteur des serviteurs de Dieu, qui est devenu le titre distinctif de ses successeurs 2 ». Il reprit Rusticienne de ce que dans les lettres qu'elle lui écrivait, elle se nommait sa servante, et la pria de changer de style, parce qu'il ne voulait être le seigneur de personne, mais le serviteur de tout le monde. Il est rapporté dans le Pré spirituel, que Jean, abbé de Perse, homme saint et d'un très-grand mérite, étant venu à Rome pour visiter les tombeaux des glorieux apôtres saint Pierre et saint Paul, rencontra un jour saint Grégoire dans la rue, et vint se jeter à ses pieds : mais le saint Pape le prévint, se prosterna lui-même aux pieds de l'abbé, et ne consentit point à se relever sans que l'abbé se relevât aussi.


1. Traduction de M. de Montalembert. Moines d'Occident, t. ,II p. 114. — 2. idem

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