Le généreux pardon d'une offense obtient immédiatement la délivrance d'un cruel purgatoire.
Remettez, et l'on vous remettra à vous-mêmes. (Luc. VI, 37.)
Deux grands docteurs, saint Augustin et saint Grégoire, réduisent à quatre espèces, les suffrages que l'on offre pour les défunts: le saint sacrifice, la prière, le jeûne et l'aumône. Des théologiens plus récents, en ajoutent une cinquième qu'ils regardent comme très-efficace; c'est le pardon des offenses. Cet acte a quelque chose d'héroïque et de surnaturel. Le fait que nous allons raconter, prouvera combien cette généreuse action est profitable aux âmes du purgatoire.
A Bologne en Italie, une veuve noble et riche avait un fils unique qu'elle chérissait tendrement et qui était tout son bonheur sur la terre. Or un jour que ce jeune enfant, jouait sur la place publique avec ceux de son âge, il survint un étranger qui se mit à entraver la partie par esprit de contrariété. L'enfant dans sa vivacité, adresse à cet importun des paroles un peu insultantes! Celui-ci dont la main était aussi disposée aux armes que le cœur, à la colère, s'élance sur l'enfant avec fureur, lui enfonce son épée au milieu de la poitrine, et l'étend mort à ses pieds. Reconnaissant aussitôt l'énormité de son crime, il s'échappe, l'épée sanglante à la main, et se met à courir sans savoir où il va. Une porte ouverte s'offre à sa vue, il s'y précipite, monte un escalier, pénètre dans un appartement, et se trouve en face d'une dame de grande distinction.
Le visage pâle de cet homme, ses yeux hagards, cette arme ensanglantée, lui arrachent un cri d'effroi. Mais l'horreur dont elle était saisie, fit place à la compassion, dès qu'elle entendit cet inconnu , la supplier, au nom du Ciel, d'avoir pitié de lui et de le cacher, car déjà on devait être à sa recherche pour un homicide involontaire qu'il venait de commettre. Heureusement, cette dame avait dans sa demeure un endroit très-retiré, formant une cachette introuvable; elle se hâta de l'y enfermer en lui recommandant de ne rien craindre.