Comme au temps de Noé

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Abbé Zins
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Revue Sub Tuum Praesidium, n ̊ 39 (Mai 1994)


EDITORIAL


Avant le temps de Noé


1. Il n 'est point difficile de comparer notre époque à celle de Noé.

Il suffit pour cela de connaître ce qui a caractérisé cette période ayant conduit les "fils des hommes" au déluge.

Toutefois, comme ce qui a spécifié cet âge pré-diluvien est une grave rupture d'avec l'état du monde qui l'a précédé, il importe de considérer tout d'abord cet état antérieur des débuts de l'humanité.

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Abbé Zins
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Avant le temps de Noé


Exposé de Saint Augustin sur les deux Lignées ou Cités avant le temps de Noé :

Saint Augustin a écrit :

2. « Adam fut donc le père de deux postérités dont l'une appartient à la cité de la terre, l'autre à la Cité du Ciel ;

après la mort d'Abel dont le meurtre évoque un admirable mystère, il y eut un père pour chacune de ces postérités :

Cain et Seth, et leurs fils dont il fallait mentionner les noms, commencèrent à mieux faire apparaître dans le genre humain les caractères des deux cités.


3. Caïn, en effet, engendra Enoch au nom duquel il fonda une cité, cité terrestre évidemment, qui n'est pas établie en ce monde comme en un lieu d'exil mais qui s'y installe dans la paix et la félicité temporelle.

Or Cain signifie "Possession" aussi à sa naissance fut-il dit par son père ou sa mère : "J'ai acquis un homme par Dieu " (Gen. 4,1).

Quant à Enoch, cela signifie "dédicace", car c'est ici-bas où elle est établie qu'est dédiée la cité terrestre, puisqu'ici-bas se trouve la fin où tend son aspiration ... cette cité trouve son origine et sa fin sur terre,où rien n’est à espérer au-delà de ce qu'on peut voir en ce siècle.


4. Tandis que Seth signifie "résurrection" et son fils Enos signifie "homme" ; non pas comme Adam.

Ce nom aussi signifie "homme" ; mais il se présente dans la langue hébraïque comme nom commun de l'homme et de la femme. [Synonyme, donc de humain, comme homo en latin ; vir signifiant seulement l'homme.]

Ainsi est-il écrit à propos de lui : "Il les fit homme et femme, les bénit et les appela Adam" (Gen. 5,2).

Il n'y a donc pas de doute : Eve est le nom propre de la femme, tandis qu'Adam au sens d'homme (d'humain) est le nom des deux sexes.


5. Enos, lui, signifie "homme" dans un sens qui, d'après ceux qui sont versés en cette langue, ne saurait désigner "la femme" [comme vir à la différence de homo : cf. Saint Jérôme, Quaest.Hebraic.in Gen],

en tant que fils de la résurrection où "ni les hommes ne prennent d'épouses ni les femmes d'époux" (Lc. 20,35).

Car il n'y aura plus de génération dans le séjour où aura conduit la régénération.»


(Saint Augustin, Cité Dieu L. 15 ch. 17)

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Avant le temps de Noé

Saint Augustin a écrit :

6. ""A Seth", est-il dit, "naquit un fils et il le nomma Enos, et celui-ci mit son espérance à invoquer le Nom du Seigneur Dieu".

Voilà le témoignage éclatant de la vérité. C'est donc dans l' "espérance" que vit l'homme, fils de la résurrection ; c'est dans l' "espérance" que vit la Cité de Dieu aussi longtemps que dure son exil ici-bas, laquelle est engendrée de la foi en la Résurrection du Christ.

Car ces deux hommes, Abel qui signifie "deuil" et Seth son frère qui signifie "résurrection" sont la figure de la mort du Christ et de sa vie au sortir d'entre les morts.

De cette foi naît ici-bas la Cité de Dieu, c.à.d. l'homme qui a "mis son espérance à invoquer le Nom du Seigneur Dieu" ...

Qui ne jugerait qu'il y a là un profond mystère ? Car Abel ... Seth... (n'ont-ils) pas mis (leur) "espérance à invoquer le Nom du Seigneur Dieu"... ?


7. Pourquoi donc attribuer en propre à Enos ce que l'on remarque être commun à tous les hommes pieux, sinon parce que celui qu on donne comme premier descendant du père des générations réservées pour une meilleure part, c.à.d. de la Cité d'en-haut, devait préfigurer l'homme ou la société des hommes vivant non selon l'homme dans la réalité de la félicité terrestre, mais selon Dieu dans 1' "espérance" de la félicité éternelle ? ...

En effet ce qui est dit "Il l'appela Enos, ce qui signifie homme", ainsi que ce qui suit : "Il mit son espérance à invoquer le Nom du Seigneur Dieu", montre bien que l'homme ne doit pas mettre son espérance en lui-même ; car "maudit" (comme on le lit ailleurs), "quiconque met son espérance en l'homme" (Jer. 17,5), et personne dès lors ne doit la mettre en soi-même pour être citoyen de l'autre Cité, celle qui n'est pas dédiée à la suite du fils de Caïn dans le temps présent, c.à.d. pour le cours éphémère de ce siècle mortel, mais dans l'immortalité de l'éternelle Béatitude."


(Saint Augustin, Cité Dieu L. 15 ch. 18)



8."Car la descendance dont Seth est le père, présente aussi le nom de "dédicace", à la septième génération à partir d'Adam, celui-ci compris.

Hénoch, qui signifie "dédicace" est en effet son septième descendant.

C'est lui qui fut enlevé parce qu'il plut à Dieu (Gen. 5,24), et c'est un nombre remarquable que le nombre de sa génération, à savoir la septième depuis Adam, nombre qui fut sanctifié par le sabbat.

Cependant, si l'on compte à partir de Seth, père des générations distinctes de celles de Cain, Hénoch est le sixième : c'est au 6e. jour que l'homme fut fait et que Dieu acheva toutes ses oeuvres.

Or son enlèvement a préfiguré l'ajournement de notre propre dédicace.

Elle est déjà accomplie, à la vérité, dans le Christ notre Tête, ressuscité pour ne plus mourir et Lui-même aussi enlevé. Il reste toutefois une autre dédicace, celle de la maison tout entière dont le Christ est le fondement (Eph. 2,20), reportée jusqu'à la fin, quand la résurrection de tous aura lieu sans qu'ils n'aient plus à mourir.

Qu'on parle ici de Maison de Dieu, de Temple de Dieu ou de Cité de Dieu, cela est tout un ... "


(Saint Augustin, Cité Dieu L. 15 ch. 19)

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Avant le temps de Noé

Saint Augustin a écrit :

9."Quel a été le but de cette énumération de la descendance de Caïn, sinon de la conduire jusqu'au déluge où fut engloutie la race tout entière de la cité terrestre ... ?

Lorsqu'on en est arrivé à Lamech, septième descendant d'Adam, on lui compte autant de fils qu'il en faut pour accomplir le nombre onze qui signifie le péché : on ajoute en effet trois fils et une fille ...

La Loi étant donc promulguée dans le nombre dix d'où vient le célèbre Décalogue, assurément le nombre onze, puisqu'il passe outre au nombre dix, signifie la transgression de la Loi et par suite le péché...

La descendance d'Adam par Caïn le criminel s'achève donc au nombre onze qui signifie le péché, et ce nombre lui-même se clôt par une femme dont le sexe est à l'origine du péché par lequel nous mourons tous.

Or ce péché une fois commis a été suivi de la volupté de la chair qui résiste à l'esprit. Noéma en effet, fille de Lamech, signifie "volupté".


10. Par contre, en allant d'Adam par Seth jusqu'à Noé, on atteint le nombre dix conforme à la Loi.

On lui ajoute les trois fils de Noé, dont l'un est tombé et deux ont été bénis par le père.

En soustrayant le réprouvé et en ajoutant les deux fils approuvés, on obtient le nombre douze, insigne chez les Patriarches et les Apôtres, parce qu'on le forme en multipliant les deux parties du septénaire trois fois quatre ou quatre fois trois font douze ...


Il importait de mettre ainsi en lumière ces deux cités :

l'une qui commence et finit par un homicide (Lamech aussi avoue à ses deux épouses qu'il en a commis un : Gen. 4,23),

l'autre qui commence par celui qui a "mis son espérance à invoquer le Nom du Seigneur Dieu".


Voilà, certes, quelle doit être en cette vie mortelle l'unique et souveraine occupation de la Cité de Dieu en exil en ce monde."


(Saint Augustin, Cité de Dieu L. 15 ch. 20,21)

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Avant le temps de Noé

Saint Augustin a écrit :

« Deux amours ont donc fait deux cités


l’ amour de soi jusqu'au mépris de Dieu,

la cité terrestre ;


l'Amour de Dieu jusqu'au mépris de soi,

la Cité céleste.




L’une se glorifie en elle-même,

l'autre dans le Seigneur.


L'une demande sa gloire aux hommes ;

pour l'autre,

Dieu témoin de sa conscience est sa plus grande gloire...


L'une, en ses maîtres, aime sa propre force !

l'autre dit à son Dieu :

Seigneur, Vous ma vertu, je Vous aimerai (Ps. 17,2).»



(Saint Augustin, Cité de Dieu L. 14 ch. 28)

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1. L ’ ECH0 DE LA TRADITI0N


AU TEMPS DE NOÉ



11. Suite à l'exposé de Saint Augustin sur l'état antérieur du monde, il nous faut à présent considérer en quoi la période pré-diluvienne a marqué une profonde rupture d'avec ce précédent état.

12. Jusque là les deux lignées, celle des "fils de Dieu" issue de Seth restée fidèle à Dieu, et celle des "fils des hommes" issue de Caïn ne vivant que pour la terre, étaient demeurées soigneusement séparées.



Etat antérieur de séparation des deux Lignées :


Saint Ambroise a écrit :

13. "Dieu ne dédaigne pas d'appeler les hommes fidèles ses fils.

Aussi, de même que les hommes d'une vie probe sont nommés "fils de Dieu", de même ceux dont les oeuvres sont charnelles sont dits de par l'autorité des Ecritures "fils de la chair" (cf. Jn. 1,13)."

(Saint Ambroise, liber de Noé et Arca, in Gen. 6,4)


Saint Thomas a écrit :

14. "On se demande ce que l'on entend par "fils de Dieu" ?

Il faut dire que de même que toute la descendance des Sarrasins ou des schismatiques est séparée de la descendance des bons Chrétiens, ainsi toute la descendance de Caïn était alors séparée de la descendance de Seth.

Les membres de cette dernière sont appelés ici "fils de Dieu" ; ceux de l'autre "fils des hommes"."

(Saint Thomas in Gen. 6,1s)


Saint Augustin a écrit :

15. "C'est à l'autre cité, en effet, qu'appartiennent ceux qui, déviant de la foi de la céleste Cité, ont fondé diverses hérésies : ils vivent certes selon l'homme, non selon Dieu."

(Saint Augustin, Cité de Dieu L. 15 ch. 20)


Saint Thomas a écrit :

16. "Et l'on croit avec probabilité que Adam et Seth, ainsi que les autres Saints Patriarches, interdirent à leurs descendants de s'unir conjugalement avec les fils ou les filles du peuple de Caïn, comme il est à présent interdit par l'Eglise de se marier avec les Sarrasins.

Par ceci apparaît principalement la peine de son crime, car il ne fut pas digne que nul de ses descendants ne se rattache à la génération du Sauveur, ni que sa descendance n'aille plus loin que le déluge."

(Saint Thomas in Gen. 6,2)

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1. L ’ ECH0 DE LA TRADITI0N


AU TEMPS DE NOÉ




L'origine du déluge ou le mélange des deux Lignées :


Saint Augustin a écrit :


17. "Ceci établi, il convient de considérer et de rappeler comment les deux postérités qui, par deux séries distinctes de générations, insinuent les deux cités, celle des fils de la terre et celle des hommes régénérés, se sont plus tard tellement mêlées et confondues que le genre humain tout entier, à l'exception de huit personnes, mérita de périr par le déluge."


(Saint Augustin, Cité Dieu 15,20)


18. "Car la volonté qui a été naturellement faite bonne par un Dieu bon, mais faite muable par l'Immuable parce que tirée du néant, peut tantôt se détourner du bien pour faire le mal, ce qui se fait par le libre arbitre, et tantôt se délivrer du mal pour faire le bien, ce qui n'arrive pas sans le secours divin." (id. 15,21)


19. "En raison de ce libre arbitre de la volonté, il se fit donc, avec le progrès et l'accroissement, un mélange (des membres) des deux cités.

De ce mal, le sexe féminin fut de nouveau la cause, non pas, il est vrai, de la même manière qu'au commencement (car cette fois ce n'est pas, séduites par les artifices de quelqu'un, que ces femmes ont induit les hommes à pécher) :

mais dès le commencement, celles qui eurent de mauvaises moeurs dans la cité terrestre, furent aimées pour leur beauté physique par les "fils de Dieu" (cf. Gen. 6,1s), ces citoyens de l'autre Cité qui est en exil dans ce siècle.

Ce bien de la beauté corporelle est un don de Dieu, mais il l'accorde aussi aux mauvais de peur qu'il n'apparaisse aux bons comme un grand bien.


20. L’abandon du grand bien propre aux bons fait tomber dans ce bien infime qui, loin d’être propre aux bons, leur est commun avec les mauvais.

C'est ainsi que "les fils de Dieu" furent pris par l'amour des "filles des hommes" ; pour en jouir comme épouses, ils se laissèrent aller aux moeurs de la société fille de la terre, délaissant la piété qu'ils pratiquaient dans la société des saints.


21. Ainsi, la beauté du corps, oeuvre de Dieu, certes, mais d'une bonté infime, charnelle et temporelle, est mal aimée, quand Dieu, Bien éternel, intérieur et sans déclin est mis au second rang, tout comme, la justice étant délaissée, l'or est aimé par l'avare, non par la faute de l'or, mais de l'homme.

Ainsi en est-il de toute créature, toute bonne qu'elle soit, elle peut être aimée d'un amour bon ou mauvais, bon si l'ordre est sauvegardé, mauvais s'il est violé ...


22. Tandis que si le Créateur est aimé véritablement, c.à.d. s'Il est aimé Lui-même et rien d'autre à sa place
qui ne soit Lui, Il ne saurait être mal aimé.

Car l'amour par lequel nous aimons ce qu'il faut aimer, doit être lui-même aimé d'une façon ordonnée, pour que nous possédions la vertu qui fait bien vivre.


23. Aussi, me semble-t-il, une définition brève et juste de la vertu est celle-ci : l'ordre de l'amour.

Voilà pourquoi l'Epouse du Christ, la Cité de Dieu, chante dans le saint Cantique des cantiques (2,4) :

"Mettez en moi ordre à la Charité ".


24. C’est donc une fois renversé "l'ordre de la Charité", c.à.d. de la dilection et de l'amour, que "les fils de Dieu" ne se soucièrent plus de Dieu et qu'ils aimèrent "les filles des hommes".

Ces deux appellations marquent bien la distinction des deux cités.

Car "les fils de Dieu" ne cessaient pas d'être par nature fils des hommes, mais par la grâce ils avaient commencé à porter un autre nom."


(Saint Augustin, Cité de Dieu L. 15 ch. 2 2)


Saint Thomas a écrit :

25. "Au temps, donc, duquel nous parlons maintenant, à l'encontre de la prohibition de leurs parents, "les fils" de la bonne descendance, vaincus par la concupiscence, s'unirent aux "filles" de la mauvaise descendance, et vice versa, ne faisant attention à rien d'autre qu'à la seule attirance de la beauté corporelle et de la volupté de leur chair."


(Saint Thomas in Gen. 6,2)

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1. L ’ ECH0 DE LA TRADITI0N


AU TEMPS DE NOÉ



Conséquences perverses de ce mélange :


Saint Jean Chrysostome a écrit :

26. "Mais écoutons les paroles mêmes de Moise... :

"Quand les hommes eurent commencé à se multiplier sur la terre, il leur naquît des filles."

S'il ajoute "il leur naquit des filles", c'est pour insister sur l'idée qu'ils étaient nombreux.. .

"Les fils de Dieu voyant que les filles des hommes étaient belles, en prirent pour épouses parmi toutes celles qu'ils choisirent."

Etudions chaque parole avec soin pour ne rien perdre de leur sens profond ...


27. Nous vous avons déjà prouvé que l'Ecriture a l'habitude de donner à des hommes le nom de "fils de Dieu" (cf. Ex. 4,22 ; Ps. 81,6 ; Is. 1,2 ; Jn. 11,52).

Ceux qu'elle appelle ainsi descendent de Seth et de son fils Enos, celui de qui il est dit qu'il "se confia dans l'invocation du Nom de Dieu" (Gen. 4,26).

Ces descendants sont appelés "fils de Dieu" dans les saintes Ecritures, parce qu'ils avaient imité jusque-là les vertus de leurs ancêtres ; le nom de "fils des hommes" fut donné à ceux qui étaient nés avant Seth, c. à. d. aux fils de Caïn, et aussi à leurs descendants.


28. Dès que "les fils de Dieu" (les descendants de Seth et d'Enos) "eurent vu les filles des hommes" (celles dont on indiquait tout à l'heure la naissance), "ils les trouvèrent belles".

Voyez comme ce seul mot montre l'impureté !

Ils ne songeaient pas seulement à avoir des enfants, mais aux plaisirs des sens.

"Dès qu'ils virent que les filles des hommes étaient belles", les désirs excités par cette beauté les entraînèrent à leur perte ; l'aspect de la beauté fut pour eux l'occasion d'un libertinage effréné.


29. Et ce n'est pas tout ; "ils prirent pour épouses toutes celles qu'ils choisirent".

Cela achève de nous montrer l'excès de leurs désordres.

Vaincus par la beauté, ils ne purent imposer un frein à la violence de leurs désirs, mais ils furent enivrés et domptés par la vue au point de s'aliéner, par cette conduite impie, le Coeur de Dieu.


30. Et pour nous faire comprendre qu' ils ne s'attachaient point au mariage ni à la paternité, l'Ecriture précise :
"Quand ils virent qu'elles étaient belles, ils prirent pour épouses toutes celles qu'ils choisirent"."


(Saint Jean Chrysostome, hom. 22 in Gen.)


Saint Augustin a écrit :


31. "Quant à ces paroles : "Ils engendrèrent pour eux-mêmes", elles montrent bien qu'antérieurement, avant de déchoir de la sorte, "les fils de Dieu" engendraient pour Dieu et non pour eux-mêmes :

alors, la volupté charnelle loin de commander se soumettait chez eux au devoir de la procréation ; et ils n'engendraient pas une famille qui serait leur gloire, mais des citoyens à la Cité de Dieu, leur enseignant comme "anges de Dieu" à "mettre en Dieu leur espérance" (cf. Ps. 77,7) à l'exemple du fils de Seth, le fils de la résurrection, qui "mit son espérance à invoquer le Nom du Seigneur Dieu" :

espérance qui les rendrait avec leurs descendants cohéritiers des biens éternels et, sous un même Dieu leur Père, frères de leurs enfants."


(Saint Augustin, Cité de Dieu L. 15 ch. 23,2)

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1. L ’ ECH0 DE LA TRADITI0N


AU TEMPS DE NOÉ



Miséricordieuse intervention et patience de Dieu :

Saint Jean Chrysostome a écrit :

32. "Cependant, même après leurs actions coupables et leurs pensées impures, admirez encore la Bonté de Dieu :

"Le Seigneur Dieu dit : Mon Esprit ne restera pas perpétuellement dans ces hommes, car ils sont charnels. Leurs jours seront cent-vingt ans."

On peut voir dans ce peu de paroles l'abîme de la Miséricorde ...

Par "esprit", il entend ici sa Puissance qui nous protège, et il prédit ainsi leur perte.

Et pour faire voir que c 'est bien de cela qu'il s'agit, il ajoute : "car ils sont charnels", c.a.d. s'abandonnent tout entiers aux oeuvres de la chair en négligeant les biens de l'âme, et passent leur vie comme s'ils n'étaient formés que de chair et si l'âme leur manquait.

C'est en effet un usage constant de l'Ecriture d'appeler "chair" les hommes charnels ; pour les hommes vertueux, au contraire, Elle dit qu’ils n’ont pas de chair (cf. Rom.8,9) ...

Comme "ils sont chair", je ne tolérerai pas plus, longtemps la souillure de leurs péchés.


33. Vous avez vu combien son indignation était grande, ses menaces terribles; voyez comme la miséricorde se mêle à cette indignation et à ces menaces.

Tel est Notre Seigneur souvent il nous fait des menaces, non pour les accomplir, mais pour nous corriger et ne pas les réaliser.

Car s'il voulait punir, pourquoi prévenir ? Mais comme il ne le voudrait pas, il hésite et diffère toujours, il attend, il prévient, offrant aux coupables une occasion d'éviter le châtiment en fuyant le vice et pratiquant la vertu.


34. Ainsi il a commencé par menacer d'une destruction générale.

Car ces paroles : "Mon Esprit ne restera pas perpétuellement dans ces hommes parce qu'ils sont chair", reviennent à dire : je ne les laisserai pas vivre longtemps.

Pourtant, non content des cinq cents ans de patience qu'il avait montrée pendant toute la vie de Noé .... il recule et diffère encore l'effet de son indignation, il le reporte à une époque plus éloignée et il leur dit : je vous ai menacés, j'ai annoncé publiquement la colère que la multitude de vos péchés a justement excitée en Moi ; cependant, comme je désire le salut, même des pécheurs incurables, et que je ne voudrais faire périr personne, je vous accorde encore un sursis de cent-vingt ans.

Si vous voulez vous purifier de vos péchés, revenir à de meilleurs sentiments et pratiquer la vertu, vous éviterez le châtiment qui vous attend...


35. Quelques personnes pensent que ce nombre de 120 ans est le terme de la vie. Ce n’est pas là ce que Dieu veut dire, mais il veut montrer jusqu'où va la patience qu'il conserve encore après tant de péchés."


(Saint Jean Chrysostome, hom. 22 in Gen.)


36. "Dieu leur annonce ainsi d'avance que son indignation déborde ; ensuite, voulant leur donner un temps suffisant pour se repentir, pour échapper aux effets de son indignation, il dit : "Le temps de l'homme ne sera plus que de 120 ans" (Gen. 6,3).

Autrement dit, j'attendrai encore, j'ajouterai à ces cinq cents ans pendant lesquels cet homme juste ... les a suffisamment avertis ... de renoncer à l'iniquité, de se convertir à la vertu.

Maintenant encore, malgré tant de patience dans le passé, je leur fais la promesse de les supporter 120 années de plus, afin qu'ils emploient comme il convient le temps qui s'écoulera encore ; afin qu'ils s'écartent de l'iniquité et se convertissent à la vertu."

(Saint Jean Chrysostome, hom. 25 in Gen.)


37. On peut néanmoins souligner parallèlement un autre motif à cette prolongation.

La vie des hommes avant le déluge durait en moyenne dix fois plus longtemps que celle d'après le déluge.

Or, dans la tranche de ce siècle ajouté comme délai, vivaient encore deux des huit Patriarches de la bonne descendance ayant connu le Protoplaste ou premier homme formé de la main même de Dieu.


38. Voici en effet quels sont ces huit Patriarches ou fils aînés de la bonne descendance issue d'Adam (0-930) par Seth (130-1042) compris parmi eux : Enos (235-1140), Cainan (325-1235), Malaleel (395-1290), Jared (460-1422).. Hénoch (né en 622 et emporté par Dieu en 987), Mathusalem (687-1656), et Lamech (874-1651).


39. Le déluge ayant eu lieu en 1656 après la création du Protoplaste, Lamech, père de Noé (1056-2006), trépassa donc quatre ans avant le déluge, tandis que Mathusalem, grand-père de Noé, trépassa l'année même du déluge, Dieu ayant attendu la mort de ce dernier Patriarche ayant connu le Protoplaste pour déclencher ce cataclysme universel.


Saint Jean Chrysostome a écrit :

40. "Il ne suffit point à Dieu de promettre 120 ans, il commanda au juste de construire une arche dont le seul aspect suffisait pour raviver leur mémoire, et ne permettait à personne d'ignorer la grandeur du châtiment à venir.

Car, ce seul fait, que ce juste, qui était parvenu à la vertu la plus haute, construisait l'arche avec tant d'ardeur, devait suffire pour inspirer à tous ceux qui n'étaient pas dépourvus de sens l'angoisse et l'épouvante ; pour leur persuader d'apaiser enfin le Dieu qui leur montrait ainsi sa Clémence et sa Bonté."


(Saint Jean Chrysostome, hom. 25 in Gen.)


41. "Il avertit, par la fabrication de cette arche, ceux qui s'étaient rendus coupables de péchés si graves de réfléchir sur leurs actions, de venir à résipiscence, pour échapper à la colère.

En effet, ce n'était pas un délai de courte durée qu' offrait au repentir la construction de l’arche ; le temps, certes, était considérable, suffisant, s'ils n'avaient été plongés dans l'ingratitude, dans l'engourdissement stupide qui les empêcha de corriger leurs erreurs.


42. Il était naturel que chacun d'eux, voyant l'homme juste qui construisait l'arche, que chacun d'eux, averti d'ailleurs de la colère divine, se repentit de ses fautes ; il suffisait de vouloir.

Mais ce délai ne leur fut d'aucune utilité. Ils ne se sont pas repentis.

Ce n'est pas parce qu'ils ne pouvaient pas se repentir, mais parce qu'ils ne le voulaient pas "


(Saint Jean Chrysostome, hom. 24 in Gen.)

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1. L ’ ECH0 DE LA TRADITI0N


AU TEMPS DE NOÉ



Insensibilité des pécheurs endurcis dans l'ivresse de leurs vices :

Saint Jean Chrysostome a écrit :

43. "Mais nous pouvons voir qu’après tant d’indignation et de menaces, après un si long délai qu'il leur avait
laissé pour faire pénitence, non seulement les pécheurs n'avaient profité de rien, mais ils avaient persévéré dans leurs fautes ...

Voyez quel excès de perversité, quelles âmes insensibles !

Ni la crainte du châtiment, ni le délai accordé par la clémence divine ne put les détourner de leurs actions coupables : une fois emportés vers l'abîme, privés des yeux de la conscience, ils étaient trop plongés dans l'ivresse de leurs désirs criminels pour avoir la pensée de. revenir en arrière.

C’est ce que dit le Sage : "Quand l'impie est dans l'abîme de ses maux, il méprise." (Prov. 13,3).


44. En effet, c'est une chose bien grave de tomber dans les pièges du diable.

L'âme saisie dans ces filets est entraînée ; et comme le pourceau se plaît à se vautrer dans la fange, de même, ensevelie sous ses habitudes vicieuses, elle ne sent même plus l'infection de ses péchés.

Il faut donc beaucoup de modération et de vigilance pour ne laisser au démon aucun accès, pour ne pas laisser obscurcir notre jugement, de crainte que notre raison, étant ainsi aveuglée, nous ne tombions dans l'état de ceux qui sont privés des rayons du soleil, au point de ne plus voir "le Soleil de la justice" (Mal. 4,2) et de tomber ainsi dans l'abîme : c'est ce qui est arrivé à ces hommes.


45. Apprenez encore à connaître la clémence divine.

"Le Seigneur Dieu voyant que les crimes des hommes s 'étaient multipliés sur la terre".

Que veut dire ce mot "voyant" ? Le Seigneur ignorait-il cela ? non, certes.

Mais l'Ecriture Sainte ménage toujours notre faiblesse Elle nous montre ainsi que ceux qui avaient éprouvé tant de clémence avaient persisté dans les mêmes fautes et en avaient commis de plus graves encore.


46. "Quand il vit que les crimes des hommes s'étaient multipliés sur terre".

De cette liaison coupable étaient sortis, comme d'une source, une foule d'autres péchés ; aussi est-il dit : "les crimes des hommes".

Car là où se trouvent le libertinage, l'impudicité et les débordements de cette nature, il est probable que l'ivresse la plus crapuleuse, l'iniquité de toute espèce, l'avarice et une foule d'autres vices s'y trouveront en même temps.


47. "Le Seigneur Dieu voyant que les crimes des hommes s 'étaient multipliés sur la terre et que chacun ne songeait dans son coeur qu'à faire du mal chaque jour".

Voyez comme chaque parole montre la grandeur des péchés !

Après avoir dit, en général, que "les crimes des hommes s'étaient multipliés sur la terre", on ajoute "chacun".

Ce mot a une grande force. Il ne s'agit pas seulement du jeune homme, mais aussi du vieillard, aussi coupable que le jeune homme.

Ce n'est pas seulement l'homme, mais la femme ; l'esclave, mais l'homme libre ; le riche, mais le pauvre.


48. Voyez aussi toute l'importance de ce verbe "songeait".

Ce n'étaient pas seulement des fautes dues à l'entraînement, mais préméditées dans le coeur ; ils y pensaient à toute heure, ils y mettaient toute leur ardeur.


49. Ils ne ressemblaient pas à ceux qui, après avoir succombé une fois ou deux au péché, s'en détournent ensuite mais ils se livraient avec joie à faire le mal.

Ils le faisaient avec fureur, sans relâche et sans hésitation ; ce n'était pas pour un temps plus ou moins court, mais constamment ; enfin ils y consacraient toute leur vie.

Voyez quel comble d'iniquité !

Voyez comme ils n'avaient pas d'autre désir que celui du crime, et comment tous les âges y apportaient leur contingent.


50. "Chacun", est-il dit ; l'âge le plus tendre n'en était pas exempt, malgré son innocence ordinaire ; mais dès le berceau on luttait de perversité, et l'on cherchait mutuellement à se surpasser en actions coupables."


(Saint Jean Chrysostome, hom. 22)


51. "Dieu voyant que la malice des hommes qui vivaient sur la terre était extrême, que chacun d'eux, dès sa jeunesse, appliquait au mal toutes les pensées de son coeur" ; ces paroles montrent manifestement que les jeunes gens dépassaient les vieillards, que les vieillards étaient comme les jeunes gens dans le délire, que l'âge même de l'innocence était précipité dans la corruption."


(Saint Jean Chrysostome, hom. 24)

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